N° RG 20/00952 - N° Portalis DBV2-V-B7E-INUN
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 18 JANVIER 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du POLE SOCIAL DU TJ DE [Localité 9] du 30 Janvier 2020
APPELANTE :
Société [10]
[Adresse 1]
[Localité 4]
dispensée de comparaître
ayant pour avocat Me Gabriel RIGAL, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
[7]
[Adresse 2]
[Adresse 8]
[Localité 3]
représentée par Me Vincent BOURDON, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 15 Novembre 2022 sans opposition des parties devant Madame DE BRIER, Conseillère, magistrat chargé d'instruire l'affaire.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame BIDEAULT, Présidente
Madame ROGER-MINNE, Conseillère
Madame DE BRIER, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme WERNER, Greffière
DEBATS :
A l'audience publique du 15 Novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 Janvier 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 18 Janvier 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par M. CABRELLI, Greffier.
* * *
FAITS ET PROCÉDURE :
La [6] ([7]) du Havre a pris en charge, au titre de la législation sur les risques professionnels, la maladie 'cancer broncho-pulmonaire provoqué par l'inhalation de poussières d'amiante' figurant au tableau 30 bis des maladies professionnelles dont souffre M. [Z] [D], ancien salarié de la société [10] en qualité de mécanicien.
Contestant la décision de la caisse du 1er décembre 2017 d'attribuer au salarié une rente basée sur un taux d'incapacité permanente partielle de 67%, la société [10] a saisi le 25 janvier 2018 le tribunal du contentieux de l'incapacité de Rouen, devenu pôle social du tribunal de grande instance puis du tribunal judiciaire.
Par jugement du 30 janvier 2020, le tribunal a déclaré recevable mais mal fondé le recours de la société contre la décision prise le 1er décembre 2017 par la [7].
Par courrier recommandé envoyé le 18 février 2020, la société a formé appel.
Le 28 juillet 2022, le greffe a convoqué les parties à l'audience du 15 novembre 2022.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par ses conclusions remises le 10 novembre 2022, la société [10], dispensée de comparaître, demande à la cour de :
$gt; constater l'absence de péremption d'instance,
$gt; à titre pricipal, fixer à 0% le taux de la rente d'incapacité permanente partielle attribuée à M. [D] par la caisse,
$gt; à titre subsidiaire, désigner un expert pneumologue avec pour mission d'apprécier les séquelles présentées par le salarié à la date de consolidation et de fixer un taux d'IPP conforme ; ordonner que les frais résultant de l'expertise soient mis à la charge de la [5],
$gt; en tout état de cause, condamner la caisse aux dépens.
Par ses conclusions remises le 27 juin 2022, la [7], représentée à l'audience par son avocat, demande à la cour de :
$gt; à titre principal, dire que la péremption de l'instance est acquise et en conséquence reconnaitre au jugement force de chose jugée,
$gt; à titre subsidiaire, confirmer le jugement et le taux d'incapacité permanente partielle de 67% dans les rapports entre la caisse et la société, et rejeter les demandes de la société.
MOTIFS DE L'ARRÊT:
Sur la péremption de l'instance
La société [10] soutient qu'à la date de la déclaration d'appel, les dispositions de l'article 386 du code de procédure civile n'étaient plus applicables, au profit de celles du nouvel article R. 142-10-10 du code de la sécurité sociale conditionnant la péremption au non accomplissement pendant deux ans des diligences expressément mises à la charge des parties par la juridiction. Notant que ni la juridiction d'appel ni son président ne lui ont jamais enjoint de réaliser quelque diligence que ce soit, elle en déduit que le délai de péremption n'a jamais commencé à courir.
La caisse, se prévalant des articles 386 et suivants du code de procédure civile, considère qu'en l'absence de diligence accomplie par la société avant le 18 février 2022 (aucune écriture communiquée, aucune autre diligence accomplie), la péremption de l'instance d'appel est acquise.
Les dispositions de l'article R. 142-22 du code de la sécurité sociale, abrogées par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, prévoyaient jusqu'au 1er janvier 2019 que la péremption n'était acquise, en matière de contentieux général de la sécurité sociale, que lorsque les parties n'avaient pas accompli pendant un délai de deux ans les diligences expressément mises à leur charge par la juridiction.
Ces dispositions ont en substance été remplacées, à partir du 1er janvier 2020, par celles du nouvel article R. 142-10-10 du code de la sécurité sociale, invoquées par l'employeur.
Mais ces nouvelles dispositions, contenues au paragraphe 1 'procédure applicable en première instance' de la sous-section 1 'procédure applicable aux litiges mentionnés à l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire' de la section 3 'procédure juridictionnelle' du chapitre 2 'contentieux de la sécurité sociale et contentieux de l'admission à l'aide sociale', ne sont applicables qu'en première instance, à défaut de texte prévoyant leur application en cause d'appel.
Dans le cadre de la procédure d'appel, à défaut de texte spécifique, ce sont donc les dispositions de droit commun de l'article 386 du code de procédure civile qui trouvent à s'appliquer.
Selon cet article, l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
Il est admis que constitue une « diligence » au sens de l'article 386 précité toute action manifestant la volonté des parties de poursuivre l'instance et de faire avancer le procès.
Si en procédure orale, les parties n'ont pas l'obligation de conclure, il leur appartient à tout le moins, si elles n'entendent pas le faire, de manifester leur intention de poursuivre l'instance en demandant la fixation de l'affaire à une audience, quelles que soient au demeurant les chances de succès d'une telle demande, et, si au contraire elles entendent conclure, de le faire en temps voulu.
En l'espèce, les parties n'ont conclu que les 27 juin 2022 (la caisse) et 10 novembre 2022 (la société). Elles n'ont pas accompli la moindre diligence dans le délai de deux ans ayant commencé à courir au 18 février 2020, date de la déclaration d'appel.
Dès lors, la cour constate que la présente instance est périmée.
En application de l'article 390 du code de procédure civile, cette péremption confère au jugement attaqué la force de la chose jugée.
Sur les frais du procès
En application des articles 393 et 696 du code de procédure civile, la société [10] est condamnée aux dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, par arrêt rendu contradictoirement et en dernier ressort,
Constate la péremption de l'instance d'appel,
Rappelle que cette péremption confère force de chose jugée au jugement rendu le 30 janvier 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Rouen,
Condamne la société [10] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE