5ème Chambre
ARRÊT N°-195
N° RG 20/01233 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QQAT
Société GRAND LIEU PLEIN AIR
C/
SCA COOPERL ARC ATLANTIQUE
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 31 MAI 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,
Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,
Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 22 Mars 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 31 Mai 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
Société GRAND LIEU PLEIN AIR
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Olivier MECHINAUD de la SCP MECHINAUD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
INTIMÉE :
SCA COOPERL ARC ATLANTIQUE
[Adresse 6]
[Adresse 6]
Représentée par Me Franck BARBIER de la SELARL FRANCK BARBIER AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
La société Grand Lieu Plein Air exerce une activité de productions d'oeufs sur la commune de [Localité 3] en [Localité 4].
Pour les besoins de cette activité, elle s'approvisionne de manière habituelle auprès de la société Cooperl Arc Atlantique en poules pondeuses, lesquelles sont ensuite placées dans différents élevages, dont le GAEC Charbepi situé à [Localité 2] en [Localité 5].
Dans ce cadre, la société Cooperl Arc Atlantique a vendu et livré le 18 août 2010 à la société Grand Lieu Plein Air des poulettes futures pondeuses. La facture du 8 octobre 2010 mentionne :
13500 poulettes futures pondeuses
Observations : Lot Loison enlèvement 18 août 2010 lot 1233 poulettes 125 jours, destination Gaec Charbepi.
Cette facture mentionne un prix de 48 210,86 euros TTC, payable en 10 mensualités, la première échéance étant fixée au 17 octobre 2010. Elle est restée impayée, de même qu'une somme correspondant à une cotisation versée pour le compte de la société Grand Lieu Plein Air au Comité national pour la promotion de l'oeuf pour des ventes de poules pondeuses réalisées les 19 juin et 10 décembre 2007.
La société Grand Lieu Plein Air n'ayant pas réglé ces sommes, et après mises en demeure de le faire en date des 28 janvier et 21 février 2013 restées infructueuses, la société Cooperl Arc Atlantique l'a assignée devant le tribunal de grande instance de Nantes par acte d'huissier en date du 11 octobre 2013.
Par jugement du 21 avril 2016, le tribunal a déclare irrecevable l'action de la société Cooperl Arc Atlantique en paiement de la somme au titre des cotisations versées au Comité national de promotion de l'oeuf, celle-ci étant prescrite, a sursis à statuer sur les autres demandes et a ordonné une expertise confiée à M. [U] [I] aux fins de dire si le lot de poules pondeuses livré était conforme à la qualité attendue ou était atteint d'un vice caché et de déterminer les éventuels préjudices résultant de ces défauts ou non conformités.
L'expert a déposé son rapport le 13 décembre 2017.
Par jugement en date du 19 septembre 2019, le tribunal de Nantes a :
- condamné la société Grand Lieu Plein Air à payer à la société Cooperl Arc
Atlantique la somme de 48 210,86 euros et dit que cette somme produira intérêts au triple du taux légal à compter du 17 juillet 2011,
- ordonné la capitalisation des intérêts dans les mêmes conditions à compter du 11 octobre 2013, dans les conditions fixées par l'article 1154 du code civil,
- condamné la société Grand Lieu Plein Air à payer à la société Cooperl Arc
Atlantique la somme de 4 821 euros à titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement contentieux,
- dit que les poules futures pondeuses livrées le 18 août 2010 par la société Cooperl Arc Atlantique à la société Grand Lieu Plein Air n'étaient pas conformes,
- débouté la société Grand Lieu Plein Air de sa demande tendant à la résolution du contrat de vente de 13 600 poules futures pondeuses en date du 18 août 2010,
- débouté la société Grand Lieu Plein Air de sa demande de dommages et intérêts,
- débouté la société Grand Lieu Plein Air Plein Air du surplus de ses demandes,
- débouté la société Cooperl Arc Atlantique et la SCEA Grand Lieu Plein Air de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens, qui comprendront les frais d'expertise, seront partagés par moitié entre la société Cooperl Arc Atlantique et la société Grand Lieu Plein Air, et qu'ils pourront être recouvrés par Maître Marc Bezy et Maître Stéphane Cottineau, avocats au barreau de Nantes, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de sa décision.
Le 20 février 2020, la SCEA Grand Lieu Plein Air a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 22 février 2023, elle demande à la cour de :
- confirmer le jugement du 19 septembre 2019 en ce qu'il a dit que les poules pondeuses futures livrées le 18 août 2010 par la société Cooperl Arc Atlantique à la SCEA Grand Lieu Plein Air n'étaient pas conformes,
- infirmer le jugement du 19 septembre 2019 pour le surplus,
À titre principal,
- prononcer la résolution du contrat de livraison d'un lot de poules futures pondeuses par la société Cooperl Arc Atlantique à la SCEA Grand Lieu Plein Air en date du 18 août 2010,
- débouter la société Cooperl Arc Atlantique de toutes ses demandes, fins et conclusions.
À titre subsidiaire, en cas de condamnation de la SCEA Grand Lieu Plein Air au paiement de la facture,
- condamner la société Cooperl Arc Atlantique à lui verser une somme de 69 634,73 euros en réparation du préjudice subi,
- ordonner la compensation entre les sommes ainsi fixées,
- ordonner la restitution à la SCEA Grand Lieu Plein Air des sommes trop versées, ce avec intérêts au taux légal à compter du paiement effectué au titre de l'exécution provisoire,
À titre infiniment subsidiaire, en cas de condamnation de la SCEA Grand Lieu Plein Air au paiement de la facture,
- voir retenir l'évaluation du rapport d'expertise et condamner la société Cooperl Arc Atlantique à lui verser une somme de 37 075,82 euros,
- ordonner la compensation entre les sommes ainsi fixées,
- ordonner la restitution à la SCEA Grand Lieu Plein Air des sommes trop versées, ce avec intérêts au taux légal à compter du paiement effectué au titre de l'exécution provisoire,
En toute hypothèse,
- condamner la société Cooperl Arc Atlantique à lui verser une somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Cooperl Arc Atlantique aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions notifiées le 21 février 2023, la société Cooperl Arc Atlantique demande à la cour de :
- débouter SCEA Grand Lieu Atlantique de son appel principal,
- la recevoir en son appel incident et le dire bien fondé,
- réformer le jugement déféré en ce qu'il a considéré recevables les prétentions reconventionnelles de la SCEA Grand Lieu Plein Air et dit que les poules futures pondeuses livrées le 18 août 2010 par la société Cooperl Arc Atlantique à la SCEA Grand Lieu Plein Air n'étaient pas conformes,
En conséquence, statuant à nouveau,
- déclarer les prétentions reconventionnelles de la SCEA Grand Lieu Plein Air irrecevables et en tous cas mal fondées,
- condamner la SCEA Grand Lieu Plein Air à lui payer une somme de
48 210,86 euros au titre de la mise en place de 13 500 poulettes futures pondeuses réalisée le 18 août 2010,
- dire que cette somme produira intérêts à un taux représentant trois fois le taux d'intérêt légal, et ce à compter du 17 juillet 2011,
- ordonner la capitalisation annuelle des intérêts échus et dire que les intérêts ainsi capitalisés produiront eux-mêmes intérêts au même taux que le principal, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,
- condamner la SCEA Grand Lieu Plein Air à lui payer une somme de 4 821 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement contentieux prévue par les conditions générales de vente applicables entre les parties,
- débouter la SCEA Grand Lieu Plein Air de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la SCEA Grand Lieu Plein Air à lui payer une somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SCEA Grand Lieu Plein Air aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui incluront le coût de l'expertise judiciaire.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
- sur la résolution du contrat de vente
La SCEA Grand Lieu Plein Air fonde sa demande sur une absence de délivrance d'une chose conforme en application de l'article 1604 du code civil et l'article 1184 du code civil, rappelant qu'elle était fondée à opposer une exception d'inexécution à son fournisseur. Elle soutient que le pourcentage de poules fermées était bien supérieur à celui retenu par le tribunal, et que les résultats très mauvais du lot sont en lien direct avec le défaut constaté sur les poules livrées.
En conséquence, elle considère que la société Cooperl ne peut réclamer le prix, et doit être déboutée de ses demandes en paiement. Elle fait valoir qu'elle ne peut être condamnée à restituer le lot, cette restitution étant impossible.
L a société Cooperl indique que l'action entreprise par la SCEA Grand Lieu Plein Air est nécessairement une action en garantie des vices cachés soumise au régime des articles 1641 à 1649 du code civil, et qu'il incombe au juge en application de l'article 12 du code de procédure civile, d'appliquer au litige les règles de droit qui lui sont applicables, le plaideur ne disposant pas du pouvoir discrétionnaire de choisir son fondement juridique. Elle fait valoir que la SCEA Grand Lieu Plein Air n'a pas engagé son action dans les deux ans de la connaissance du défaut mentionné par l'expert, de sorte qu'elle est forclose à invoquer un défaut caché, y compris par voie reconventionnelle ou par voie d'exception à l'effet de se soustraire à son obligation à paiement du prix des animaux vendus. Elle demande en conséquence de réformer le jugement en ce qu'il a considéré comme recevables les prétentions reconventionnelles de la SCEA Grand Lieu Plein Air.
Selon elle, l'appelante ne peut invoquer un manquement à l'obligation de délivrance, car les parties n'ont pas convenu à la commande de caractéristiques spécifiques qui différeraient de la destination ou de l'usage normal du bien vendu donnant lieu à l'application de la garantie des vices cachés ; de plus, selon elle, les griefs invoqués se rapportent non à la livraison de volailles impropres à la production d'oeufs de consommation, mais à un retard d'entrée de ponte de certains sujets qui n'auraient pas permis d'atteindre la productivité attendue, et aucun engagement de performance ou de production n'a été pris.
Au surplus, elle fait valoir que seul serait susceptible de donner lieu à garantie un défaut dont l'origine est antérieure à la vente et ayant de rendre les animaux vendus dans leur ensemble ou du moins pour une partie essentielle d'entre eux, impropres à l'usage de production d'oeufs de consommation auquel ils étaient destinés, et que tel n'est pas le cas en l'espèce, le défaut allégué n'ayant été constaté que sur un nombre restreint d'animaux et en tous cas sur un nombre insuffisant pour que soit prononcée une résolution de vente.
Suite à l'assignation par la société Cooperl Arc Atlantique en paiement de sa facture en date du 11 octobre 2013, la SCEA Grand Lieu Plein Air a reconventionnellement, par conclusions du 29 mai 2015, sollicité devant le tribunal la résolution judiciaire de la vente, en raison d'un défaut du lot des poules vendues (cf jugement du 21 avril 2016). Elle a, après expertise judiciaire, par conclusions du 3 septembre 2018 sollicité la résolution judiciaire de la vente des 13 600 poules en raison d'une délivrance non conforme.
L'article L 213-1 du code rural et de la pêche maritime dans sa version applicable à la cause prévoit que l'action en garantie, dans les ventes ou échanges d'animaux domestiques est régie, à défaut de conventions contraires, par les dispositions de la présente section, sans préjudice ni de l'application des articles L 211-1 à L211-6, L211-8 à L211-15, L211-17 et L211-18 du code de la consommation ni des dommages et intérêts qui peuvent être dus, s'il y a dol.
L'article L 213-2 du code rural et de la pêche maritime dans sa version applicable à la cause dispose que sont réputés vices rédhibitoires et donnent ouverture aux actions résultant des articles 1641 à 1649 du code civil, sans distinction des localités où les ventes et échanges ont lieu, les maladies ou défauts définis dans les conditions prévues à l'article L 213-4.
Ainsi, s'il est constant que les ventes de volailles d'élevage relèvent du régime particulier de garantie des vices cachés, cette règle est posée à défaut de conventions contraires.
En l'espèce, les parties ont prévu des conditions générales de vente (reproduites au verso de la facture), prévoyant notamment que toute contestation d'une facture devra être formulée, à peine de forclusion, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au plus tard
8 jours après son envoi, que les réserves faites dans les formes et délais peuvent être chiffrées et seul le montant correspondant pourra être déduit du règlement de la facture.
Si, parmi les principes directeurs du procès, l'article 12 du nouveau code de procédure civile oblige le juge à donner ou à restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions, il ne lui fait pas obligation, sauf règles particulières, de changer la dénomination ou le fondement juridique de leurs demandes.
( Cass Ass. Plenière 21 décembre 2007 pourvoi n° 06.11.343).
Dès lors, il convient comme les premiers juges, de relever que la SCEA Grand Lieu Plein Air ne fonde pas sa demande sur les dispositions de l'article 1641 du code civil, mais sur la délivrance d'une chose non conforme, ce qu'elle justifie pouvoir entreprendre, compte tenu de ce qui précède en raison de la convention liant les parties et que son action, qui n'a pas, au contraire de l'action en garantie des vices cachés à être engagée dans un délai raisonnable, est recevable.
La non conformité de la délivrance de la chose vendue nécessite de vérifier si celle-ci présentait ou non les caractéristiques spécifiées à la convention des parties.
La facture mentionne que l'objet de la transaction porte sur un lot de poulettes futures pondeuses. Cette qualité entre donc bien dans le champ contractuel.
La SCEA Grand Lieu Plein Air soutient que la vente porte sur des lignées spécifiques, en l'espèce, la lignée '[P]' répondant à un cahier des charges précis, notamment s'agissant des objectifs de productivité de ponte des volailles.
La société Cooperl ne peut contester avoir pris un quelconque engagement contractuel de performance ou de production, quand bien même la facture ne le précise pas, alors que :
- son conseil dans un dire à l'expert (cf page 27 du rapport ) écrit : 'le choix de la génétique incombait à la SCEA Grand Lieu Plein Air qui, pour le lot en cause, avait demandé la fourniture de poules pondeuses de souche [T] Brown-Classic',
- l'appelante produit le 'Management Guide Pondeuses' de [T] [R], lequel énonce que :
' L'évolution constante de la concurrence mondiale en aviculture exige aujourd'hui des produits hautement performants pour satisfaire aux besoins des marchés spécialisés. En effet, grâce à l'évolution de sa génétique moderne, La [P] offre une grande diversité de lignées pondeuses sélectionnées en Allemagne aux fins de répondre à ces exigences. Les principales lignées sont :
[T] [E] : poules à plumage blanc (oeufs à coquille blanche) [T] Brown-Classic: poule à plumage roux (oeufs à coquille rousse), Très bien connue pour ses performances de production ainsi que pour la qualité de ses oeufs....'.
Dès lors, et quand bien même n'est pas stipulé au contrat un engagement de production en terme de durée ou de volume, l'exigence de performance de production des poules vendues doit être considérée comme comprise dans le contrat.
L'expert M. [I] a mis en évidence un stress affectant le lot durant sa 28ème semaine, en ce que plusieurs animaux ont été retrouvés morts étouffés et d'autres sont tombés sur le caillebotis, l'intrusion d'un animal dans le bâtiment d'élevage étant suspectée par l'éleveur et le vétérinaire.
Il a donc étudié la production d'oeufs avant cet incident et donc de la semaine 19 à 27 incluse. Il conclut que pour le lot litigieux, il a été constatée une baisse significative de la production d'oeufs de 12,01% et qu'ainsi le lot litigieux de poulettes futures pondeuses ne semblait pas répondre à la qualité attendue.
Page 10 et 12 de son rapport, il commente les graphiques de pourcentage de ponte, en relevant un accroissement particulièrement lent de la production d'oeufs avant la 28ème semaine, avec une chute de ponte lors de la 25ème semaine, et ce par comparaison avec les courbes de ponte des années référentes. La société Cooperl Arc Atlantique ne peut donc considérer que jusqu'à la semaine 28, la progression de production d'oeufs était normale et satisfaisante et que l'intervention en 23ème semaine du vétérinaire a impacté les résultats de ponte du lot, ce qui ne ressort d'aucune constatation de l'expert.
L'expert affirme donc que les mauvaises performances sont notables dès le début de lot avec un retard significatif des performances de production. Il précise qu'il n'était pas possible toutefois d'attribuer à une mauvaise qualité du lot, le fort taux de mortalité et la perte de poids.
Il retient que la perte en nombre d'oeufs pondus et le nombre d'oeufs déclassés peuvent être attribués à la mauvaise qualité du lot, étant en lien avec le diagnostic posé par le docteur [W], vétérinaire concernant la présence dans le lot de poules fermées (individus ayant un non développement de l'appareil génital entraînant un retard de production), représentant 15 à 20% du lot vendu.
La cour confirme l'analyse des premiers juges selon laquelle le défaut de performance du lot non conforme, lié à la présence de poules fermées en nombre, à l'origine d'une production inférieure à celle que la SCEA Grand Lieu Plein Air pouvait légitimement attendre, caractérise un défaut de conformité de la chose vendue au sens de l'article 1604 du code civil.
Aux termes de l'article 1184 du code civil dans sa rédaction applicable au litige:
La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.
La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.
La résiliation du contrat peut être prononcée en cas de non conformité grave.
L'expert note que le pourcentage de ponte laisse apparaître dès le début de lot un pourcentage moindre que les lots de référence qui se situent toujours au-dessus de la norme. Ce différentiel laisse apparaître un delta de 12,01 %, qui est à rapprocher de l'effectif moyen réel du lot dans la mesure où le taux de mortalité observé ne peut être lié de façon certaine à la qualité initiale du lot.
Il ne suffit pas pour la SCEA Grand Lieu Plein Air d'affirmer que son équilibre financier aurait été compromis par la perte de production d'oeufs résultant de la baisse du nombre d'oeufs pondus et d'oeufs déclassés, sans produire de pièces comptables (bilans et comptes d'exploitation), pour prétendre à une gravité de la non-conformité du lot, justifiant la résolution du contrat de vente.
La cour considère que le différentiel dans le pourcentage de ponte et le nombre estimé par le vétérinaire de poules fermées, ne constituent pas des éléments suffisants pour justifier une résolution du contrat ; elle confirme le rejet de la demande de résolution du contrat.
- sur les demandes en paiement formées par la société Cooperl Arc Atlantique
L'appelante admet ne pas avoir payé la facture afférente à la vente litigieuse.
En application des dispositions contractuelles et légales applicables, en l'absence de toute discussion, la cour confirme le jugement en ce qu'il condamne la SCEA Grand Lieu Plein Air au paiement de la somme de
48 210,86 euros, outre intérêts au triple du taux légal à compter du 17 juillet 2011, avec capitalisation des intérêts et celle de 4 821 euros à titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement de contentieux.
- sur la demande de dommages et intérêts formée par la SCEA Grand Lieu Plein Air
L'appelante entend obtenir une compensation entre les sommes dues par elle contractuellement et des dommages et intérêts qu'elle évalue à 69 634,73 euros, représentant selon elle, le préjudice économique subi en raison de la non conformité de la chose vendue. Elle sollicite la condamnation de la société Cooperl Arc Atlantique au paiement de cette somme.
À titre subsidiaire, elle demande de retenir la perte évaluée par l'expert à
37 075,82 euros.
La société Cooperl Arc Atlantique s'oppose à cette demande et estime que le préjudice invoqué est imputable à la mortalité élevée constatée pour le lot en litige, dont il est admis par l'expert qu'elle est peut être imputée à un défaut des animaux livrés.
L'expert rappelle que le nombre d'oeufs produits sur le lot litigieux a été de 3 290 496. Dans la mesure où il retient un différentiel de ponte de 12,01 % en début de lot, et dès lors imputable à la non conformité, la production attendue aurait été de 3 739 625 sans celle-ci.
Il s'ensuit comme justement calculé un manque à gagner de 449 129 oeufs, soit en prenant comme base un poids de 0,06561 grammes par oeuf et un prix au kilo de 1,2582 euros, un préjudice de 37 075,82 euros.
La cour estime en conséquence justifiée la demande de dommages et intérêts formulée à ce titre à hauteur de ce montant ; par infirmation du jugement sur ce point, la société Cooperl est condamnée au paiement de cette somme.
La compensation des créances réciproques est ordonnée.
Le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement et les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution. Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande en restitution des sommes trop versées au titre de l'exécution provisoire formée par la SCEA Grand Lieu Plein Air.
- sur les autres demandes
La cour confirme les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, fait masse des dépens d'appel qui seront partagés entre les parties.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe :
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il déboute la SCEA Grand Lieu Plein Air de sa demande de dommages et intérêts ;
Statuant à nouveau sur le chef de jugement infirmé,
Condamne la société Cooperl Arc Atlantique à payer à la SCEA Grand Lieu Plein Air la somme de 37 075,82 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la non conformité du lot ;
Y ajoutant,
Ordonne la compensation des créances réciproques ;
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes trop versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour ;
Déboute les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Fait masse des dépens d'appel et dit qu'ils seront partagés entre les parties.
Le Greffier La Présidente