N° RG 19/01343 - N° Portalis DBV2-V-B7D-IEL4
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 29 JUIN 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE ROUEN du 05 Février 2019
APPELANTE :
Madame [L] [D]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Thierry VALLAT, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
URSSAF HAUTE NORMANDIE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Mme [V] [I] en vertu d'un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 12 Avril 2022 sans opposition des parties devant Monsieur POUPET, Président, magistrat chargé d'instruire l'affaire.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur POUPET, Président
Madame ROGER-MINNE, Conseillère
Madame POUGET, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
M. CABRELLI, Greffier
DEBATS :
A l'audience publique du 12 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 25 mai 2022, délibéré prorogé au 29 Juin 2022
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 29 Juin 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Monsieur POUPET, Président et par M. CABRELLI, Greffier.
* * *
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
La caisse du régime social des indépendants (RSI) de Haute-Normandie a notifié le 8 juillet 2015 à Mme [L] [D] son affiliation rétroactive à compter du 1er'septembre 2011 puis lui a adressé plusieurs mises en demeure de payer des cotisations, à savoir':
- le 7 mars 2016 pour un montant de 37 709 euros au titre du 4ème trimestre 2015 et de la régularisation de 2012, 2013 et 2014,
- le 6 avril 2016 pour un montant de 4 560 euros au titre de la régularisation de 2015,
- le 6 septembre 2016 pour un montant de 7'111 euros se rapportant au 3ème trimestre 2016 et à la régularisation de 2013,
- le 11 juillet 2017 pour un montant de 6'941 euros au titre des 1er et 2ème trimestres 2016, 1er et 2ème trimestre 2017,
- le 10 octobre 2017 pour 4'323 euros au titre du 3ème trimestre 2017.
Elle lui a également fait signifier plusieurs contraintes :
- le 27 septembre 2017 pour 5 607 euros, soit 5 091 euros de cotisations et 516 euros de majorations de retard, se rapportant à l'échéance de régularisation 2013 et au 3ème trimestre 2016,
- le 14 décembre 2017 pour 6 941 euros, soit 6 271 euros de cotisations et 670 euros de majorations de retard se rapportant aux 1er et 4ème trimestres 2016, 1er et 2ème trimestres 2017,
- le 2 mai 2018 pour 4 250 euros, soit 4 029 euros de cotisations et 221 euros de majorations de retard se rapportant au 3ème trimestre 2017.
Mme [D] a contesté la mise en demeure du 7 mars 2016 pour un montant de 37 709 euros et formé opposition aux trois contraintes devant le pôle social du tribunal de grande instance de Rouen qui, par jugement du 5 février 2019, a :
- constaté que les cotisations au titre de l'année 2012 étaient prescrites et débouté Mme [D] du surplus de ses demandes,
- confirmé la décision de la commission de recours amiable du 9 mars 2016 notifiée le 20 juin 2016 validant les mises en demeure du 7 mars 2016 et du 6 avril 2016,
- condamné Mme [D] à payer à la caisse RSI Haute Normandie la somme totale de 34 404 euros sauf mémoire, se détaillant comme suit :
* principal : 31 086 euros ( soit 28 701 euros au titre de la régularisation des années 2013 et 2014 et du 4ème trimestre 2015 et 2 385 euros au titre de la régularisation de l'année 2015),
* majorations de retard : 3 318 euros ( soit 2 761 euros au titre de la régularisation des années 2013 et 2014 et du 4ème trimestre 2015 et 557 euros au titre de la régularisation de l'année 2015).
Mme [D] a relevé appel de ce jugement le 13 mars 2019 et, par conclusions remises le 7 janvier 2022, reprises oralement à l'audience, demande à la cour :
- d'annuler les mises en demeure des 7 mars et 6 avril 2016 et «'subséquement'» l'ensemble de la procédure diligentée par l'Urssaf,
- débouter l'Urssaf de ses demandes nouvelles,
- condamner l'Urssaf à lui payer 34'404 euros à titre de dommages et intérêts outre 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
L'Urssaf, par conclusions remises le 5 novembre 2021 et soutenues oralement lors de l'audience, demande pour sa part à la cour de :
- confirmer le jugement déféré,
- valider la contrainte signifiée le 27 septembre 2017 pour son montant de 5607 euros, soit 5 091 euros de cotisations et 516 euros de majorations de retard, se rapportant à l'échéance de régularisation 2013 et au 3ème trimestre 2016,
- valider la contrainte signifiée le 14 décembre 2017 pour son montant, de 6941 euros, soit 6'271 euros de cotisations et 670 euros de majorations de retard se rapportant aux 1er trimestre 2016, 4ème trimestre 2016, 1er trimestre 2017 et 2ème trimestre 2017,
- valider la contrainte signifiée le 2 mai 2018 pour son montant de 4 250 euros, soit 4'029 euros de cotisations et 221 euros de majorations de retard se rapportant au 3ème trimestre 2017,
- condamner Mme [D] à lui payer la somme totale de 17 012,54 euros sauf mémoire, se détaillant en 15 391 euros en principal, 1 407 euros en majorations de retard et 214,54 euros en frais de signification,
- condamner Mme [D] aux dépens,
- rejeter les demandes de condamnation au titre des dommages-intérêts et au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est renvoyé aux écritures des parties pour le détail de leur argumentation.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les mises en demeure des 7 mars et 6 avril 2016
Mme [D] fait valoir qu'en l'absence de décompte détaillant le calcul des cotisations exigées au regard de ses revenus et des taux applicables, l'Urssaf ne justifie pas de sa créance et que les mises en demeure en question ne lui permettent pas d'apprécier le bien fondé des sommes réclamées.
En vertu de l'article L 244-2 du code de la sécurité sociale, toute action ou poursuite aux fins de recouvrement de cotisations engagée par un organisme de sécurité sociale est obligatoirement précédée par une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l'employeur ou au travailleur indépendant.
L'article R 244-1 indique que l'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Les mises en demeure litigieuses répondent à cette exigence dès lors qu'elles mentionnent, pour chaque somme demandée, sa cause (cotisations au titre des différents risques': maladie-maternité, invalidité-décès, etc.), sa nature (provisionnelle ou régularisation, cotisation ou majoration), et la période à laquelle elle se rapporte.
Les textes précités n'exigent pas la mention du détail du calcul desdites sommes.
Le moyen soulevé par l'appelante pour conclure à l'annulation desdites mises en demeure est donc inopérant et sa demande de ce chef ne peut prospérer.
Mme [D] ne discute pas utilement le montant que le tribunal l'a condamnée à payer à l'Urssaf au titre des mises en demeure susvisées au vu des explications de cet organisme, reprises devant la cour, sur la méthode et la chronologie du calcul des cotisations considérées, l'évaluation forfaitaire puis la révision une fois connus les revenus de l'intéressée (qui sont rappelés), les échéanciers d'appel des cotisations et les paiements intervenus.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement sur ce point.
Sur les autres demandes de l'Urssaf
Mme [D] écrit à ce sujet : «'L'Urssaf ne craint pas de solliciter la validation d'autres contraintes sur le bien fondé desquelles le juge aurait omis de statuer ! Elle réclame ainsi un montant de 17'012,54 euros. Pourtant, non seulement l'Urssaf n'a formé aucun appel incident dans les délais qui l'autoriserait à formuler cette demande. Par ailleurs, les demandes de l'Urssaf ne concernent que la mise en demeure du 7 juin 2016 et du 6 avril 2016. Il s'agit donc de demandes nouvelles totalement irrecevables'».
Il convient de rappeler à Mme [D] que le tribunal, ainsi que cela ressort de son exposé du litige, était saisi par elle-même non seulement de la contestation des mises en demeure examinées ci-dessus mais aussi d'oppositions à trois contraintes, tous ces dossiers ayant été joints, contraintes dont l'Urssaf demandait pour sa part la validation, et il est exact qu'il a omis de statuer sur les demandes des parties relatives aux contraintes (contestation/validation). L'Urssaf n'avait pas pour autant de raison d'interjeter appel (principal ou incident) du jugement, qui lui était favorable, puisqu'elle n'entendait pas critiquer des chefs de celui-ci mais voir statuer par la cour sur les demandes sur lesquelles le tribunal a omis de le faire et qu'elle a mis à profit l'appel interjeté par Mme [D], dans un souci de bonne administration de la justice alors même que cela la prive d'un degré de juridiction, pour demander à la cour de réparer cette omission de statuer ainsi que la possibilité en a été admise de manière constante.
Les contraintes en question répondent, comme les mises en demeure examinées ci-dessus, aux exigences de forme posées par l'article R 244-1 susvisé ; l'Urssaf expose, ici aussi, la méthode et la chronologie du calcul des cotisations considérées, l'évaluation forfaitaire puis la révision une fois connus les revenus de l'intéressée, les échéanciers d'appel des cotisations et les paiements intervenus, éléments contre lesquels Mme [D] ne développe aucune critique argumentée.
Il y a lieu, dès lors, de faire droit à la demande de l'organisme social de ce chef, la condamnation à paiement comprenant les frais de signification des contraintes en plus des montants de celles-ci.
Sur la demande de dommages et intérêts
Mme [D] soutient que son affiliation rétroactive, intervenue le 9 juillet 2015 à effet de septembre 2011, constitue une faute de l'Urssaf qui, ce faisant, a mis son activité en péril et doit l'indemniser à hauteur des cotisations réclamées.
Toutefois, l'Urssaf expose que Mme [D], dont il n'est pas contesté qu'elle avait été affiliée au RSI en Ile de France de 2004 à mars 2011, a entrepris une nouvelle activité indépendante en Haute-Normandie en septembre 2011 mais n'en a informé le RSI, par l'intermédiaire de son comptable, qu'en 2015 et l'intéressée, qui avait l'expérience de l'affiliation, n'apporte aucune preuve de démarches qu'elle aurait faites en vue d'être affiliée en temps voulu au RSI en raison de sa nouvelle activité.
C'est donc à bon droit que les premiers juges l'ont déboutée de sa demande de ce chef.
Il appartient à Mme [D], partie perdante, de supporter la charge des dépens et de ses autres frais.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
confirme le jugement entrepris,
y ajoutant,
valide :
- la contrainte signifiée le 27 septembre 2017 pour son montant de 5 607 euros, soit 5'091 euros de cotisations et 516 euros de majorations de retard, se rapportant à l'échéance de régularisation 2013 et au 3ème trimestre 2016,
- la contrainte signifiée le 14 décembre 2017 pour son montant de 6 941 euros, soit 6'271 euros de cotisations et 670 euros de majorations de retard, se rapportant aux 1er trimestre 2016, 4ème trimestre 2016, 1er trimestre 2017 et 2ème trimestre 2017,
- la contrainte signifiée le 2 mai 2018 pour son montant de 4 250 euros, soit 4'029 euros de cotisations et 221 euros de majorations de retard se rapportant au 3ème trimestre 2017,
condamne Mme [D] à payer à l'Urssaf de Haute-Normandie la somme totale de 17'012,54 euros, le présent arrêt se substituant aux contraintes comme titre exécutoire,
déboute Mme [D] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
la condamne aux dépens.
Le greffier Le président