5ème Chambre
ARRÊT N°-132
N° RG 19/08367 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QLQS
M. [R] [H]
MACSF ASSURANCES
C/
Mme [W] [I] épouse [G]
Organisme CAISSE PRIMAIRE D ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 05 AVRIL 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,
Assesseur : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,
Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 08 Février 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 05 Avril 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur [R] [H]
né le [Date naissance 3] 1950 à [Localité 12]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représenté par Me Xavier FRERING de la SELARL CAUSIDICOR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Représenté par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
MACSF ASSURANCES, société d'assurance mutuelle régie par le Code des Assurances, dont le siège social est situé [Adresse 11], n°siren 775665631, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège,
INTERVENANTE VOLONTAIRE
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 9]
Représentée par Me Xavier FRERING de la SELARL CAUSIDICOR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Représentée par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉES :
Madame [W] [I] épouse [G]
née le [Date naissance 6] 1970 en RUSSIE
[Adresse 4]
[Localité 8]
Représentée par Me Iannis ALVAREZ de la SELARL SYNELIS AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT
Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège,
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Benoît BOMMELAER de la SELARL CVS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Bertrand LARONZE de la SELARL L.R.B. AVOCATS CONSEILS, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
***************
Le 9 mars 2014, vers 12 heures, Mme [W] [G] ressentait une vive douleur dans la poitrine et des difficultés respiratoires ; son époux appelait le Samu.
Le docteur [F], médecin régulateur, considérait qu'il s'agissait vraisemblablement d'une crise d'angoisse mais estimait toutefois qu'il convenait d'emmener Mme [W] [G] chez le médecin de garde.
Mme [W] [G] était ainsi conduite par son mari chez le docteur [R] [H], lequel appelait le docteur [F] à 12 h 58 et l'informait qu'il allait réaliser un électrocardiogramme (ECG).
A l'issue de cet examen, le docteur [R] [H] diagnostiquant une crise d'angoisse, autorisait Mme [W] [G] à rentrer à son domicile et lui remettait une ordonnance d'Avlocardyl 40mg et de Bromazépam 40mg.
Le docteur [R] [H] ne conservait pas l'ECG.
Constatant une gêne thoracique persistante, le 11 mars 2014, Mme [W] [G] consultait le docteur [Y] qui lui prescrivait un bilan à réaliser le lendemain.
A la lecture des résultats, le docteur [Y] adressait sa patiente aux urgences de l'hôpital de [Localité 15]. L'ECG pratiqué le 12 mars 2014 mettait en évidence un infarctus antéro-septo-apical, vu tardivement. Mme [W] [G] était hospitalisée le jour même. Elle regagnait son domicile le 26 mars 2014.
Du 7 au 25 avril 2014, Mme [W] [G] bénéficiait d'un séjour en réadaptation cardio-vasculaire à Kerpape. A sa sortie, sa situation clinique était jugée instable.
En raison d'une dyspnée d'effort persistante, Mme [W] [G] était de nouveau hospitalisée dans le service de cardiologie du CHU de [Localité 13], du 19 au 23 mai 2014, puis du 11 au 13 juin 2014, puis du 25 au 27 juin 2014 dans le cadre d'un bilan de pré-transplantation cardiaque.
Le 21 août 2014, Mme [W] [G] bénéficiait d'une transplantation cardiaque orthoptique.
Le 8 septembre 2014, elle était transférée à la clinique [14] à [Localité 13] où elle séjournait jusqu'au 8 octobre 2014, date à laquelle elle rejoignait son domicile.
Une expertise amiable mettait en évidence l'erreur de diagnostic du docteur [R] [H]. L'assureur de responsabilité civile, la MACSF, ne contestait pas la responsabilité de son assuré mais estimait que le Samu était également fautif dans la prise en charge.
Par actes en date du 27 février 2017, Mme [W] [G] faisait assigner le docteur [R] [H], le Samu 56 et la CPAM du Morbihan devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lorient aux fins d'expertise.
Le Centre Hospitalier de [10] intervenait volontairement à la procédure.
Par ordonnance en date du 2 mai 2017, le juge des référés faisait droit à la demande de Mme [W] [G] et désignait le docteur [O] pour procéder à l'expertise.
L'expert déposait son rapport le 20 décembre 2017.
Par actes séparés des 9 et 11 octobre 2018, Mme [W] [G] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Lorient, M. [R] [H] aux fins d'indemnisation de ses préjudices et la CPAM du Finistère afin qu'elle puisse faire état de ses débours.
Par jugement en date du 26 novembre 2019, le tribunal de Lorient a :
- débouté M. [R] [H] de sa demande tendant au partage de responsabilité,
- débouté Mme [W] [G] de sa demande tendant à voir M. [R] [H] garanti par son assureur,
- condamné le docteur [R] [H] à verser à Mme [W] [G] en réparation des préjudices subis :
* frais divers avant consolidation-trajets : 1 218,05 euros,
* aide humaine avant consolidation : 5 456 euros,
* perte de gains professionnels actuels : 1 884,53 euros,
* frais divers post-consolidation - trajets : 590,31 euros,
* aide humaine post-consolidation : 59 723,64 euros,
* perte de gains professionnels futurs : 37 445,65 euros,
* incidence professionnelle : 30 000 euros,
* déficit fonctionnel temporaire : 7 907,50 euros,
* souffrances endurées : 30 000 euros,
* préjudice esthétique temporaire : 0 euro
* déficit fonctionnel permanent : 73 200 euros,
* préjudice esthétique permanent : 4 000 euros,
* préjudice lié à la conscience d'une pathologie évolutive : 70 000 euros,
* soit un total de 321 425,68 euros,
- condamné M. [R] [H] à verser à la CPAM du Finistère la somme de 153 975,91 euros au titre de ses débours d'ores et déjà exposés,
- condamné M. [R] [H] à payer à la CPAM du Finistère, au fur et à mesure de leur engagement, les frais hospitaliers au-delà du 6 septembre 2018, médicaux au-delà du 2 avril 2019, frais pharmaceutiques au-delà du 30 avril 2019 et d'appareillage exposés et justifiés au regard de la pathologie de Mme [W] [G] inhérente à sa faute,
- dit que les intérêts échus pour une année entière à compter de la présente
décision porteront eux-mêmes intérêts au taux légal,
- condamné M. [R] [H] à verser 3 000 euros à Mme [W] [G] et 1 000 euros à la CPAM du Finistère sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné le docteur [R] [H] à verser à la CPAM du Finistère l'indemnité forfaitaire de 1 080 euros prévue par l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale,
- condamné M. [R] [H] aux entiers dépens auxquels seront joints ceux de l'instance en référé comprenant les frais d'expertise, en application des dispositions de l'article 695 du code de procédure civile,
- dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Le 27 décembre 2019, M. [R] [H] a interjeté appel de cette décision et aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 5 décembre 2022, le M. [R] [H] et son assureur la société MACSF Assurances, cette dernière intervenant volontairement en cause d'appel, demandent à la cour de :
- recevoir l'appel de M. [R] [H], le dire bien fondé et y faire droit,
- rejeter les appels incidents, les disant mal fondés,
- dire la MACSF recevable et bien fondée en son intervention,
- confirmer le jugement sur la responsabilité,
- réformer le jugement déféré en ce qu'il a :
* condamné M. [R] [H] à verser à Mme [W] [G] la somme totale de 321 425, 68 euros en réparation des préjudices subis,
* dit que les intérêts échus pour une année entière à compter du jugement porteront eux-mêmes intérêts au taux légal,
* condamné M. [R] [H] à verser 3 000 euros à Mme [W] [G] et 1 000 euros à la CPAM du Finistère sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné M. [R] [H] à verser à la CPAM du Finistère l'indemnité forfaitaire de 1 080 euros prévue par l'article L376-1 du code de la sécurité sociale,
* condamné M. [R] [H] aux entiers dépens y compris ceux de l'instance en référé comprenant les frais d'expertise,
* débouté M. [R] [H] de ses demandes tendant à voir :
° dire que sa responsabilité est engagée à hauteur de 50 %,
° rejeter les demandes de Mme [W] [G] au titre des frais divers futurs, préjudice esthétique temporaire et du préjudice lié à la conscience d'une pathologie évolutive,
° rejeter la demande de Mme [W] [G] au titre de la perte de gains professionnels futurs en raison du défaut de production des avis d'imposition à compter de l'année 2015 et dans le cas d'une telle production réduire à une plus juste proportion l'indemnisation sollicitée,
° réduire à de plus justes proportions les demandes formulées par Mme [W] [G] au titre des autres postes de préjudices,
° rejeter les demandes de la CPAM concernant les frais de médicaments Kardegic, Pravastatine et Ramipril,
° réduire à de plus justes proportions les indemnités sollicitées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
- sur la liquidation,
* les préjudices patrimoniaux temporaires
° au titre des dépenses de santé actuelles : confirmer le jugement,
° au titre des frais divers : allouer 48,22 euros,
° au titre de l'assistance par tierce personne : allouer 2 784 euros,
° au titre de la perte de gains professionnels actuels : confirmer le jugement,
* les préjudices patrimoniaux permanents
° au titre des frais divers futurs : débouter Mme [W] [G],
° au titre de l'assistance par tierce personne : confirmer le jugement,
° au titre de la perte de gains professionnels futurs : allouer 27 375,26 euros,
cette somme revient à la CPAM
solde pour Mme [W] [G] = 0 euro
° au titre de l'incidence professionnelle : allouer 15 000 euros
cette somme revient à la CPAM
solde pour Mme [W] [G] = 0 euro,
* les préjudices extra-patrimoniaux temporaires
° au titre du déficit fonctionnel temporaire : allouer 6 975,90 euros,
° au titre des souffrances endurées : allouer 15 000 euros,
° au titre du préjudice esthétique temporaire : confirmer le jugement,
* les préjudices extra-patrimoniaux permanents
° au titre du déficit fonctionnel permanent : allouer 49 500 euros,
la somme de 48 286,99 euros revient à la CPAM
solde pour Mme [W] [G] = 1 213,01 euros,
° au titre du préjudice esthétique permanent : allouer 1 800 euros,
° au titre du préjudice lié à la conscience d'une pathologie évolutive : débouter Mme [W] [G],
- sur la créance de la CPAM : infirmer le jugement au titre des frais futurs, et en conséquence, faire droit au recours de la CPAM, pour la partie avant consolidation à hauteur de 106 817,16 euros, pour la partie post-consolidation à la somme de 65 582,06 euros et pour la partie des frais futurs 228 523,79 euros,
- laisser à chaque partie le soin d'assumer ses propres frais irrépétibles,
- débouter Mme [W] [G] et la CPAM de toutes leurs demandes contraires aux présentes,
- condamner tout succombant aux dépens d'instance et d'appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 28 décembre 2022, Mme [W] [G] demande à la cour de :
- dire et juger M. [R] [H] et le centre hospitalier de [10] fautifs dans la prise en charge de Mme [W] [G] en ce que la prise en charge n'a pas été faite conformément aux données acquises de la science,
- constater que M. [R] [H] et le centre hospitalier de [10] sont responsables d'un même dommage causé à Mme [W] [G],
En conséquence,
- condamner M. [R] [H] à réparer l'entier préjudice de Mme [W] [G].
- condamner M. [R] [H] solidairement avec la MACSF à réparer le préjudice de Mme [W] [G] comme suit :
* dépenses de santés actuelles : confirmation du jugement,
* frais divers avant consolidation : confirmation du jugement,
* aide humaine avant consolidation : 11 008 euros,
* perte de gains professionnels actuelle : 2 706,34 euros,
* frais divers post-consolidation : 655,66 euros,
* aide humaine post-consolidation : confirmation du jugement,
* perte de gains professionnels future : confirmation du jugement,
* incidence professionnelle : 60 000 euros,
* déficit fonctionnel temporaire : 8 459,1 euros,
* souffrances endurées : confirmation du jugement,
* préjudice esthétique temporaire : 3 000 euros,
* déficit fonctionnel permanent : confirmation du jugement,
* préjudice esthétique permanent : confirmation du jugement,
* préjudice lié à la conscience d'une pathologie évolutive : confirmation du jugement,
- débouter M. [R] [H] et la MACSF des demandes et conclusions contraires,
- dire et juger que les intérêts échus des capitaux produiront intérêt dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil à compter du jugement du 26 novembre 2019,
- condamner M. [R] [H], et la MACSF, à lui verser la somme de
6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [R] [H] et la MACSF aux entiers dépens de première instance (référé expertise et procédure au fond) et ceux y compris d'exécution du jugement de première instance, ainsi que de la présente procédure d'appel,
- ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir.
Par dernières conclusions notifiées le 7 décembre 2022, la CPAM du Finistère demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu le 26 novembre 2019 en ce qu'il a :
* retenu la responsabilité pleine et entière de M. [R] [H] dans la survenance du préjudice de Mme [W] [G] et de la CPAM du Finistère,
* condamné M. [R] [H] à lui verser la somme de 153 975,91 euros au titre des débours d'ores et déjà exposés,
* dit que les intérêts échus pour une année entière à compter de la présente
décision porteront eux-mêmes intérêts au taux légal,
* condamné M. [R] [H] à lui verser 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné M. [R] [H] à lui verser l'indemnité forfaitaire de 1 080 euros prévue par l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale,
* condamné M. [R] [H] aux entiers dépens auxquels seront joints ceux de l'instance en référé comprenant les frais d'expertise, en application des dispositions de l'article 695 du code de procédure civile.
Y ajoutant,
- fixer le montant des débours actualisés de la CPAM du Finistère à la somme de 417 517,78 euros, selon décompte arrêté au 7 novembre 2022,
En conséquence,
- condamner solidairement M. [R] [H] et la MACSF Assurances à lui payer la somme de 417 517,78 euros, ainsi décomposée :
* débours jusqu'à la consolidation : 106 817,16 euros, dont :
° 85 884,06 euros au titre des frais hospitaliers,
° 5 337,33 euros au titre des frais de transport,
° 513,63 euros au titre des frais médicaux,
° 5 678,13 euros au titre des frais pharmaceutiques,
° 9 404,01 euros au titre des indemnités journalières,
* débours du 22/08/2015 au 31/10/2022 : 78 153,60 euros, dont :
° 17 011,24 euros au titre des frais hospitaliers,
° 7 022,67 euros au titre des frais de transport,
° 734,21 euros au titre des frais médicaux,
° 15 945,41 euros au titre des frais pharmaceutiques,
° 37 440,07 euros au titre des arrérages échus en invalidité,
* frais futurs à compter du 01/11/2022 : 232 547,02 euros, dont :
° 73 415,32 euros au titre des frais d'hospitalisation,
° 89 301,78 euros au titre des frais viagers de pharmacie,
° 1 892,98 euros au titre des frais viagers d'appareillage,
° 67 936,94 euros au titre du capital représentatif en invalidité.
- dire que la créance de la CPAM du Finistère s'imputera en priorité,
- dire que la créance de la CPAM du Finistère sera assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement du 26 novembre 2019 et ce, jusqu'à parfait paiement,
- ordonner la capitalisation des intérêts sur la somme de 417 517,78 euros et ce, jusqu'à parfait paiement,
- condamner solidairement M. [R] [H] et la MACSF Assurances à lui payer la somme 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale,
- condamner solidairement M. [R] [H] et la MACSF Assurances à lui payer à la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les mêmes aux entiers dépens de l'instance dont distraction au
profit de la Selarl CVS, Maître Benoît Bommelaer, avocats aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
- sur l'intervention volontaire de la société MACSF Assurances
La société MACSF intervient volontairement aux débats en qualité d'assureur de M. [H] et déclare avoir réglé les causes du jugement, ce qui n'est pas discuté. Son intervention volontaire sera jugée recevable.
- sur les responsabilités
M. [H] et la MACSF Assurances font valoir que l'expert conclut à une responsabilité partagée avec le Samu, soit 50% chacun. Ils demandent donc de limiter dans ces conditions les condamnations à réparer le dommage subi par Mme [G].
Mme [W] [G] relève que l'éventuelle responsabilité limitée de M. [H] n'affecte pas son droit à réparation intégrale.
En préliminaire, la cour note également que le centre hospitalier de [10] n'est pas dans la cause et rappelle qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de 'donner acte', 'dire et juger' qui ne constituent pas des prétentions susceptibles d'entraîner des conséquences juridiques au sens de l'article 4 du code de procédure civile, mais uniquement la reprise de moyens développés dans le corps des conclusions qui ne doivent pas, à ce titre, figurer dans le dispositif des écritures des parties.
L'article L 1142-1 du code de la santé publique dispose :
Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.
En l'espèce, le docteur [O], expert retient :
- s'agissant de la prise en charge par le Samu, que le diagnostic de crise d'angoisse a été retenu prématurément, que la présence d'un facteur de risque héréditaire, associée aux éléments cliniques rapportés devait faire évoquer l'hypothèse d'un événement coronarien, que le Samu avait la nécessité d'éliminer l'hypothèse d'un infarctus et que sa prise en charge n'est pas conforme aux données acquises de la science,
- s'agissant de la prise en charge par le docteur [H], que la présence d'extrasystoles aurait dû inciter le docteur [H] à orienter la patiente vers un SAU compétent, le contexte de malaise associé à une douleur cervicale prolongée et à des extrasystoles, chez une patiente qualifiée par le docteur [H] comme ' à risque' aurait dû inciter à la prudence, que sa prise en charge n'est pas conforme aux données acquises de la science.
L'expert conclut :
L'état actuel de Mme est imputable de manière certaine et directe aux erreurs de prise en charge et d'orientation de la patiente. Compte tenu des données expérimentales en matière d'ischémie, des recommandations de la Haute Autorité de Santé et des délais d'alerte, une prise en charge adaptée aurait probablement permis de préserver une fonction myocardite dans les limites de la normale, et de manière certaine de ne pas recourir à une transplantation cardiaque.
La responsabilité est partagée entre le docteur [F] et le docteur [H] à hauteur de 50%.
La responsabilité de M. [H] dans le dommage subi par Mme [W] [G] n'est pas contestée par ce dernier.
Les éventuels partages de responsabilité entre praticiens, qui n'interviennent si besoin qu'entre eux, sont indifférents quant au droit à indemnisation intégrale de la victime et les premiers juges retiennent à raison que chacun des responsables d'un même dommage peut être condamné à le réparer en totalité. Le moyen opposé par les appelants pour réduire les éventuelles condamnations prononcées à l'encontre le docteur [H], en tenant compte d'un tel partage, est donc écarté.
La cour confirme le jugement déboutant M. [H] de sa demande de partage de responsabilité.
- sur la liquidation des préjudices subis par Mme [W] [G]
En application de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale, le tiers payeur peut réclamer au tiers responsable ou à son assureur le remboursement des prestations prises en charge au bénéfice de la victime.
La CPAM du Finistère soutient à juste titre qu'il convient d'imputer ses débours poste par poste.
Les conclusions du docteur [O] en date du 20 décembre 2017 ne sont pas contestées.
Ce dernier indique que Mme [W] [G] antérieurement au 12 mars 2014 présentait une fonction myocardite normale.
Elle a présenté un infarctus antéro-septo-apical étendu par occlusion de la partie proximale de l'interventriculaire antérieure, ayant entraîné une nécrose étendue du myocarde antérieurement sain.
L'étendue des lésions a amené à faire subir à Mme [W] [G] une transplantation orthoptique cardiaque.
M. [W] [G] est née le [Date naissance 6] 1970. La date de consolidation a été fixée par l'expert au 21 août 2015, un an après la transplantation.
1.Sur les préjudices patrimoniaux
1.1 sur les préjudices patrimoniaux temporaires
les dépenses de santé actuelles
La CPAM du Finistère fait état des débours avant consolidation suivants :
- frais hospitaliers : 85 884,06 euros
- frais de transport : 5 337,33 euros
- frais médicaux : 513,63 euros
- frais pharmaceutiques : 5 678,13 euros.
Total : 97 413,15 euros.
Ces sommes ne sont pas discutées. Mme [W] [G] ne fait valoir aucun frais resté à charge. La cour retient donc une indemnisation au profit de la CPAM de ce chef à hauteur de la somme de 97 413,15 euros.
les frais divers
M. [H] et la MACSF demandent de ramener ce poste de préjudice à 48,22 euros, considérant que seuls les frais de déplacement personnels à la victime peuvent être indemnisés.
Mme [W] [G] demande la confirmation du jugement qui lui alloue une somme de 1 218,05 euros.
Il s'agit ici d'indemniser la victime notamment des frais liés à l'hospitalisation, des dépenses liées à la réduction d'autonomie, des frais de déplacement pour consultations et soins, des frais de transport et d'hébergement des proches pour visiter la victime puisque le moral du blessé peut agir sur l'évolution de son état de santé.
L'effectivité des déplacements invoqués par la victime pour se rendre elle-même au centre de Kerpape en avril 2014 et pour être visitée par sa famille chaque jour durant son hospitalisation à [Localité 15] entre le 12 mars 2014 et le 26 mars 2014 n'est pas contestée.
Au regard de ces trajets effectués, Mme [W] [G] est donc fondée en sa demande d'indemnisation, justement appréciée par les premiers juges. La cour retient donc également la somme de 1 218,05 euros.
L'assistance tierce personne temporaire
M. [H] et la MACSF demandent à la cour de limiter cette indemnisation à 2 784 euros sur une base horaire de 16 euros en prenant en compte un besoin d'assistance de 1h30 pendant la période du 26 avril 2014 au 20 août 2014.
Mme [W] [G] considère sous-estimé ce besoin et sollicite une indemnisation de 11 008 euros, pour 688 heures à 16 euros.
Il s'agit d'indemniser la victime des dépenses liées à la réduction d'autonomie. Le préjudice est indemnisé selon le nombre d'heures d'assistance et le type d'aide nécessaire.
L'expert a retenu que Mme [W] [G] avait besoin, avant consolidation d'une assistance de 1h30 par jour du 26 avril 2014 au 20 août 2014.
Mme [G] a été hospitalisée pendant la période du 21 août 2014 au 8 octobre 2014.
Si l'expert ne retient pas la nécessité d'une aide humaine après le 8 octobre 2014, il a toutefois constaté lors de l'examen de la victime qu'elle déclarait ne pas être autonome après la transplantation cardiaque subie. L'expert retient d'ailleurs un besoin d'assistance à compter de la consolidation le 21 août 2015 au regard des séquelles constatées (2 heures par semaine).
Ces séquelles existaient donc déjà de toute évidence pour la période du 9 octobre 2014 au 20 août 2015. Mme [G] est dès lors fondée à se prévaloir de la nécessité d'une aide humaine durant cette dernière période, quand bien même l'expert ne la mentionne pas. La cour approuve l'analyse des premiers juges retenant que ce besoin important au retour d'hospitalisation a toutefois diminué avec le temps durant cette deuxième période.
L'indemnisation de l'assistance tierce personne pendant la période du 26 avril 2014 au 20 août 2015 à hauteur de la somme de 5 456 euros est confirmée.
les pertes de gains professionnels actuels
M. [H] et la MACSF demandent la confirmation du jugement sur ce point. Mme [G] considère cependant qu'il lui reste dû, en prenant en compte l'érosion monétaire, et après imputation des indemnités journalières, une somme de 2 706, 34 euros, qu'elle réclame devant la cour.
Il s'agit d'indemniser la perte totale ou partielle des revenus de la victime avant la consolidation du fait de son dommage.
Mme [G] a travaillé en qualité de femme de service à compter du 2 mai 2005.
Elle a été en arrêt de travail à compter du 12 mars 2014. Les parties sont d'accord pour prendre en compte un salaire de base mensuel actualisé de 648,87 euros et une période de 76 semaines jusqu'à consolidation.
La CPAM produit un décompte mentionnant le versement d'indemnités journalières de 17,71 euros par jour pendant 531 jours, du 19 mai 2014 au 31 octobre 2015. La consolidation étant le 21 août 2015, il ne peut être tenu compte de ces versements que durant 459 jours ( 531-72), soit une somme de 8 128,89 euros.
La perte de revenus de Mme [G] est donc de :
- du 12 mars 2014 au 20 août 2015 :
648,87 x 12 mois = 7 786,44 euros : 52 semaines = 149,74 euros par semaine, soit pour 76 semaines : 11 380,24 euros.
Après imputation de la créance de la CPAM du Finistère, il reste dû à la victime une somme de 3 251,35 euros.
L'intimée ne réclame cependant qu'une somme de 2 706, 34 euros. Celle-ci sera accordée et la cour infirme le jugement qui fixe l'indemnisation de ce chef à la somme de 1 884,53 euros.
1.2 sur les préjudices patrimoniaux permanents après consolidation
les dépenses de santé futures
Mme [G] estime insuffisante l'indemnité de 590,31 euros accordée par le tribunal au titre de ses dépenses futures à engager (frais de déplacements) et ce, pour les bilans trimestriels à l'hôpital de [Localité 8]. Elle demande de porter cette somme à 655,66 euros.
La CPAM du Finistère fait état des débours après consolidation suivants:
- frais hospitaliers : 17 011,24 euros, puis à compter du 1er janvier 2022 :
73 415,32 euros,
- frais de transport : 7 022,67 euros
- frais médicaux : 734,21 euros
- frais pharmaceutiques : 15 945,41 euros, puis à compter du 1er janvier 2022 : frais viagers de pharmacie : 89 301,78 euros
- frais viagers d'appareillage à compter du 1er janvier 2022 : 1 892,98 euros,
soit un total de 205 323,61 euros.
S'agissant de la demande de frais restés à charge présentée par la victime, la différence de 65 euros écartée par le tribunal correspond selon Mme [G] à 15 allers-retours effectués par elle pour se rendre à l'hôpital entre le 2 août 2015 et le 1er janvier 2019. Force est de constater que la réalité de dépenses restées à sa charge n'est pas plus démontrée en appel qu'en première instance, alors que la CPAM comptabilise des frais de taxi durant cette même période. La cour confirme le jugement fixant à 590,31 euros les frais restés à charge de Mme [G].
Aucune discussion n'est opposée aux décomptes du tiers payeur, la MACSF indiquant accepter de prendre en charge le recours de la CPAM du Finistère à ce titre. Ces sommes seront donc allouées à l'organisme social.
l'assistance tierce personne permanente
Ce poste de préjudice fixé à 59 723,64 euros n'est pas discuté devant la cour.
les pertes de gains professionnels futurs
M. [H] et la MACSF demandent de fixer la perte annuelle de gains capitalisée à une somme de 27 375,26 euros, sur la base du barème de l'Oniam. Ils considèrent qu'aucune somme n'est due de ce chef à Mme [G], après imputation de la créance de la CPAM du Finistère.
L'intimée conclut à la confirmation du jugement qui lui alloue de ce chef une somme de 37 445,65 euros.
Ce préjudice résulte de la perte de l'emploi ou du changement de l'emploi. Il est évalué à partir des revenus antérieurs afin de déterminer la perte annuelle, le revenu de référence étant le revenu net annuel imposable avant l'accident.
Mme [G] a été maintenue en arrêt de travail après la consolidation et a été licenciée le 13 janvier 2016. L'expert a relevé que l'état de santé de celle-ci rendait peu probable la reprise d'une activité professionnelle salariée, même à temps partiel.
Sa perte de salaire, appréciée au plus près du jour où il est statué, est évaluée comme suit :
- pour les arrérages échus du 21 août 2015 au 21 décembre 2022 :
648,87 x 88 mois = 57 100,56 euros
- pour les arrérages à échoir à échoir à compter du 21 décembre 2022 :
648,87 x 12 x 9,832 correspondant à l'euro de rente jusqu'à 62 ans pour une femme de 52 ans à cette date, selon le barème de capitalisation de la gazette du palais 2020, lequel apparaît le plus approprié eu égard aux données démographiques, économiques et monétaires les plus récentes au vu de l'inflation en cours, soit 76 556,27 euros,
La perte de gains professionnels représente donc une somme totale de
133 656,83 euros.
La CPAM du Finistère fait part de la créance suivante:
- arrérages échus de la pension d'invalidité : 37 440,07 euros,
- capital représentatif à compter du 1er janvier 2022 : 67 936,94 euros.
Il convient d'ajouter les indemnités journalières servies durant la période postérieure à la consolidation soit 17,71 euros x 72 jours = 1 275,12 euros, ce qui représente un total de 106 652,13 euros
Après imputation des sommes servies par la CPAM, il reste dû à la victime une somme de 27 004,70 euros. Le jugement est infirmé de ce chef.
l'incidence professionnelle
Mme [G] soutient que la somme de 30 000 euros allouée par le tribunal est insuffisante et réclame une somme de 60 000 euros. Elle argue d'une impossibilité de reclassement au regard du fait qu'elle ne peut plus porter des charges lourdes, tenir une station débout prolongée ou travailler de nuit, qu'elle a un suivi médical contraignant, de sorte que toute projection professionnelle est impossible, alors qu'elle avait 44 ans au moment de l'accident.
M. [H] et la MACSF entendent pour leur part, voir fixer l'indemnisation de ce préjudice à une somme de 15 000 euros, considérant qu'une reconversion est possible. Selon eux, un tel poste de préjudice serait absorbé par un reliquat au titre de la créance de la caisse primaire d'assurance maladie portant sur les arrérages de la rente.
Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.
L'expert conclut :
La patiente a été mise en invalidité de niveau 2 en novembre 2015. Compte tenu de la nécessité de bilan, de la dyspnée d'effort et de la fatigabilité pour des efforts peu importants, l'état de santé de Mme [W] [G] rend peu probable la reprise d'une activité professionnelle salariée, même à temsp partiel.
Privée de toute perspective d'emploi à un âge encore jeune, et ne disposant d'aucune qualification, Mme [G] subit donc une incidence professionnelle. La cour confirme l'appréciation de l'indemnisation qui en découle opérée par les premiers juges, laquelle revient entièrement à la victime, la créance de la CPAM ayant déjà fait l'objet d'une entière imputation.
2.Sur les préjudices extra-patrimoniaux
2. 1 Sur les préjudices extra-patrimoniaux temporaires
le déficit fonctionnel temporaire
Mme [G] sollicite une indemnisation à hauteur de 8 459,10 euros en prenant pour base une indemnisation de 27 euros par jour, tandis que M. [H] et la MACSF demandent de ramener celle-ci à 6 975,90 euros, calculée sur une base de 23 euros par jour.
Il s'agit d'indemniser l'aspect non économique de l'incapacité temporaire, c'est-à-dire pendant la maladie traumatique de la victime. Ce poste de préjudice correspond aux périodes d'hospitalisation de la victime, à la perte de la qualité de vie et à celle des joies usuelles de la vie courante rencontrée par la victime.
Les parties ne discutent pas les périodes d'indemnisation au titre du déficit fonctionnel total et du déficit fonctionnel partiel.
La cour ne trouve pas matière à critique du jugement qui évalue l'indemnisation de ce préjudice sur une base journalière de 25 euros. Le jugement est donc confirmé s'agissant de la somme due à Mme [G], soit 7 907,50 euros.
les souffrances endurées
M. [H] et la MACSF sollicitent de la cour qu'elle ramène l'indemnisation de ce préjudice à une somme de 15 000 euros.
Il s'agit d'indemniser ici toutes les souffrances tant physiques que morales subies par la victime pendant la maladie traumatique et jusqu'à la consolidation.
L'expert a évalué ce préjudice à 5/7 et précise que Mme [G] a présenté un infarctus du myocarde compliqué d'une insuffisance cardiaque un trouble de rythme mal toléré ayant nécessité un choc électrique externe, plusieurs hospitalisations pour réalisation d'un bilan pré-greffe cardiaque, une transplantation cardiaque avec séjour en réanimation et rééducation, des hospitalisations pour bilan post-greffe avec réalisation de biopsies myocardiques. Il relève les souffrances psychologiques liées à l'attente d'un greffon, les souffrances psychologiques secondaires à la greffe, les intolérances et effets secondaires des traitements immunosuppresseurs.
La cour considère justifiée au regard des souffrances physiques et morales ainsi décrites, la somme allouée à ce titre par le tribunal de 30 000 euros.
le préjudice esthétique temporaire
Mme [G] critique le jugement qui rejette sa demande à ce titre. Elle sollicite une indemnisation de 3 000 euros, observant que sur ce point, l'expert a omis de retenir ce préjudice, alors qu'il est parfaitement caractérisé. Elle souligne que les lourdes hospitalisations subies ont entraîné une altération de la perception de ses proches, notamment lors de la pose d'un défibrillateur qui crée un sentiment d'amoindrissement et d'assistance, que les cicatrices relevées par l'expert résultent de l'opération de transplantation cardiaque et qu'elle a pris 10 kg postérieurement à ces opérations, en raison des traitements médicamenteux, ce qui a altéré son apparence physique.
M. [H] et la MACSF concluent à la confirmation du rejet de ses prétentions.
Ce poste vise à réparer le préjudice né de l'obligation de la victime de se présenter temporairement avant consolidation au regard des tiers dans une apparence physique altérée en raison de ses blessures.
L'expert à la question de savoir s'il existe un préjudice esthétique temporaire et/ou définitif a décrit les cicatrices présentées par Mme [G] et retenu l'existence d'un seul préjudice esthétique permanent, constitué par les cicatrices des interventions.
Il est constant que ces interventions sont bien antérieures à la consolidation, de sorte que les traces de celles-ci sur le corps de la victime étaient présentes avant le 21 août 2015. Le défibrillateur a été implanté le 26 juin 2014. Il est rappelé que la transplantation cardiaque date du 21 août 2014.
Au vu de ces éléments qui mettent en évidence une apparence physique altérée de la victime avant consolidation, la cour alloue une somme de 1 000 euros de ce chef. Le jugement est donc infirmé.
2. 2 Sur les préjudices extra-patrimoniaux permanents après consolidation
le déficit fonctionnel permanent
M. [H] et la MACSF demandent d'indemniser ce préjudice par une somme de 49 500 euros, estimant excessive la réparation accordée par le tribunal.
Ce poste tend à la réduction définitive du potentiel physique, psycho-sensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomo-physiologique, à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, normalement liées à l'atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte à la vie de tous les jours.
L'expert évalue le déficit fonctionnel permanent à 30 % ; compte tenu de l'âge de Mme [G] à la date de consolidation, en l'espèce 44 ans, la cour approuve la fixation de ce préjudice à la somme de 73 200 euros.
le préjudice esthétique permanent
M. [H] et la MACSF demandent de ramener la somme due de ce chef à 1 800 euros.
L'expert a conclu à un préjudice de 2/7, au regard des importantes cicatrices présentées par Mme [G]. La cour ne trouve pas matière à critique s'agissant de l'évaluation de l'indemnisation en découlant opérée par les premiers juges, soit 4 000 euros. Le jugement est confirmé sur ce point.
3. Sur le préjudice lié à la conscience d'une pathologie évolutive
M. [H] et la MACSF considèrent qu'un tel préjudice n'est pas caractérisé. Ils notent que l'angoisse d'une évolution défavorable ne constitue, au regard des conclusions de l'expert, qu'une hypothèse.
Mme [G] entend voir confirmer le jugement qui lui alloue une somme de 70 000 euros à ce titre, rappelant que dès le lendemain de sa transplantation cardiaque, elle a été exposée à un environnement anxiogène, tant au regard du risque important du rejet du greffon que de l'évolution à long terme. Elle fait valoir que la réduction de son espérance de vie est devenue une certitude, qu'à cela s'ajoute l'augmentation du risque de développement d'un cancer, de d'hypertension artérielle, d'insuffisance rénale, risques faisant désormais partie de son quotidien et constituant une épée de Damoclès permanente.
Le préjudice lié à des pathologies évolutives existe en dehors de toute consolidation des blessures, puisqu'il se présente pendant et après la maladie traumatique. Ce poste de préjudice exceptionnel peut concerner toutes les pathologies évolutives. Dans ces situations, la victime a conscience du risque d'apparition, à plus ou moins brève échéance, d'une pathologie mettant en jeu le caractère vital.
En l'espèce, la cour relève les observations de l'expert suivantes :
La surveillance au long cours a pour but de détecter :
- le rejet aigu par la réalisation d'échocardiographies et de biopsies myocardiques systématiques,
- l'artériosclérose du greffon cardiaque (ou rejet cardiaque) est le facteur pronostique principal à moyen terme après transplantation cardiaque. La prévalence de cette pathologie est d'environ 50% trois ans après la greffe et de 10% par an,
- les complications infectieuses,
- le complications néoplasiques : l'incidence des cancers chez le transplanté cardiaque est augmentée par rapport à la population générale. Leur prévalence est de 3% à 1 an et de 9% à 5 ans. Les lésions cutanées représentent 30 à 50% des cancers.
Par ailleurs l'hypertension artérielle du transplanté cardiaque est très fréquente (environ 70%), pouvant être responsable de complications cardio-vasculaires et pouvant participer à l'altération de la fonction rénale. L'insuffisance rénale est une complication fréquente chez les transplantés cardiaques, d'origine multifactorielle mais dominée par la néphrotoxicité des médicaments anti-rejet et de l'hypertension artérielle. L'hypercholestorolémie est très fréquente après transplantation cardiaque, le plus souvent associée à une hypertriglycéridémie.
En terme de survie, l'espérance de vie des patients greffés cardiaques est de 57 % à 5 ans.
Il est rappelé que l'expert a indiqué que Mme [G] présentait antérieurement au 12 mars 2014 une fonction myocardite normale.
Au vu de ces éléments, et notamment au regard des multiples et graves complications de la transplantation cardiaque subie, la cour fait sienne l'appréciation des premiers juges, qui d'une part reconnaît l'existence, en l'espèce, de ce préjudice spécifique et d'autre part, alloue à la victime en réparation une somme de 70 000 euros.
Pour résumer, la cour retient que la CPAM du Finistère est fondée à exercer son recours au titre des débours suivants :
- dépenses de santé actuelles : 97 413,15 euros
- perte de gains professionnels actuels : 8 128,89 euros
- dépenses de santé futures : 205 323,61
- perte de gains professionnels futurs : 106 652,13 euros,
soit pour une somme totale de 417 517,78 euros.
La cour confirme la condamnation d'ores et déjà prononcée de M. [H] à hauteur de 153 975,91 euros, condamne la société MACSF Assurances solidairement avec M. [H] au paiement de cette somme.
La cour, infirme le jugement qui a 'condamné M. [R] [H] à payer à la CPAM du Finistère, au fur et à mesure de leur engagement, les frais hospitaliers au-delà du 6 septembre 2018, médicaux au-delà du 2 avril 2019, frais pharmaceutiques au-delà du 30 avril 2019 et d'appareillage exposés et justifiés au regard de la pathologie de Mme [W] [G] inhérente à sa faute,' et y ajoutant, condamne M. [R] [H], solidairement avec la société MACSF Assurances à payer à la CPAM du Finistère, la somme de 263 542 euros (417 517,78 -153 975,78).
La cour confirme les dispositions du jugement relatives aux intérêts et à la capitalisation de ceux-ci.
Il est dû à Mme [W] [G] les sommes de :
- frais divers : 1 218,05 euros,
- tierce personne temporaire : 5 456 euros,
- perte de gains professionnels actuels : 2 706, 34 euros,
- frais divers futurs : 590,31 euros,
- tierce personne permanente : 59 723,64 euros,
- perte de gains professionnels futurs : 27 004,70 euros,
- incidence professionnelle : 30 000 euros
- déficit fonctionnel temporaire : 7 907,50 euros,
- souffrances endurées : 30 000 euros,
- préjudice esthétique temporaire : 1 000 euros,
- déficit fonctionnel permanent : 73 200 euros,
- préjudice esthétique permament : 4 000 euros,
- préjudice lié à une pathologie évolutive : 70 000 euros.
Soit un total de 312 806,54 euros.
La cour infirme en conséquence la condamnation prononcée s'agissant des pertes de gains professionnels actuels et des pertes de gains professionnels futurs ainsi que s'agissant du rejet de la demande d'indemnisation au titre du préjudice esthétique temporaire, condamne M. [R] [H] à payer à Mme [W] [G] une somme de 2 796,34 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels, une somme de 27 004,70 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs et celle de 1 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire.
La cour condamne en outre la société MACSF Assurances, solidairement avec le docteur [H] à payer à Mme [W] [G] les montants de l'ensemble des indemnisations accordées.
Le pourvoi en cassation n'ayant pas d'effet suspensif, il convient de débouter Mme [W] [G] de sa demande aux fins d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision.
- sur l'indemnité de gestion
La cour confirme le jugement sur ce point. Une condamnation solidaire de M. [H] et de la société MACSF Assurances d'une somme de 1 114 euros est prononcée au profit de la CPAM du Finistère, en application de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale, en cause d'appel.
- sur les frais irrépétibles et les dépens
Les dispositions du jugement sont confirmées.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
M. [H] et la société MACSF, qui succombent partiellement en leurs demandes, supporteront les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe :
Donne acte à la société MACSF Assurances de son intervention volontaire;
Confirme le jugement déféré sauf :
- en ce qu'il condamne M. [R] [H] à payer à Mme [W] [G] une somme de 1 884,53 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels,
- en ce qu'il condamne M. [R] [H] à payer à Mme [W] [G] une somme de 37 445,65 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs,
- en ce qu'il déboute Mme [W] [G] de sa demande d'indemnisation d'un préjudice esthétique temporaire,
- en ce qu'il condamne M. [R] [H] à payer à la CPAM du Finistère, au fur et à mesure de leur engagement, les frais hospitaliers au-delà du 6 septembre 2018, médicaux au-delà du 2 avril 2019, frais pharmaceutiques au-delà du 30 avril 2019 et d'appareillage exposés et justifiés au regard de la pathologie de Mme [W] [G] inhérente à sa faute ;
Statuant à nouveau sur les chefs de jugement infirmés,
Condamne M. [R] [H] à payer à Mme [W] [G] les sommes de :
- 1 884,53 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels,
- 27 004,70 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs,
- 1 000 euros au titre de son préjudice esthétique temporaire ;
Y ajoutant,
Condamne la société MACSF Assurances solidairement avec M. [R] [H] à payer à la CPAM du Finistère la somme de 153 975,91 euros, ainsi que la somme de 263 542 euros, outre intérêts légaux avec capitalisation de ceux-ci, dans les conditions de l'article 1154 devenu 1343-2 du code civil ;
Condamne solidairement M. [R] [H] et la socicété MACSF à payer à la CPAM du Finistère la somme de 1 114 euros par application de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale ;
Condamne la société MACSF Assurances solidairement avec M. [R] [H] à payer à Mme [W] [G] les sommes allouées par le tribunal et par la cour au titre de son préjudice ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne M. [R] [H] et la société MACSF Assurances aux d'appel, distraits au profit de la Selarl CVS, Me Benoît Bommelaert, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier La Présidente