N° RG 20/03273 - N° Portalis DBV2-V-B7E-ISN5
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 03 MARS 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
19/429
Jugement du POLE SOCIAL DU TJ D'EVREUX du 17 Septembre 2020
APPELANTE :
Société [5]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Rachid MEZIANI de la SARL MEZIANI & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Maria BEKMEZCIOGLU, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'EURE
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me François LEGENDRE, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 18 Janvier 2023 sans opposition des parties devant Madame POUGET, Conseillère, magistrat chargé d'instruire l'affaire.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame BIDEAULT, Présidente
Madame ROGER-MINNE, Conseillère
Madame POUGET, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
M. CABRELLI, Greffier
DEBATS :
A l'audience publique du 18 Janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 03 Mars 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 03 Mars 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par M. CABRELLI, Greffier.
* * *
EXPOSÉ DU LITIGE :
Mme [C] [B], engagée au sein de la [5] (la société) a établi, le 19 janvier 2015, une demande de reconnaissance de maladie professionnelle adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure (la caisse). La demande était accompagnée d'un certificat médical initial, daté du même jour, et faisant état d'une 'épicondylite droite'.
Par décision en date du 15 avril 2015, la caisse a notifié à la société sa décision de prise en charge de ladite pathologie au titre du tableau 57 des maladies professionnelles.
Le 15 juin 2015, la société a saisi la commission de recours amiable de la caisse (la CRA) afin de contester cette décision.
À défaut de réponse, elle a saisi le 22 juillet 2015 le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Eure d'une contestation de la décision implicite de rejet de la CRA.
L'affaire a été transférée au tribunal de grande instance d'Evreux, pôle social, devenu tribunal judiciaire, lequel a, par jugement du 17 septembre 2020 :
débouté la société de son recours et de l'ensemble de ses demandes,
dit n'y avoir lieu à confirmer la décision implicite de rejet de la CRA de la caisse de l'Eure et la décision de prise en charge du 15 avril 2015 de la maladie déclarée par Mme [B] le 19 janvier 2015, qui restent opposables à l'employeur,
condamné la société aux dépens nés après le 1er janvier 2019.
La société a relevé appel de cette décision le 14 octobre 2020 et par conclusions remises le 13 janvier 2023, soutenues oralement à l'audience, elle demande à la cour de :
- déclarer son recours bien fondé,
- réformer la décision entreprise,
à titre principal,
- lui déclarer inopposable la décision de prise en charge en raison du non-respect du principe du contradictoire,
à titre subsidiaire,
- juger que la décision de prise en charge lui est inopposable car la caisse n'établit pas que les conditions réglementaires de l'article 57 B sont remplies,
- condamner la caisse à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions remises le 16 janvier 2023, soutenues oralement à l'audience, la caisse demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau,
- confirmer la décision de la caisse valant prise en charge de la pathologie déclarée au titre du tableau 57 des maladies professionnelles,
- débouter la société de son recours et de l'ensemble de ses demandes,
- la condamner à lui payer la somme de 2 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé détaillé de leurs moyens et arguments.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
A titre préliminaire, la cour constate que si la caisse demande, dans le dispositif de ses conclusions, l'infirmation de la décision déférée, il s'infère des motifs de celles-ci, repris oralement, qu'elle sollicite en réalité sa confirmation.
1) Sur le respect du contradictoire
L'article R. 411-14 alinéa 3 dans sa version applicable au litige, dispose que dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.
Ce dernier texte dans sa version applicable au litige, précise que le dossier constitué par la caisse primaire doit comprendre :
1°) la déclaration d'accident ;
2°) les divers certificats médicaux détenus par la caisse ;
3°) les constats faits par la caisse primaire ;
4°) les informations parvenues à la caisse de chacune des parties ;
5°) les éléments communiqués par la caisse régionale ;
6°) éventuellement, le rapport de l'expert technique.
Se fondant sur ces dispositions, la société fait valoir, en premier lieu, que lors de la consultation du dossier dans les locaux de la caisse, celle-ci n'a pas mis à sa disposition l'ensemble des certificats médicaux de prolongation délivrés à la salariée.
Pourtant, il ressort de la fiche contradictoire relative à la consultation du dossier de Mme [B], remplie et signée par la représentante de l'employeur, Mme [A], responsable des ressources humaines, qu'elle reconnaît avoir consulté l'intégralité des pièces du dossier et ce, sans mentionner une quelconque réserve au moment de la consultation ou ultérieurement relative à l'absence des certificats médicaux de prolongation, lequel élément est évoqué pour la première fois en cause d'appel.
Dans ces conditions, la caisse justifie avoir satisfait à l'obligation mise à sa charge et ce moyen sera rejeté.
En second lieu, la société soutient qu'il n'est nullement communiqué les éléments médicaux ayant permis au médecin conseil de fixer la date de première constatation de la maladie retenue par le médecin de la caisse.
Or, comme justement relevé par le tribunal, le certificat médical initial du 19 janvier 2015 et la fiche de colloque médico-adminstratif qui s'y référe expressément, figurant au dossier constitué par la caisse, mentionnaient tous le 27 novembre 2014, comme date de première constatation médicale de la maladie, de sorte que l'employeur avait été mis en mesure de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief.
Par conséquent, ce moyen est également rejeté.
2) Sur la décision de prise en charge
Selon les dispositions de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau des maladies professionnelles défini aux articles L 461-2 et R 461-3 du même code, et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
La société fait valoir que la caisse ne démontre pas que l'affection déclarée par Mme [B] remplit les conditions du tableau n° 57 B des maladies professionnelles en ce qui concerne le délai de prise en charge et la liste limitative des travaux.
Selon ledit tableau dans sa version applicable au litige, le délai de prise de en charge en cas de tendinopathie d'insertion des muscles épicondyliens associée ou non à un syndrome du tunnel radial est de 14 jours et les travaux susceptibles de provoquer cette maladie sont ceux comportant habituellement des mouvements répétés de préhension ou d'extension de la main sur l'avant-bras ou des mouvements de pronosupination.
Il a été précédemment jugé que la date de première constatation de la maladie a été fixée au 27 novembre 2014, alors que la salariée a été en arrêt de travail à compter du 3 janvier 2015, de sorte que la condition liée au délai de prise en charge est remplie.
Quant aux travaux limitatifs du tableau considéré, il est établi par le rapport d'enquête de la caisse que la salariée, technicienne de surface, effectue, chaque jour durant plusieurs heures, les mouvements répétés, à tout le moins, de préhension de la main lorsqu'elle passe l'aspirateur industriel, le balai, soulève les seaux d'eau, poubelles et essore une serpillère ou une éponge. L'employeur ne conteste d'ailleurs aucune des tâches énumérées.
Par conséquent, les conditions réglémentaires du tableau 57 B des maladies professionnelles sont remplies et la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle a rejeté le recours de la société contre la décision de prise en charge.
3) Sur les dépens et frais irrépétibles
En qualité de partie succombante, l'appelante est condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles.
Pour les mêmes raisons, elle est condamnée à payer à la caisse la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement, en dernier ressort ;
confirme le jugement du tribunal judiciaire d'Evreux du 17 septembre 2020;
condamne la société [5] à payer à la caisse la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande à ce titre :
la condamne aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE