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07/02/2023 | FRANCE | N°21/05925

France | France, Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre commerciale, 07 février 2023, 21/05925


3ème Chambre Commerciale





ARRÊT N° 51



N° RG 21/05925 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SBGM













M. [J] [V]



C/



Ste Coopérative banque Pop. BPGO

































Copie exécutoire délivrée



le :



à :

Me DARDY

Me MONCOQ



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE

RENNES

ARRÊT DU 07 FEVRIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Julie ROUET, lors des débats, et Madame...

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N° 51

N° RG 21/05925 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SBGM

M. [J] [V]

C/

Ste Coopérative banque Pop. BPGO

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me DARDY

Me MONCOQ

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 FEVRIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Julie ROUET, lors des débats, et Madame Lydie CHEVREL, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 Novembre 2022

devant Monsieur Alexis CONTAMINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [J] [V]

né le [Date naissance 4] 1967 à [Localité 6] (92)

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représenté par Me Hervé DARDY de la SELARL KOVALEX, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

INTIMÉE :

BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST, venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE DE L'OUEST, immatriculée au RCS de RENNES sous le n°857 500 227, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Cyrille MONCOQ de la SELARL ALPHA LEGIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-MALO

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 30 octobre 2015, la société BM Trans a souscrit auprès de la société Banque Populaire de l'Ouest, aux droits de laquelle vient la société Banque Populaire Grand Ouest (la Banque Populaire), un contrat de prêt professionnel, n°08700338, d'un montant principal de 25.000 euros, remboursable en 60 mensualités au taux d'intérêt nominal annuel de 1,97 %.

Le même jour, M. [V], gérant de la société BM Trans, s'est porté caution solidaire au titre de ce prêt n°08700338 dans la limite de la somme de 25.000 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour une durée de 108 mois, ce avec le consentement de Mme [N] épouse [V].

Le 4 août 2016, la société BM Trans a souscrit auprès de la Banque Populaire un contrat de prêt professionnel n°08718259, d'un montant principal de 6.000 euros, remboursable en 36 mensualités au taux d'intérêt nominal annuel de 1,21 %.

Le 19 octobre 2016, la société BM Trans a souscrit auprès de la Banque Populaire un crédit-bail n°48593, d'une durée de 84 mois pour un loyer mensuel hors taxes de 325,31 euros.

Le 21 octobre 2016, la société BM Trans a souscrit auprès de la Banque Populaire un crédit-bail n°48594, d'une durée de 60 mois pour un loyer mensuel hors taxes de 1.628,25 euros.

Le 20 mars 2018, la société BM Trans a souscrit auprès de la Banque Populaire un contrat de prêt professionnel n°08762489, d'un montant principal de 50.000 euros, remboursable en 60 mensualités au taux d'intérêt nominal annuel de 1,27 %.

Le même jour, M. [V] et Mme [N] se sont portés cautions solidaires au titre de ce prêt n°08762489 dans la limite de la somme de 50.000 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour une durée de 108 mois.

Le même jour, M. [V] et Mme [N] se sont portés cautions solidaires au titre de toutes sommes qui seraient dues par la société BM Trans à la Banque Populaire dans la limite de la somme de 50.000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour une durée de 120 mois.

Le 28 juin 2019, la société BM Trans a été placée en liquidation judiciaire.

Le 29 juillet 2019, la Banque Populaire a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire.

Le 5 septembre 2019, la Banque Populaire a mis en demeure M. [V] d'honorer son engagement de caution.

Le 14 octobre 2019, la Banque Populaire a assigné M. [V] en paiement.

Par jugement du 18 mai 2021, le tribunal de commerce de Saint-Malo a :

- Condamné M. [V] à payer à la Banque Populaire les sommes suivantes :

- Au titre de son engagement de caution en garantie du prêt n°08700338 d'un montant initial de 25.000 euros : 8.184,26 euros outre intérêts au taux de 1,97 % l'an à compter de la mise en demeure du 5 septembre 2019 jusqu'au jour du parfait paiement,

- Au titre de son engagement de caution en garantie du remboursement du prêt n° 08762489 : 41.252,58 euros outre les intérêts au taux de 1,27 % l'an compter de la mise en demeure du 5 septembre 2019 jusqu'au jour du parfait paiement,

- Au titre de son engagement de caution omnibus et en garantie de l'ensemble des autres créances détenues par la Banque Populaire à l'égard de la société BM Trans :

' Au titre du solde débiteur du compte courant de la société BM Trans: 1.866,96 euros

' Au titre du crédit-bail n° 148593 : 9.031,29 euros

' Au titre du crédit-bail n° 148594 : 13.158,64 euros

' Outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 septembre 2019 au titre de ses trois créances garanties par le cautionnement omnibus,

- Au titre du prêt n°02718259, la somme de 869,33 euros arrêtée au 22 juillet 2020 outre les intérêts au taux contractuel de 1,21 % à compter de cette date jusqu'au jour du parfait paiement,

- Ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- Débouté M. [V] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- Condamné M. [V] à 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné M. [V] aux entiers dépens.

Le 20 septembre 2021, M. [V] a interjeté appel.

Les dernières conclusions de M. [V] sont en date du 17 décembre 2021. Les dernières conclusions de la Banque Populaire sont en date du 4 mars 2022.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 octobre 2022.

PRÉTENTIONS ET MOYENS :

M. [V] demande à la cour de :

- Réformer le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

- 1°) Décharger M. [V] de toute obligation contributive en raison de la disproportion des engagements que la banque lui a fait souscrire,

En conséquence :

- Débouter la Banque Populaire de toutes ses demandes, fins et conclusions,

2°) Subsidiairement :

2.1 Sur le mal fondé de la demande présentée au titre du cautionnement omnibus:

- Déclarer irrecevable la Banque Populaire en ses demandes fondées sur l'acte de cautionnement omnibus au titre des crédits-bails dont elle ne justifie pas qu'ils ont été inclus dans les opérations de fusion-absorption,

Subsidiairement :

Sur la demande au titre du crédit-bail :

Décharger à M. [V] de toutes obligations contributives en raison du fait de la Banque Populaire qui l'empêche d'être subrogé dans un droit préférentiel,

Plus subsidiairement :

- Dire et juger que la banque est déchue de son droit de percevoir les intérêts, frais et accessoires au titre des créances qu'elle a déclarées au passif du débiteur principal,

- Ordonner à la banque de produire un décompte de sa créance expurgé de tous les frais, intérêts et accessoires avec imputation des règlements opérés par le débiteur principal sur le capital,

Sur la demande au titre du prêt n°08718259 :

- Dire et juger que la banque est déchue de son droit de percevoir les intérêts, frais et accessoires au titre des créances qu'elle a déclarées au passif du débiteur principal,

- Ordonner à la banque de produire un décompte de sa créance expurgé de tous les frais, intérêts et accessoires avec imputation des règlements opérés par le débiteur principal

sur le capital,

Sur la demande au titre du solde débiteur du compte courant :

- Dire et juger que la banque est déchue de son droit de percevoir les intérêts, frais et accessoires au titre des créances qu'elle a déclarées au passif du débiteur principal,

En conséquence :

- Débouter la Banque Populaire de toutes ses demandes, fins et conclusions,

2.2 Sur la demande au titre de la caution en garantie du prêt n°08700338 :

- Dire et juger que la banque est déchue de son droit de percevoir les intérêts, frais et accessoires au titre des créances qu'elle a déclarées au passif du débiteur principal,

- Ordonner à la banque de produire un décompte de sa créance expurgé de tous les frais, intérêts et accessoires avec imputation des règlements opérés par le débiteur principal sur le capital,

2.3 Sur la demande au titre de l'engagement de caution en garantie du prêt n°08762489:

- Dire et juger que la banque est déchue de son droit de percevoir les intérêts, frais et accessoires au titre des créances qu'elle a déclarées au passif du débiteur principal,

- Ordonner à la banque de produire un décompte de sa créance expurgé de tous les frais, intérêts et accessoires avec imputation des règlements opérés par le débiteur principal sur le capital,

3°) En toute hypothèse :

- Condamner la Banque Populaire à payer à M. [V] la somme de 3.000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la Banque Populaire aux entiers dépens, de première instance et d'appel.

La Banque Populaire demande à la cour de :

- Dire M. [V] mal fondé en son appel,

- En conséquence, débouter M. [V] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- Condamner M. [V] à payer à la Banque Populaire la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

DISCUSSION :

Sur la disproportion manifeste :

L'article L 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur du 5 août 2003 au 1er juillet 2016 et applicable aux cautionnements en date du 30 octobre 2015, prévoit que le créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un cautionnement manifestement disproportionné :

Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses bien et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Les dispositions de ce texte ont été reprises par l'article L 332-1 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur du 1er juillet 2016 au 1er janvier 2022 et applicable aux cautionnements en date du 20 mars 2018.

C'est sur la caution que pèse la charge d'établir cette éventuelle disproportion manifeste.

Cet article n'impose pas au créancier professionnel de s'enquérir de la situation financière de la caution préalablement à la souscription de son engagement. La fiche de renseignements que les banques ont l'usage de transmettre aux futures cautions n'est, en droit, ni obligatoire ni indispensable. En revanche, en l'absence de fiche de renseignements, les éléments de preuve produits par la caution doivent être pris en compte.

Ce n'est que lorsque le cautionnement est considéré comme manifestement disproportionné au moment de sa conclusion qu'il revient au créancier professionnel d'établir qu'au moment où il appelle la caution, le patrimoine de celle-ci lui permet à nouveau de faire face à son obligation.

Si la fiche de renseignements remplie par la caution lie cette dernière quant aux biens et revenus qu'elle y déclare, le créancier n'ayant pas, sauf anomalie apparente, à en vérifier l'exactitude, elle ne fait pas obstacle à ce que les éléments d'actif ou de passif dont le créancier ne pouvait ignorer l'existence soient pris en compte, ce, quand bien même ils n'auraient pas été déclarés.

L'antériorité de la fiche de renseignements n'a pas pour conséquence de lui enlever toute force probante. En pareil cas, il y a seulement lieu d'en relativiser les mentions et de prendre en considération les éventuels éléments de preuve contraires produits par la caution.

M. [V] démontre qu'il était marié sous le régime de la communauté légale. Il en résulte que les biens et revenus propres de M. [V] et les biens et revenus communs doivent être pris en compte pour apprécier sa situation.

- Pour le cautionnements du 30 octobre 2015 dans la limite de la somme de 25.000 euros :

M. [V] demande à la cour de le décharger de toute obligation contributive en raison de la prétendue disproportion des engagements souscrits.

Il ne détaille pas quelle était sa situation patrimoniale à la date du 30 octobre 2015.

M. [V] n'a pas rempli de fiche de renseignement à l'ocassion de son cautionnement du prêt n°08700338. M. [V] justifie pas la production de ses avis d'imposition sur le revenu qu'il percevait 19.502 euros par, soit environ 1.625,17 euros par mois et son épouse de 7.131 euros, soit environ 594,25 euros par mois. Les revenus du couple s'élevaient donc à 26.640 euros en 2014.

M. [V] ne fournit pas d'éléments permettant d'apprécier la valeur de son patrimoine net au jour de la souscription de ce cautionnement.

Il résulte de ces éléments qu'il n'établi pas que son engagement de caution pour la somme de 25.000 euros était manifestement disproportionné à ses biens et revenus. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [V] à honorer son engagement au titre du cautionnement en date du 30 octobre 2015.

- Pour les cautionnements du 20 mars 2018 dans la limite de la somme de100.000 euros :

Pour apprécier le caractère disproportionné d'un cautionnement au moment de sa conclusion, les juges doivent prendre en considération l'endettement global de la caution, ce qui inclut les cautionnements qu'elle a précédemment souscrits par ailleurs, bien qu'ils ne correspondent qu'à des dettes éventuelles, à condition qu'ils aient été souscrits avant celui contesté.

M. [V] a rempli une fiche de renseignements le 3 mars 2018. Il y a indiqué être marié, avoir trois enfants à sa charge et percevoir un revenu personnel annuel de 29.495 euros, soit environ 2.457,92 euros par mois. Il y a également indiqué que Mme [N] percevait un revenu personnel annuel de 12.848 euros, soit environ 1.070,67 euros par mois. Les revenus annuels du couple déclarés s'élèvent donc à 42.343 euros.

Il a précisé être propriétaire de deux biens immobiliers, d'une valeur cumulée nette d'emprunt de 61.000 euros. Il y a également indiqué être engagé par un crédit finançant l'acquisition d'un véhicule arrivant à terme en octobre 2019, soit à l'issue de 19 mensualités de 311,06 euros. Cette dette est évaluée au 3 mars 2018 par la Banque Populaire à 5.910,14 euros. L'actif net du couple, hors parts sociales détenues par M. [V] dans la société BM Trans, s'élevait donc à environ 55.000 euros au 3 mars 2018.

M. [V] n'a pas reporté sur la fiche de renseignement son engagement de caution solidaire de 25.000 euros en garantie du prêt n°08700338 en date du 30 octobre 2015. Cependant, la Banque Populaire en avait nécessairement connaissance en sa qualité de créancier.

Cependant, comme le soutient la Banque Populaire les parts sociales détenues par la caution doivent être prises en compte pour apprécier le patrimoine de celle-ci. M. [V] n'indique aucunement la valeur des parts sociales de cette société. Or, M. [V] était l'associé unique de la société BM Trans, ce dont avait nécessairement connaissance la Banque Populaire au moment de la souscription du cautionnment. De plus, la société avait réalisé un chiffre d'affaires de 485.000 euros en 2015, en hausse de 80,32 % par rapport à 2014, les parts sociales de cette société constituaient donc un actif d'une valeur certaine.

Ne présentant pas sa complète situation patrimoniale à la date de l'engagement de caution, M. [V] ne prouve pas la disproportion manifeste qu'il allègue. Il résulte de ces éléments qu'il n'est pas établi que le cautionnement souscrit par M. [V] auprès de la Banque Populaire le 20 mars 2018, était, au jour de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus. Partant, il n'y a pas lieu d'examiner la proportionnalité de ce cautionnement au jour où M. [V] a été appelé. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le mal fondé de la demande au titre des crédits-bails garantis par le cautionnement 'omnibus' du 20 mars 2018 :

- Sur la recevabilité de la demande :

M. [V] prétend que les crédits-bails n°148593 souscrit le 19 octobre 2016 et n°148594 souscrit le 21 octobre 2016 auprès du département crédit-bail mobilier de la société Banque Populaire de l'Ouest, nommé Lofi Ouest, ne sont pas garantis par le cautionnement 'omnibus' souscrit le 20 mars 2018 auprès de la société Banque Populaire Grand Ouest.

Il apparaît que ces contrats ont été passés entre la société Banque Populaire de l'Ouest, dont Lofi Ouest n'était qu'un département, et la société BM Trans.

Il est justifié que la société Banque Populaire de l'Ouest a été absorbée par la société Banque Populaire Grand Ouest.

La société Banque Populaire Grand Ouest est donc recevable à agir pour demander le paiement des sommes restant dues au titre des contrats de crédit-bail litigieux.

- Sur la demande de décharge :

La caution peut être déchargée de son engagement en cas de manquement du créancier à son obligation de conserver et de se prévaloir des droits et privilèges qu'il peut lui même détenir :

Article 2314 du code civil (dans sa rédaction en vigueur du 24 mars 2006 au 1er janvier 2022 et applicable en l'espèce):

La caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution. Toute clause contraire est réputée non écrite.

La déchéance suppose la réunion de trois conditions cumulatives : le créancier doit posséder un droit préférentiel, ne pas l'avoir mis en oeuvre et qu'il en résulte ainsi un préjudice pour la caution.

Il incombe à la caution de démontrer la perte, par le fait exclusif du créancier, du droit dans lequel elle pouvait être subrogée.

Une fois ce fait exclusif établi, c'est au créancier qu'il incombe de prouver que la perte du droit préférentiel dont se plaint la caution n'a causé aucun préjudice à celle-ci.

La décharge n'est accordée à la caution qu'à hauteur du préjudice qu'elle a subi.

En l'espèce, M. [V] fait valoir que la Banque Populaire aurait perdu le bénéfice du cautionnement dont elle aurait pu se prévaloir, en s'abstenant de s'expliquer sur la mise en oeuvre de l'action en revendication, des conditions de restitution et de la revente du matériel objet des crédits-bails, à savoir un semi-remorque au titre du crédit-bail n°148593 et un tracteur routier au titre du crédit-bail n°148594.

La Banque Populaire produit au débat une lettre en date du 4 mars 2020 portant sur l'actualisation de la créance due au titre des crédits-bails, à la suite de la vente du matériel objet desdits contrats, dans laquelle le calcul des indemnités de résiliation est détaillé.

Partant, les conditions d'application de l'article 2314 du code civil n'étant pas remplies, aucune décharge ne saurait être prononcée au bénéfice de M. [V]. Il y a donc lieu de rejeter sa demande. Le jugement sera confirmé.

Sur le mal fondé de la demande au titre du solde débiteur du compte courant garanti par le cautionnement 'omnibus' du 20 mars 2018 :

En vertu de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

En l'espèce, la Banque Populaire demande la confirmation de la condamnation de M. [V] au paiement du solde débiteur du compte courant pour un montant de 1.866,96 euros, en précisant que ce solde débiteur correspond au compte courant n°[XXXXXXXXXX01] .

Cependant, la Banque Populaire ne fonde sa demande ni en fait ni en droit et sans indiquer aucune pièce au soutien de cette prétention comme l'exige l'article 954 du code de procédure civile. Il ne ressort d'aucune pièce versée aux débats l'existence d'un compte courant n°[XXXXXXXXXX01], telle que la convention d'ouverture de compte ou un relevé de compte à la date de l'ouverture de la liquidation judiciaire.

Les déclarations de créances ainsi que la mise en demeure de la caution en date du 5 septembre 2019 font état d'une demande de paiement de 1.866,96 euros au titre des écritures sur carte à débit différé relative aux contrats n°8677807165, n°8677817297, n°8677717305, n°9154039767. Cependant, aucune pièce ne justifie l'existence de ces contrats.

Par conséquent, la demande de paiement de la Banque Populaire au titre du solde débiteur du compte courant est mal fondée. Le jugement sera réformé en ce qu'il a condamné M. [V] à payer la somme 1.866,96 euros.

Les autres demandes des parties relatives au paiement du solde débiteur du compte courant sont rejetées.

Sur l'information annuelle de la caution :

L'article L 313-22 du code monétaire et financier, dans sa rédaction en vigueur du 1er janvier 2014 au 11 décembre 2016 et applicable au prêt n°08700338 du 30 octobre 2015 dispose que l'établissement prêteur est tenu d'une obligation d'information annuelle de la caution :

Les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.

L'article L 313-22 du code monétaire et financier, dans sa rédaction en vigueur du 11 décembre 2016 au 1er janvier 2022 et applicable aux prêts n°08718259 du 4 août 2016 et n°08762489 du 20 mars 2018 dispose que l'établissement prêteur est tenu d'une obligation d'information annuelle de la caution dont la réalisation ne peut être facturée à la personne bénéficiant de l'information.

De même, l'obligation d'information édictée est applicable aux établissements de crédit qui ont demandé un cautionnement en vue de maintenir une ouverture de crédit.

L'établissement n'est pas tenu de prouver que les lettres d'information ont été reçues. Il doit établir qu'il a envoyé des lettres contenant les informations fixées par ce texte.

En l'espèce, la Banque Populaire produit des copies de lettres d'information destinées à M. [V] en date des 26 février 2016, 21 mars 2017, 12 février 2018 et 21 février 2019. Il ne joint à ces pièces aucun élément permettant d'attester de leur envoi. Il n'est ainsi pas établi que les lettres d'information ont effectivement été envoyées à M. [V].

- Pour le prêt n°08700338 du 30 octobre 2015 garanti par le cautionnement du 30 octobre 2015 :

La Banque Populaire est donc déchue du droit aux intérêts au titre de ce prêt.

Le prêt n°08700338, d'un montant de 25.000 euros, a été payé jusqu'à l'échéance du 24 mai 2019 incluse. Au vu du tableau d'amortissement du prêt versé aux débats, le débiteur principal a payé pour ce prêt la somme de 1.136,93 euros au titre des intérêts. Il convient, pour ce qui concerne la caution, de déduire cette somme de celles restant dues par le débiteur principal.

Il reste dû par la caution, au titre du prêt n°08700338, la somme de 7.047,33 euros. Elle sera condamnée à payer cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2019, date de la mise en demeure, conformément à l'article 1153 du code civil dans sa rédaction antérieure à la réforme de 2016 applicable en l'espèce.

- Pour le prêt n°08718259 du 4 août 2016 garanti par le cautionnement tous engagments du 20 mars 2018 :

La Banque Populaire est donc déchue du droit aux intérêts au titre de ce prêt.

Le prêt n°08718259, d'un montant de 6.000 euros, a été payé jusqu'à l'échéance du 20 mai 2019 incluse. Au vu du tableau d'amortissement du prêt versé aux débats, le débiteur principal a payé pour ce prêt la somme de 110,52 euros au titre des intérêts. Il convient, pour ce qui concerne la caution, de déduire cette somme de celles restant dues par le débiteur principal.

Il reste dû par la caution, au titre du prêt n°08718259, la somme de 746,62 euros. Elle sera condamnée à payer cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2019, date de la mise en demeure, conformément à l'article 1231-6 du code civil applicable en l'espèce.

- Pour les crédits-bails n°48593 du 19 octobre 2016 et n°48594 du 21 octobre 2016 garantis par le cautionnement 'omnibus' du 20 mars 2018 :

Le crédit-bail ne constitue pas un concours financier, par conséquent les dispositions de l'article L.313-22 du code monétaire et financier ne sont pas applicables en faveur de la caution du crédit-preneur qui s'acquitte de loyers.

M. [V] demande la déchéance des intérêts dus au titre des crédits-bails sur le fondement de l'absence d'information annuelle de la caution. Il y a donc lieu de rejeter la demande de M.[V]. Le jugement sera confirmé de ce chef.

- Pour le prêt n°08762489 du 20 mars 2018 garanti par le cautionnement du 20 mars 2018 :

La Banque Populaire est donc déchue du droit aux intérêts au titre de ce prêt.

Le prêt n°08762489, d'un montant de 50.000 euros, a été payé jusqu'à l'échéance du 20 mai 2019 incluse. Au vu du tableau d'amortissement du prêt versé aux débats, le débiteur principal a payé pour ce prêt la somme de 535,97 euros au titre des intérêts. Il convient, pour ce qui concerne la caution, de déduire cette somme de celles restant dues par le débiteur principal.

Il reste dû par la caution, au titre du prêt n°08762489, la somme de 40.716,61 euros. Elle sera condamnée à payer cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2019, date de la mise en demeure.

Sur les frais et dépens :

Il y a lieu de condamner M. [V] aux dépens d'appel et de rejeter les demandes formées en appel au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour :

- Réforme le jugement en ce qu'il a :

- Fixé la condamnation au titre de l'engagement de caution en garantie du prêt n°08700338 d'un montant initial de 25.000 euros à la somme de 8.184,26 euros outre intérêts au taux de 1,97 % l'an à compter de la mise en demeure du 5 septembre 2019 jusqu'au jour du parfait paiement,

- Fixé la condamnation au titre de l'engagement de caution en garantie du remboursement du prêt n° 08762489 à la somme de 41.252,58 euros,

- Fixé la condamnation au titre de l'engagement de caution omnibus en garantie de l'ensemble des autres créances détenues par la Banque Populaire à l'égard de la société BM Trans aux sommes de 1.866,96 euros, 9.031,29 euros et 13.158,64 euros,

- Condamné M. [V] à payer à la société Banque Populaire Grand Ouest la somme de 869,33 euros au titre du prêt n°02718259,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Condamne M. [V] à payer à la société Banque Populaire Grand Ouest :

- Au titre du cautionnement, en date du 30 octobre 2015, en garantie du remboursement du prêt n°08700338, la somme de 7.047,33 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2019,

- Au titre du cautionnement, en date du 20 mars 2018, en garantie du remboursement du prêt n°08762489, la somme de 40.716,61 euros avec intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2019,

- Au titre du cautionnement omnibus, en date du 20 mars 2018, en garantie de l'ensemble des autres créances détenues par la Banque Populaire à l'égard de la société BM Trans, les sommes de :

' Au titre du prêt n°08718259 en date du 4 août 2016 : 746,62 euros,

' Au titre du crédit-bail n° 148593 : 9.031,29 euros

' Au titre du crédit-bail n° 148594 : 13.158,64 euros

' Outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 septembre 2019,

- Rejette les autres demandes des parties,

- Condamne M. [V] au dépens d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 3ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/05925
Date de la décision : 07/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-07;21.05925 ?
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