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07/09/2022 | FRANCE | N°19/01613

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 07 septembre 2022, 19/01613


5ème Chambre





ARRÊT N°-235



N° RG 19/01613 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PTBV













Mme [R] [H] divorcée [T]



C/



SA SURAVENIR *



















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée



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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 SEPTEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

...

5ème Chambre

ARRÊT N°-235

N° RG 19/01613 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PTBV

Mme [R] [H] divorcée [T]

C/

SA SURAVENIR *

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 SEPTEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 11 Mai 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [R] [H] divorcée [T]

née le 04 Octobre 1967 à [Localité 5] ([Localité 5])

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Bernard RINEAU de la SELARL RINEAU & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉE :

SA SURAVENIR Société Anonyme à Directoire et Conseil de Surveillance, Prise en la personne de son Président du Directoire, domicilié

en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Stéphanie PRENEUX de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Elisabeth PHILY de la SCP GLOAGUEN & PHILY, Plaidant, avocat au barreau de BREST

Mme [R] [H], qui exerçait comme esthéticienne, a acquis en 1994 un institut de beauté-parfumerie à [Localité 6].

Connaissant une croissance rapide, Mme [H] et son époux ont créé diverses sociétés et ont investi dans d'autres boutiques, contractant à chaque fois des prêts auprès du Crédit Mutuel pour financer ces opérations. Parallèlement, Mme [H] a souscrit des assurances pour couvrir ces prêts auprès de la société Suravenir.

Le 5 octobre 2011, Mme [H] a fait un malaise, suivi, trois jours plus tard d'une perte de connaissance. Elle a été placée en arrêt de travail.

En avril 2012, Mme [H] a informé la société Suravenir de ce qu'elle était en arrêt de travail depuis le 8 octobre 2011 et a demandé le 20 août 2012 à être garantie pour 7 prêts encore en cours, au titre de la formule 'Essentielle" qu'elle avait choisie.

Le 12 mars 2013, le RSI a reconnu l'incapacité de Mme [R] [H] à l'exercice de son métier et l'a placée en invalidité avec prise d'effet au 1er février 2013 pour 'état dépressif sévère'. Le 3juin 2013, le RSI lui a notifié une pension d'invalidité totale et définitive.

Le 22 mai 2013, Mme [R] [H] a été examinée par le docteur [I], médecin expert missionné par la société Suravenir, qui a déposé un rapport le 10 juin 2013.

Par courrier du 26 juin 2013, Mme [H] a été informée que la société d'assurance prononçait la nullité de son contrat d'assurance et qu'elle refusait de garantir les 7 prêts encore en cours.

Mme [H] a contesté ce refus auprès de la société Suravenir qui a maintenu sa position.

Par acte d'huissier du 5 mai 2014, Mme [R] [T] née [H] a fait assigner la société Suravenir devant le tribunal de grande instance de Nantes.

Par jugement du 20 décembre 2018, le tribunal a :

- prononcé la nullité des contrats d'adhésion souscrits par Mme [R] [T] auprès de la SA Suravenir,

- débouté Mme [R] [T] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté Mme [R] [T] et la SA Suravenir de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [R] [T] aux dépens, qui pourront être recouvrés par la SELARL Armen et maître Claudie Cabon, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la présente décision

Le 8 mars 2019, Mme [R] [H] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 6 avril 2022, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a prononcé la nullité des contrats d'adhésion souscrits par elle auprès de la société Suravenir, au motif qu'elle aurait intentionnellement effectué de fausses déclarations sur le questionnaire de santé complété par ses soins,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes,

Statuant à nouveau :

- la recevoir en toutes ses demandes et prétentions et l'y déclarant bien fondée,

- dire et juger que la société Suravenir a manqué à ses obligations contractuelles et engagé sa responsabilité contractuelle,

- condamner la société Suravenir à prendre en charge toutes les échéances des prêts qu'elle aurait dû garantir au titre du risque incapacité de travail pour les prêts susmentionnés à compter du 6 janvier 2012 à hauteur de

175 583,50 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 6 janvier 2012,

- ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que la société Suravenir a manqué à ses obligations contractuelles et a ainsi engagé sa responsabilité contractuelle,

- condamner la société Suravenir à prendre en charge toutes les échéances qu'elle aurait dû garantir au titre du risque incapacité de travail pour les prêts susmentionnés à compter du 6 janvier 2012 jusqu'à la reconnaissance de son invalidité au 31 janvier 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 6 janvier 2012, soit à hauteur de 57 362,68 euros,

- ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil,

À titre infiniment subsidiaire,

- condamner la société Suravenir à lui verser le montant de sa garantie réévaluée en fonction des risques qui auraient été réellement couverts si les risques avaient été complètement et exactement déclarés,

En tout état de cause,

- condamner la société Suravenir à lui verser les échéances dues à compter du 31 janvier 2013 jusqu'au jour de l'arrêt à intervenir pour les prêts dont les échéances sont encore en cours dans les conditions applicables aux invalidités permanentes totales (prêts de 216 262 euros et 130 000 euros),

- condamner la société Suravenir à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts, sauf à parfaire, à raison de la résistance abusive de la société Suravenir à garantir les remboursements dus au titre des deux contrats d'assurance souscrits,

- condamner la société Suravenir à lui payer la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la même aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 1er avril 2022, la société Suravenir demande à la cour de :

- confirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il a prononcé la nullité des adhésions de Mme [R] [T] au contrat d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle, par application de l'article L 113-8 du code des assurances,

- confirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il a débouté Mme [R] [T] de toutes ses demandes,

- y additant, condamner Mme [R] [T] à lui payer la somme de

5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner par application de l'article 696 du code de procédure civile, aux entiers dépens,

- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le caractère intentionnel des fausses

déclarations serait écarté, débouter Mme [R] [T] de sa demande de réduction proportionnelle fondée sur l'article L 113-9 du code des assurances,

- à titre encore plus subsidiaire, dans l'hypothèse où les garanties seraient jugées mobilisables, dire et juger que les conditions générales du contrat définies dans les notices remises à Mme [R] [T] lui sont opposables,

- en application de ces conditions générales du contrat, dire et juger que la garantie n'est due qu'à l'issue d'un délai de franchise de 180 jours soit à compter du 6 avril 2012 et jusqu'à la date d'extinction anticipée de chacun des prêts, à savoir :

*pour le prêt de 100 000 euros, du 6 au 11 avril 2012, soit sur 6 jours,

*pour le prêt de 42 000 euros, du 6 avril au 5 juin 2012, soit sur 61 jours,

*pour le prêt de 120 000 euros, du 6 avril au 13 juin 2012, soit sur 69 jours,

*pour le prêt de 108 000 euros, du 6 avril au 13 juin 2012, soit sur 69 jours.

- s'agissant des prêts de 216 262 € et 130 000 €, sous réserve de la preuve qu'ils étaient toujours en cours, dire et juger que l'éventuelle prise en charge ne pourrait être due qu'à partir du 6 avril 2012 à hauteur de 50 % et jusqu'à la fin de l'ITT le 31 janvier 2013, conformément aux conditions générales du contrat,

- s'agissant d'une éventuelle invalidité permanente partielle à compter du 31 janvier 2013, renvoyer les parties à l'application du contrat, c'est-à-dire à la mise en 'uvre d'une expertise médicale afin de déterminer le taux d'IPP,

- débouter Mme [R] [T] de toutes ses demandes,

- la condamner à lui payer la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SELARL Bazille-Tessier-Preneux, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 avril 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au soutien de son appel, Mme [H] explique qu'elle a souscrit, avec son époux, 12 prêts pour un montant global de 1 116 262 euros ainsi que des contrats de garantie auprès de la société Suravenir en optant pour la formule dite 'Essentielle'.

Elle considère que le docteur [I] a considéré, à tort, que l'affection dont elle souffrait, préexistait à la date de prise d'effet des contrats de garantie. Elle conteste toute fausse déclaration intentionnelle sur le questionnaire de santé.

Elle entend se prévaloir du caractère imprécis du questionnaire de santé.

Mme [H] soutient avoir bénéficié de prescriptions occasionnelles et non régulières de traitements psychotropes.

Elle conteste toute modification de l'appréciation du risque par l'assureur.

Mme [H] soutient que la société Suravenir ne rapporte pas la preuve de sa connaissance des conditions générales valant notice d'information, et notamment des clauses de condition de garantie et d'exclusion de garantie.

Elle estime que la clause sur le délai de franchise doublé lui est inopposable, ou, à défaut, que seul le délai de 90 jours est applicable.

À titre subsidiaire, Mme [H] conteste les propos de la société Suravenir selon lesquels 5 prêts, ayant été remboursés de manière anticipée, ne peuvent faire l'objet d'une indemnisation.

Pour les deux prêts de 130 000 et 216 262 euros, Mme [H] discute l'application du délai de franchise.

Elle rappelle qu'elle continue à rembourser lesdits prêts et conteste toute limitation garantie supplémentaire au titre de l'invalidité permanente totale.

En réponse, la SA Suravenir indique que Mme [H] a souscrit de nombreux prêts pour l'exercice de sa profession, dont 7 ont fait l'objet de demandes d'adhésion à un contrat d'assurance.

Elle considère que, dans le cadre des questionnaires de santé, Mme [H] a commis de fausses déclarations intentionnelles ayant modifié son appréciation du risque.

Elle précise que Mme [H] souffre depuis 2004 de moments d'angoisse, traités par des prescriptions à la demande de traitements psychotropes. Elle précise que Mme [H] aurait dû répondre positivement aux questions 1, 3 et 5 des questionnaires.

Elle entend se prévaloir de la clarté et de la précision des questions posées.

Elle soutient que Mme [H] a menti intentionnellement aux questions.

La SA Suravenir signale que les états anxieux constituent un risque majoré d'ITT et d'IPP.

Elle s'oppose à l'application de l'article L 113-9 du code des assurances.

À titre subsidiaire, sur le quantum des demandes, la société d'assurance explique que les dispositions de l'article L 141-4 du code des assurances invoquées par Mme [H] sont inapplicables dans le cas présent.

Elle signale que Mme [H] a versé aux débats, devant les premiers juges, la notice du contrat d'assurance et que c'est de mauvaise foi que Mme [H] précise aujourd'hui ne pas l'avoir reçue.

Elle rappelle qu'en application de l'article L 112-2 alinéa 2 du code des assurances, elle a remis les différentes notices d'information à Mme [H] qui l'a reconnu en signant le questionnaire de santé, et les certificats de garantie.

La SA Suravenir entend appliquer les délais de franchise pour une affection d'origine psychique.

Elle précise que 5 prêts ont été remboursés par anticipation après la vente de 3 magasins et qu'ainsi les garanties ont cessé pour ces prêts.

S'agissant des prêts de 130 000 euros et de 216 262 euros, l'assureur discute leur prise en charge et demande l'instauration d'une expertise médicale pour déterminer une éventuelle IPP.

L'assureur conteste toute faute et toute mauvaise foi telle qu'alléguée par l'appelant.

- Sur la nullité des contrats.

Aux termes de l'article L 113-2-2° du code des assurances, l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge.

Au visa de l'article L 113-8 du code des assurances, indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l'article L 132-26, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre. Les primes payées demeurent alors acquises à l'assureur, qui a droit au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts.

Des pièces versées au dossier, il résulte que Mme [H] a contracté plusieurs prêts dont 7 ont fait l'objet de 3 séries de demandes d'adhésion et donc de 3 questionnaires de santé soit :

- un questionnaire de santé du 3 janvier 2005 (donnant lieu à 3 certificats de garantie du 8 mars 2005) pour :

- un prêt de 210 000 euros,

- un prêt de 120 000 euros,

- un prêt de 100 000 euros,

- un questionnaire de santé du 11 mai 2005 (donnant lieu à 3 certificats de garantie du 27 mai 2005) pour :

- un prêt de 216 262 euros,

- un prêt de 108 000 euros,

- un prêt de 42 000 euros,

- un questionnaire de santé du 20 février 2008 (donnant lieu à un certificat de garantie du 20 mars 2008) pour un prêt de 130 000 euros.

Mme [H] a répondu à la négative à toutes les questions des déclarations de santé des 3 janvier 2005 et 11 mai 2005 notamment pour les questions n° 1, 3 et 5 qui sont les suivantes :

1 Etes-vous sous surveillance ou traitement médical '

3 Avez-vous consulté pour maladie, accident ou bilan votre médecin ou d'autres médecins au cours des 3 dernières années ' Ne sont pas concernées les maladies bénignes telles que les grippes, angines, gastro-entérites, visite annuelle médecine du travail sauf si découverte de problèmes de santé '

5 Avez-vous souffert ou souffrez-vous :

- d'anxiété ou de maladies psychiatriques (dépression, névrose, psychose...)

- d'affection de la colonne vertébrale '

Dans sa déclaration de santé du 20 février 2008, Mme [H] a répondu par l'affirmative à la question 3.

Les conclusions du docteur [I] du 10 juin 2013 sont les suivantes :

1- la patiente a eu des éléments pathologiques avant la date d'effet des contrats. Les troubles ne résultent pas de l'éthylisme ni d'un état d'ivresse.

2- l'incapacité de travail reste totale avec un état non stabilisé en évolution défavorable, nouvel examen à prévoir dans 6 à 8 mois.

3- on ne peut pas considérer qu'elle soit définitivement incapable de se livrer à une occupation ou un travail lui procurant gain et profit.

4- il existe des anomalies dans les questionnaires de santé qui m'ont été communiqués.

Le praticien a indiqué : Mme [T] est en arrêt de travail depuis le 8 octobre 2011, en invalidité par son régime obligatoire depuis le 1er février 2013 pour un état dépressif sévère qui est, à la date de mon expertise en évolution défavorable avec une proposition d'hospitalisation. L'incapacité de travail reste totale, l'état n'est pas stabilisé. (...) Avant les dates d'effet la patiente avait été vue à la demande par son médecin traitant dans un contexte de manifestations anxieuses liées à l'intensité de l'activité professionnelle avec traitement à partir de 2004 avec prescriptions occasionnelles de traitements psychotropes sans arrêt de travail ni suivi psychiatrique. La réponse à la question 5 des questionnaires aurait dû être positive.

* La question n° 1 est simple à comprendre, les termes 'traitement médical' étant simples et dénués d'ambiguïté.

Dans un courrier du 13 novembre 2013 adressé à la société d'assurance, le conseil de Mme [H] écrit :

A mon sens, ces assertions ne sont pas justifiées, dans la mesure où les causes justifiant une prise en charge médicale n'étaient absolument pas liées, à l'époque, à un contexte de manifestation anxieuse liée à l'intensité de l'activité professionnelle de Mme [T]. En effet, les ordonnances prescrites en 2004 n'avaient aucun rapport avec son état dépressif actuel, dans la mesure où les traitements ordonnés correspondaient à des événements bien précis, justifiant le stress de cette dernière. (....) Par ailleurs, vous pourrez constater que la synthèse du rapport médical de Mme [T] indique que dès le 24 juin 2005, cette dernière ne prenait déjà plus de psychotropes et qu'elle suivait également un traitement en vue d'un sevrage antidépresseur.

Le docteur [I] précise dans son rapport qu'à partir de 2004, pour des moments d'angoisse, elle a été suivie par son médecin traitant le docteur [G] avec des prescriptions à la demande de traitements psychotropes, pas de suivi psychiatrique.

La prise de psychotrope a été confirmée par le médecin traitant de Mme [H] qui écrit : j'atteste avoir prescrit occasionnellement des traitements psychotropes en raison d'un stress lié à des opérations professionnelles ponctuelles, sans avoir noté d'état de dépression.

Ainsi, des pièces du dossier, il résulte que Mme [H] s'est vue prescrire des médicaments psychotropes en 2004 et jusqu'en juin 2005. La référence à un sevrage antidépresseur contredit le caractère ponctuel du traitement tel qu'allégué par Mme [H].

Elle écrit : la prise occasionnelle d'antidépresseur n'a débuté qu'en juin 2004 pour s'achever en juin 2005 soit sur une période de 12 mois, étant précisé que les mois de mars à juin 2005 ont consisté en une phase dite de 'sevrage' c'est à dire de diminution progressive de la dose de médicaments avant l'arrêt total du traitement.

Mme [H] reconnaît elle-même avoir suivi un traitement médical. Le fait qu'il n'y ait pas eu d'arrêt de travail ou de consultation de spécialiste ne change rien à l'existence d'un traitement médical en janvier et mai 2005.

Mme [H] n'a donc pas répondu sincèrement à la première question.

* La question n° 3 n'est pas discutée par Mme [H].

Cette question est claire et non ambiguë. Elle est compréhensible par Mme [H] qui, d'ailleurs, a répondu par l'affirmative à la question le 20 février 2008.

Les éléments cités ci-dessus démontrent que Mme [H] a consulté son médecin traitant dans les trois années précédant la souscription des prêts et assurances.

Sur cette question, Mme [H] n'a pas répondu sincèrement.

* Sur la question n° 5.

Cette question concerne deux types de pathologies différentes, l'une ayant trait à un problème de colonne vertébrale qui n'intéresse pas le présent litige.

En l'absence de diagnostic de maladie psychiatrique, le terme anxiété peut correspondre à diverses situations. Celles-ci peuvent être analysées dans les cas d'inquiétude, de tension nerveuse, d'angoisse ou de stress dans le langage courant.

Du courrier de son conseil en date du 13 novembre 2013, il apparaît que Mme [H] a connu un certain nombre d'événements traumatiques. Ainsi son conseil écrit : les ordonnances prescrites en 2014 n'avaient aucun rapport avec son état dépressif actuel, dans la mesure où les traitements ordonnés correspondaient à des événements bien précis, justifiant le stress de cette dernière. M. et Mme [T] m'ont en effet indiqué qu'ils avaient fait l'objet à cette époque :

- pour M. [T] d'un accident lequel avait été suivi d'une opération de la colonne vertébrale,

- d'un cambriolage,

- de l'incendie de leur immeuble à [Localité 4] à la suite de la maladresse d'une de leur employé.

Ces événements ont perturbé Mme [H] qui a dû faire appel à son médecin pour faire face à ces difficultés qui ont engendré stress et/ou anxiété.

Mme [H] aurait dû répondre affirmativement à la question n° 5.

Le caractère intentionnel des fausses déclarations découle de leur répétition, à raison de 3 réponses erronées sur 11 questions.

En répondant aux questions par la négative, Mme [H] a évité un questionnaire plus précis ou une vérification complémentaire par le médecin de l'assureur.

Le fait de cacher un traitement médical, ou un état de stress (ou d'anxiété) a modifié l'appréciation du risque par l'assureur.

La tarification utilisée par le médecin-conseil de la société Suravenir démontre que l'appréciation du risque est différente dans l'hypothèse d'un arrêt de traitement (anxiolytique et/ou antidépresseur et/ou neuroleptique) depuis un an ou d'un traitement en cours notamment.

En conséquence, il convient de prononcer la nullité des contrats d'adhésion souscrits les 3 janvier 2005, 11 mai 2005 et 20 février 2008.

Le jugement est confirmé à ce titre.

- Sur l'application de l'article L 113-9 du code des assurances.

En application de ce texte, l'omission ou la déclaration inexacte de la part de l'assuré dont la mauvaise foi n'est pas établie n'entraîne pas la nullité de l'assurance. (....) Dans le cas où la constatation n'a lieu qu'après un sinistre, l'indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés.

Il a été dit que Mme [H] avait intentionnellement répondu faussement aux questions posées, soit de mauvaise foi.

Le texte précité n'a pas vocation à s'appliquer.

- Sur les autres demandes.

La nullité des adhésions de Mme [H] aux contrats d'assurance rend sans objet les autres demandes de l'appelante.

Succombant en son appel, Mme [H] est déboutée de ses demandes en dommages et intérêts et en frais irrépétibles. Elle est condamnée aux dépens.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile. La SA Suravenir est déboutée de sa demande à ce titre.

Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [H] de ses demandes en dommages et intérêts et en frais irrépétibles ;

Déboute la SA Suravenir de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [H] aux dépens.

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/01613
Date de la décision : 07/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-07;19.01613 ?
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