6ème Chambre A
ARRÊT N° 106
N° RG 22/01724 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SSBG
M. [Y], [Z], [G] [D]
C/
Mme [O] [T]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Emmanuelle FOUCRE
Me Isabelle LE FLOCH-CHAPLAIS
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 20 FEVRIER 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Sylvie ALAVOINE, Conseillière,
Assesseur : Madame Emmanuelle DESVALOIS, Conseillière,
GREFFIER :
Madame Christine NOSLAND, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
En audience publique du 03 Janvier 2023
devant Madame Aurélie GUEROULT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 20 Février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur [Y], [Z], [G] [D]
né le 31 Mars 1965 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 6]
' Représenté par Me Emmanuelle FOUCRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
INTIMÉE :
Madame [O] [T]
née le 22 Décembre 1962 à [Localité 7] (JAPON)
[Adresse 3]
[Localité 6]
' Représentée par Me Isabelle LE FLOCH-CHAPLAIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
EXPOSE DU LITIGE
M. [D] et Mme [T] se sont mariés le 22 juin 2002 à [Localité 4] sans contrat de mariage préalable de sorte qu'ils étaient soumis au régime de la communauté légale réduite aux acquêts.
Par jugement du 3 novembre 2016, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nantes a notamment prononcé le divorce au torts partagés entre les époux, dit que le divorce produira ses effets entre les époux en ce qui concerne leurs biens à la date du 1er mars 2012 et ordonné la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux.
Par jugement du 31 janvier 2022, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Nantes a notamment :
- dit n'y avoir lieu d'ordonner de nouveau l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. [D] et Mme [T],
- désigné Maître [V] [C], notaire à [Localité 6], aux fins de procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux des parties,
- dit que le délai d'un an prévu à l'article 1368 du code de procédure civile commencera à compter de la décision,
- désigné le juge aux affaires familiales du cabinet G pour surveiller le déroulement des opérations en qualité de juge commis,
- dit que M. [D] et Mme [T] seront chacun attributaire d'une liste de meubles (détaillée au dispositif du jugement ),
- débouté les parties de leurs autres demandes relatives aux meubles meublants,
- débouté M. [D] de sa demande relative au véhicule Clio
- dit que les comptes suivants seront portés à l'actif de la communauté :
compte joint banque postale 821 €,
PEE BNP de M. [D] : 4 108,81 €,
PER BNP de Mme [T] : 1056,89 €,
PER AXA de Mme [T] : 1970,56 €,
compte-courant BNP : 8 902,40 €,
CEL de Mme [T] : 4 155,19 €
épargne salariale CIC de Mme [T] : 1667,97 €,
- dit que le total des actifs financiers de Mme [T] se rapporte à l'actif de communauté pour la somme de 46'397,41 €,
- débouté Mme [T] de sa demande relative au LDD de M. [D],
- dit que le LDD de M. [D] sera porté à l'actif de communauté pour la somme de 3517 €,
- débouté Mme [T] de sa demande relative aux bons au porteur,
- débouté M. [D] de sa demande relative à l'indemnité transactionnelle,
- dit que la somme de 22'132 € correspondant à l'impôt sur le revenu acquitté par M. [D] seul se rapporte au passif de communauté,
- débouté les parties de leurs demandes relatives aux intérêts des récompenses,
- débouté M. [D] de sa demande de remboursement de la somme de 2800 € par l'indivision,
- réservé les dépens d'instance et sursis à statuer s'agissant des demandes au titre des frais irrépétibles.
Par une déclaration en date du 14 mars 2022, M. [D] a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle l'a débouté de sa demande relative à l'indemnité transactionnelle et de sa demande relative au véhicule Clio.
Le jugement n'a pas été notifié ni signifié, de sorte qu'il apparaît que l'appel est recevable.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par le RPVA le 6 décembre 2022,
M. [D] demande à la cour de :
- le recevoir en son appel,
- y faire droit
En conséquence
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de sa demande relative au véhicule Clio et l'a débouté de sa demande relative à l'indemnité transactionnelle,
Statuant à nouveau
- le dire et juger recevable et bien fondé en ses demandes
En conséquence
- retenir la valeur du véhicule Renault Clio pour 4000 €,
- juger que l'indemnité pour préjudice moral qu'il a perçue à hauteur de 192'000 € est un bien propre et dès lors doit figurer au passif de communauté,
- décerner acte à Mme [T] qu'elle admet à titre subsidiaire qu'il a bien subi un préjudice moral du fait de son licenciement lequel a été indemnisé à tout le moins par l'allocation d'une somme de 50'353 €,
- condamner Mme [T] au paiement de la somme de 3600 € TTC au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance d'appel,
- débouter Mme [T] de toutes ses demandes plus amples ou contraires.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 21 décembre 2022 Mme [T] demande à la cour de :
- confirmer en tous points le jugement entrepris et notamment ce qu'il a débouté M. [D] de sa demande relative à l'indemnité transactionnelle et débouté M. [D] de sa demande relative au véhicule Clio,
- condamner M. [D] au paiement de 3600 € TTC sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [D] aux dépens.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.
L'ordonnance de clôture est intervenue à l'audience du 3 janvier 2023.
* * *
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'indemnité de licenciement :
M. [D] fait valoir que l'indemnité de licenciement qu'il a perçue constituerait un propre s'agissant d'une indemnité pour préjudice moral.
L'article 1401 du code civil dispose que :
La communauté se compose activement des acquêts faits par les époux ensemble ou séparément durant le mariage, et provenant tant de leur industrie personnelle que des économies faites sur les fruits et revenus de leurs biens propres.
L'article 1403 du même code indique que :
Chaque époux conserve la pleine propriété de ses propres. La communauté n'a droit qu'aux fruits perçus et non consommés. Mais récompense pourra lui être due, à la dissolution de la communauté, pour les fruits que l'époux a négligé de percevoir ou a consommés frauduleusement, sans qu'aucune recherche, toutefois, soit recevable au-delà des cinq dernières années.
Enfin l'article 1404 précise que :
Forment des propres par leur nature, quand même ils auraient été acquis pendant le mariage, les vêtements et linges à l'usage personnel de l'un des époux, les actions en réparation d'un dommage corporel ou moral, les créances et pensions incessibles, et, plus généralement, tous les biens qui ont un caractère personnel et tous les droits exclusivement attachés à la personne. Forment aussi des propres par leur nature, mais sauf récompense s'il y a lieu, les instruments de travail nécessaires à la profession de l'un des époux, à moins qu'ils ne soient l'accessoire d'un fonds de commerce ou d'une exploitation faisant partie de la communauté.
Il est constant que les indemnités visant à indemniser la perte d'emploi, source de revenus, sont assimilées aux gains et salaires et forment par conséquent des acquêts relevant de la communauté, et seules les indemnités allouées à un époux exclusivement attachées à la personne du créancier n'entrent pas en communauté.
Les indemnités allouées à un époux tombent en communauté, à l'exception de celles qui sont exclusivement attachées à la personne du créancier.
En l'espèce, dans le cadre d'un protocole transactionnel signé le 8 septembre 2011 avec son employeur à la suite de son licenciement, M. [D] a perçu, à titre de dommages-intérêts transactionnels forfaitaires et définitifs, la somme globale de 192.000 euros. Ce protocole indique qu'il tient compte du préjudice moral, mais ne distingue pas une somme qui aurait été allouée à titre de ce préjudice moral. La cour n'est pas tenue de suivre les appréciations éventuelles des services fiscaux ou sociaux sur la nature de cette somme.
Il apparaît ainsi que M. [D] a perçu une indemnité transactionnelle de licenciement, globale, de sorte qu'elle ne réparait pas un préjudice affectant uniquement sa personne.
Il y a lieu de rejeter sa demande et de confirmer le jugement sur ce point.
Sur le véhicule Renault Clio :
M. [D] fait valoir que le véhicule Renault Clio conservé par son épouse aurait eu à la date du divorce une valeur de 4.000 euros.
Le divorce a été prononcé le 3 novembre 2016 avec effet sur les biens des époux au 1er mars 2012. Mme [T] a conservé un véhicule Renault Clio. Elle justifie qu'il a été accidenté en janvier 2013, remorqué puis envoyé à la casse pour destruction le 8 janvier 2013.
Il n'en demeure pas moins qu'au 1er mars 2012, Mme [T] en reçu ce véhicule en état de fonctionnement.
M. [D] produit une cote affinée de ce véhicule pour 2.709 euros pour un kilométrage de 65.000 km et de 1.887 euros pour un kilométrage d'usage de 10.860 euros annuels. Il résulte de la facture de mise à la casse que le véhicule avait alors 91.165 kilomètres au compteur.
Même si la cote produite par M. [D] n'est pas datée, il apparaît que l'évaluation pour 2.000 euros correspondait à la valeur d'un tel véhicule à la date du 1er mars 2012.
Il conviendra de retenir cette somme et d'infirmer le jugement sur ce point.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il y a lieu de dire que chacune des parties supportera les dépens d'appel par elle engagés et de rejeter les demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
* * *
PAR CES MOTIFS :
La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, et mis à disposition au greffe,
- Infirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [D] de sa demande relative au véhicule Clio,
Confirme le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant :
- Dit que Mme [T] sera attributaire du véhicule Renault Clio immatriculé [Immatriculation 2] pour la somme de 2.000 euros,
- Rejette les autres demandes des parties,
- Dit que chacune des parties supportera les dépens d'appel par elle engagés.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT