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09/06/2022 | FRANCE | N°19/03118

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 09 juin 2022, 19/03118


N° RG 19/03118 - N° Portalis DBV2-V-B7D-IH74





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE



ARRET DU 09 JUIN 2022











DÉCISION DÉFÉRÉE :





Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 11 Juillet 2019





APPELANTE :





SARL [A] [BS] ET ASSOCIES venant aux droits de la société ACTHEOS DLA

[Adresse 2]

[Localité 4]



représentée par Me Séverine LANGOT, avocat au barreau

de ROUEN











INTIME :





Monsieur [Z] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]



présent



représenté par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de DIEPPE substituée par Me Romain GUILLEMARD, avo...

N° RG 19/03118 - N° Portalis DBV2-V-B7D-IH74

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 09 JUIN 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 11 Juillet 2019

APPELANTE :

SARL [A] [BS] ET ASSOCIES venant aux droits de la société ACTHEOS DLA

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Séverine LANGOT, avocat au barreau de ROUEN

INTIME :

Monsieur [Z] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

présent

représenté par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de DIEPPE substituée par Me Romain GUILLEMARD, avocat au barreau d'AMIENS

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 26 Avril 2022 sans opposition des parties devant Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

Madame BERGERE, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme WERNER, Greffière

DEBATS :

A l'audience publique du 26 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 Juin 2022

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 09 Juin 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [Z] [H] a été engagé par le cabinet [F] [A] en qualité d'assistant - stagiaire Expert-Comptable à compter du 18 février 1998.

Il a été promu cadre le 1er janvier 2001et à partir de 2003, il a détenu des parts dans la société.

En dernier lieu, le salarié était directeur de mission/associé technique.

Ce cabinet a été repris par la société Audit Basse Seine Expertise en juin 2003, laquelle a été absorbée par la société [A] [BS] et Associés (DLA) le 30 novembre 2012, dont les parts ont été reprises en décembre 2013 par la société Acthéos DLA, laquelle a été absorbée le 31 juillet 2017 par la société DLA.

Les relations contractuelles des parties étaient soumises à la convention collective des experts comptables et des commissaires aux comptes.

Le licenciement pour faute grave a été notifié au salarié le 9 juin 2016.

Par requête du 21 décembre 2016, M. [Z] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Rouen en contestation de son licenciement, ainsi qu'en paiement de rappels de salaire et d'indemnités.

Par jugement du 11 juillet 2019, le conseil de prud'hommes, en formation de départage, a requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave de M. [Z] [H], condamné la SARL DLA à verser à M. [Z] [H] les sommes suivantes :

rappel sur salaire : 60 408,21 euros bruts,

congés payés y afférents : 6 040,82 euros,

dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure : 3 000 euros,

indemnité compensatrice de préavis : 25 487,76 euros bruts,

congés payés y afférents : 2 548,78 euros bruts,

indemnité de licenciement : 41 063,61 euros,

-ordonné à la SARL DLA de remettre à M. [Z] [H] les documents de fin de contrat rectifiés conformément à la décision, rappelé que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2016 et que les créances de nature indemnitaire portent intérêts au taux légal à compter du jugement, dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du jugement pour ses dispositions qui n'en bénéficieraient pas de plein droit, rappelé les dispositions de l'article R. 1454 28 du code du travail sur l'exécution provisoire de droit, fixé à hauteur de 8 495,92 euros bruts la moyenne des trois derniers mois de salaire de M. [Z] [H], condamné la SARL DLA à verser à M. [Z] [H] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, rejeté toute demande plus ample ou contraire.

La SARL DLA a interjeté appel le 2 août 2019.

Par conclusions remises le 22 février 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la SARL DLA demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a :

-requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave de M. [Z] [H],

-dit que la qualité de cadre dirigeant de M. [Z] [H] n'est pas établie,

-l'a condamnée à verser à M. [Z] [H] un rappel de salaire et les congés payés afférents, des dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents, l'indemnité de licenciement,

-ordonné de remettre à M. [Z] [H] les documents de fin de contrat rectifiés conformément à la décision, fixé à hauteur de 8 495,92 euros bruts la moyenne des trois derniers mois de salaire de M. [Z] [H], l'a condamnée à verser à M. [Z] [H] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance,

-à titre principal, dire que le licenciement pour faute grave notifié à M. [Z] [H] est fondé, dire qu'il relève de la catégorie des cadres dirigeants, en conséquence, le débouter de l'ensemble de ses demandes,

-à titre subsidiaire, dire que le licenciement repose sur une faute simple, limiter la condamnation de la société au paiement de l'indemnité de préavis et de l'indemnité de licenciement sur la base d'une rémunération moyenne mensuelle de 6 002,35 euros bruts,

-à titre infiniment subsidiaire, dire que le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse réclamés par M. [Z] [H] est excessif et en réduire le montant, en tout état de cause, condamner M. [Z] [H] à lui verser la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux éventuels dépens.

Par conclusions remises le 14 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, M. [Z] [H] demande à la cour de déclarer l'appel de la SARL DLA recevable mais mal fondé, dire son appel incident recevable et bien fondé, confirmer le jugement toutes ses dispositions faisant droit à ses demandes, l'infirmer pour le surplus,

-statuant à nouveau, dire ses demandes recevables et bien fondées, en conséquence, dire que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, juger la convention de forfait jours à laquelle il était soumis comme nulle, et à tout le moins inopposable, avec toutes les conséquences juridiques et financières y afférentes,

-à titre principal, et s'il était fait droit à ses demandes de rappel sur salaire, condamner la SARL DLA à lui verser les sommes suivantes :

rappel sur indemnité de préavis : 25 487,76 euros bruts,

congés payés afférents : 2 548,78 euros bruts,

rappel sur indemnité de licenciement : 41 299,61 euros,

dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 170 926,56 euros nets,

rappel sur salaire : 60 408,21 euros bruts,

congés payés afférents : 6 040,82 euros bruts,

indemnité pour travail dissimulé : 50 975,52 euros,

dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement : 8 495,92 euros,

-à titre subsidiaire, et s'il n'était pas fait droit à ses demandes de rappel sur salaire, condamner la SARL DLA à lui verser les sommes suivantes :

rappel sur indemnité de préavis : 18 007,05 euros bruts,

congés payés afférents : 1 800,71 euros bruts,

rappel sur indemnité de licenciement : 29 178,09 euros,

dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 120 047 euros nets,

dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement : 6 002,35 euros,

-à titre encore plus subsidiaire, dire que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, condamner la SARL DLA à lui verser les sommes suivantes :

rappel sur indemnité de préavis : 25 487,76 euros bruts,

congés payés afférents : 2 548,78 euros bruts,

rappel sur indemnité de licenciement : 41 299,61 euros,

rappel sur salaire : 60 408,21 euros bruts,

congés payés afférents : 6 040,82 euros bruts,

indemnité pour travail dissimulé : 50 975,52 euros,

dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement : 8 495,92 euros,

-subsidiairement, et s'il n'était pas fait droit à ses demandes de rappel sur salaire, condamner la SARL DLA à lui verser les sommes suivantes :

rappel sur indemnité de préavis : 18 007,05 euros bruts,

congés payés afférents : 1 800,71 euros bruts,

rappel sur indemnité de licenciement : 29 178,09 euros,

dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement : 6 002,35 euros,

-en toute hypothèse, condamner la SARL DLA à lui remettre l'ensemble de ses documents de fin de contrat conformes à la décision, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé 15 jours à compter de la notification de la décision, condamner la SARL DLA à lui verser, outre la somme de 2 000 euros accordée en première instance, celle de 7 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 7 avril 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes au titre de l'exécution du contrat de travail

M. [Z] [H], qui n'a jamais régularisé de contrat écrit, expose que ses bulletins de paie font référence à une convention de forfait de 218 jours par an qui lui est inopposable, à défaut d'écrit et de respect des dispositions conventionnelles notamment quant au contrôle permettant de garantir un suivi effectif de son temps de travail pour éviter tout abus, étant rappelé que la Cour de cassation à juger nulles les conventions de forfait régularisées sous l'empire de la convention collective des experts-comptables à tout le moins jusqu'à la signature de l'avenant du 18 février 2015, que ne peut lui être opposée la qualité de cadre dirigeant dès lors qu'il était employé sur la base d'un forfait jours ainsi que cela résulte des mentions constantes de ses bulletins de paie dont les mentions ont valeur de présomption, qu'en tout état de cause, cette qualité ne peut lui être reconnue faute d'en être le gérant, d'avoir le pouvoir d'engager la société ou de participer de manière effective à sa direction et que sa classification professionnelle et ses responsabilités étaient celles d'un chef de service et non d'un cadre de direction.

La SARL DLA, faisant valoir que M. [Z] [H] dirigeait l'intégralité des missions comme chaque associé mais n'en assumait pas les risques comme un gérant qu'il ne pouvait être, faute de disposer du diplôme d'expert-comptable ou de commissaire aux comptes, explique qu'en qualité de directeur de mission-associé technique, il était l'associé en charge du dossier, devant à ce titre définir la stratégie de l'audit ou de la mission d'expertise-comptable, organiser, réaliser et superviser les contrôles, gérer les relations clients et préparer l'émission de l'opinion, en conformité avec les règles de la profession, pour signature par l'expert-comptable ou le commissaire aux comptes, lequel n'effectuait qu'une revue finale, qu'il avait le statut de cadre dirigeant comme participant à la direction de l'entreprise et à la gestion du personnel conjointement avec les gérants, accomplissant ses fonctions de manière largement autonome, bénéficiant de la plus grande liberté dans l'organisation de son emploi du temps et percevant une rémunération des plus élevées.

Selon l'article L.3111-2 alinéa 2 du code du travail, sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou leur établissement.

Outre que ces conditions sont cumulatives, la qualité de cadre dirigeant suppose que le cadre participe à la direction de l'entreprise.

Il appartient au juge, pour se déterminer, de vérifier précisément les conditions réelles d'emploi du salarié concerné, sans s'en tenir aux définitions conventionnelles.

Il est constant qu'aucun contrat de travail écrit n'a jamais été régularisé au cours de la relation contractuelle et il n'est produit aucune fiche de poste.

En dernier lieu, M. [Z] [H] était chargé de mission statut cadre N2 coefficient 500.

La seule circonstance que M. [Z] [H] ne soit pas expert-comptable ou commissaire aux comptes et que dès lors il ne puisse être gérant de la société en application de l'ordonnance n°45-2138 du 19 septembre 1945 ne suffit pas à écarter le statut de cadre-dirigeant, cette notion ne se confondant pas avec celle de mandataire social de l'entreprise.

Si les bulletins de paie faisaient référence à un forfait annuel de 218 jours, en l'absence d'une convention de forfait jours prévue contractuellement, le salarié n'était de fait pas soumis à une telle convention, dès lors qu'il n'était par ailleurs pas soumis à un décompte effectif des jours travaillés et à leur contrôle par l'employeur, de sorte que cette seule mention sur les bulletins de salaire est insuffisante pour retenir que l'employeur entendait le soumettre à une telle convention.

Aussi, le moyen selon lequel il ne peut être reconnu une qualité de cadre dirigeant en raison de la soumission du salarié à une convention de forfait en jours est inopérant.

Il convient d'examiner les conditions réelles d'exercice de l'activité de M. [Z] [H].

I - organisation de son emploi du temps

Il est indéniable et non discuté que M. [Z] [H] disposait d'une grande autonomie dans la gestion de son temps de travail, aucun contrôle n'étant exercé par l'employeur à ce titre.

II - rémunération

Il résulte des bulletins de paie versés au débat que jusqu'à ce qu'il soit salarié de la société [A] [BS] et associés en 2013, M. [Z] [H] percevait un salaire de base de 5 422,96 euros.

Il soutient qu'alors MM. [F] [A], et [BS] percevaient 10 000 euros nets mensuels et que les rémunérations de Mme [BZ] et [FI] [A] étaient également supérieures à la sienne.

Lorsqu'il a intégré la société Acthéos à compter de janvier 2014, sa rémunération a été fixée à 6 000 euros par mois, prime d'ancienneté incluse. Il indique que les trois gérants, associés majoritaires percevaient une rémunération comprise entre 6 500 et 7 500 euros.

La SARL DLA était composée de 3 gérants et de deux salariés en ce compris M. [Z] [H].

La SARL DLA justifie que M. [Z] [H] était le salarié le mieux rémunéré comparativement à l'ensemble des salariés avec un salaire annuel brut de 72 000 euros.

Il n'est pas démenti que s'y ajoutent des dividendes sur résultats et des revenus sur l'immobilier professionnel d'un montant total non discuté de 18 055 euros.

Si comme le prétend le salarié, les mandataires gérants percevaient une rémunération plus élevée que la sienne, néanmoins, alors que les personnes avec lesquelles il se compare étaient toutes titulaires du diplôme d'expert-comptable et/ou commissaire aux comptes, ce qui leur conférait une responsabilité que M. [Z] [H] ne pouvait assumer, il était justifié qu'ils soient rétribués à ce titre.

Il n'en demeure pas moins qu'en dehors des mandataires sociaux, et bien que n'étant pas titulaire du diplôme d'expert-comptable ou/et de commissaire aux comptes, il est établi que M. [Z] [H] avait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise.

III - habilitation à prendre des décisions de façon largement autonome

M. [Z] [H] était en dernier lieu rémunéré en qualité de chargé de mission statut cadre N2 coefficient 500. Cette classification, dont le poste de référence dans la convention collective est celui de chef de service requiert une expérience alliant une compétence professionnelle totale et une capacité à assumer des hautes responsabilités techniques, humaines, organisationnelles, qui dispose d'une forte capacité d'initiative et assure le développement optimal tant des missions qu'il a en charge que de l'unité dont il est responsable.

La non attribution du coefficient 600 qui, selon les dispositions conventionnelles, s'applique au cadre de direction, lequel anime, dirige, organise son département, une unité, un service ou un établissement disposant d'une grande autonomie de fonctionnement et d'une structure interne très développée et est responsable des résultats de l'unité qu'il dirige, n'est pas en soit suffisante pour apprécier de la réalité des fonctions de M. [Z] [H].

Concernant ses fonctions purement techniques, il n'est pas discuté qu'il était en charge du dossier, devant à ce titre définir la stratégie de l'audit ou de la mission d'expertise-comptable, organiser, réaliser et superviser les contrôles, gérer les relations clients et préparer l'émission de l'opinion, en conformité avec les règles de la profession, pour signature par l'expert-comptable ou le commissaire aux comptes, puisque faute de disposer du diplôme nécessaire, il ne pouvait certifier les comptes.

Néanmoins, jusqu'à cette étape, son autonomie était pleine et entière.

En effet, dans un courriel adressé le 23 mars 2012 à Mme [BZ] et M. [A], M. [Z] [H] lui-même estimait le total des honoraires suivis par ses soins à 440K€, précisant que ce total concerne des dossiers dans lesquels aucun des cadres de premier rang n'intervient et que l'intervention des cadres de second rang est très limitée, puisque les honoraires facturés sur les dossiers où ils interviennent est de 53K€, ce qui démontre une grande autonomie dans l'accomplissement de ses missions.

IV - participation à la direction de l'entreprise

Le salarié invoque son absence de pouvoir en matière de ressources humaines.

Néanmoins, il résulte des éléments produits qu'il était consulté sur les questions relatives au recrutement, comme étant destinataire des candidatures sur lesquels il émettait son avis notamment le 10 mars 2015 mais aussi pour le recrutement d'un responsable pôle social en mai 2011, aux rémunérations, ainsi le 16 décembre 2011 concernant '[T]', sur l'organisation des congés pouvant même les valider, qu'il était associé à l'organisation de la fermeture du cabinet au cours de la période d'été. Ainsi, il résulte à ce propos d'un mail du 13 mars 2014 envoyé par M. [FI] [A] qu'il reprend la suggestion faite à ce titre par M. [Z] [H], à savoir imposer 3 semaines avec une souplesse au choix d'une semaine début/fin août, idée qu'il qualifiait d'intéressante, et qui était reprise également pour 2015, toujours sur la suggestion de M. [Z] [H] ; il était associé à l'évaluation de l'ensemble des collaborateurs et aux démarches de recherche d'une mutuelle pour les salariés de l'entreprise en septembre 2015, rencontrant à ce titre un assureur avec d'autres associés.

Par ailleurs, il donnait des consignes aux salariés comme cela résulte de certains mails, ne manquant pas de conclure le 7 novembre 2011 que les consignes doivent être impérativement suivies.

En ce sens, Mme [N] [E] atteste qu'elle a toujours reçu ses consignes de la Direction ou des associés experts comptables, signataires ou non, et plus particulièrement de M. [Z] [H] lequel a toujours été présenté depuis son arrivée en 2007 comme un associé et un membre de la direction, que M. [Z] [H] intervenait régulièrement et pouvait être amené à donner des consignes ou directives générales appliquées par l'ensemble du personnel, qu'il vérifiait fréquemment lorsqu'il n'était pas en déplacement que les salariés étaient bien à leur poste, s'inquiétant de connaître les tâches confiées et les dossiers concernés, et que lors des séminaires, il était présenté comme un membre du comité de direction.

M. [G] [RN], salarié de mars 2001 à octobre 2019 relate que lors du transfert des contrats de travail en 2004, la direction était assurée de manière plus accessoire par M. [Z] [H], mais que l'évolution a été dans le sens d'une participation plus importante à la direction des plus jeunes (Mme [BZ], M. [Z] [H] et [FI] [A]), qu'il a par ailleurs été amené à travailler sous la supervision de M. [Z] [H] pour certains dossiers, auquel il rendait compte, qu'il recevait ses directives, et que participant aux réunions animées par la Direction, M. [Z] [H] en faisait partie et savait s'en prévaloir.

S'il ne disposait effectivement d'aucune délégation pour engager des dépenses, néanmoins il avait accès à l'ensemble des éléments afférents aux éléments comptables du cabinet comme cela résulte de l'établissement par ses soins du suivi de la facturation du cabinet qu'il a adressé au CODIR le 8 juillet 2015, précisant l'emplacement où il a placé le suivi de facturation 2015 par dossier.

Il avait accès sans restriction aucune à la comptabilité du cabinet BSEC, au logiciel RH et paie de BSEC et aux comptes de la holding commune.

Par ailleurs, M. [Z] [H] a la qualité d'associé depuis 2003, année au cours de laquelle il a signé son premier pacte d'associés en vue de la reprise partielle des cabinets [F] [A] et Basse Seine Expertise Comptable. S'il était considéré comme associé égalitaire au même titre que les deux autres repreneurs ([X] [BZ] et [FI] [A]), ce principe a été momentanément rompu afin de se conformer aux règles ordinales exigeant l'obtention du diplôme d'expertise comptable et l'inscription sur la liste des commissaires aux comptes.

En 2012, M. [Z] [H] avec [X] [BZ] et [FI] [A] s'accordaient sur la reprise des titres des sociétés formant l'entité Acthéos.

Un nouveau pacte d'associés a été conclu le 25 octobre 2013 dans le cadre de l'acquisition du capital de l'ensemble économique constitué par les sociétés Basse Seine Expertise comptable, [A] [BS] et associés et DV Audit définissant ainsi le statut des associés dirigeants :

'sont associés dirigeants les associés membres de l'Ordre des Experts-Comptables et de la Compagnie Régionale des Commissaires aux comptes qui ont été agréés par les autres associés dirigeants statuant à la majorité simple.'

Leur rôle consiste à :

- définir la politique générale et l'organisation du cabinet, notamment en ce qui concerne l'orientation générale, l'organigramme et la chaîne des responsabilités, les liens avec les confrères et/ou les professions proches, les ressources humaines et leur utilisation (embauches, effectifs, promotions, plans de carrières, affectations)

- évaluer annuellement le patrimoine du cabinet et déterminer, au moment de l'assemblée générale annuelle, s'il y a lieu de réserver une quote-part du résultat de l'industrie, ainsi que sa répartition en fonction de l'activité de chacun.

M. [Z] [H] disposait de 9,75 % des parts.

Si la qualité d'associé est insuffisante à elle-seule à donner la qualité de cadre-dirigeant, toutefois, il est établi que M. [Z] [H] participait aux décisions de la société.

En effet, la SARL DLA établit que M. [Z] [H] était convoqué avec les membres gérants et les autres associés aux réunions hebdomadaires appelées 'réunion associés' fixées habituellement le vendredi matin, mais dont chacun, quelque soit son statut, pouvait solliciter un report de date en fonction de ses indisponibilités.

Si selon un document établi par la SARL DLA, le comité de direction était composé de Mme [S] [OH] et de MM. [I] [Y] et [FI] [A], néanmoins, dans le fonctionnement de la société, les réunions associés se confondent au moins pour partie avec les réunions du Codir et s'il est avéré que les associés non gérants avaient plutôt un rôle consultatif, la décision étant finalement prise par les mandataires gérant en l'absence d'unanimité, le fonctionnement habituel reposait en réalité sur une co-gestion entre tous les associés quelque soit leur statut.

D'ailleurs, ce mode de gestion a été repris dans un document dénommé 'Actheos Basse Seine 2020", certes postérieure au licenciement de M. [Z] [H], mais qui formalise le fonctionnement tel qu'il ressort des échanges entre les parties lorsque M. [Z] [H] était dans la société et qui évoque un CODIR hebdomadaire composé des 5 associés dont 3 dirigeants, avec un processus de décision à l'unanimité, avec un vote à la majorité des 3 dirigeants si besoin, qui en dernier lieu disposait du véritable pouvoir de décision, tandis que les associés avaient un rôle consultatif.

Ce fonctionnement ressort des attestations de Mme [X] [BZ], qui a été mandataire social et co-gérante, lorsqu'elle expose que M. [Z] [H] participait à l'ensemble des réunions entre associés ayant trait à la gestion courante de l'entreprise, mais aussi aux décisions majeures de la vie sociale : comité de direction du vendredi matin, réunions de suivi stratégique, animation du planning cadres avec les mêmes pouvoirs d'intervention et de décisions que les trois associés mandataires ou de Mme [NE] [L] qui confirme la présence de M. [Z] [H] aux réunions du comité de direction, auquel elle assistait également en sa qualité de responsable administrative du cabinet, ce qui lui permettait d'avoir toutes les informations nécessaires et de pouvoir les transmettre aux services concernés. Elle précise qu'au cours de ces réunions, M. [Z] [H] exprimait son opinion sur les sujets abordés et son avis était sollicité pour les prises de décision.

Sa participation aux décisions de la société est également établie :

-lorsqu'il émet son avis par mail du 9 décembre 2013 au sujet ' ATH' pour l'intégration d'un nouveau réseau,

-pour la facturation des dossiers dont il avait la responsabilité,

-pour choisir un nouveau logiciel 'Yooz'en septembre 2015,

-sur l'opportunité de changer de banque en mars 2016,

-lorsqu'il était informé des éléments ayant trait à la vie financière de l'entreprise et notamment en février 2016 des éléments concernant les difficultés de trésorerie de la société BSEC.

Il établissait des documents relatifs à la vie de l'entreprise au-delà de ses missions en qualité de chargé de mission chargé comme notamment l'élaboration d'un tableau de synthèse des dossiers sur lesquels les cadres ont passés plus de 50 heures en décembre 2008, un fichier excel 'Rému' faisant le point sur le prévisionnel des salaires bruts 2016, et était considéré comme un membre de la direction par les collaborateurs ainsi que cela résulte des attestations de Mme [MB], assistance administrative, qui expose qu'il avait accès au niveau des systèmes d'information aux mêmes droits que l'ensemble des associés (lecture, modification, suppression) et qu'il donnait des directives au secrétariat en tant qu'associé concernant tant l'organisation interne du cabinet que sur les dossiers clients.

Il concourait à la stratégie commerciale du cabinet en participant au groupe de travail association ayant décidé de la diffusion d'une lettre d'information appelée Fil Vert en version électronique, précisant dans un mail du 21 juin 2011 soutenir ce projet piloté par [GL] [XD] responsable technique et s'adressant et MM. [A] et [BS], concluant en ces termes : 'Si vous en êtes d'accord je confirme notre intérêt à [GL]' ; mais aussi en proposant au Codir de participer à une rencontre avec le Crédit agricole Normandie-Seine et plus spécifiquement l'agence dédiée spécifiquement aux professions médicales pour une présentation après qu'il ait vanté les compétences du cabinet en matière d'accompagnement des professions médicales.

Il n'est pas discuté qu'il était le référent formation en charge du plan de formation et à ce titre organisait la formation des collaborateurs et participait comme représentant de la société aux réunions de la direction formation de l'association technique ATH

Par ailleurs, il a été nommé responsable des procédures Tracfin et, à ce titre, chargé de la mise en place et du suivi des systèmes d'évaluation et de gestion des risques et des procédures correspondantes, mais également responsable de la mise en place et de la mise à jour régulière de la classification des risques de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme et du suivi de la formation des collaborateurs à la législation applicable à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.

Il a participé activement à l'élaboration du diagnostic du cabinet Acthéos datant de janvier 2015 dont il ressort qu'il se définit comme un cabinet pluri-disciplinaire, à la fois à taille humaine et d'envergure régionale, reconnu pour sa qualité, l'implication personnelle de ses associés et sa proximité avec la clientèle.

Concernant les relations entre associés, il est décrit :

- une bonne entente, des profils complémentaires et un objectif en commun (reprise du cabinet)

- décisions :

En général on est d'accord, donc on échange et unanimité

Avec des loupés et certaines décisions sans consultation.

- des réunions bimensuelles pas toujours tenues

- avec des difficultés à suivre les ordres du jour

- parfois on sort des réunions au cours desquelles des choses ont été évoquées mais non tranchées et on ne sait pas ce qu'on doit faire et qui doit le faire

- le manque de concertation, le fait de ne pas assez acter et formaliser conduit parfois à des prises de positions divergentes devant les collaborateurs.

Cette analyse conforte la co-gestion entre tous les associés, qu'ils soient ou non gérants, dans tous les domaines de la vie de l'entreprise.

Alors que M. [Z] [H] avait plusieurs fonctions transversales intéressant la vie de la société au delà de ses missions techniques d'assistant technique dans le domaine de l'expertise comptable/commissariat aux comptes, qu'il donnait son avis quant au choix des orientations prises, qu'il ressort de ce qui précède qu'il existait en réalité un mode de gestion collective dans lequel chaque associé était consulté sur les orientations stratégiques de la société et la vie de la société, et pas seulement sur les points intéressants les associés au titre de leur seul détention de parts sociales, la prédominance des gérants prévu dans les statuts de la société n'étant stipulé que pour permettre des décisions dès lors qu'il n'y avait pas unanimité sur une question pour éviter toute situation de blocage, il s'en déduit que M. [Z] [H], qui par ailleurs disposait d'une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, était habilité à prendre des décisions de façon largement autonome et percevait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise, avait la qualité de cadre dirigeant.

Dès lors, conformément aux dispositions de l'article L.3111-1 du code du travail, il n'est pas soumis aux dispositions des titres II et III, traitant respectivement de la durée du travail et des repos et jours fériés.

Aussi, la cour infirme le jugement entrepris ayant accordé un rappel de salaire, mais le confirme en ce qu'il a rejeté la demande au titre du travail dissimulé.

Sur les demandes au titre de la rupture du contrat de travail

I - irrégularité de la procédure

M. [Z] [H], qui précise que la société ne comportait pas de délégués du personnel, n'a pas été informé de son droit d'être assisté par un conseiller extérieur pour l'entretien préalable au licenciement, ce qui lui cause un préjudice dont il sollicite réparation à hauteur de la somme à titre principal de 8 495,92 euros et à titre subsidiaire de 6 002,35 euros puisque les seuls salariés de l'entreprise en étaient également associés et donc intéressés directement au litige dans un contexte où il était particulièrement fragile sur le plan psychologique.

La SARL DLA ne conteste pas sur le fond l'irrégularité mais sollicite la réduction de l'indemnisation, considérant que M. [Z] [H] ne fait pas la démonstration de son préjudice.

Dans les convocations à entretien préalable adressées les 19 mai et 24 mai 2016, le salarié a été informé de la possibilité d'être assisté par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, alors que l'article R.1232-1 du code du travail prévoit qu'en l'absence d'institutions représentatives dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister par un conseiller du salarié, ce qui doit être rappelé dans la lettre de convocation.

Compte tenu du contexte particulier de la procédure affectant certes un salarié mais aussi associé, il était particulièrement nécessaire que M. [Z] [H] connaisse ses droits quant au recours à un conseiller extérieur à la structure, et puisse avoir la possibilité effective d'y recourir, de sorte que la carence affectant l'information dispensée lui cause un préjudice dont la réparation a été justement appréciée par les premiers juges qui sont confirmés sur ce point.

II - motifs de licenciement

La SARL DLA, rappelant qu'elle exerce une activité strictement encadrée par des règles légales, déontologiques et professionnelles connues de M. [Z] [H], lequel était présenté comme très compétent dans le domaine associatif, considère que les graves manquements commis dans plusieurs dossiers suivis directement par lui en qualité de directeur de mission- associé technique justifient son licenciement pour faute grave.

M. [Z] [H], outre qu'il conteste pour partie les manquements qui lui sont imputés, fait valoir qu'en tout état de cause, ils ne traduisaient ni mauvaise volonté, ni intention frauduleuse de sa part, n'impliquaient aucun bénéfice personnel, alors qu'en 19 ans d'ancienneté, il n'avait jamais fait l'objet de la moindre sanction, ne serait-ce qu'un rappel à l'ordre.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Aux termes de la licenciement pour faute grave notifié à M. [Z] [H] le 9 juin 2016, il lui est reproché d'avoir commis des fautes d'une particulière gravité dans la gestion de dossiers qu'il traitait directement et en toute autonomie, fautes susceptibles d'engager tant les responsabilités civile, disciplinaire ou pénale du cabinet, que celles des commissaires aux comptes personnes physiques.

Il convient d'examiner les dossiers pour lesquels il est imputé des manquements au salarié.

l. Le client PAPILLONS BLANC DE L'EURE (PBE) :

La lettre de licenciement est ainsi rédigée :

'Le 22 avril, vous êtes venus dans mon bureau pour me faire part. selon vos propres termes, de 'plaintes pénales sur le fondement d`erreurs d'imputation comptables liées à des provisions pour retraite' pour ce client pour lequel vous intervenez en direct comme Manager de Mission Associé depuis août 2008.

Sur la base de ces informations, je vous ai demandé de fixer en urgence un rendez-vous avec la direction des PBE, qui s'est tenu le 25 avril après-midi en votre présence, celle du Directeur Général par intérim, du Président de l'association et de la Directrice Administrative et Financière des PBE.

A cette occasion, la direction des PBE m'a fait part de l'existence d'un compte de réserves injustifié à hauteur de 2 M€. Elle m'a également confirmé que trois plaintes pénales avaient été déposées : une par I'association, et deux par les organismes de tutelle : l'ARS, et le Conseil départemental de l'Eure, pour pratiques comptables irrégulières avec falsification de comptes administratifs pour la période 2004-2012.

En quelques jours. nous sommes passés d'une situation d'erreurs comptables à une fraude

pénale. sans compter le discrédit porté à la réputation du cabinet et la possible mise en cause de notre responsabilité civile, disciplinaire, voire pénale.

A ma demande, vous m'avez remis un rapport synthétique le 3 mai (couvrant la période 2010 -2015) dans lequel il était fait état de provisions IDR (indemnité de départ à la retraite). provisions pour remplacement et postes à pourvoir, et provisions pour formation et formation non engagée.

Afin de déterminer réellement ce qui relèverait d'erreurs d`imputation, d'irrégularités comptables ou de fraudes aux comptes administratifs, nous avons diligenté un audit complémentaire les 10 et 11 mai 2016.

Cet audit a révélé de graves irrégularités et exclu formellement que les charges en question puissent en partie se justifier par la nécessité de provisionner les IDR des prochaines années. Nous sommes donc très loin de la situation que vous avez pu me présenter.

Postérieurement, nous avons été informés de la mise sous administration provisoire de l'association PBE, la décision de l'ARS faisant état, pour la période 2004-2012 de 'faits d'une extrême gravité possiblement constitutif d'abus de confiance (...) et d'escroquerie (...)'.

Le Conseil départemental a pour sa part porté plainte pour 'des faits susceptibles de constituer des délits de prise illégale d'intérêt, de détournement de fonds publics, d'abus de confiance et d'escroquerie'.

Le 19 mai 2016. [IS] [J], cadre et auditeur sur ce dossier, nous a informé par écrit de la modification à son insu de certaines de ses notes de cycle pour le client PBE, notamment la synthèse personnel 2015, conduisant à 'maquiller' en provisions IDR ce qui était jusque-là noté au titre de comptes de réserves non justifiés. Ce collaborateur a par ailleurs expressément indiqué qu'iI n'avait 'jamais fait de travaux dans le sens d'une IDR'.

Sur la base de ces déclarations nous avons effectivement constaté le 'maquillage' d'informations effectué à distance à partir de votre ordinateur entre le 22 et le 25 avril 2016.

Comme vous le savez, ces modifications sont, en soi, plus que d'une extrême gravité : elles ont en outre été réalisées à une période ou nous avions rendez-vous le 25 avril à 18h avec la direction des PBE, et si j'avais été amené à lire en l'état vos notes, je n'aurais pas pu avoir une autre vue que celle que vous m'aviez laissé entendre : 'erreurs d`imputation IDR'.

Ce faisant, vous avez cherché tout autant à préserver votre responsabilité qu'à nous nuire ; vos explications à ce sujet ont clairement démontré que vous aviez parfaitement conscience de ce que vous faisiez.

Nous avons par ailleurs noté un courrier à destination du Président de l`Association, relevant d'une procédure d'alerte signé par vous seul, alors que vous n'ignorez pas la nécessité d'en référer au commissaire aux comptes en pareil cas et de la nécessité qu'i| soit signataire d'un tel courrier.

Sur un autre plan, la revue des procès-verbaux de Conseils d'administration et d'AssembIées Générales sur une période longue laisse apparaître que le commissaire aux comptes ne pouvait être le cabinet BASSE SEINE EXPERTISE COMPTABLE mais Monsieur [C] [BS]. Or, l'émission de rapports à l'entête de la société BASSE SEINE EXPERTISE COMPTABLE et l'étabIissement de déclarations d'activité mentionnant BASSE SEINE EXPERTISE COMPTABLE comme commissaire aux comptes titulaire, induit tout autant une confusion sur l`identité exacte du commissaire aux comptes qu'une possible remise en cause de la validité des Assemblées Générales sur une période longue, ainsi qu'une sanction disciplinaire. Ces faits sont eux aussi particulièrement graves.

Enfin, j'ai appris le 2 juin dernier que vous aviez vous-même établi l'annexe des comptes annuels des PBE, et ce en totale vioIation de nos normes tant professionnelles que déontologiques.'

Il est constant que depuis la fin de l'année 2008, M. [Z] [H] en sa qualité de responsable de mission, avait en charge le dossier de l'association Les Papillons blancs de l'Eure (PBE), à la suite de M. [SR], le commissaire aux comptes étant alors M. [BS] jusqu'en 2014, auquel a succédé M. [FI] [A].

Selon le plan de mission pour l'exercice 2013, il est par ailleurs justifié que M. [J] était le chef de mission, intervenant sous la supervision de M. [Z] [H].

Concernant les provisions injustifiées à hauteur de 2 millions d'euros, la SARL DLA fait valoir que M. [Z] [H] en avait nécessairement connaissance, qu'il ne peut s'agir d'une simple erreur, que le rapprochement annuel depuis 2008 des comptes et de la déclaration annuelle des données sociales permettait de faire apparaître des écarts qu'il aurait dû faire justifier.

Il est produit le rapport d'audit effectué par Mme [U] [WA] directrice de missions au sein de Basse Seine Expertise comptable, certes salariée du groupe mais qui joint des éléments objectifs permettant de vérifier les données qu'elle cite, qui procédant à une analyse des comptes 42860-438600-448600-428610 au 31 décembre 2015 à la suite de la révélation de la difficulté sur les réserves injustifiées, a constaté que les montants non justifiés atteignent 2 006 304 euros au 31 décembre 2015 par l'application de deux méthodes :

- la création de salarié fictif par l'ajout de lignes dans le tableau détaillé transmis aux tutelles

- et/ou la majoration des indices de salariés existants,

avec pour objectif de diminuer les excédents en provisionnant les masses budgétaires non consommés au Groupe 2 des établissements. Cette pratique est identifiée au moins à partir de 2004. Il est précisé qu'à partir de 2011, à l'arrivée d'un nouveau DG plus aucune reprise n'a été constatée mais les charges fictives sont demeurées au G2 et que ces pratiques ont cessé en 2013.

Il en est résulté que les autorités de tarification ont supporté des charges à tort diminuant ainsi l'excédent présenté en fin d'exercice et que si ces charges pouvaient en partie se justifier par la nécessité de provisionner les indemnités de départ en retraite des prochaines années, la modification volontaire des coefficients de quelques professionnels pour justifier un montant tronqué de la ligne 6411 ne permet pas cette conclusion.

Il s'en déduit que lorsque M. [Z] [H] a repris ce dossier, la pratique avait cours et il n'est donc pas responsable de sa mise en oeuvre initiale.

Néanmoins, alors qu'il s'agit d'une pratique des plus contestable, il n'a jamais alerté quiconque, et notamment pas le commissaire aux comptes de ce fonctionnement et ce malgré des interrogations à ce sujet dont il a été destinatiare.

En effet, M. [J] atteste qu'en arrivant en février 2013, il travaillait sur le dossier des Papillons blancs de l'Eure sous la supervision de M. [BS] en tant que commissaire aux comptes signataire et de M. [H], associé technique et directeur de mission, que lui-même est passé après quelques mois responsable de mission sous la responsabilité de M. [Z] [H] et à ce titre lui rendait compte de ses travaux, que M. [Z] [H] avait la charge de la planification, de l'orientation des travaux et de l'établissement des dates d'intervention, qu'il participait personnellement aux travaux d'audit, relisait et finalisait les synthèses, restituait les travaux à la direction et au conseil d'administration, présentait les rapports du commissaire aux comptes aux assemblées générales auxquelles il assistait.

Lors de son audit du cycle Personnel, il a rapidement identifié des comptes de réserves dont il ne parvenait pas à justifier des montants sur la base des travaux de ces prédécesseurs ; qu'en en discutant avec la directrice administrative et financière, elle lui a avoué à demi-mot qu'il s'agissait de postes de contreparties de dotations pour ajuster les résultats des comptes administratifs ; que l'évoquant avec M. [Z] [H], il s'est pris quelques réflexions désagréables, lui faisant comprendre que c'était le client qui payait les factures et qu'il fallait le défendre. Néanmoins, prenant ses responsabilités, il a écrit une note de synthèse de cycle personnel 2015 mentionnant que ces comptes de réserves n'étaient pas justifiés, laquelle a été adressée à M. [Z] [H] mais non au commissaire aux comptes par respect de la voie hiérarchique. Il ajoute que lorsqu'il a commencé à entendre parler de cette affaire par M. [H] le vendredi 22 avril 2016, il a pris la précaution d'imprimer et conserver un maximum de travaux et lorsque la semaine suivante M. [FI] [A] lui a demandé de ressortir ses travaux, sa note de synthèse avait été profondément modifiée, toutes mentions sur des réserves injustifiées ayant été supprimées et remplacée par les termes 'provisions IDR'.

Par ailleurs, dans un courriel du 15 juin 2016, Mme [M] directrice financière des Papillons blancs de l'Eure affirme que dans le cadre de l'exercice des missions du commissaire aux comptes, M. [Z] [H] a été interpellé dès mars 2014 sur des irrégularités constatées sur les méthodes et pratiques comptables, de sorte qu'elle refuse de signer la lettre de confirmation des déclarations de la direction au commissaire aux comptes proposant d'écrire ' vous nous avez signalé en avril 2016 des fraudes et des allégations de fraude....'.

L'argument selon lequel M. [Z] [H] n'avait pas en charge les comptes administratifs de ce client, mais seulement sa comptabilité est démenti par :

- le compte-rendu du comité de direction de PBE qui le mentionne expressément et nommément lorsqu'ils abordent les comptes administratifs le 19 mars 2012 en indiquant que le commissaire aux comptes est au siège, que le contrôle est quasiment terminé, qu'il a été approfondi concernant les ressources humaines avec présentation des dossiers du personnel, des salaires, des déclarations de charges sociales, que M. [O] conclut que tous les indicateurs sont au vert et que les provisions ont été acceptées sans commentaires, qu'il reste à faire l'étude comparative N et N-1, qu'il demande également à rencontrer les directeurs des établissements,

- le mail du 2 avril 2015 que lui a adressé Mme [M] et lui communiquant le tableau des résultats comptables et comptes administratifs pour 2013 et 2014 et restant à sa disposition pour toutes informations complémentaires,

- les échanges avec [IS] [J] au sujet des comptes administratifs,

Il est ainsi reproché à M. [Z] [H], actif comme associé technique de 2008 à 2015 de ne jamais avoir alerté le commissaire aux comptes signataire de cette situation.

M. [Z] [H] fait valoir qu'il n'a fait que poursuivre une pratique mise en oeuvre avant qu'il n'assure le suivi du dossier et qui était forcément connue du commissaire aux comptes sauf à feindre d'ignorer la situation pour rejeter plus facilement la responsabilité des anomalies sur son subordonné en cas de difficulté.

Il résulte des différents échanges qui ont suivi l'information relative à ce point que M. [FI] [A] paraît découvrir la difficulté. Néanmoins, dans son courriel du 26 avril 2022, il mentionne qu'il avait été demandé de faire un point sur les IDR au 31 décembre 2014 et que pour l'audit 2015, il avait fait part des échos émanant d'un banquier de montants dans les comptes de cet ordre de grandeur, outre quelques rumeurs de salariés fictifs et c'était alors contenté de la réponse de M. [Z] [H] lui disant que tout était ok car cela résultait du passage aux RTT.

Outre que la réponse imputée au salarié lui disant que tout OK émane de M. [A] lui-même, à tout le moins, alors que le commissaire aux comptes dispose d'informations particulièrement graves concernant d'éventuelles irrégularités, compte tenu des responsabilités qui lui incombent, sa réaction peut être qualifiée des plus légères, s'en remettant totalement à M. [Z] [H] sans chercher à contrôler plus avant, démontrant ainsi qu'il se reposait totalement sur le directeur de mission, ce qui constitue sans aucun doute une négligence ou imprudence fautive qui pour autant ne dédouane pas totalement M. [Z] [H] de ses propres responsabilités, dès lors que si le rôle du commissaire aux comptes consiste à contrôler et valider les comptes, il le fait sur la base du travail préparé en amont par les collaborateurs et en l'espèce par M. [Z] [H], associé technique et directeur de mission, lui-même contrôlant le travail du responsable de mission, et il appartient aux collaborateurs, dans le souci du respect des règles applicables à la matière, d'alerter soit son supérieur hiérarchique soit le commissaire aux comptes d'anomalies constatées compte tenu de l'importance attachée à la certification des comptes.

Aussi, même si les provisions étaient une masse constituée depuis plus de 15 ans dont il a hérité, compte tenu de ses missions et de ses propres responsabilités, dès lors que des irrégularités lui ont été signalées, soit en 2014 comme l'indique Mme [M], soit en 2015 comme déclaré par M. [J], il lui appartenait de vérifier et d'alerter le commissaire aux comptes en charge du dossier de ses constats pour dénoncer une pratique irrégulière.

Or, alors que M. [Z] [H] avait été alerté par M. [J] de questionnement relatif aux comptes de réserves, il n'a pas plus investigué, puisqu'au contraire il répondait à celui-ci en lui faisant comprendre que c'était le client qui payait les factures et qu'il fallait le défendre.

S'agissant de la modification de la note de cycle de M. [J], M. [Z] [H] ne le conteste pas mais explique que la rectification apportée consistait à faire état de ce que les provisions étaient constituées en vue du paiement des indemnités retraite des salariés ce qui correspondait strictement à la situation comptable de l'association PBE, ce qui était sans incidence sur la présentation litigieuse des comptes administratifs, ajoutant également que depuis 2011, il n'y a eu aucun mouvement sur ces provisions, ce qui est également conforme à la réalité comptable, ne supprimant que la mention ' seuls les comptes de réserve n'ont pu être justifiés'

Il est établi que M. [Z] [H] a apporté des modifications sur le fichier correspondant à la note de synthèse du 12 avril 2016 rédigée par M. [J] en substituant en page 1 paragraphe 2 : zone de risque/risque identifié 'Suivi des provisions IDR' à ' Reprise de certains postes servant de réserves, ajoutant en page 3 la phrase suivante 'Depuis 2011 il n'y a quasiment aucun mouvement sur ces provisions', page 4 , la phrase suivante a été supprimée : Seuls les comptes de réserves n'ont pu être justifiés'.

Il résulte des constatations réalisées par Mme [D] [EF] huissier de justice, que le document créé le mardi 12 avril 2016 à 10h46 avait été modifié le samedi 23 avril 2016 à 18:51:44, et qu'il résulte de l'analyse du fichier crypté informatique sur lequel sont indiquées toutes les connexions des collaborateurs que M. [Z] [H] s'est connecté le 23 avril 2016 entre 17h51 et 19h30. Cela est corroboré par M. [K] [P] PDG de la société Webaxys qui atteste qu'à la demande des dirigeants du cabinet, il leur a été demandé d'analyser les journaux d'accès de M. [Z] [H] sur la journée du 23 avril 2016. Cette analyse révèle qu'il a utilisé l'application installée sur son ordination portable nommée Client VPN pour se connecter aux services de l'entreprise Basse Seine Expertise Comptable entre 17h51 et 19h30. Aucun autre collaborateur du cabinet n'était connecté au réseau de l'entreprise par le biais du VPN sur cette tranche horaire.

Cette intervention, le lendemain du jour où M. [H] a informé M. [A] d'un problème d'imputation comptable erronée et avant le lundi 25 avril 2015, date à laquelle était fixé en urgence un rendez-vous au siège social du client PBE, alors qu'au vu de la chronologie des événements et informations apportées, consistant notamment à supprimer la mention selon laquelle ' seuls les comptes de réserve n'ont pu être justifiés', ce qui ne peut être considéré comme anodin au vu des irrégularités suspectées, doit s'analyser comme ayant pour objet de dissimuler l'information dont il disposait résultant de la note de synthèse rédigée par son collaborateur, ce qui ne peut seulement se justifier dans un souci de préserver la structure dont il est l'associé, comme ayant aussi un intérêt personnel à donner de la situation une présentation qui lui était plus favorable.

Dès lors, ce grief est établi.

Concernant la procédure d'alerte, si M. [Z] [H] n'était pas habilité à adresser une lettre relevant d'une procédure d'alerte, même à supposer que le courrier adressé le 4 mai 2016 répondait à cette finalité, laquelle relève de l'initiative du commissaire aux comptes, néanmoins, alors que M. [Z] [H] exerçait de manière habituelle toutes les missions incombant au commissaire aux comptes à l'exception de la certification des comptes, cette démarche ne saurait justifier une rupture du contrat de travail.

S'agissant de la confusion d'identité du commissaire aux comptes en établissant les rapports du commissaire aux comptes de l'association PBE sur papier à entête de la société Basse Seine Expertise comptable, alors que le commissaire aux comptes était M. [BS], ce qui n'est pas contesté, le commissaire aux comptes alors signataire ne pouvait que le relever au moment de la signature, ce qui n'apparaît pas avoir été fait, de sorte qu'il n'a pas été mis fin à cette pratique pourtant irrégulière et que dès lors il ne saurait être invoqué au soutien du licenciement par l'employeur qui l'a de fait admise.

S'agissant de l'établissement de l'annexe des comptes annuels de PBE en violation des normes professionnelles et déontologiques, la SARL DLA verse au débat le mail adressé par Mme [M] le 13 janvier 2017 mentionnant que M. [Z] [H] avait pour pratique de rédiger les annexes de l'ATDE, laquelle ne se confond pas avec PBE, seul M. [FI] [A] évoquant dans sa réponse la pratique de M. [H] relative à la rédaction de l'annexe, ce qui, compte tenu de ses fonctions au sein de la SARL DLA et de sa nécessaire partialité, est insuffisant pour établir la réalité de ce grief.

Aussi, alors que M. [Z] [H] conteste ce grief concernant PBE, l'employeur n'apporte pas la preuve de la réalité du manquement concernant cette association, seule visée dans la lettre de licenciement à ce titre.

2. Le client ATDE :

Il résulte de la lettre de licenciement que ' l'audit que nous avons diligenté les 10 et 11 mai dernier a également révélé que le dossier ATDE, géré directement par vous, était lui aussi concerné par ces mêmes pratiques, à hauteur d'environ 80.000 €.

Vous nous avez affirmé au cours de l'entretien préalable que les financeurs étaient informés de cette situation : leur connaissance supposée ne modifie en rien le caractère fautif des faits constatés. ni leur gravité.'

Il ressort de l'audit réalisé par Mme [WA] que la comptabilité de l'ATDE est gérée par les PBE avec les mêmes pratiques. Dans un point de situation complémentaire, il est ajouté que la dernière dotation date de 2008 pour 1 540 sur le 428600, soit un global de 2 417,80 et que depuis ce ne sont que des reprises.

Outre que cette pratique a été initiée avant la reprise de ce dossier par M. [Z] [H], il résulte du rapport du commissaire aux comptes sur les comptes annuels pour l'exercice clos le 31 décembre 2015, signé le 18 juin 2016 par M. [A], que les comptes annuels 2015 intègrent au poste ' charges à payer' une masse dont l'origine de la constitution n'a pu être retracée ni justifiée pour un montant de 81 171 euros, que cette somme présente un caractère de réserve, sur laquelle les primes annuelles versées au personnel au titre d'un usage sont imputées. En l'absence d'accord formel des financeurs sur le sort de cette réserve, mais pour laquelle la transparence de son utilisation a toujours été assurée (primes versées aux salariés), la réserve correspondante a été laissée aux comptes du bilan, avec reclassement de ces sommes en 2016.

Si l'imputation de ces sommes est critiquable et doit faire l'objet à terme d'une modification, néanmoins, aucun caractère frauduleux n'est établi au point que le commissaire aux comptes la valide pour l'année échue, de sorte qu'aucun manquement fautif ne peut être imputé à M. [Z] [H] à ce titre.

3.- Le client ARM :

Selon la lettre de licenciement, 'parallèlement, Monsieur [GL] [V] (expert-comptabIe et commissaire aux comptes) a audité les dossiers de commissariat aux comptes traités directement par vos soins et sur lesquels il est signataire.

Fin avril 2016, il a été amené à constater de graves erreurs comptables, principalement sur les stocks de matières premières, en cours et produits finis pour l'exercice 2014.

L'incidence chiffrée de ces graves erreurs comptables est très significative : sur un résultat net au 31/12/2015 déficitaire de 1,9 M€, 0,9 M€ sont directement liés à des corrections d'erreurs antérieures.

Ces graves erreurs résultent clairement de vos fautes professionnelles dans la conduite des missions pour ce client (matérialisation de tests sur les principes et méthodes comptables retenus pour la valorisation des stocks, identification du risque de fraudes, et revue des écritures comptables).

En votre qualité de Manager de Mission, vous auriez dû matérialiser un risque majeur de contrôle interne sur le suivi de la production et le suivi des stocks. Mais vous n'avez pas effectué les travaux qui auraient permis d'identifier cette insuffisance majeure, notamment vous n'avez réalisé aucun contrôle visant à valider la valorisation des stocks au 31/12/2014. Si les travaux de vérification avaient réellement été effectués, vous n'auriez pas pu ne pas identifier un tel risque sur les stocks.

ll en est ainsi résulté une opinion sur les comptes 2014 inappropriée, et nous émettons à cet égard les plus vives réserves sur le dossier de travail de commissariat aux comptes pour ce client que vous avez inséré et modifié sur le réseau informatique en mai 2016, action qui est elle aussi - et à elle seule - susceptible d'engager notre responsabilité civile, disciplinaire voire pénale.

Notre réputation et notre image ont, ici encore, été fortement détériorées au sein du groupe dont la société ARM est membre.'

Il résulte de l'audit réalisé par M. [V] le 21 juin 2016, commissaire aux comptes qu'au cours de l'exercice 2015, des corrections d'erreurs ont été comptabilisés pour un montant cumulé de 932K€ s'expliquant par :

- des encours de production comptabilisés en double à tort lors des exercices précédents en raison notamment d'un suivi insuffisamment précis des entrées et sorties physiques d'articles au cours du processus de production : incidence 455K€

- l'arrivée du nouveau responsable supply chain qui a permis de mieux tracer les flux de pièces et de procéder à l'enregistrement d'écarts d'inventaire au cours de l'exercice 2015 : incidence 335 K€

- au regard de la consommation réelle de matières en consignation au cours de l'exercice 2014 des fournisseurs ont demandé au cours de l'exercice 2015 des facturations complémentaires qui n'avaient pas été anticipées au 31/12/2014 : incidence 142K€.

Il est donc reproché à M. [Z] [H] de ne pas avoir identifié un risque majeur de contrôle interne sur le suivi de la production et le suivi des stocks.

M. [Z] [H] n'a jamais évoqué de difficultés pour établir l'inventaire physique auquel il a procédé le 5 janvier 2015 accompagné pour ce faire de M. [UX] pour un temps respectif de 9h et 8h50, avant de s'y rendre à nouveau le 13 janvier 2015, accompagné cette fois par M. [R] pour une durée comptabilisée à hauteur de 9 heures chacun.

M. [Z] [H] ne conteste pas ne pas avoir détecté l'erreur qui lui est imputée, mais l'explique par ses conditions de travail loin d'être idéale chez ce client.

Alors qu'il résulte des éléments du débat que M. [Z] [H] a réellement accompli les opérations d'inventaire avec sérieux mais dans des conditions rendues moins aisées, faute notamment pour l'entreprise de ne pas avoir arrêté la production, du déplacement de stocks de matières premières et un listing des OF en cours inexploitable, outre qu'il s'agit d'un événement isolé, en tout état de cause, il ne pourrait relever que d'une insuffisance professionnelle, ne pouvant justifier un licenciement pour faute grave.

La lettre de licenciement visait également les réserves sur le dossier de travail de commissariat aux comptes concernant ce client qu'il a inséré et modifié sur le réseau informatique en mai 2016, action susceptible d'engager la responsabilité civile, disciplinaire voire pénale.

Il ressort du procès-verbal de constat de l'huissier dressé le 14 juin 2016 que M. [Z] [H] est intervenu sur le dossier 2014 ARM le 4 mai 2016. Néanmoins, la nature de la modification n'est pas décrite, de sorte qu'il n'est pas possible de déterminer s'il a été procédé à des modifications de fond, lesquelles sont interdites au-delà de la signature du rapport par le commissaire aux comptes ou des modifications de forme lesquelles sont admises dans un délai de quatre-vingt dix jours après la réunion de l'organe appelé à statuer sur les comptes.

4. Les clients [B] [HO] et [W] :

La lettre de licenciement est ainsi rédigée :

'Enfin, nous avons découvert la tenue de deux Assemblées Générales pour les clients [B] [HO] et ETENNMARE, sans information du commissaire aux comptes et sans que celui ci ait été en mesure d'établir son rapport sur les comptes annuels.

Cette situation nécessite l'annulation des deux assemblées générales d'approbation des comptes annuels pour ces deux structures. Aucune opinion sur les comptes annuels n'a pu avoir été émise.

Là encore, ces fautes entachent forternent la réputation du cabinet.'

Il est établi que M. [Z] [H] était présent les 27 avril 2016 et 28 avril 2016 aux assemblées générales de l'association [W] et de l'EHPAD [B] [HO], y prenant la parole en qualité de commissaire aux comptes, alors que les rapports relatifs aux comptes annuels pour l'exercice 2015 n'étaient pas établis et d'ailleurs pour couvrir ses manquements, il a transmis à chacun des clients, postérieurement à la tenue de l'assemblée générale, une lettre de confirmation des déclarations de la direction pour signature qu'il a antidatée.

Le manquement est ainsi établi, peu important que qu'une telle situation se soit déjà produite en 2015 pour le dossier Fombi Versailles.

Néanmoins, le commissaire aux comptes ne peut feindre d'ignorer une telle situation, comme étant de sa responsabilité de s'assurer que les rapports relatifs aux comptes annuels d'un client soient établis avant la date de l'assemblée générale, à laquelle le cabinet est représenté pour présenter les comptes.

Au regard des développements qui précèdent, sont établis le défaut d'informations relatives aux irrégularités affectant les comptes de l'association des Papillons blancs de l'Eure, la modification apportée sur le note de synthèse rédigée par M. [J] et d'avoir présenté en assemblée générale des comptes qui n'avaient pas été certifiés par le commissaire aux comptes.

Compte tenu des responsabilités de M. [Z] [H] qui certes n'avait pas la qualification d'expert-comptable ou de commissaire aux comptes, mais avait acquis une grande expérience, voire même une expertise, compte tenu d'une ancienneté de longue date, d'une réelle implication dans ses missions et d'une parfaite connaissance des règles applicables à une profession réglementée, le manquement essentiellement relatif au dossier afférent au dossier des Papillons blancs constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement au regard des impacts possibles de telles irrégularités qu'il connaissait et qu'il a laissé persister, sans néanmoins que cette faute empêche la poursuite du contrat de travail, l'employeur ayant aussi une responsabilité comme ayant accès aux informations qui lui auraient permises de s'interroger sur les provisions constituées, ce qu'il n'a jamais fait, se reposant sur M. [Z] [H] sans grand questionnement.

Ainsi, la cour confirme le jugement entrepris ayant dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave.

Sur les conséquences du licenciement

Faute de retenir la demande de M. [Z] [H] au titre des heures supplémentaires contrairement aux premiers juges, en considération d'un salaire de 6 002,35 euros les indemnités de rupture allouées à M. [Z] [H] s'élèvent aux sommes suivantes :

- indemnité compensatrice de préavis : 18 007,05 euros

- congés payés afférents : 1 800,70 euros

- indemnité de licenciement : 29 178,09 euros

Sur les dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie pour partie succombante, la SARL DLA est condamnée aux entiers dépens, déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à M. [Z] [H] la somme de 1 000 euros en cause d'appel, en sus de la somme allouée en première instance pour les frais générés par l'instance et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à M. [Z] [H] un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et les congés payés afférents et a statué sur les indemnités de rupture ;

Statuant à nouveau,

Déboute M. [Z] [H] de ses demandes au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents ;

Condamne la SARL DLA à payer à M. [Z] [H] les sommes suivantes :

indemnité compensatrice de préavis: 18 007,05 euros

congés payés afférents : 1 800,70 euros

indemnité de licenciement : 29 178,09 euros

Le confirme en ses autres dispositions non contraires ;

Y ajoutant,

Condamne la SARL DLA à payer à M. [Z] [H] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Déboute la SARL DLA de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Condamne la SARL DLA aux entiers dépens de première d'instance et d'appel.

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/03118
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;19.03118 ?
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