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04/05/2023 | FRANCE | N°21/01041

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 04 mai 2023, 21/01041


N° RG 21/01041 - N° Portalis DBV2-V-B7F-IWVZ





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE



ARRET DU 04 MAI 2023











DÉCISION DÉFÉRÉE :





Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'EVREUX du 11 Février 2021





APPELANTE :





Société IFC CONSEILS IMMOBILIER venant aux droits de la S.A.S. CABINET DELAHOULLE

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par Me Sébastien FERIAL, avoca

t au barreau de l'EURE









INTIMEE :





Madame [U] [Z] épouse [R]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par Me Jean-Yves PONCET de la SCP PONCET DEBOEUF BEIGNET, avocat au barreau de l'EURE






















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N° RG 21/01041 - N° Portalis DBV2-V-B7F-IWVZ

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 04 MAI 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'EVREUX du 11 Février 2021

APPELANTE :

Société IFC CONSEILS IMMOBILIER venant aux droits de la S.A.S. CABINET DELAHOULLE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Sébastien FERIAL, avocat au barreau de l'EURE

INTIMEE :

Madame [U] [Z] épouse [R]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Jean-Yves PONCET de la SCP PONCET DEBOEUF BEIGNET, avocat au barreau de l'EURE

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 22 Mars 2023 sans opposition des parties devant Madame BERGERE, Conseillère, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

Madame BERGERE, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme DUBUC, Greffière

DEBATS :

A l'audience publique du 22 Mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Mai 2023

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 04 Mai 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [U] [Z] épouse [R] a été engagée par la SAS Cabinet Delahoulle en qualité de conseillère en transactions immobilières VRP non cadre par contrat de travail à durée indéterminée du 30 juillet 2014.

Les relations des parties étaient régies par la convention collective nationale de l'immobilier.

Le 19 juillet 2018, Mme [Z] épouse [R] et la société Cabinet Delahoulle ont convenu de la rupture conventionnelle du contrat de travail à effet au 25 août 2018.

Par requête du 16 mai 2019, la société Cabinet Delahoulle a saisi le conseil de prud'hommes d'Evreux en remboursement d'un trop perçu de commissions.

Par jugement du 11 février 2021, le conseil de prud'hommes a : '[condamné] la SAS cabinet Delahoulle à payer à Madame [R] [U] à titre de rappel de salaires les sommes de 8203E et de 696E pour la période préalable au 17 Décembre et pour les périodes du 17 Décembre 2017 au 24 Août 2018

- 1588,91 au titre des congés payés

- 5824,17 de dommages et intérêts

- 1000 euros au titre de l'artice 700 du code de procédure civile

[condamné] Mme [R] a régler à la SAS Cabinet Delahoulle la somme de 2912 euros au titre d'un trop perçu sur les commissions entre le 17 Décembre 2017 jusqu'au 25 Août 2018

[ordonné] à la SAS Cabinet Delahoulle à remettre à Madame [R] sans astreinte les bulletins de salaire récapitulatifs et rectifiés pour la période courue entre le mois de Décembre 2017 et le mois d'Août 2018, l'attestation Pôle emploi rectifiée ainsi que le certificat de travail et un bulletin de salaire valant reçu pour solde de tous compte.

[débouté] les parties du surplus de leurs demandes.

[condamné] la SAS Cabinet Delahoulle aux entiers dépens.'

La société IFC Conseils Immobilier, venant aux droits de la société Cabinet Delahoulle, a interjeté appel de cette décision le 9 mars 2021.

Par conclusions remises le 8 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la société IFC Conseils Immobilier demande à la cour d'infirmer le jugement critiqué en toutes ses dispositions à l'exception de celles relatives à la non requalification de la rupture conventionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse, statuant à nouveau, condamner Mme [Z] épouse [R] à lui rembourser la somme de 8 395 euros au titre d'un trop perçu sur commissions, débouter Mme [Z] épouse [R] de toutes ses demandes et la condamner à lui verser une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Les conclusions remises le 5 octobre 2021 par Mme [U] [Z] épouse [R] ont été déclarées irrecevables par le conseiller de la mise en état suivant ordonnance du 9 novembre 2021.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 2 mars 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'intimé qui ne conclut pas, ou dont les conclusions sont irrecevables, est réputé adopter les motifs de la décision de première instance, sans pouvoir se référer à ses conclusions ou pièces déposées devant la juridiction de première instance.

En l'espèce, par décision du 9 novembre 2021, les conclusions de Mme [Z] épouse [R] ont été déclarées irrecevables et elle est, en conséquence, réputée adopter les motifs du jugement déféré.

I - Sur les demandes de rappel de salaires et de restitution de commissions indues

I - a) Sur la recevabilité de l'action de la société IFC Conseils Immobilier

La société IFC Conseils Immobilier soutient qu'elle est bien fondée à solliciter le remboursement d'un trop perçu d'avances sur commissions sur les trois années précédant la rupture du contrat de travail, soit à partir du 19 juillet 2015, la rupture conventionnelle ayant été signée le 19 juillet 2018.

Le conseil de prud'hommes a considéré en application des dispositions de l'article L. 3245-1 du code civil que la demande de remboursement sur les années 2014 à 2016 était prescrite et a condamné la salariée 'à rembourser au titre d'un trop perçu sur commissions la somme de 2912 euros pour la période du 17 Décembre 2017 jusqu'au 25 Août 2018.'

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel la prescription.

L'article L. 3245-1 du code du travail dispose que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

En l'espèce, la rupture conventionnelle convenue entre les parties ayant pris effet au 25 août 2018 et l'employeur ayant saisi la juridiction de première instance dans le délai de trois ans à compter de cette rupture, elle est bien fondée à solliciter la répétition des commissions indues pour la période allant du 25 août 2015 au 25 août 2018.

I - b) Sur le fond

A titre liminaire, il convient de relever que la demande de trop perçu de commissions étant indissociable de la demande réciproque de paiement de rappels de salaire présentée par Mme [Z] épouse [R] en première instance, ces deux prétentions seront examinées en même temps.

Le contrat de travail prévoit, en conformité avec les dispositions de l'article 4 de l'annexe IV de la convention collective applicable relative au nouveau statut du négociateur immobilier, dans sa version applicable au litige, en son article 5 relatif à la rémunération, les dispositions suivantes :

'En contrepartie des fonctions exercées, le conseil transactions immobilières VRP percevra une rémunération constituée exclusivement par un pourcentage des commissions sur transactions encaissées par l'employeur du fait de son activité. [...]

Il percevra en tant qu'avance sur commissions une rémunération forfaitaire de 1 800, 000 € bruts par mois d'activité entier (réduction au prorata des absences). [...]

Le conseiller transactions immobilières VRP sur toutes les affaires réalisées par son intermédiaire, est rémunéré par un pourcentage de la commission nette effectivement encaissée par l'employeur, déduction faite des frais, taxes de toutes natures et honoraires pouvant éventuellement être dus à un ou plusieurs confrères ou intermédiaires. Les commissions ne seront acquises au conseiller transactions immobilières VRP qu'une fois l'acte authentique dûment signé par les parties et le montant des honoraires encaissés par l'employeur. [...]

Le taux de commission est fixé à 25 % si le conseil transactions immobilières VRP (taux doublé):

- trouve une affaire par sa démarche pour laquelle il obtient personnellement un mandant de mise en vente

- trouve un acquéreur pour ce bien qu'il aura personnellement fait visiter, négocier et conclut l'acte de vente entre les parties.

C'est à dire que dans ces cas, le conseiller transactions immobilières VRP percevra 12, 50 % ou 25 % du montant hors taxes de la commission de l'agence en fonction de son degré d'intervention.

Variabilité au taux de commission en fonction du chiffre d'affaire généré par le conseiller transaction immobilières VRP au cours de chaque trimestre civil: de 0 à 30 000, 00 € de chiffre d'affaires HT réalisé par trimestre civil entier : taux de 12.5 % en intervention partielle , 25 % en intervention totale. Pour la fraction de CAHT comprise en 30 001, 00 € et 37 500, 00 € : pour cette tranche, taux de 15 % en intervention partielle, 30 % en intervention totale. À partir de 37 501, 00 € de CA HT réalisé par trimestre civil entier : taux de 15 % appliqué de manière rétroactive sur l'ensemble de l'intervention partielle, 30 % appliqué de manière rétroactive sur l'ensemble de l'intervention totale.'

Il résulte de l'examen des pièces produites aux débats par la société IFC Conseils Immobilier, à savoir l'intégralité des bulletins de salaires de Mme [Z] épouse [R] sur les années 2014 à 2017 qui font apparaître les avances sur commissions qu'elle a perçues ainsi que les régularisations faites, les factures d'honoraires émises par la société concernant les clients de Mme [Z] épouse [R] et le tableau récapitulatif calculant le montant des commissions de cette dernière, que la demande présentée par l'employeur est partiellement fondée.

En effet, pour l'année 2018, alors qu'il est fait état de commissions dues à la salariée d'un montant de 2 969 euros, la société IFC Conseils Immobilier ne verse aux débats aucun élément établissant que ces sommes ont été réglées à Mme [Z] épouse [R]. En conséquence, il existe un solde en faveur de la salariée d'un montant de 2 969 euros pour cette année 2018.

Pour l'année 2017, le calcul opéré par l'employeur est incontestable et valablement justifié de sorte qu'il est établi que Mme [Z] épouse [R] est redevable d'une somme de 6 464 euros.

Pour l'année 2016, en ne majorant pas à 30 % le montant de la commission due à la salariée sur le dernier trimestre de l'année alors que celle-ci a dépassé le plafond contractuel de 30 000 euros de chiffre d'affaires HT en atteignant 30 834 euros, l'employeur a commis une erreur. Il est donc dû un montant de commissions de 1 131,20 euros au lieu de 1 079 euros.

Pour l'année 2015, l'irrecevabilité de toute demande antérieure au 25 août 2015, conduit à minorer le trop perçu par Mme [Z] épouse [R] à la somme de 2 950 euros.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement entrepris non seulement en ce qu'il a condamné Mme [Z] épouse [R] à régler à son employeur la somme de 2 912 euros au titre d'un trop perçu sur les commissions entre le 17 décembre 2017 jusqu'au 25 août 2018 mais également en ce qu'il a condamné la société IFC Conseils Immobilier à payer à la salariée les sommes de 8 203 euros et 696 euros à titre de rappels de salaires, condamnation qui ne repose sur aucune explication, les premiers juges n'ayant pas motivé leur décision, ni en tout état de cause, sur aucune justification au vu du chiffre d'affaires réalisée par la salariée.

Par suite, il y a lieu de débouter Mme [Z] épouse [R] de ses demandes de rappels de salaires et de la condamner à payer à la société IFC Conseils Immobilier la somme de 5 313, 80 euros au titre d'un trop perçu de commissions sur la période allant du 31 août 2015 au 25 août 2018.

Conformément à la demande présentée par la société IFC Conseils Immobilier, il convient également d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à Mme [Z] épouse [R] une somme de 1 588, 91 euros au titre des congés payés, cette condamnation ne correspondant à aucune créance valablement établie en l'absence de toute motivation de la part des premiers juges sur ce point.

II - Sur la demande de dommages et intérêts présentée par Mme [R]

Le conseil de prud'hommes a motivé l'allocation de dommages et intérêts comme suit :

'Sur la demande de requalifier la ruptre conventionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse

Madame [R] a demandé le 9 Juillet 2018 une rupture conventionnelle à son employeur. Le 13 Juillet, elle a été reçu par son employeur pour trouver un accord qui a été finalisé le 19 Juillet 2018 à effet au 25 Août 2018 qu'elle n'a pas contesté ensuite.

Le conseil ne requalifie pas la rupture conventionnelle en licenciement sans cause rélle et sérieuse.

En conséquence,

Le conseil déboute Madame [R] de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis 8351,41E et des congés payés afférents, soit 835,14 E .

Sur la demande de dommage et intérêts :

L'articleL1234-9 du code du travail dispose que le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté dans l'entreprise ininterrompus au service du même employeur, a droit sauf en cas de faute grave à une indemnité de licenciement

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

Compte tenu de l'ancienneté l'indemnité doit être comprise entre 3 à 5 mois de salaire.

Le salaire de référence à prendre en considération est le salaire brut mensuel moyen de 1,941,39 E comme s'y est référé le conseil.

En conséquence : Le conseil accorde à titre de dommages et intérêts à Madame [R] [U] la somme de 5824,17 euros.'

En l'absence de tout élément permettant de requalifier la rupture conventionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse, c'est à tort que les premiers juges ont alloué à Mme [Z] épouse [R] une indemnité sur le fondement de l'article L. 1234-9 du code du travail.

En conséquence, il convient d'infirmer la décision entreprise et de débouter Mme [Z] épouse [R] de sa demande à ce titre.

III - Sur les dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner Mme [Z] épouse [R] aux entiers dépens, y compris ceux de première instance et de la débouter de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité et la situation financière respective des parties commandent de ne pas faire droit à la demande présentée par la société IFC Conseils Immobilier au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement, dans les limites de sa saisine, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions déférées à la cour ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare irrecevables l'action en répétition de l'indu de la SAS IFC Conseils Immobilier pour les commissions antérieures au 25 août 2015 ;

Condamne Mme [U] [Z] épouse [R] à payer à la SAS IFC Conseils Immobilier la somme de la somme de 5 313,80 euros au titre d'un trop perçu de commission sur la période allant du 31 août 2015 au 25 août 2018 ;

Déboute Mme [U] [Z] épouse [R] de toutes ses demandes ;

Condamne Mme [U] [Z] épouse [R] aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Déboute Mme [U] [Z] épouse [R] et la SAS IFC Conseils Immobilier de leur demande respective au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d'appel.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/01041
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;21.01041 ?
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