04 OCTOBRE 2022
Arrêt n°
FD/NB/NS
Dossier N° RG 20/00332 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FL3J
S.A.R.L. LABA
/
[C] [M]
Arrêt rendu ce QUATRE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Karine VALLEE, Conseiller
Mme Frédérique DALLE, Conseiller
En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé, et de Mme Manon MONEDIERES, greffier stagiaire.
ENTRE :
S.A.R.L. LABA prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis
Enseigne ADOMICI
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Jean ROUX suppléant Me Antoine PORTAL de la SARL TRUNO & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANTE
ET :
Mme [C] [M]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Anicet LECATRE, avocat au barreau de MOULINS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/004501 du 04/09/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)
INTIMEE
Après avoir entendu, Mme DALLE, Conseiller en son rapport, les représentants des parties à l'audience publique du 27 Juin 2022, la Cour a mis l'affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Madame [C] [M] a été embauchée, le 03 juin 2013, par la SARL LABA, en qualité d'assistante de vie, niveau 3, suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à raison de 27 heures par semaine. Elle effectuait son travail au domicile des personnes âgées.
À compter du 23 avril 2015 et jusqu'au 15 octobre 2017, Madame [M] a été placée en arrêt de travail suite à un accident vasculaire cérébral alors qu'elle intervenait au domicile d'une cliente.
La CPAM de [Localité 3] a refusé la prise en charge au titre d'accident du travail.
Elle a passé, le 16 octobre 2017, une visite de reprise et, au terme de cette visite, le médecin du travail a conclu : 'inaptitude en une visite........ restrictions médicales à prendre en compte pour la recherche de reclassement : contre-indication aux efforts sollicitant les membres supérieurs, port de charges habituel, soutenu ou répété, gestes répétitifs, contraintes posturales sollicitant les membres supérieurs. L'état de santé nécessite une réduction du temps de travail quotidien'.
Madame [M] a été convoquée à un entretien préalable, qui s'est tenu le 25 octobre 2017, et a été licenciée, le 28 octobre 2017, pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Le 30 octobre 2018, par requête expédiée en recommandé, Madame [M] a saisi le conseil de prud'hommes de VICHY aux fins notamment de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse outre obtenir diverses sommes à titre indemnitaire.
L'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 17 décembre 2018 et, comme suite au constat de l'absence de conciliation (convocation notifiée au défendeur le 30 octobre 2018), l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.
Le 9 septembre 2019, le bureau de jugement du conseil de prud'hommes de VICHY a ordonné la radiation de l'instance du rang des affaires en cours. Cette affaire a ensuite été réinscrite le 12 septembre 2019 sur demande de Madame [M].
Par jugement contradictoire en date du 17 février 2020 (audience du 14 octobre 2019), le conseil de prud'hommes de VICHY a :
- dit que la rupture de la relation de travail, le 28 octobre 2017, s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
En conséquence :
- condamné la société LABA, prise en la personne de son représentant légal, à payer et porter à Madame [M] les sommes de :
* 3 564,00 euros au titre de l'indemnité de préavis, avec intérêts de droit à compter de la saisine, outre 356,42 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis, avec intérêts de droit à compter de la saisine,
* 3 500,00 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts de droit à compter de la présente décision ;
- dit que des sommes ci-dessus énoncées en brut devront éventuellement être déduites les charges sociales salariales précomptées et reversées aux organismes sociaux par l'employeur ;
- dit que les sommes nettes s'entendent nettes de toutes cotisations et contributions sociales ;
- ordonné, le licenciement étant intervenu sans cause réelle et sérieuse dans une entreprise comptant plus de 10 salariés et à l'encontre d'une salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté, le remboursement au Pôle Emploi Auvergne, en application des dispositions de l'article L 1235-4 du Code du travail, des indemnités de chômage qui ont pu être versées à Madame [M] pour une durée de six mois ;
- ordonné à la société LABA, prise en la personne de son représentant légal, à remettre à Madame [M] l'attestation Pôle Emploi rectifiée conformément à la présente décision ;
- débouté Madame [M] de sa demande au titre de l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991 ;
- condamné la société LABA, prise en la personne de son représentant légal, aux dépens ;
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire sur l'ensemble de la décision, étant rappelé qu'elle est de droit pour le salaire et ses accessoires.
Le 19 février 2020, la société LABA a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 27 février 2020.
Vu les conclusions notifiées à la cour le 25 juin 2020 par la société LABA,
Vu les conclusions notifiées à la cour le 9 juin 2020 par Madame [M],
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 30 mai 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières écritures, la société LABA conclut à la réformation du jugement en toutes ses dispositions, et demande à la cour de:
Statuant à nouveau :
- dire et juger qu'il n'existait en son sein aucun poste disponible compatible avec les préconisations du médecin du travail ;
- dire et juger qu'elle n'a commis aucun manquement dans le cadre de la recherche de reclassement concernant Madame [M] ;
- dire et juger qu'elle justifie d'une impossibilité de reclassement ;
En conséquence :
- débouter Madame [M] de sa demande de requalification du licenciement pour impossibilité de reclassement en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- débouter Madame [M] de son appel incident au titre du montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- débouter Madame [M] de sa demande au titre de l'indemnité de préavis ;
- débouter Madame [M] de sa demande indemnitaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- débouter Madame [M] de sa demande de remise d'une attestation Pôle Emploi rectifiée mentionnant le salaire des 12 derniers mois travaillés sous astreinte de 10 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification du jugement à intervenir ;
En toute hypothèse :
- débouter Madame [M] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
- condamner Madame [M] au paiement d'une somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
La société LABA soutient que la demande de requalification du licenciement ne saurait prospérer et entend le démontrer. À cet effet, elle indique que la recherche de reclassement est une obligation de moyen et qu'il suffit à l'employeur de justifier de démarches faites en vue dudit reclassement. Elle précise, également, que la recherche doit être compatible avec les préconisations du médecin du travail, rappelle que l'avis de ce dernier comportait 5 restrictions médicales, qu'elle est une petite structure, dont plus de 90 % des salariés sont des assistantes de vies, et qu'ainsi les restrictions médicales étaient incompatibles avec les missions de ces dernières.
Elle affirme en outre qu'elle a bien pris contact avec la salariée, dès le 16 octobre 2017, afin de l'informer de l'impossibilité de reclassement et ajoute qu'on ne peut lui reprocher l'absence de contact écrit avec le médecin du travail, alors que l'avis d'inaptitude rendu était particulièrement explicite, le médecin du travail ayant listé pas moins de cinq restrictions médicales à prendre en compte dans le cadre de la recherche de reclassement.
Elle précise que seuls deux postes administratifs sont dénombrés au sein de sa structure, que ceux-ci sont pourvus par des contrats de travail à durée indéterminée et, en conséquence, non disponibles. De plus, la recherche de reclassement ne pouvait être envisagée sur ces postes administratifs, qui se trouvaient être des postes d'assistantes de vie, car ces postes étaient incompatibles avec les restrictions médicales de Madame [M].
Elle explique qu'aucun aménagement de poste ne pouvait être envisagé pour la salariée car, d'une part, même en réduisant le temps de travail de Madame [M], la réalisation des actes d'hygiène sur les personnes dépendantes ou état de faiblesse, l'aide à l'habillage, l'aide à la mobilité, l'aide à la prise des repas, les travaux ménagers, et la réalisation des courses, auraient encore été en contrariété avec les restrictions médicales définies par le médecin du travail, et car d'autre part, en retirant de ses missions, la réalisation des actes d'hygiène sur les personnes dépendantes ou état de faiblesse, l'aide à l'habillage, l'aide à la mobilité, l'aide à la prise des repas, les travaux ménagers, et la réalisation des courses, le poste d'assistante de vie aurait été vidé de sa substance.
Sur la brièveté des délais, la société LABA soutient que la sanction qui en découle concerne les structures possédant plusieurs établissements et ne peut s'appliquer pour une petite structure comme la sienne.
Elle conclut, ainsi, qu'au vu de son activité, de la nature des emplois, de leur nombre et des contre-indications du médecin du travail, que le licenciement de Madame [M] est parfaitement justifié et qu'elle n'a commis aucun manquement.
Dans ses dernières écritures, Madame [M] demande à la cour de :
- constater le caractère mal fondé de l'appel principal de la société LABA ;
- constater la recevabilité et le bien fondé de son appel incident ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a requalifié le licenciement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l'obligation de reclassement ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société LABA à lui payer les sommes suivantes :
* 3 564.00 euros à titre d'indemnité de préavis, outre 356,42 euros au titre des congés payés correspondants ;
- l'infirmer pour le surplus ;
Statuant à nouveau :
- condamner la société LABA à lui payer et porter la somme de 5 940.00 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- dire que ces sommes porteront intérêts de droit au taux légal à compter :
- de la convocation de l'employeur à comparaître devant le bureau de conciliation pour les sommes allouées à caractère salarial,
- du jugement dont appel pour les sommes allouées à caractère indemnitaire,
- de l'arrêt de la Cour pour les sommes allouées à titre indemnitaire en plus de celles allouées par le Conseil de Prud'hommes ;
- ordonner la transmission d'une attestation Pôle Emploi rectifiée mentionnant le salaire des 12 derniers mois travaillés sous astreinte 10 euros par jour de retard passé 8 jours suivant la notification à intervenir;
- sagissant des frais irrépétibles, infirmer le jugement dont appel ;
Statuant à nouveau :
- condamner la société LABA à payer et porter à Maitre LECATRE Anicet, Avocat de Mme [M], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale en première instance et en appel, la somme de 3 000.00 euros au titre des articles 37 alinéa 2, 75 et 108 de la Loi du 10 juillet 1991 ;
- condamner la société LABA en tous les dépens.
Madame [M] rappelle que, s'agissant de l'obligation de reclassement, le médecin du travail préconisait un reclassement avec allégement des horaires journaliers de travail et n'a, en aucun cas, dispensé la société LABA de recherche de reclassement.
Elle soutient que son employeur n'a fait aucune tentative de reclassement ni ne justifie avoir fait une quelconque recherche en ce sens comme le démontre la brièveté du délai écoulé après l'avis d'inaptitude. La salariée indique que cette brièveté prouve bien la volonté de l'employeur de ne pas vouloir lui proposer un reclassement. Elle explique à cet effet que l'employeur a même reconnu lors de l'entretien préalable qu'il n'avait pas à procéder à des recherches de reclassement.
Elle soutient, également, qu'à la lecture du registre unique du personnel, il apparaît qu'un poste d'assistante de secteur était disponible au moment de son licenciement et qu'il ne lui a pas été proposé. En réponse aux arguments de l'employeur, qui soutient qu'il s'agissait d'un contrat de travail à durée déterminée, elle rappelle que la jurisprudence n'interdit pas de proposer un tel poste en reclassement. Elle ajoute que l'employeur explique que ledit contrat avait été conclu en remplacement d'un congé maternisé et qu'elle n'aurait pas eu l'expérience ni les compétences pour occuper un tel poste, or elle rappelle qu'il appartient à l'employeur de former et adapter le salarié d'autant plus en cas d'inaptitude.
Ainsi, pour toutes ces raisons, Madame [M] considère que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement et estime que la brièveté du délai écoulé entre la constatation définitive de l'inaptitude et le début de la procédure de licenciement traduit le fait que la société LABA n'avait aucune ambition d'effectuer la moindre recherche sérieuse de reclassement.
Elle sollicite les conséquences indemnitaires et financières de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des dommages et intérêts en raison du non-respect de l'employeur de son obligation de reclassement.
Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.
MOTIFS
- Sur la rupture du contrat de travail -
Le salarié déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment bénéficie d'un droit au reclassement.
Il appartient à l'employeur, qui peut tenir compte de la position prise par le salarié déclaré inapte, de justifier qu'il n'a pu, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, le reclasser dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, effectuée au sein de l'entreprise et des entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent entre elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.
La preuve du respect de l'obligation de reclassement du salarié inapte pèse sur l'employeur et le manquement de ce dernier à cette obligation prive de cause réelle et sérieuse le licenciement fondé sur l'inaptitude du salarié et sur l'impossibilité de le reclasser.
L'employeur, non dispensé de son obligation de reclassement, doit interroger le médecin du travail sur les possibilités de reclassement du salarié, notamment sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise et, le cas échéant, sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté. L'employeur doit proposer au salarié un emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des dernières indications en date que celui-ci formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et sa capacité à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté. En cas d'avis successifs du médecin du travail, l'employeur doit se conformer au dernier avis émis, que celui-ci ait été donné à l'issue d'une nouvelle suspension du contrat de travail ou non.
Lorsque le médecin du travail déclare le salarié inapte à reprendre son poste, l'employeur doit chercher à reclasser le salarié dans un autre emploi adapté à ses nouvelles capacités. Si le reclassement est impossible, il doit le notifier par écrit au salarié.
L'emploi de reclassement doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation, aménagements, adaptions ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail. Il ne doit en principe entraîner aucune modification du contrat de travail du salarié inapte. Toutefois, si le seul poste disponible emporte une modification du contrat de travail, il doit être proposé au salarié déclaré inapte.
La société LABA soutient que la demande de requalification du licenciement ne saurait prospérer et entend le démontrer. À cet effet, elle indique que la recherche de reclassement est une obligation de moyen et qu'il suffit à l'employeur de justifier de démarches faites en vue dudit reclassement. Elle précise, également, que la recherche doit être compatible avec les préconisations du médecin du travail, rappelle que l'avis de ce dernier comportait 5 restrictions médicales, qu'elle est une petite structure, dont plus de 90 % des salariés sont des assistantes de vies, et qu'ainsi les restrictions médicales étaient incompatibles avec les missions de ces dernières.
Elle affirme en outre qu'elle a bien pris contact avec la salariée, dès le 16 octobre 2017, afin de l'informer de l'impossibilité de reclassement et ajoute qu'on ne peut lui reprocher l'absence de contact écrit avec le médecin du travail, alors que l'avis d'inaptitude rendu était particulièrement explicite, le médecin du travail ayant listé pas moins de cinq restrictions médicales à prendre en compte dans le cadre de la recherche de reclassement.
Elle précise que seuls deux postes administratifs sont dénombrés au sein de sa structure, que ceux-ci sont pourvus par des contrats de travail à durée indéterminée et, en conséquence, non disponibles. De plus, la recherche de reclassement ne pouvait être envisagée sur ces postes administratifs, qui se trouvaient être des postes d'assistantes de vie, car ces postes étaient incompatibles avec les restrictions médicales de Madame [M].
Elle explique qu'aucun aménagement de poste ne pouvait être envisagé pour la salariée car, d'une part, même en réduisant le temps de travail de Madame [M], la réalisation des actes d'hygiène sur les personnes dépendantes ou état de faiblesse, l'aide à l'habillage, l'aide à la mobilité, l'aide à la prise des repas, les travaux ménagers, et la réalisation des courses, auraient encore été en contrariété avec les restrictions médicales définies par le médecin du travail, et car d'autre part, en retirant de ses missions, la réalisation des actes d'hygiène sur les personnes dépendantes ou état de faiblesse, l'aide à l'habillage, l'aide à la mobilité, l'aide à la prise des repas, les travaux ménagers, et la réalisation des courses, le poste d'assistante de vie aurait été vidé de sa substance.
Sur la brièveté des délais, la société LABA soutient que la sanction qui en découle concerne les structures possédant plusieurs établissements et ne peut s'appliquer pour une petite structure comme la sienne.
Elle conclut, ainsi, qu'au vu de son activité, de la nature des emplois, de leur nombre et des contre-indications du médecin du travail, que le licenciement de Madame [M] est parfaitement justifié et qu'elle n'a commis aucun manquement.
Madame [M] rappelle que, s'agissant de l'obligation de reclassement, le médecin du travail préconisait un reclassement avec allégement des horaires journaliers de travail et n'a, en aucun cas, dispensé la société LABA de recherche de reclassement.
Elle soutient que son employeur n'a fait aucune tentative de reclassement ni ne justifie avoir fait une quelconque recherche en ce sens comme le démontre la brièveté du délai écoulé après l'avis d'inaptitude. La salariée indique que cette brièveté prouve bien la volonté de l'employeur de ne pas vouloir lui proposer un reclassement. Elle explique à cet effet que l'employeur a même reconnu lors de l'entretien préalable qu'il n'avait pas à procéder à des recherches de reclassement.
Elle soutient, également, qu'à la lecture du registre unique du personnel, il apparaît qu'un poste d'assistante de secteur était disponible au moment de son licenciement et qu'il ne lui a pas été proposé. En réponse aux arguments de l'employeur, qui soutient qu'il s'agissait d'un contrat de travail à durée déterminée, elle rappelle que la jurisprudence n'interdit pas de proposer un tel poste en reclassement. Elle ajoute que l'employeur explique que ledit contrat avait été conclu en remplacement d'un congé maternisé et qu'elle n'aurait pas eu l'expérience ni les compétences pour occuper un tel poste, or elle rappelle qu'il appartient à l'employeur de former et adapter le salarié d'autant plus en cas d'inaptitude.
Ainsi, pour toutes ces raisons, Madame [M] considère que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement et estime que la brièveté du délai écoulé entre la constatation définitive de l'inaptitude et le début de la procédure de licenciement traduit le fait que la société LABA n'avait aucune ambition d'effectuer la moindre recherche sérieuse de reclassement.
Elle sollicite les conséquences indemnitaires et financières de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des dommages et intérêts en raison du non-respect de l'employeur de son obligation de reclassement.
En l'espèce, Madame [C] [M] a été embauchée, le 03 juin 2013, par la SARL LABA, en qualité d'assistante de vie, niveau 3, suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à raison de 27 heures par semaine. Elle effectuait son travail au domicile des personnes âgées.
À compter du 23 avril 2015 et jusqu'au 15 octobre 2017, Madame [M] a été placée en arrêt de travail suite à un accident vasculaire cérébral alors qu'elle intervenait au domicile d'une cliente.
La CPAM de [Localité 3] a refusé la prise en charge au titre d'accident du travail.
Elle a passé, le 16 octobre 2017, une visite de reprise et, au terme de cette visite, le médecin du travail a conclu : 'inaptitude en une visite........ restrictions médicales à prendre en compte pour la recherche de reclassement : contre-indication aux efforts sollicitant les membres supérieurs, port de charges habituel, soutenu ou répété, gestes répétitifs, contraintes posturales sollicitant les membres supérieurs. L'état de santé nécessite une réduction du temps de travail quotidien'.
Madame [M] a été convoquée à un entretien préalable par courrier avec accusé de réception en date du 17 octobre 2017. L'entretien préalable s'est tenu le 25 octobre 2017, et la salariée a été licenciée, le 28 octobre 2017, pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Le courrier de notification est ainsi libellé :
' Madame [C] [M],
A la suite de l'avis d'inaptitude du médecin du travail du 16 octobre 2017, nous avons procédé à la recherche de postes disponibles, aussi comparables que possibles a l'emploi que vous occupez, conformes aux préconisations du médecin du travail et à vos compétences.
Faisant suite à notre entretien du 25 octobre 2017, nous sommes au regret de vous notifier par la présente votre licenciement, en raison de l'impossibilité dans laquelle nous sommes de vous reclasser pour les motifs qui vous ont été notifiés par courrier du 16 octobre et que nous vous rappelons :
Pour cette recherche de reclassement, nous avons contacté la médecine du travail et aux vues de vos restrictions d'emploi (' contre-indication aux efforts sollicitant les membre supérieurs, port de charges habituel, soutenu ou répété, gestes répétitifs, contraintes posturales sollicitant les membres supérieurs. L'état de santé nécessite une réduction du temps de travail quotidien '.) et du seul type de poste à pourvoir au sein de notre entreprise nous avons conclu, avec la médecine du travail, que votre reclassement s'avérait impossible au sein de notre entreprise.
En effet, comme nous vous l'avons notifié dans notre courrier du 16 octobre 2017, nous ne pouvons vous proposer que des postes d'auxiliaire de vie dont les principales fonctions sont d'assister des personnes fragiles dans certaines taches qu'elles ne parviennent plus à réaliser :
-Accompagner la personne pour réaliser des actes d'hygiène pour elle-même ou assister une tierce personne [infirmier(e) ou autre] a la réalisation de ces actes d'hygiène
-Aide à l'habillage
-Aide à la mobilité
-Aide à la prise des repas
-Travaux ménagers
-Préparation des repas simples ou spécifiques selon le régime alimentaire suivi par la personne
-Accompagnement dans la prise de son repas
-Gestion et réalisation des courses
-Aide administrative
-Rappel de la prise de médicaments
-Permettre à la personne aidée de garder le contact avec le monde extérieur (lutte contre l'isolement) : sortie, accompagnement au bras, accompagnement aux rendez-vous extérieurs
La date de première présentation de cette lettre fixera la date de rupture de votre contrat de travail, étant précisé que, conformément a l'article L. 1226-4 du Code du travail, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul des indemnités de licenciement.
Nous vous adressons, par courrier séparé, votre solde de tout compte qui comportera l'indemnité de licenciement, votre certificat de travail ainsi que votre attestation Pôle Emploi.
Veuillez, agréer, Madame, nos sincères salutations.
Mme [W]
Directrice'
Il résulte ainsi de l'avis du médecin de travail en date du 16 octobre 2017 que Madame [M] a été déclarée inapte à son poste, cet avis étant accompagné des préconisations suivantes:
- contre-indication aux efforts sollicitant les membres supérieurs ;
- contre-indication au port de charges habituel, soutenu ou répété ;
- contre-indication aux gestes répétitifs ;
- contre-indication aux contraintes posturales sollicitant les membres supérieurs ;
- réduction du temps de travail quotidien.
Il est constant que l'avis du médecin du travail n'a en outre pas expressément dispensé l'employeur de son obligation de reclassement.
Si l'employeur indique qu'il n'avait pas de poste disponible compatible avec les restrictions médicales émises par le médecin du travail, il ressort de la lecture du registre unique du personnel qu'il a pourvu un poste d'assistante secteur en CDD du 1er février 2018 au 7 juin 2018.
Par ailleurs, l'employeur ne justifie d'aucun contact ultérieur avec le médecin du travail pour envisager des possibilités d'aménagement du poste de la salariée.
L'employeur ne justifie pas non plus d'un contact pris avec la salariée pour prendre en compte ses éventuelles compétences professionnelles sur un poste plus administratif ou la former en ce sens.
Au contraire, l'employeur a fait preuve d'une précipitation avérée pour procéder au licenciement de la salariée, dont l'avis d'inaptitude est en date du 16 octobre 2017 alors que le courrier la convoquant à un entretien préalable au licenciement est en date du 17 octobre 2017, soit le lendemain.
La preuve du respect de l'obligation de reclassement du salarié inapte pèse sur l'employeur et le manquement de ce dernier à cette obligation prive de cause réelle et sérieuse le licenciement fondé sur l'inaptitude du salarié et sur l'impossibilité de le reclasser.
L'employeur, non dispensé de son obligation de reclassement, doit interroger le médecin du travail sur les possibilités de reclassement du salarié, notamment sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise et, le cas échéant, sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.
Au vu de ces éléments, l'employeur ne démontre nullement avoir loyalement et sérieusement rempli son obligation de reclassement de la salariée. Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que la rupture de la relation de travail, le 28 octobre 2017, s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Au vu des éléments d'appréciation dont la cour dispose, les premiers juges ont justement appréhendé les circonstances de la cause ainsi que les droits et obligations des parties en condamnant l'EURL LABA à payer à Madame [C] [M] les sommes de 3.564 euros au titre de l'indemnité de préavis, de 356,42 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis et de 3.500 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement déféré sera également confirmé sur ces dispositions.
- Sur les frais irrépétibles et les dépens -
Aux termes de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991:
'Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre.
Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat pouvant être rétribué, totalement ou partiellement, au titre de l'aide juridictionnelle, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.
Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat.
Si, à l'issue du délai de quatre ans à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, l'avocat n'a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l'Etat, il est réputé avoir renoncé à celle-ci.'
Les dispositions du jugement déféré relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance seront confirmées.
En équité, il convient de débouter Madame [C] [M] de sa demande au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 en cause d'appel.
L'EURL LABA, qui succombe en son recours, sera condamnée au paiement des dépens en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
- Déboute Madame [C] [M] de sa demande au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 en cause d'appel ;
- Condamne l'EURL LABA au paiement des dépens en cause d'appel ;
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le greffier, Le Président,
N. BELAROUI C. RUIN