3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°507
N° RG 20/02023 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QSPT
S.A.R.L. MATAVICOL
C/
E.A.R.L. LA MASSERIE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me BLANCHET MAGON
Me SIMON
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 18 OCTOBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre, rapporteur
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Guillaume FRANCOIS, Conseiller, désigné par ordonnance de M. le premier président par intérim de la cour d'appel de Rennes en date du 12 septembre 2022,
GREFFIER :
Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats, et Madame Julie ROUET, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 13 Septembre 2022
ARRÊT :
contradictoire, prononcé publiquement le 18 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
S.A.R.L. MATAVICOL, immatriculée au RCS de RENNES sous le n° 392 804 654, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Quentin BLANCHET MAGON, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Patrice HUGEL de la SELARL PATRICE HUGEL AVOCAT, plaidant, avocat au barreau d'ANGERS
INTIMÉE :
E.A.R.L. LA MASSERIE, immatriculée au RCS de RENNES sous le n° 405 248 998, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège,
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Anne-Cécile SIMON, plaidant/postulant, avocat au barreau de RENNES
FAITS ET PROCEDURE :
L'Earl La Masserie a confié à la société Matavicol la pose d'une installation photovoltaïque au lieu de son exploitation sise [Adresse 1].
Ces travaux ont fait l'objet d'une facturation d'un montant de 161.047,38 euros TTC en date du 22 octobre 2009.
L'Earl La Masserie a alors souscrit auprès d'EDF un contrat d'achat d'énergie prévoyant un tarif d'achat de 0,60176 euros/ kWh. La société Matavicol a également posé des panneaux solaires sur la maison d'habitation de Mme [G], gérante de l'Earl de la Masserie.
Estimant que du fait des manquements de la société Matavicol sa production d'électricité n'était pas celle attendue, l'Earl de La Masserie l'a assignée en paiement de dommages-intérêts.
Par jugement du 5 mars 2020, le tribunal de commerce de Rennes a :
- Dit que l'Earl La Masserie est régulière, recevable et bien fondée en ses demandes,
- Dit que l'Earl La Masserie a subi un préjudice compte tenu de l'insuffisance de production,
- Fixé le préjudice en découlant à la somme de 6.360,55 euros,
- Condamné la société Matavicol à payer à l'Earl La Masserie la somme de 6.360,55 euros à titre de dommages-intérêts,
- Débouté la société Matavicol de sa demande de règlement de la somme de 700,19 euros,
- Condamné la société Matavicol à verser à l'Earl La Masserie la somme de 2.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Débouté la société Matavicol du surplus de ses demandes, fins et conclusions,
- Condamné la société Matavicol aux entiers dépens de l'instance,
- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
La société Matavicol interjeté appel le 2 avril 2020.
Les dernières conclusions de la société Matavicol sont en date du 27 juin 2022. Les dernières conclusions de l'Earl La Masserie sont en date du 28 juin 2022.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 juillet 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS :
La société Matavicol demande à la cour de :
- Voir infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
En conséquence :
- À titre principal :
- Voir rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de l'Earl La Masserie,
- Voir condamner l'Earl La Masserie à payer à la société Matavicol la somme de 700,19 euros outre intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2015 avec capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an,
- À titre subsidiaire :
- Voir rejeter la demande d'indemnité au titre de la période 2020/2021 à hauteur de 2.501,68 euros,
- Voir minorer les demandes au titre de la période 2019/2020 qui ne pourront être supérieures à 115,49 euros,
- Voir minorer l'ensemble des demandes d'au moins 30 % minimum du gain espéré compte tenu de la seule perte de chance applicable,
En tout état de cause :
- Condamner l'Earl La Masserie à payer à la société Matavicol la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- La condamner aux entiers dépens.
L'Earl La Masserie demande à la cour de :
- Débouter la société Matavicol de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement,
- Y ajoutant :
- Condamner la société Matavicol à régler à l'Earl La Masserie la somme de 2.619,21 euros à titre de dommages et intérêts pour la période allant de septembre 2019 à septembre 2021,
- Condamner la société Matavicol à verser à l'Earl La Masserie la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la même aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.
DISCUSSION :
La facture en date du 22 octobre 2009 mentionne notamment la fourniture de 150 panneaux photovoltaïques Biohaus 190 Wc, une puissance installée de 28000 Wc, une garantie constructeur de 10 ans, une garantie de production de 90% sur 10 ans et une garantie de production de 80% sur 26 ans.
La facture, ou les documents contractuels, ne comportent aucune mention chiffrée de la production annuelle attendue ou garantie.
L'Earl La Masserie produit un tableau, à en tête de la société Matavicol, de production d'électricité de 27.590 Kwh sur l'année pour une puissance nominale installée de 28 Kw.
La société Matavicol conteste la portée contractuelle de ce document.
Ce tableau n'est ni daté ni signé et il n'est pas établi qu'il ait été un élément déterminant de l'engagement de l'Earl La Masserie. Il n'est pas indiqué dans quelles circonstances il a pu être rédigé. Il n'est ainsi pas établi que ce document soit rentré dans le champ contractuel. Il est d'ailleurs à noter que si certaines années la production annuelle constatée à été inférieure à ce qu'indique ce tableau, elle a été supérieure sur la période septembre 2013 à septembre 2014. Ce tableau ne constitue tout au plus qu'une simulation indicative.
La notice technique des panneaux solaires installés mentionne une garantie de puissance de 25 ans sur 80% de la puissance, un rendement optimal et un autonettoyage amélioré.
La mention d'autonettoyage amélioré signifie qu'il est présenté comme plus performant que d'autres, sans plus de précision. Il ne peut résulter d'une telle mention que la société Matavicol a présenté son installation comme n'ayant pas besoin d'un entretien consistant notamment en un nettoyage régulier de la surface de panneaux solaires.
La puissance de crête, Wc, est la puissance maximale d'un panneau solaire placé dans des conditions d'exposition, de luminosité et d'entretien optimales. Comme l'a rappelé la société Matavicol dans la lettre de son conseil du 27 septembre 2018, cette puissance est obtenue dans des conditions précises, normées, et notamment une température de 25°C et un éclairement de 1.000 W/m2.
La garantie offerte visait une production de 90%, puis 80%. Cette garantie portait sur la capacité de production de l'ensemble de l'installation, panneaux solaires, équipements et onduleurs facturés, dans les conditions de la définition de la puissance de crête. En d'autres termes, faute d'engagement sur une production annuelle chiffrée garantie, la garantie ne portait que sur une capacité de production à un instant t, dans les conditions optimales, de 28.000 x 0,9 = 25.200 kw/h puis de 28.000 x 0,8 = 22.400 kw/h.
L'Earl La Masserie ne se prévaut pas d'un non respect de cette capacité de production mais d'une insuffisance de production annuelle. Faute d'engagement de la société Matavicol sur une production annuelle garantie, ses demandes seront rejetées et le jugement infirmé.
Sur la facture de 2015 :
La société Matavicol demande le paiement d'une facture du 30 septembre 2015 correspondant selon elle à des réparations qu'elle aurait alors effectuées.
L'Earl La Masserie invoque l'irrecevabilité de cette demande en faisant valoir qu'elle aurait déjà été rejetée dans une précédente procédure.
Il apparaît en effet que dans un litige l'opposant à Mme [G], gérante de l'Earl La Masserie, la société Matavicol avait demandé le paiement de cette facture. Cette instance n'opposait pas les mêmes parties que dans la présente, Mme [G] étant alors en litige au titre d'une installation photovoltaïque qu'elle avait fait installer sur son habitation personnelle. Le tribunal de commerce, dans son jugement du 26 septembre 2017, avait d'ailleurs noté que la facture en question n'avait pas été établie au nom de Mme [G] mais à celui de l'Earl La Masserie, personne morale distincte, et avait encouragé la société Matavicol à mieux se pourvoir.
Il n'y a pas d'autorité de la chose jugée le 26 septembre 2017 concernant la demande formée aujourd'hui contre l'Earl La Masserie. La demande d'irrecevabilité de la demande de paiement présentée par la société Matavicol sera rejetée.
Mme [G] ajoute qu'elle ne sait pas à quoi correspondrait la facture litigieuse et que cette facture paraît, en tout état de cause, être en lien avec l'entretien de ses poulaillers dont la société Matavicol avait assuré l'aménagement.
La société Matavicol, pas plus que l'Earl La Masserie, ne produit pas la facture litigieuse devant la cour. En tout état de cause, elle ne justifie pas de la réalité des travaux qu'elle invoque, par exemple en produisant des bons de commande ou d'intervention, alors que ces travaux sont contestés par l'Earl La Masserie.
Il y a lieu de rejeter sa demande de paiement y afférente.
Sur les frais et dépens :
Il y a lieu de condamner l'Earl La Masserie à payer à la société Matavicol la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour :
- Confirme le jugement en ce qu'il a débouté la société Matavicol de sa demande de règlement de la somme de 700.19 euros,
- Infirme le jugement pour le surplus,
Statuant de nouveau et y ajoutant :
- Rejette les autres demandes des parties,
- Condamne l'Earl La Masserie à payer à la société Matavicol la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne l'Earl La Masserie aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT