5ème Chambre
ARRÊT N°-199
N° RG 20/01579 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QRHW
M. [B] [Y]
C/
Mme [S] [N] épouse [J]
S.A. ALLIANZ IARD
Organisme CPAM DU FINISTERE
FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES D OMMAGES (FGAO)
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 31 MAI 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 22 Mars 2023
devant Madame Virginie PARENT et Madame Virginie HAUET, magistrats rapporteurs, tenant seules l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui ont rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 31 Mai 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur [B] [Y]
né le [Date naissance 1] 1994 à[Localité 15])
[Adresse 6]
[Localité 13]
Représenté par Me Pierre GUILLON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT
INTIMÉES :
Madame [S] [N] épouse [J]
née le [Date naissance 4] 1977 à [Localité 12]
[Adresse 9]
[Localité 7]
Représentée par Me Jean-Michel YVON de la SELARL JEAN MICHEL YVON AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT
S.A. ALLIANZ IARD
[Adresse 2]
[Localité 10]
Représentée par Me Jean-Michel YVON de la SELARL JEAN MICHEL YVON AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT
Organisme CPAM DU FINISTERE ayant fait l'objet des significations prévues par les articles 902 et 911 du code de procédure civile par remise de l'acte à personne habilitée à le recevoir, n'ayant pas constitué avocat
[Adresse 3]
[Localité 5]
Organisme FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE D OMMAGES (FGAO) pris en la personne de son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité
[Adresse 8]
[Localité 11]
Représentée par Me Pascal ROBIN de la SELARL A.R.C, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
Le 19 septembre 2015, la motocyclette conduite par M. [B] [Y] est entrée en collision avec le véhicule automobile conduit par Mme [S] [N] épouse [J] au lieu-dit [Adresse 14] à [Localité 13], au niveau d'une intersection.
Le véhicule conduit par M. [B] [Y] n'était pas assuré. Mme [S] [J] était, quant à elle, assurée auprès de la société Allianz.
La procédure pénale a fait l'objet d'un classement sans suite le 3 mars 2016 par le parquet de Lorient.
M. [B] [Y] a été examiné par un médecin qui a fixé une incapacité totale de travail de 120 jours en raison d'une fracture du fémur droit, d'une plaie au genou droit, d'une contusion pulmonaire gauche et d'un léger pneumothorax gauche.
Le Fonds de garantie a conclu une transaction avec Mme [S] [J] en date du 6 juin 2017, puis une deuxième transaction en date du 18 décembre 2017 annulant et remplaçant la première.
Par actes d'huissier des 30 novembre, 4 et 6 décembre 2017, M. [B] [Y] a fait assigner Mme [S] [J] et son assureur la société Allianz, le Fonds de garantie des assurances obligatoires ainsi que la CPAM du Finistère devant le tribunal judiciaire de Lorient.
Par jugement du 15 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Lorient a :
- débouté M. [B] [Y] de l'ensemble de ses demandes,
- condamné M. [B] [Y] à verser à Mme [S] [J] et la société Allianz la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [B] [Y] à verser au Fonds de garantie des assurances
obligatoires la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- déclaré le jugement commun à la CPAM du Finistère,
- condamné M. [B] [Y] aux dépens, qui seront distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Le 5 mars 2020, M. [B] [Y] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 17 janvier 2023, il demande à la cour de :
- le dire et juger bien fondé et recevable dans ses demandes,
- réformer le jugement du tribunal judiciaire de Lorient du 15 janvier 2020,
A titre principal :
- dire et juger que les dommages qu'il a subis lors de l'accident de la circulation du 19 septembre 2015 sont exclusivement imputables à Mme [S] [J],
- dire et juger que Mme [S] [J] a commis une faute engageant sa responsabilité,
- condamner la société Allianz à lui régler le montant de son préjudice matériel soit la somme de 7 566,40 euros,
- constater qu'il est créancier du droit à indemnisation conformément aux dispositions de la loi du 5 juillet 1985 à l'encontre de la société Allianz,
A titre subsidiaire,
- constater qu'il est créancier du droit à indemnisation conformément aux dispositions de la loi du 5 juillet 1985 à l'encontre de la société Allianz,
- dire et juger qu'il a commis une faute de nature à réduire son droit à indemnisation,
- dire et juger que le droit à indemnisation ne pourra être inférieur à 50% au regard des circonstances de l'espèce et de la faute imputable à ce dernier sans lien avec l'accident,
En tout état de cause,
- ordonner une expertise médicale,
- commettre pour y procéder un expert inscrit sur la liste de la cour d'appel de Rennes, avec la mission suivante :
* convoquer M. [B] [Y] après l'en avoir averti par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, et en informant les parties de la possibilité de se faire assister par un médecin de son choix ; informer dans les mêmes formes 1'avocat de l'intéressé, et toutes parties et leurs avocats de la date et du lieu de ses opérations, en les informant de la possibilité de se faire représenter par un médecin de leur choix,
* se faire communiquer par la victime, tous documents médicaux relatifs à 1'accident de la circulation survenu le 19 septembre 2015 (certificat médical initial, certificats de prolongation et de consolidation, autres certificats, radiographies, compte-rendu d'examens et d'opération, dossier médical...).
* fournir le maximum de renseignements sur l'identité de la victime et sa situation : ses conditions d'activités professionnelles, son statut et/ou sa formation s'il s'agit d'un demandeur d'emploi,
* à partir des déclarations et doléances de la victime, des documents médicaux fournis, et des constatations faites lors d'un examen clinique circonstancié, après avoir déterminé les éléments en lien avec l'événement dommageable :
° décrire en détail l'état antérieur de la victime (anomalies, maladies, séquelles d'accidents antérieurs) en soulignant les antécédents pouvant avoir un effet sur les lésions et les séquelles,
° décrire en détail les lésions initiales, les modalités de traitement et leur évolution,
° dire si chacune des lésions constatées est la conséquence de l'événement et/ou de l'état antérieur ou postérieur,
* dire ce que cet expert pourra s'adjoindre de tout sapiteur psychiatre
1 - Préjudices avant consolidation,
* préjudices patrimoniaux,
° pertes de gains professionnels actuels : déterminer la durée de l'incapacité provisoire de travail, correspondant au délai normal d'arrêt ou de ralentissement d'activités ; dans le cas d'un déficit partiel, en préciser le taux,
° frais divers : dire si du fait de son incapacité provisoire, la victime directe a été amenée à exposer des frais destinés à compenser des activités non professionnelles particulières durant sa maladie traumatique (notamment garde d'enfants, soins ménagers, frais d'adaptation temporaire d'un véhicule ou d'un logement, assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante - dans ce dernier cas, la décrire, et émettre un avis motivé sur sa nécessité et ses modalités, ainsi que sur les conditions de la reprise d'autonomie)
* préjudices extra patrimoniaux temporaires,
° déficit fonctionnel temporaire : décrire et évaluer l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant sa maladie traumatique (troubles dans les actes de la vie courante)
° souffrances endurées avant consolidation : décrire les souffrances endurées avant consolidation, tant physiques que morales, en indiquant les conditions de leur apparition et leur importance ; les évaluer sur une échelle de sept degrés,
° préjudice esthétique temporaire : donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance, sur une échelle de sept degrés, d'un éventuel préjudice esthétique temporaire,
2 - Consolidation
* proposer une date de consolidation des blessures, qui est le moment où les lésions se fixent et prennent un caractère permanent tel qu'un traitement n'est plus nécessaire,
* dire si l'état de la victime est susceptible de modifications en aggravation ou amélioration ; dans l'affirmative, fournir au Tribunal toutes précisions utiles sur cette évolution, son degré de probabilité, et, dans le cas où un nouvel examen lui apparaîtrait nécessaire, indiquer le délai dans lequel il devra y être procédé,
3 - Préjudices après consolidation
* préjudices patrimoniaux permanents
° dépenses de santé futures : décrire les frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, même occasionnels, mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l'état pathologique. De la victime après la consolidation
° frais de logement et de véhicule adapté : décrire et chiffrer les aménagements rendus nécessaires pour adapter le logement et/ou le véhicule de la victime à son handicap,
° assistance par une tierce personne : Se prononcer sur la nécessité d'une assistance par tierce personne ; dans l'affirmative, préciser le nombre nécessaire d'heures par jour ou par semaine, et la nature de l'aide spécialisée ou non, décrire les attributions précises de la tierce personne : aide dans les gestes de la vie quotidienne, accompagnement dans les déplacements, aide à l'extérieur dans la vie civile, administrative et relationnelle etc.' ; donner toutes précisions utiles,
° perte de gains professionnels futurs : décrire les éléments permettant de dire si la victime subit une perte ou une diminution consécutive à l'incapacité permanente à laquelle elle est confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du dommage (notamment perte d'emploi, temps partiel, changement de poste ou poste adapté)
° incidence professionnelle : décrire l'incidence périphérique du dommage touchant à la sphère professionnelle (notamment dévalorisation sur le marché du travail, augmentation de la pénibilité de l'emp1oi, frais de reclassement, perte ou diminution de droits à la retraite)
° préjudice scolaire, universitaire ou de formation : dire si du fait de l'événement, la victime a subi un retard dans son parcours scolaire, universitaire ou de formation, et/ou a dû modifier son orientation, ou renoncer à une formation, .
* préjudices extra patrimoniaux
° déficit fonctionnel permanent : Donner un avis sur le taux de déficit fonctionnel permanent imputable à l'événement, résultant de 1'atteinte permanente d'une ou plusieurs fonctions persistant au moment de la consolidation, ce taux prenant en compte non seulement les atteintes physiologiques, mais aussi les douleurs physiques et morales permanentes
ressenties ;
' préciser le barème d'invalidité utilisé,
' dans le cas d'un état antérieur, préciser les incidences de l'événement sur celui-ci, et chiffrer les effets d'une telle situation ;
' en toute hypothèse, donner un avis sur le taux du déficit fonctionnel actuel, tous éléments confondus (état antérieur inclus) ;
° préjudice d'agrément : Si la victime allègue l'impossibilité définitive de se livrer à des activités spécifiques de sport ou de loisirs, correspondant à un préjudice d'agrément, donner un avis médical sur cette impossibilité ou cette limitation,
° préjudice esthétique permanent : donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique permanent, l'évaluer sur une échelle de sept degrés,
° préjudice sexuel : dire s'il existe un préjudice sexuel, le décrire en précisant s'il recouvre l'un ou plusieurs des trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : la libido, l'acte sexuel proprement dit (impuissance ou frigidité), et la fertilité (fonction de reproduction),
° préjudice d'établissement : dire si la victime présente un préjudice d'établissement (perte de chance de réaliser un projet de vie familiale normale en raison de la gravité du handicap permanent) et le quantifier en indiquant des données circonstanciées,
* procéder de manière générale à toutes constatations ou conclusions utiles à la solution du litige,
* l'expert accomplira sa mission sous le contrôle du magistrat chargé du suivi des expertises, conformément aux dispositions des articles 155 à 174, 232 à 248, 263 à 284 du code de procédure civile,
* l'expert pourra recueillir les déclarations de toutes personnes informées, sauf à ce que soient précisés leur nom, prénom et domicile, ainsi que leurs liens de parenté, d'alliance, de subordination, ou de communauté d'intérêts avec l'une ou l'autre des parties,
* l'expert devra prendre en considération les observations des parties ou de leurs conseils, et dire la suite qui leur a été donnée,
* l'expert pourra s'adjoindre tout spécialiste de son choix, dans une spécialité distincte de la sienne, à charge d'en informer préalablement le magistrat chargé du contrôle de l'expertise,
* l'expert établira un pré-rapport qu'il adressera aux parties en leur impartissant délai pour formuler leurs observations ou réclamations,
* l'expert désigné déposera son rapport écrit au greffe de ce tribunal dans le délai de six mois suivant sa saisine, et en adressera copie aux parties ou à leurs représentants,
* en cas d'empêchement de l'expert désigné, il sera procédé à son remplacement par ordonnance à la requête de la partie la plus diligente, ou d'office,
- dire que les frais d'expertise seront avancés par la société Allianz,
- débouter tout contestant,
- condamner la société Allianz à lui payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 31 mai 2021, la société Allianz et Mme [S] [J] demandent à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,
- condamner M. [B] [Y] à leur verser une indemnité de 1 500 euros au titre des frais d'appel non compris dans les dépens,
- le condamner aux dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 24 juillet 2020, le Fonds de Garantie des assurances obligatoires de dommages demande à la cour de :
- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Lorient du 21 janvier 2020,
- dire et juger que M. [B] [Y] est irrecevable en toute contestation des transactions conclues entre le Fonds de Garantie et Mme [S] [J] pour l'indemnisation de ses préjudices consécutifs à l'accident du 19 septembre 2015 dans lequel la motocyclette de M. [B] [Y], non assuré, s'est trouvé impliquée,
- dire et juger que son droit à indemnisation doit être réduit à néant à raison de sa faute liée au défaut de maîtrise de sa motocyclette qui est venue percuter le véhicule de Mme [S] [J],
- en conséquence, débouter M. [B] [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner M. [B] [Y] à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [B] [Y] aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL ARC conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- dire et juger l'arrêt à intervenir opposable au Fonds de Garantie des assurances obligatoires de dommages.
La CPAM n'a pas constitué avocat dans le délai prescrit. La déclaration d'appel ainsi que les conclusions d'appelant ont été signifiées à une personne habilitée le 4 juin 2020.
Par ordonnance du 1er octobre 2020, le magistrat de la mise en état de la cour d'appel de Rennes a :
- déclaré irrecevable les conclusions d'incident n°2 notifiées à M. [Y] le 15 septembre 2020 et la pièce n'°42 produite le même jour en ce qui concerne les débats devant le juge de la mise en état,
- débouté M. [Y] de sa demande d'expertise,
- dit que les dépens suivront ceux de l'instance au fond.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il est rappelé qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de 'constater', 'donner acte', 'dire et juger' qui ne constituent pas des prétentions susceptibles d'entraîner des conséquences juridiques au sens de l'article 4 du code de procédure civile, mais uniquement la reprise de moyens développés dans le corps des conclusions qui ne doivent pas, à ce titre, figurer dans le dispositif des écritures des parties.
M. [Y] fait valoir, à titre principal, qu'il n'a commis aucune faute susceptible d'exclure son droit à indemnisation. Il rappelle qu'il n'était pas sous l'influence de l'alcool ou de stupéfiants lors de l'accident. Il conteste avoir roulé à une vitesse excessive en arguant que les impressions du témoin M. [F] ne sont corroborées par aucun élément de l'enquête et que le modèle de moto qu'il pilotait génère un bruit important qui peut donner une fausse impression de vitesse aux personnes se trouvant à proximité. Il ajoute que la seule faute qui peut lui être reprochée est le défaut d'assurance mais qui est sans lien de causalité avec la survenance de l'accident.
M. [Y], se fondant sur le rapport de la société Forensic Consulting qu'il a mandaté, soutient que Mme [N] est entièrement responsable de l'accident en ce qu'elle s'est engagée sur la route principale sans observer suffisamment son environnement et sans marquer le temps d'arrêt au cédez-le-passage alors qu'il circulait sur la route principale et qu'elle l'a ainsi percuté alors qu'il circulait sur sa voie de circulation.
A titre subsidiaire, si sa faute devait être retenue s'agissant de la vitesse excessive, il sollicite que son indemnisation ne soit pas inférieure à la moitié de celle à laquelle il aurait pu prétendre au motif que sa faute n'est pas la cause exclusive de l'accident.
En réponse, Mme [N] et la société Allianz font valoir que M. [Y] a commis un excès de vitesse doublé d'un défaut de maîtrise, ou à tout le moins une vitesse inadaptée aux abords d'une intersection limitée à 70km/h, et d'une perte de contrôle de sa moto de nature à exclure son droit à indemnisation au sens de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985. Ils rappellent que la faute du conducteur victime n'a pas à être la cause exclusive de l'accident.
S'agissant du rapport de la société Forensic Consulting qui conclut à la responsabilité de l'accident de Mme [N], ils relèvent que le rédacteur du rapport a retenu des postulats erronés quant à la vitesse de M. [Y] en retenant une vitesse de 70km/h et quant au fait que M. [Y] chevauchait sa moto au moment du choc et ce en contradiction avec les conclusions des gendarmes.
Le Fonds de garantie sollicite la confirmation du jugement entrepris sauf à préciser que l'arrêt à intervenir sera déclaré opposable au Fonds. Il constate qu'en cause d'appel, M. [Y] ne remet plus en cause la transaction conclue avec Mme [N].
L'article 4 de la loi n 85-677 du 5 juillet 1985 dispose que « la faute commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis ».
Il est de jurisprudence constante que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice. Il appartient au juge d'apprécier si cette faute a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure. La faute de la victime ayant contribué à la réalisation de son préjudice doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur du véhicule impliqué dans l'accident. Seules les éventuelles erreurs et violations du code de la route qui peuvent être reprochées à l'appelant doivent être examinées. Les juges du fond n'ont pas à rechercher, pour exclure son droit à indemnisation, si la faute du conducteur victime est la cause exclusive de l'accident mais doivent seulement examiner si cette faute a contribué à la réalisation de son préjudice et apprécier sa gravité afin de réduire ou exclure son droit à indemnisation.
Il résulte du procès-verbal de constatations dressé par les militaires de la brigade de [Localité 16] que Mme [N] se trouve au cédez-le-passage pour tourner vers [Localité 13] sans avoir franchi la signalisation lorsqu'elle est percutée à l'avant gauche par un motard. Les gendarmes ont noté que le véhicule de Mme [N] est immobilisé au niveau de la signalisation 'cédez-le-passage' et se trouve en position normale par rapport aux règles circulation et que le point de choc se situe à l'angle droit du pare-choc avant du véhicule, le pare-choc étant totalement détruit.
Il est constant que M. [Y] n'était pas assuré pour la moto mais cette faute est sans incidence sur la survenue de l'accident.
Par ailleurs, le droit à indemnisation de M. [Y] ne devant pas être apprécié en considération du comportement de Mme [N], le rapport de la société Forensic Consulting produit par l'appelant qui conclut à la seule responsabilité de Mme [N] dans la survenance de l'accident est inopérant en l'espèce.
Les gendarmes ont relevé que la fourche avant de la moto pilotée par M. [Y] est positionnée du côté du véhicule de Mme [N], que des traces de ripage de pneus dans le sens de marche de la moto sont présentes sur une partie des lignes blanches extérieures du zébra séparatif de voies ainsi que sur le revêtement de la route. Les gendarmes considèrent que ces traces correspondent à la trajectoire prise par la moto lors de la chute. Ils constatent également des traces de choc sur le revêtement de la chaussée matérialisant le choc des cales pieds et ils en déduisent que la moto a du se coucher sur le côté avant de percuter le véhicule de Mme [N].
Un témoin de l'accident, M. [F], qui circulait derrière la moto sur la même voie, a déclaré que la moto roulait à vive allure à plus de 100km/h, que le véhicule, qui s'était arrêté au cédez-le-passage, avait entièrement dépassé le cédez-le-passage lorsque la moto est arrivée et l'a percuté puis que le véhicule avait reculé en se plaçant derrière la signalisation.
Il est constant que Mme [N] a marqué un arrêt au cédez-le-passage au niveau de l'intersection et qu'elle n'a pas vu la moto arriver. Les déclarations du témoin selon lesquelles le véhicule se serait engagé sur la voie après avoir marqué un temps d'arrêt puis a reculé après l'accident sont contredites par les constatations des enquêteurs qui ont relevé que le véhicule se trouvait derrière le cédez-le-passage et qui ont décrit l'état du véhicule qui avait les airbags sortis, le pare-choc complètement détruit et le bloc moteur abîmé, ce qui ne lui aurait pas permis de reculer après le choc.
Si la vitesse de la moto n'a pas été établie, il n'en demeure pas moins que sa vitesse peut être caractérisée comme excessive puisque la conductrice du véhicule ne l'a pas vu arriver et ce alors que les conditions atmosphériques étaient normales au vu du procès-verbal de constatations des gendarmes et qu'elle indique avoir regardé à trois reprises de chaque côté de la chaussée lorsqu'elle était arrêtée au cédez-le-passage. Cette vitesse excessive était inadaptée à la configuration des lieux s'agissant d'une intersection limitée à 70 km/h, que les parties s'accordent pour décrire comme particulièrement dangereuse et a été à l'origine de la perte de contrôle de la moto qui s'est couchée avant de percuter le véhicule de Mme [N] au vu des traces de ripage et surtout de la trace des cales pieds sur la chaussée qui ont été relevées dans la voie de circulation de la moto.
Cette vitesse excessive et ce défaut de maîtrise de M. [Y], s'agissant de fautes particulièrement graves, ont contribué à la réalisation du dommage de sorte que les fautes commises par ce dernier sont de nature à exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis. Le jugement, qui a exclu le droit à indemnisation de M. [B] [Y] en raison de la gravité des fautes commises et l'a débouté de toutes ses demandes sera confirmé. Il sera également débouté de sa demande d'expertise.
Il sera fait droit à la demande du Fonds de garantie de lui voir déclarer opposable l'arrêt à intervenir.
- Sur les frais irrépétibles et les dépens
Succombant en son appel, M. [Y] sera condamné à verser la somme de 1 500 euros à Mme [N] et à la société Allianz ainsi que la somme de 1 500 euros au Fonds de garantie au titre des frais irrépétibles en cause d'appel. M. [Y] sera également condamné aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe :
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute M. [B] [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
Condamne M. [B] [Y] à verser à Mme [S] [N] épouse [J] et à la société Allianz Iard la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles en cause d'appel ;
Condamne M. [B] [Y] à verser au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles en cause d'appel ;
Condamne M. [B] [Y] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile;
Dit que la présente décision est opposable au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommage.
Le greffier, La présidente,