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20/10/2022 | FRANCE | N°20/00864

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 20 octobre 2022, 20/00864


N° RG 20/00864 - N° Portalis DBV2-V-B7E-INN6





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE



ARRET DU 20 OCTOBRE 2022











DÉCISION DÉFÉRÉE :





Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE DIEPPE du 21 Janvier 2020





APPELANTE :





S.A.R.L. POMPES FUNEBRES DIEPPOISES PRIVEES

[Adresse 1]

[Localité 5]



représentée par Me François GARRAUD de la SCP GARRAUD OGEL LARIBI HAUSSETETE,

avocat au barreau de DIEPPE







INTIMES :





Me [E] [S] en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la Société POMPES FUNEBRES DIEPPOISES PRIVEES

[Adresse 3]

[Localité 4]



représenté par Me François GAR...

N° RG 20/00864 - N° Portalis DBV2-V-B7E-INN6

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 20 OCTOBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE DIEPPE du 21 Janvier 2020

APPELANTE :

S.A.R.L. POMPES FUNEBRES DIEPPOISES PRIVEES

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me François GARRAUD de la SCP GARRAUD OGEL LARIBI HAUSSETETE, avocat au barreau de DIEPPE

INTIMES :

Me [E] [S] en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la Société POMPES FUNEBRES DIEPPOISES PRIVEES

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par Me François GARRAUD de la SCP GARRAUD OGEL LARIBI HAUSSETETE, avocat au barreau de DIEPPE

Monsieur [B] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 6]

présent

représenté par Me Sandrine DORANGE, avocat au barreau de DIEPPE

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 07 Septembre 2022 sans opposition des parties devant Madame ALVARADE, Présidente, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame ALVARADE, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame DUPONT, Greffière

DEBATS :

A l'audience publique du 07 Septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Octobre 2022

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 20 Octobre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame ALVARADE, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

FAITS ET PROCEDURE

[B] [Y] a été embauché par la société à responsabilité limitée (SARL) Pompes funèbres dieppoises privées en qualité de maître de cérémonie - chauffeur, suivant contrat à durée indéterminée à compter du 12 mai 1993, moyennant une rémunération brute qui était en dernier lieu de 2361,10 euros.

Par jugement du 6 novembre 2015, le tribunal de commerce de Dieppe a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire et par jugement du 3 février 2017, un plan de redressement pour une durée de 9 ans a été adopté.

 

Le 27 décembre 2017, M. [Y] a été victime d'un accident du travail et placé en arrêt maladie jusqu'au 2 janvier 2018, prolongé jusqu'au 14 janvier 2018. À la suite d'une rechute, il a été placé en arrêt de travail du 29 janvier 2018 au 14 février 2018, prolongé à plusieurs reprises jusqu'au 31 mai 2018, une visite médicale de préreprise ayant été organisée le 28 mai 2018. 

 

Le 4 juin 2018, il a été déclaré inapte à son poste de travail.

 

Par lettre du 3 juillet 2018, la société Pompes funèbres dieppoises privées a formulé une offre de reclassement dans un poste de vendeur en marbrerie moyennant un salaire brut de 1 941,38 euros à raison de 35 heures hebdomadaires, proposition qu'il a refusée par lettre du 6 juillet 2018. 

 

Par lettre du 19 juillet 2018, il a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, entretien qui toutefois n'a pas été suivi d'effet, l'employeur ayant poursuivi les recherches de reclassement de son salarié tout en maintenant son salaire. 

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 4 décembre 2018, la société Pompes funèbres dieppoises privées a convoqué M. [Y] à un second entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement avec mise à pied conservatoire, fixé au 14 décembre 2018 et par lettre du 21 décembre 2018, adressée sous la même forme, il a été licencié pour faute grave.

Par lettre du 28 décembre 2018, M. [Y] a contesté la mesure qui lui a ainsi été notifiée et dénoncé son solde de tout compte en janvier 2019.

Contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale, le 8 mars 2019, afin d'obtenir diverses sommes au titre de la rupture de son contrat de travail.

Par jugement rendu le 21 janvier 2020, le conseil de prud'hommes de Dieppe a :

-requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse, 

-condamné la société Pompes funèbres dieppoises privées à payer à M. [Y] les sommes de : 

4722,20 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 

17.176 euros à titre de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, 

- débouté les parties du surplus de leurs demandes, 

- condamné la société Pompes funèbres dieppoises privées au paiement d'une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance. 

La société Pompes funèbres dieppoises privées a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 19 mars 2020, la société Pompes funèbres dieppoises privées, demande à la cour de :

-réformer le jugement rendu le 21 janvier 2020 par le conseil de prud'hommes de Dieppe en ce qu'il a :

-requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

-condamné la société Pompes funèbres dieppoises privées à payer à M. [Y] les sommes de :

4 722,20 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

17 176,00 euros à titre d'indemnité de licenciement conventionnelle,

-débouté la société Pompes funèbres dieppoises privées de l'intégralité de ses demandes,

-condamné la société Pompes funèbres dieppoises privées à payer à M. [Y] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens,

Et statuant à nouveau,

-dire que le licenciement pour faute grave de M. [Y] est justifié,

En conséquence,

-débouter M. [Y] de toutes ses demandes,

-condamner M. [Y] à payer la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

  

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 12 juin 2020, M. [S], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société Pompes funèbres dieppoises privées, cointimé, a formulé ses prétentions et arguments dans les mêmes termes.

 

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 juillet 2022.

 

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 - Sur la procédure

 

Suivant ordonnance du 29 juillet 2022, le magistrat de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions remises le 16 juin 2022 par M. [Y], lequel disposait d'un délai expirant au 19 juin 2020, prorogé au 24 août 2020 en application de l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020.

 

M. [Y] a transmis de nouvelles écritures par la voie électronique le 7 juillet 2022, soit le jour de l'ordonnance de clôture.

 

En l'état toutefois de l'ordonnance précitée déclarant irrecevables les conclusions de M. [Y], au motif que le délai pour conclure prévu à l'article 909 du code de procédure civile, prorogé en raison de circonstances exceptionnelles, n'avait pas été respecté, l'irrégularité des premières conclusions privait l'intimé de la possibilité de conclure à nouveau, de sorte que les conclusions transmises le 7 juillet 2022 ne pourront qu'être écartées.

 

2 - Sur le licenciement pour faute grave

 

La lettre de licenciement en date du 21 décembre 2018 est ainsi motivée : « (') je vous notifie votre licenciement pour faute grave pour les motifs suivants :

Le 3 décembre 2018, vous vous êtes présenté à l'entreprise pour recevoir votre chèque de salaire. Vous avez cherché à me provoquer et compte tenu que je ne répondais pas à vos propres provocations, vous m'avez insulté, en présence de témoins, en ces termes : « T'es qu'un guignol... T'as pas de couilles... Si tu ne me donnes pas ma prime je vais te défoncer. 'Petite bite... Je vais te faire cracher.»

Ces faits, constitutifs d'injures et constitutifs de menaces de violences, rendent impossible le maintien du contrat de travail qui sera rompu à première présentation du présent courrier' ».

 

Aux termes de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

 

La faute grave, dont la preuve incombe à l'employeur, se définit comme un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

 

Pour qualifier la faute grave, il incombe donc au juge de relever le ou les faits constituant pour le salarié licencié une violation des obligations découlant de son contrat de travail ou des relations de travail susceptible d'être retenue, puis d'apprécier si le fait allégué était de nature à exiger le départ immédiat du salarié.

 

La société Pompes funèbres dieppoises privées reproche aux premiers juges d'avoir considéré que le licenciement pour faute grave n'était pas justifié au regard du comportement du salarié qui a proféré des insultes et des injures, mais également des menaces à l'endroit de son supérieur hiérarchique, ce, en présence de salariés et de clients, alors que ces faits sont susceptibles d'avoir des répercussions importantes pour l'entreprise.

Il fait valoir que le salarié, qui a multiplié les provocations, n'avait d'autre objectif que de quitter l'entreprise pour rejoindre sa compagne, Mme [F] [T], ancienne salariée, qui avait créé sa propre agence de pompes funèbres.

A l'appui des griefs allégués, l'employeur produit trois attestations de deux salariés (M. [A] [K], M. [B] [C]) et d'un client de l'entreprise (M. [N]). Ces témoins ne font toutefois état d'aucune menace à l'endroit du gérant, M. [A] [K] indiquant l'avoir entendu dire « petite bite » « faux-cul » « tu vas pouvoir cracher ton argent » », M. [B] [C] confirmant les propos tenus, ajoutant que l'intéressé aurait également dit : « t'as pas de couilles » et M. [N], qui indique avoir entendu une personne prononcer plusieurs insultes, et dire qu'il allait lui faire cracher son argent.

L'employeur ne justifie pas non plus d'un quelconque comportement provocateur du salarié.

Pour autant, la matérialité des faits d'insultes et d'injures ainsi que leur imputabilité à M. [Y] sont établies.

L'examen de proportionnalité auquel doit se livrer le juge conduit à retenir que les faits, bien que caractérisés pour une part, n'ont cependant pas revêtu un caractère de gravité suffisant pour rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, y compris pendant la durée limitée du préavis, alors que les premiers juges ont relevé que M. [Y] avait toujours donné satisfaction à son employeur et n'avait jamais fait l'objet d'aucune remontrance, que ce dernier avait tardé soit à le reclasser, soit à le licencier en raison de son inaptitude due à son accident du travail du 27 décembre 2017, l'avait contraint à rester à son domicile dans l'attente d'une décision et à se déplacer à plusieurs reprises en début de mois pour récupérer son salaire.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé.

 

Les droits de M. [Y] au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité de licenciement tels que fixés par les premiers juges ne sont pas spécifiquement contestés dans leur quantum à hauteur d'appel.

 

Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.

 

3 - Sur les dépens et les frais non-répétibles  

La société Pompes funèbres dieppoises privées qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens.

 

Il n'y a pas lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré,

 

Y ajoutant,

 

Condamne la société Pompes funèbres dieppoises privées aux dépens,

Rejette le surplus des demandes.

 

 La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00864
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;20.00864 ?
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