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20/10/2022 | FRANCE | N°20/00530

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 20 octobre 2022, 20/00530


N° RG 20/00530 - N° Portalis DBV2-V-B7E-IMZ3





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE



ARRET DU 20 OCTOBRE 2022











DÉCISION DÉFÉRÉE :





Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 13 Janvier 2020





APPELANTE :



Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA [Localité 2]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]



représentée par Me Linda MECHANTEL de la SCP BONIFACE DAKIN

& ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Karine MAUREY-THOUOT, avocat au barreau de ROUEN







INTIMES :



Monsieur [H] [P]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]



représenté par Me Sophie DEFRES...

N° RG 20/00530 - N° Portalis DBV2-V-B7E-IMZ3

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 20 OCTOBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROUEN du 13 Janvier 2020

APPELANTE :

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA [Localité 2]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Linda MECHANTEL de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Karine MAUREY-THOUOT, avocat au barreau de ROUEN

INTIMES :

Monsieur [H] [P]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représenté par Me Sophie DEFRESNE, avocat au barreau de ROUEN

Maître [G] [R], mandataire judiciaire de la liquidation judiciaire de la Société COIFFURE DE LAFAYETTE

[Adresse 1]

[Localité 2]

n'ayant pas constitué avocat

régulièrement assigné par acte d'huissier en date du 17/03/2020

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 07 Septembre 2022 sans opposition des parties devant Madame ALVARADE, Présidente, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame ALVARADE, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame DUPONT, Greffière

DEBATS :

A l'audience publique du 07 Septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Octobre 2022

ARRET :

REPUTE CONTRADICTOIRE

Prononcé le 20 Octobre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame ALVARADE, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

FAITS ET PROCÉDURE 

 

M. [H] [P] a été engagé par la société Coiffure de Lafayette en qualité de coiffeur, suivant contrat à durée déterminée du 10 mars au 9 juin 2018, moyennant un salaire brut moyen mensuel qui était de 1498,50 euros.

  

M. [P] expose qu'au cours de la relation de travail, ses salaires étaient régulièrement réglés avec retard, qu'il a dû relancer son employeur pour obtenir ses documents de fin de contrat et que postérieurement à la rupture du contrat de travail, il a appris que l'ensemble de ses salaires n'avait pas fait l'objet d'une déclaration auprès de l'URSSAF.

 

Considérant que son contrat de travail était dénué de motif et se prévalant de manquements de son employeur à ses obligations, il a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, l'inscription au passif de la liquidation de la société Coiffure de Lafayette de diverses sommes à titre d'indemnité et de dommages et intérêts. 

  

Par jugement rendu le 13 janvier 2020, le conseil de prud'hommes de Rouen a : 

- fixé les créances au passif de la liquidation de la société Coiffure de Lafayette, 

-requalifié le contrat de travail à durée déterminée de M. [P] en contrat de travail à durée indéterminée, 

-dit et jugé que la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-« condamné » la société Coiffure de Lafayette à verser les sommes suivantes à M. [P] :

1 498,50 euros au titre de l'indemnité de requalification, 

345,80 euros  au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 

34,58 euros au titre des congés payés et afférents, 

8 991 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé, 

1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 

750 euros à titre de dommages et intérêts pour retard de paiement des salaires, 

750 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat, 

-donné acte à l'AGS et au CGEA de [Localité 2] de leur intervention, 

-déclaré que l'ensemble de la décision est opposable aux AGS CGEA de [Localité 2] sauf sur la demande de l'article 700 du code de procédure civile dans la limite de six fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage, 

-ordonné à Mme [R], en qualité de mandataire judiciaire de la liquidation judiciaire de la société Coiffure de Lafayette à verser à M. [P] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, 

-ordonné l'exécution provisoire du jugement à intervenir, 

-mis les dépens à la charge de M. [R], ès qualités, 

-ordonné la transmission de la décision au procureur de la République sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale.

 

L'UNEDIC, délégation AGS CGEA de [Localité 2] a interjeté appel partiel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées. 

 

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES 

  

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 16 mars 2020, l'UNEDIC, délégation AGS CGEA de [Localité 2], appelante, fait valoir, que le travail dissimulé constitue une infraction pénale et qu'il appartient au demandeur de rapporter la preuve de l'intention frauduleuse de l'employeur de dissimuler l'emploi du salarié, que M. [P] ne verse aux débats aucun élément à l'appui de ses prétentions. 

 

Elle demande en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a alloué à M. [P] une somme de 8 991 euros à titre de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé et de statuer ce que de droit quant aux dépens.

 

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 23 avril 2022, M. [P], intimé, fait valoir : 

-que les éléments du délit de travail dissimulé sont caractérisés dès lors que l'employeur s'est volontairement abstenu de procéder à la déclaration de l'intégralité de ses salaires auprès de l'URSSAF,

-que la dissimulation d'emploi salarié constatée, la rupture de la relation de travail entraîne pour le salarié le bénéfice de l'indemnité forfaitaire due.  

 

Il demande en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'employeur s'est rendu coupable du délit de travail dissimulé et fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Coiffure de Lafayette la somme de 8 991 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, et y ajoutant, de déclarer le jugement opposable au CGEA de [Localité 2], de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Coiffure de Lafayette à la somme de 1 000 euros sa créance au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de dire que les entiers dépens comprendront les éventuels frais et honoraires d'exécution de la décision à intervenir.

Les dernières conclusions de l'appelante et de l'intimé ont été signifiées à Mme [R], ès qualités, cointimée défaillante, respectivement les 17 mars et 27 avril 2020.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 juillet 2022.

 

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

  

MOTIFS DE LA DÉCISION

 

1 - Sur l'indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé

 

L'article L.8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l'article L.8221-3 du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions de l'article L.8221-5 du même code relatif à la dissimulation d'emploi salarié.

 

Selon l'article L.8221-5 du code du travail : « Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales. »

Aux termes de l'article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 du même code relatif au travail dissimulé adroit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. ».

 

Il n'est pas discuté au cas d'espèce que la société Coiffure de Lafayette a procédé à la déclaration préalable à l'embauche de son salarié le 10 mars 2018.

Il n'est pas non plus discutable que seules les rémunérations brutes au titre des mois d'avril et de mai 2018 ont fait l'objet d'une déclaration auprès des organismes de la protection sociale.

En s'abstenant toutefois de procéder à la déclaration des salaires pour les mois de mars et juin 2018, soit les mois de début et de fin de la relation salariale, alors qu'il ne pouvait ignorer les obligations auxquelles il était tenu, pour avoir précompté les cotisations des mois d'avril et de mai 2018, l'employeur a sciemment dissimulé l'emploi de son salarié, cette omission ne pouvant s'expliquer par le contexte économique de l'entreprise marqué par des difficultés financières ayant motivé son placement en redressement judiciaire le 8 janvier 2019.

L'élément intentionnel étant établi, c'est à juste titre que les premiers juges ont fait droit à la demande d'indemnité au titre du travail dissimulé.

Le jugement sera en conséquence confirmé.

 

2 - Sur les demandes au titre des dépens et des frais irrépétibles

Les dépens d'appel seront mis à la charge de la liquidation judiciaire de la société Coiffure de Lafayette.

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande du salarié au titre des éventuels frais et honoraires d'exécution de la décision à intervenir, dès lors qu'il s'agit de recouvrer une créance née de l'exécution du contrat du travail.

L'équité ne commande pas de faire application au bénéfice de M. [P] de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

 

Y ajoutant,

Condamne Mme [R], ès qualités de mandataire judiciaire de la liquidation judiciaire de la société Coiffure de Lafayette, aux dépens,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00530
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;20.00530 ?
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