08 Novembre 2022
Arrêt n°
KV/CC/NS
Dossier N° RG 21/00221 - Portalis DBVU-V-B7F-FQ7G
CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE D'ILE DE FRANCE ( CNAV)
/
[Y] [T]
Arrêt rendu ce HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Karine VALLEE, Conseiller
Mme Sophie NOIR, Conseiller
En présence de Mme Cécile CHEBANCE, greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE D'ILE DE FRANCE ( CNAV), représentée par Madame [L] [P], Responsable Département Contentieux
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée à l'audience par Madame [G] [M], muni d'un pouvoir de représentation du 20 Septembre 2022
APPELANTE
ET :
M. [Y] [T]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Non comparant
INTIME
Madame Karine VALLEE, Conseiller en son rapport, après avoir entendu, à l'audience publique du 03 Octobre 2022, tenue en application de l'article 945-1 du code de procédure civile, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Par décision du 4 septembre 2018, la caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) d'Ile de France a refusé de fixer au 1er août 2018 le point de départ de la pension de retraite de M. [Y] [T], le dossier déposé par celui-ci ayant été jugé incomplet.
Par courrier du 6 avril 2020, M. [T] a saisi le tribunal judiciaire du PUY EN VELAY d'une contestation de la décision de la commission de recours amiable de la CNAV d'Ile de France, qui lors de sa séance du 12 février 2020 a confirmé ce refus.
Par jugement en date du 10 décembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire du PUY EN VELAY a :
- déclaré recevable le recours formé par M. [T] ;
- annulé la décision de la commission de recours amiable en date du 12 février 2020, notifiée le 6 février 2020, ayant rejeté le recours formé par M. [T] contre la décision du 4 septembre 2018 de la caisse nationale d`assurance vieillesse d`Ile de France ;
- renvoyé M. [T] devant la caisse nationale d`assurance vieillesse d`Ile de France pour nouvel examen de ses droits ;
- débouté M. [T] de sa demande de dommages et intérêts ;
- condamné la caisse nationale d`assurance vieillesse d`Ile de France aux dépens.
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 27 janvier 2021, la CNAV a interjeté appel de ce jugement.
L'affaire a été fixée à l'audience de la chambre sociale du 3 octobre 2022.
Bien que régulièrement convoqué à cette audience par lettre recommandée dont l'avis de réception a été signé le 14 février 2022, M. [T] n'a pas comparu, ni ne s'y est fait représenter, et n'a pas fait connaître de motif légitime d'empêchement.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par ses écritures visées le 3 octobre 2022, oralement soutenues à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses moyens, la CNAV demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu le 10 décembre 2020 par le tribunal judiciaire du PUY EN VELAY en ce qu'il fixait le point de départ de la pension de retraite de M [T] au 1er août 2018 ;
- fixer le point de départ de la pension de retraite de M [T] au 1er janvier 2020 comme étant le 1er jour du mois suivant la réception du dossier complet de l'assuré ;
- rejeter l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
MOTIFS
- Sur la forme :
Selon les dispositions combinées des articles R142-11 du code de la sécurité sociale et 946 du code de procédure civile, les recours formés contre les jugements rendus par les pôles sociaux des tribunaux judiciaires donnent lieu devant la cour d'appel à une procédure orale sans représentation obligatoire.
La procédure dont s'agit étant orale, les observations écrites que M.[T] avait déposées au greffe le 26 juillet 2021 ne peuvent suppléer à son défaut de comparution à l'audience et ne peuvent donc pas être examinées par la cour.
En vertu de l'article 472 du code de procédure civile, quand bien même l'intimé n'est pas comparant et ne conclut pas, la cour saisie d'un appel doit néanmoins statuer sur le fond et ne peut faire droit aux prétentions et moyens de l'appelante que dans la mesure où elle les estime réguliers, recevables et bien fondés.
- Sur le fond :
En date du 19 février 2018, M. [T] a déposé auprès de la CNAV une demande d'entrée en jouissance de retraite personnelle prenant effet le 1er août 2018.
Il ressort des pièces communiquées aux débats en cause d'appel que la CNAV, après avoir constaté le caractère incomplet du dossier remis à ses services par M. [T], a transmis à ce dernier, à l'adresse indiquée sur la demande reçue :
-un courrier daté du 25 juin 2018 l'invitant à fournir des pièces manquantes ;
- un courrier de relance daté du 11 juillet 2018.
Les pièces réclamées n'ayant pas été communiquées, la CNAV a notifié à M. [T], par courrier daté du 4 septembre 2018, le rejet de sa demande de pension vieillesse.
Selon les pièces produites par la CNAV, le contact écrit n'a été repris par M. [T] que le 19 décembre 2018, date de réception par la caisse de l'attestation par laquelle Mme [E] a certifié l'héberger à titre gratuit à son domicile situé [Adresse 1] au [Localité 3] depuis le mois de juillet 2018.
Le 3 décembre 2019, soit près d'un an plus tard, M. [T] a adressé une lettre à la CNAV aux termes de laquelle il explique avoir vainement tenté d'obtenir des rendez vous et explications sur le traitement de son dossier et avoir signalé par voie téléphonique, au cours du printemps 2018, son changement d'adresse imminent dans le département de la HAUTE-LOIRE. Il a également précisé avoir concrètement déménagé le 28 juin 2018 et avoir pris la précaution de faire procéder à la réexpédition de son courrier par les services postaux pour une durée de six mois renouvelée une fois.
Au vu des pièces versées à hauteur d'appel par la CNAV, il ne peut être affirmé, comme l'ont fait les premiers juges face à la défaillance probatoire de la caisse alors constatée, que la demande de retraite formulée par M. [T] n'a pas été sérieusement traitée.
M. [T], non comparant, ne rapporte pas la preuve du signalement du changement d'adresse dont il se prévaut dans le courrier susvisé du 3 décembre 2019, de sorte qu'il doit être considéré par défaut que c'est à bon droit que la mention de son adresse précédente dans le département de l'ESSONNE a été portée sur les correspondances de la CNAV qui lui étaient destinées.
Reste que la copie des courriers en date des 25 juin 2018 et 11 juillet 2018 émanant de la CNAV ne suffit pas à établir leur expédition effective, laquelle n'est aucunement démontrée, par quelque procédé que ce soit.
La CNAV n'établit pas davantage qu'elle a complété les courriers postaux qu'elle invoque de courriels ou d'avis dûment communiqués à l'assuré via son compte ouvert sur le site internet de l'organisme.
Il s'infère de ces constatations que peu important les délais de réaction de M. [T], l'appelante est mal fondée à reprocher à ce dernier son incurie dans le suivi de sa demande.
Pour autant, il ne peut être conclu en l'état des débats judiciaires que les conditions d'attribution de la pension de retraite à compter du 1er août 2018 sont satisfaites, en particulier en ce qui concerne la communication des pièces justificatives de situation nécessaires.
Les premiers juges n'ont d'ailleurs pas posé cette conclusion puisqu'ils se sont limités à annuler la décision de la commission de recours amiable qui a rejeté la contestation de l'assuré pour cause de tardiveté du recours et à renvoyer M. [T] devant la CNAV pour réexamen de ses droits, sans se prononcer sur la date de fixation du point de départ du versement de la pension de retraite objet du litige. Cette décision d'annulation, mise implicitement dans le débat d'appel par les demandes de la CNAV, doit être infirmée, étant de surcroît rappelé que le juge judiciaire n'a pas compétence pour annuler une décision de nature administrative.
Le jugement entrepris ne disposant pas expressément que le point de départ de la pension de retraite de M. [T] est fixé au 1er août 2018, la demande d'infirmation présentée par la CNAV de ce chef est sans objet et sera sur ce motif rejetée.
La CNAV demande par ailleurs à la cour de fixer le point de départ de la pension de retraite de M. [T] au 1er janvier 2020.
La caisse verse aux débats la demande de retraite renouvelée le 15 décembre 2019 par M. [T] qui, selon les affirmations de l'appelante, l'a complétée des pièces jusqu'alors manquantes.
L'article R351-37 alinéa 1er du code de la sécurité sociale dispose que la date d'entrée en jouissance de la pension de retraite est nécessairement le 1er jour d'un mois et ne peut être antérieure au dépôt de la demande.
C'est donc à raison que la CNAV soutient que le point de départ de l'entrée en jouissance de la pension de retraite doit être fixé au 1er janvier 2020, cette date constituant le 1er jour du mois suivant le dépôt du dossier complet. Ajoutant au jugement entrepris, il sera fait droit à sa demande en ce sens, ce dont il résulte la nécessaire infirmation de la disposition par laquelle M. [T] a été renvoyé devant la CNAV pour nouvel examen de ses droits, ceux-ci étant tranchés par la cour conformément à la demande de l'appelante.
M. [T], non comparant, ne conclut pas à l'infirmation du jugement qui l'a débouté de sa demande en dommages et intérêts, de sorte que cette disposition qui n'a pas été dévolue à la cour ne peut être remise en cause.
Eu égard à la solution apportée au litige en cause d'appel, M. [T] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel, la disposition contraire du jugement entrepris étant infirmée.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a annulé la décision de la commission de recours amiable en date du 12 février 2020 ayant rejeté le recours formé par M. [Y] [T] contre la décision du 4 septembre 2018 de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, renvoyé M. [Y] [T] devant la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés pour l'examen de ses droits et condamné la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés aux dépens ;
Statuant à nouveau ,
- Condamne M. [Y] [T] aux dépens de première instance;
Y ajoutant,
- Fixe le point de départ de la pension de retraite de M. [Y] [T] au 1er janvier 2020 ;
- Condamne M. [Y] [T] aux dépens d'appel ;
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le greffier, Le Président,
C.CHEBANCE C.RUIN