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04/02/2008 | FRANCE | N°07/00807

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0038, 04 février 2008, 07/00807


04 / 02 / 2008
ARRÊT No
NoRG : 07 / 00807 OC / CD

Décision déférée du 12 Janvier 2007- Tribunal de Grande Instance de CASTRES- 02 / 1683 Mme SOSSAH

Lesley Y... représentée par Me Bernard DE LAMY Jaime Z... représenté par Me Bernard DE LAMY Jaume Z... représenté par Me Bernard DE LAMY

C /
Philippe A... représenté par la SCP MALET AGF ASSURANCES représentée par la SCP RIVES- PODESTA Société COVEA RISKS représentée par la SCP RIVES- PODESTA

REFORMATION

Grosse délivrée
le
àREPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCA

IS *** COUR D' APPEL DE TOULOUSE 1ère Chambre Section 1 *** ARRÊT DU QUATRE FEVRIER DEUX MILLE HUIT ***

APPELANT...

04 / 02 / 2008
ARRÊT No
NoRG : 07 / 00807 OC / CD

Décision déférée du 12 Janvier 2007- Tribunal de Grande Instance de CASTRES- 02 / 1683 Mme SOSSAH

Lesley Y... représentée par Me Bernard DE LAMY Jaime Z... représenté par Me Bernard DE LAMY Jaume Z... représenté par Me Bernard DE LAMY

C /
Philippe A... représenté par la SCP MALET AGF ASSURANCES représentée par la SCP RIVES- PODESTA Société COVEA RISKS représentée par la SCP RIVES- PODESTA

REFORMATION

Grosse délivrée
le
àREPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS *** COUR D' APPEL DE TOULOUSE 1ère Chambre Section 1 *** ARRÊT DU QUATRE FEVRIER DEUX MILLE HUIT ***

APPELANTS
Madame Lesley Y... en qualité d' administratrice de son fils mineur Alexandre Z..., né le 07 / 02 / 1990 à la Nouvelle Orléans (USA)... 81500 LAVAUR représentée par Me Bernard DE LAMY, avoué à la Cour assistée de la SCP MAIGNIAL, SALVAIRE, VEAUTE, JEUSSET, ARNAUD- LAUR, BOONSTOPPEL, avocats au barreau de CASTRES

Monsieur Jaime Z... en qualité d' administrateur de son fils mineur Alexandre Z..., né le 07 / 02 / 1990 à la Nouvelle Orléans (USA)... 81500 BELCASTEL représenté par Me Bernard DE LAMY, avoué à la Cour assisté de la SCP MAIGNIAL, SALVAIRE, VEAUTE, JEUSSET, ARNAUD- LAUR, BOONSTOPPEL, avocats au barreau de CASTRES

Monsieur Jaume Z...... 81500 LAVAUR représenté par Me Bernard DE LAMY, avoué à la Cour assisté de la SCP MAIGNIAL, SALVAIRE, VEAUTE, JEUSSET, ARNAUD- LAUR, BOONSTOPPEL, avocats au barreau de CASTRES

INTIMES

Monsieur Philippe A...... 31590 BONREPOS RIQUET représenté par la SCP MALET, avoués à la Cour assisté de Me Jean Paul BOUCHE, avocat au barreau de TOULOUSE

AGF ASSURANCES 87 rue de Richelieu 75060 PARIS 02 représentée par la SCP RIVES- PODESTA, avoués à la Cour assistée de Me DELORMEAU, avocat au barreau de PARIS

Société COVEA RISKS 19 / 21 allée de L' Europe 92100 CLICHY représentée par la SCP RIVES- PODESTA, avoués à la Cour assistée de Me CHARRIER DE LAFORCADE,, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l' affaire a été débattue le 10 Décembre 2007 en audience publique, devant la Cour composée de :
A. MILHET, président O. COLENO, conseiller C. FOURNIEL, conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : E. KAIM- MARTIN

ARRET :

- contradictoire- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties- signé par A. MILHET, président, et par E. KAIM- MARTIN, greffier de chambre.

*******
FAITS ET PROCÉDURE
Dans la nuit du 4 au 5 mars 1996, un incendie s' est déclaré qui a détruit la toiture du château de Belcastel appartenant à Jaume et Alexandre Z... à l' époque tous deux mineurs.
A la suite du dépôt du rapport d' une expertise aussitôt ordonnée en référé, Jacques Z... et Lesley Y... agissant en qualité d' administratrice légale de ses enfants mineurs Jaume et Alexandre Z... ont, par acte d' huissier du 11 août 1998, assigné Philippe A... et son assureur de responsabilité civile professionnelle AGF ASSURANCES devant le tribunal de grande instance de Castres en responsabilité et réparation à raison de l' installation qu' il avait réalisée en 1994 d' une chaudière à bois dans ce château.
Les consorts Z... et Y... ont ensuite appelé en cause la société COVEA RISKS en sa qualité d' assureur décennal de Philippe A... au moment du sinistre.
Par un premier jugement du 24 juin 1999, le tribunal a sursis à statuer en application des dispositions de l' article 4 du code de procédure pénale à raison d' une plainte avec constitution de partie civile déposée par Philippe A... contre Lesley Y... à laquelle il faisait grief d' avoir dissimulé certaines circonstances à l' expert et produit une fausse facture de ramonage du conduit de la chaudière, qui s' est achevée par une décision de non- lieu confirmée en appel le 7 juin 2002.
Par le jugement déféré du 12 janvier 2007 rendu après reprise de l' instance, le tribunal a rejeté les demandes, considérant que Philippe A..., tenu en vertu des dispositions de l' article 1792- 2 du code civil à raison des ouvrages exécutés, rapportait la preuve de la cause étrangère, en l' occurrence le caractère causal déterminant de caractéristiques propres à la souche de la cheminée mais restées cachées, ainsi que la faute du maître de l' ouvrage tenant au défaut de ramonage du tubage de la chaudière pendant deux ans.

Aux termes de leurs conclusions du 12 juin 2007, les consorts Y... et Z..., régulièrement appelants, concluent à la réformation de cette décision et demandent à la Cour de déclarer Philippe A... responsable sur le fondement des dispositions de l' article 1792 du code civil des conséquences dommageables de l' incendie, à titre principal de le condamner in solidum avec la compagnie COVEA RISKS au paiement de la somme de 1. 065. 237, 40 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 5 mars 1996, avec capitalisation, subsidiairement dans le cas où serait retenue la responsabilité civile contractuelle de Philippe A..., de le condamner pareillement mais in solidum avec la compagnie AGF ASSURANCES.

Ils soutiennent que l' imputabilité du sinistre aux travaux réalisés n' est pas discutable au regard des conclusions d' expertise qui ont mis en évidence l' absence de précaution visant à protéger les pièces de bois mises à nu à proximité du tubage réalisé et l' inobservation des prescriptions réglementaires concernant la construction des conduits de fumée et des installations de cheminées, que les caractéristiques de la cheminée ne peuvent constituer une cause étrangère alors qu' il incombait à l' entrepreneur de s' assurer de leur aptitude à recevoir l' ouvrage réalisé, que l' expert a formellement exclu le lien de causalité entre l' incendie et le défaut de ramonage.
Aux termes de ses conclusions du 1er août 2007, Philippe A... conclut au principal à la confirmation du jugement dont appel, subsidiairement demande à la Cour de condamner la compagnie AGF à le garantir intégralement, aucune limitation de garantie ni réduction proportionnelle ne trouvant matière à s' appliquer.
Il soutient que les conclusions de l' expert reposent sur des supputations qui ne sont pas corroborées par les constatations effectuées, que lors de la deuxième réunion d' expertise, les propriétaires avaient fait disparaître tous les vestiges de l' incendie, interdisant les investigations sur les origines possibles du sinistre qui auraient pu se trouver dans les très importants travaux dont le château faisait l' objet à l' époque de l' incendie ou dans l' installation électrique vétuste des combles, que la non- conformité des travaux aux DTU n' est pas démontrée en ce qui concerne le respect de la distance au feu et de la hauteur de sortie du tubage, que l' expert n' a pas démontré l' origine du feu et les circonstances de sa propagation alors que l' absence d' ardoises en certains endroits laissait sans protection la charpente qui a brûlé, que le feu de cheminée est une cause recevable en l' absence d' entretien. Sur l' assurance, il fait valoir que les travaux de tubage font partie intégrante de son activité de chauffagiste dont ils constituent une prestation annexe qui n' a pas été formellement exclue de la garantie, seul le chauffage électrique intégré étant exclu, qu' à défaut l' assureur aurait manqué à son obligation de renseignement et de conseil, que la compagnie AGF n' est pas fondée à demander l' application d' une limite de garantie dès lors que les montants réclamés n' excèdent pas le plafond fixé à 30 millions de Francs pour les dommages exceptionnels résultant de l' action du feu (§ 2. 63), enfin qu' il a bien déclaré son salarié à l' assureur.
Aux termes de ses conclusions du 17 septembre 2007, la compagnie AGF ASSURANCES demande à la Cour de juger que les conclusions du rapport d' expertise ne sont que des hypothèses non confortées par les faits constatés, qu' en tout état de cause, l' incendie ne peut être dû qu' à une cause totalement extérieure à l' intervention de Philippe A... et aux fautes des appelants, et de rejeter leurs demandes, subsidiairement que sa garantie est exclue, le sinistre étant dû à une activité de fumisterie, chemisage et tubage qui n' est pas couverte par la police d' assurance souscrite auprès d' elle, que la limite de garantie de 457. 345, 05 € est opposable aux tiers ainsi que la franchise de 10 % de cette somme, de faire application de la règle proportionnelle en réduisant à 293. 825, 29 € le montant de l' indemnité en raison de l' inexactitude des déclarations faite par l' assuré en ce qui concerne l' effectif de son entreprise, enfin de rejeter les demandes d' intérêts au taux légal et de capitalisation.
Sur l' origine du sinistre, elle ajoute que les deux autres conduits de la souche de cheminée doivent être considérés comme extérieurs à l' ouvrage confié, et sur lesquels son assuré n' était tenu d' aucune obligation de conseil. Sur la garantie, elle soutient que Philippe A... qui est électricien, n' était couvert que pour les installations de chauffage électrique à l' exclusion du chauffage par câbles électriques chauffants noyés dans la maçonnerie, qu' aucune obligation de renseignement et conseil ne pouvait être engagée pour la réalisation de travaux de tubage qui relèvent d' une activité de fumisterie répertoriée dans une activité distincte de celle de chauffage, que la notion d' activité annexe est inefficace, que l' article 2. 63 invoqué concerne les sinistres exceptionnels de nature catastrophique pouvant entraîner des dommages extrêmement graves, et non un incendie ordinaire, et que le plafond qui en résulte ne s' applique que lorsqu' il y a eu dommages corporels, enfin que Philippe A... ne démontre pas avoir informé son assureur de la modification du risque tenant à la présence d' un salarié.
Aux termes de ses conclusions du 16 novembre 2007, la société COVEA RISKS conclut à titre principal à la confirmation du jugement déféré, subsidiairement à l' inopposabilité de l' expertise et à l' absence de garantie, au titre du contrat d' assurance de responsabilité civile décennale souscrit, de l' activité de chauffage pour laquelle la responsabilité de Philippe A... est recherchée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que l' expert a déterminé la zone de départ de l' incendie en fonction de l' intensité des dégradations thermiques constatées dans l' ensemble des décombres, en l' occurrence à partir de l' éclatement de la maçonnerie en sortie du gainage de la cheminée, et de l' importance nettement supérieure des dommages occasionnés aux planchers des combles et leurs bois de charpente directement au pied de ce conduit de cheminée ;
qu' il a écarté toute cause d' origine électrique et notamment au niveau des combles en l' absence de toute trace de ligne électrique dans ce secteur du château, et identifié la chaudière à bois comme seule source d' énergie dans cette zone du château capable d' engager un incendie, par transfert aux éléments combustibles proches de la construction, à savoir les planches en bois occultant partiellement le dessus de la souche de cheminée et les supports en bois permettant la fixation des ardoises recouvrant les parois extérieures des conduits de cheminée ;
Attendu que rien ne permet d' envisager que ces constatations précises et déterminantes effectuées sitôt après le sinistre soient susceptibles d' être remises en cause par les modifications qui ont été apportées par la suite dans les lieux afin d' en assurer la protection pour limiter l' aggravation des dommages, et à cette fin d' en entamer la restauration ;
Attendu qu' il est sans intérêt de discuter des opérations effectivement réalisées par l' installateur pour assurer ou non l' ouverture du conduit dans lequel a été installé le gainage- sciage ou non de planches, ou simple enlèvement d' une plaque de zinc- dès lors que les constatations faites sur l' état des lieux immédiatement après l' incendie sont suffisamment éloquentes pour déterminer ce qu' il était lors de l' exécution des travaux et à l' issue de ceux- ci ;
qu' il en résulte d' une part que le conduit dans lequel avait été installé le gainage de la chaudière était resté partiellement obturé par un complexe bouchant les orifices des deux autres conduits voisins de la même cheminée, et constitué d' une épaisse couche de mortier de ciment additionné de chaux coulée sur deux planches en bois de 22 mm d' épaisseur, reposant directement sur le sommet de la souche ;
qu' il en ressort d' autre part qu' en sortie du conduit de cheminée, le tube annelé, d' une section inférieure au conduit, n' avait pas été fixé ni rendu étanche aux ouvrages environnants, et qu' après le sinistre son propre orifice se trouvait dans un plan situé immédiatement au- dessous de celui défini par les planches ;
Attendu que le processus d' ignition mis en évidence par l' expert dans cette configuration n' est pas utilement discuté, à partir des flux de convection transportant des particules incandescentes jusqu' en sortie de tube, au voisinage immédiat de planches en bois dont il a été constaté qu' elles avaient brûlé sur tout le pourtour du complexe d' obturation, dans une zone fortement alimentée en oxygène en sortie de cheminée où l' expert a souligné l' importance des phénomènes aérologiques, le tout dans le volume d' un autre complexe, celui de l' enrobage en ardoise tant des parois verticales de la cheminée, monté sur bois, que de la partie supérieure horizontale de leur bâti sur tout son pourtour ;
que l' expert s' est parfaitement expliqué sur la hauteur initiale de sortie du tube, probablement suffisante, mais également sur l' origine mécanique de l' affaissement matériellement constaté du tube annelé, qui n' avait pas été fixé, ainsi que sur la portée de la trace d' agression thermique que présentait son extrémité sur quelques centimètres, ce qui est exactement compatible avec le mécanisme qu' il décrit où se développe un foyer d' incendie autour des planches voisines en sortie de cheminée, dans le volume où se trouve cette portion de la gaine ;
Attendu qu' il ne résulte de l' avis de l' expert sur le processus incendiaire aucune supputation non vérifiée ou exploitation abusive de déclarations contestées, mais au contraire la mise en évidence, à partir de faits précis exactement constatés et de mécanismes techniques détaillés qui ne sont pas utilement discutés, d' une conjonction de phénomènes qui rend compte des dommages constatés et de leur origine ;
Attendu qu' il résulte du processus d' ignition mis en évidence, qui met en cause l' installation du gainage en sortie de conduit, que c' est à juste titre qu' il est soutenu que le lien d' imputabilité du dommage aux travaux exécutés par Philippe A... est démontré ;
Attendu qu' il incombait à ce dernier d' une part, en reconnaissant les ouvrages alentour, de s' assurer que le gainage qu' il installait ne risquait pas voisiner des pièces de bois dans des conditions dangereuses, d' autre part de garantir la solidité de son installation et spécialement de la sortie du gainage et l' étanchéité de celle- ci par rapport aux ouvrages immédiatement environnants ; Attendu que s' il peut se prévaloir d' une vraisemblance suffisante pour prétendre avoir ignoré que les ardoises étaient montées sur des bois très proches de la souche, ce qui était normalement caché dans la configuration que révèlent les autres cheminées moins endommagées, en revanche, il n' est pas démontré au regard des constatations faites sur la consistance du complexe qui obturait les conduits de cheminée que la présence et la proximité immédiate des planches de bois ne pouvaient être découvertes lors de l' exécution des travaux en 1994, dès lors que, directement posées au dessus des orifices de sortie des conduits, elles constituaient l' unique support du complexe de mortier qui débordait de 13 centimètres sur l' orifice litigieux long de 45 centimètres, et que le débordement des planches elles- mêmes a été mesuré à 4 centimètres après l' incendie qui les avait entamées ;

que l' absence de détection de ces bois ne peut ainsi être admise comme une cause étrangère ;
qu' en outre, le défaut de fixation du gainage en partie haute fait apparaître que les précautions destinées à garantir la solidité de l' ouvrage et l' étanchéité de sa sortie par rapport aux ouvrages alentour n' ont pas été prises, ce qui exclut également toute possibilité d' admission de la cause étrangère ;
Attendu d' autre part que l' expert a estimé en fonction des constatations qu' il a rapportées et qui ne sont pas discutées, et par des motifs précis qui ne sont pas utilement remis en cause faute de l' être précisément, que le défaut de ramonage du conduit- fût- il en lui- même un fait fautif- n' avait pas contribué de façon active au processus à l' origine de l' incendie ;
Attendu qu' il suit de ces motifs que le jugement est à bon droit critiqué en ce qu' il a retenu que l' entrepreneur s' exonérait de sa responsabilité par la preuve de la cause étrangère ;
Attendu, sur la garantie de la société COVEA RISKS, que la garantie de l' assurance décennale obligatoire n' a vocation à couvrir les dommages que pour les travaux afférents au secteur d' activité professionnelle déclaré par le constructeur ;
que la police d' assurance décennale a été souscrite pour l' exercice d' activités de zinguerie, plomberie, sanitaire, électricité ;
qu' il n' est pas discuté que les travaux exécutés par Philippe A... de pose d' une chaudière à bois et de gainage d' une cheminée ne ressortent d' aucun de ces secteurs d' activité professionnelle déclarés ;
qu' il s' ensuit que c' est à bon droit que la société COVEA RISKS oppose une non- garantie à son assuré, qu' elle ne peut donc qu' être mise hors de cause ;
Attendu, sur la garantie de la compagnie AGF ASSURANCES, que les conditions particulières de la police d' assurance des risques professionnels des artisans du bâtiment souscrite le 1er décembre 1992 par Philippe A... précisent que les activités exercées sont l' " électricité, installation d' alarmes, pose d' enseignes lumineuses, plomberie- sanitaire, chauffage (sauf chauffage électrique intégré) " ;
que dans un paragraphe intitulé " dispositions diverses ", figure la mention suivante : " il est précisé qu' en ce qui concerne l' activité d' installateur d' alarmes, sont exclus de la garantie B (responsabilité civile de votre entreprise) les dommages résultant d' un vol ou d' une tentative de vol " ;
Attendu qu' en l' état de ces indications, d' où ne résulte aucune référence à des nomenclatures ou classifications préétablies et déterminées pour la sélection des activités à déclarer par l' assuré ou pour l' identification du champ de chaque activité exercée et de ses limites, mais seulement des désignations purement génériques assorties de l' expression de restrictions explicites, la compagnie AGF ne trouve aucun fondement pour prétendre utilement que l' activité " chauffage " n' aurait pas compris les travaux exécutés ;
qu' ainsi, elle n' est pas fondée à prétendre que l' activité déclarée devrait s' entendre de " chauffage électrique ", ce que rien n' implique ni directement ni indirectement ;
que le fait que le code APE de l' entreprise désigne uniquement l' activité de travaux d' installations électriques ne peut être considéré comme déterminant de la nature des activités assurées alors qu' il est sans rapport avec celle de " plomberie- sanitaire " qui est pourtant explicitement assurée ;
que le fait que la restriction exprimée sur l' activité chauffage concerne un type de chauffage électrique, le " chauffage électrique intégré ", n' induit pas non plus nécessairement que la seule activité de chauffage assurée serait celle de chauffage électrique, ce qui n' est pas exprimé, d' autant moins que l' activité de plomberie- sanitaire également garantie a un rapport propre avec celle de chauffage, et sans lien avec l' activité électrique ;
que pareillement et pour les mêmes motifs Philippe A... est- il fondé à soutenir que l' installation du tube d' évacuation des gaz brûlés de la chaudière installée constitue une prestation annexe de l' installation de chauffage dont elle est indissociable, et dont l' assureur n' est pas fondé à refuser la garantie au prétexte qu' elle ressortirait d' un autre secteur d' activité, celui de la fumisterie, en l' absence de toute exclusion formelle au contrat ;
Attendu par conséquent que Philippe A... est fondé à soutenir que les travaux qu' il a effectués en la circonstance d' installation d' une chaudière à bois, outre selon la facture émise diverses autres prestations apparemment associées relevant de plusieurs de ses activités déclarées : circulateur sanitaire, alimentation, soupape thermique, réducteur de pression, vannes (...), ainsi que l' installation du tube d' évacuation des fumées relèvent de l' activité de chauffage déclarée pour son assurance ;
Attendu, sur les limites de garantie de la compagnie AGF, que le paragraphe 2. 6. des conditions générales " montants de garantie et franchises " renvoie en son article 2. 61 à un tableau récapitulatif en page 40 qui, pour les dommages matériels survenus après réception prévoit un plafond " tous dommages confondus " de 6. 000. 000 Francs par année d' assurance sans pouvoir dépasser 3. 000. 000 Francs par sinistre pour les dommages matériels ;
que l' article 2. 63 envisageant le " cas particulier des dommages exceptionnels " ajoute qu' " il est précisé, pour l' application de la présente garantie, que nos engagements ne peuvent excéder trente millions de Francs par sinistre, quel que soit le nombre de victimes, pour les dommages exceptionnels, c' est- à- dire les dommages corporels, matériels et immatériels résultant (...) de l' action du feu, de l' eau, des gaz et de l' électricité dans toutes leurs manifestations (....) " ; que la deuxième phrase de cet article ajoute, à la suite de la liste des causes de dommages, que " En cas de sinistre concernant à la fois des dommages corporels, des dommages matériels et des dommages immatériels consécutifs visés ci- dessus, nos engagements ne pourront excéder par sinistre trente millions de Francs pour l' ensemble de ces dommages " ;

Attendu que le tableau en page 40 en ce qui concerne la garantie B ici en cause de la " responsabilité civile de votre entreprise ", définit les natures et montants de garantie suivant que les dommages sont survenus avant ou après livraison, mais annonce en préambule que " les montants de garantie qui suivent s' entendent sous réserve des dispositions concernant les dommages exceptionnels " ;
Attendu que pour les dommages survenus avant réception, le tableau distingue les dommages corporels, qui sont garantis sans limitation de somme, des dommages matériels et immatériels consécutifs qui sont plafonnés à 3. 000. 000 Francs par sinistre ;
que pour les dommages de pollution accidentelle et pour les dommages survenus après réception, il prévoit des garanties " tous dommages confondus ", ce qui s' entend de l' ensemble des dommages corporels, matériels et immatériels consécutifs ;
Attendu qu' il est clair dans ce corps de stipulations que l' objet de l' article 2. 63, inséré dans un paragraphe 2. 6 " montants de garantie et franchises " qui ne concerne donc pas la définition des risques couverts mais exclusivement le montant des garanties et prend sa place après le renvoi en 2. 61 aux montants résultant du tableau de la page 40, n' est autre que de limiter les engagements de l' assureur qui résultent de ce dernier ainsi que le révèlent explicitement les termes introductifs selon lesquels " il est précisé, pour l' application de la présente garantie, que nos engagements ne peuvent excéder trente millions de Francs par sinistre ", et que confirme la stipulation suivante du caractère invariable de ce plafond, ce qui ne peut viser que le cas dans lequel la garantie est stipulée illimitée dans le tableau, c' est- à- dire dans le cas de dommages corporels et avant réception seulement ;
que l' exposition de telles sommes n' est concrètement susceptible de se rencontrer qu' en cas de pluralité de victimes et pour des sinistres à potentialité catastrophique par la nature de leurs sources ainsi que l' envisage explicitement ce corps de stipulations ;
que c' est donc sans fondement et par dénaturation du sens clair de la clause que Philippe A... prétend que l' incendie serait garanti comme dommage exceptionnel, alors que, survenu après réception, il n' entre pas dans la catégorie des sinistres pour lesquels la garantie est prévue illimitée ;
Attendu que la garantie de l' assureur n' est donc engagée qu' à hauteur du plafond de 3. 000. 000 Francs, soit 457. 347, 05 €, sous réserve selon l' article 2. 61 de sa revalorisation en fonction de l' évolution de l' indice entre la date de souscription de la garantie et la date d' échéance annuelle précédant la survenance du sinistre, et s' agissant d' une assurance qui n' est pas obligatoire, moyennant la franchise convenue, opposable aux tiers, soit 10 % de l' indemnité entre le minimum de 5 fois l' indice BT 01 et le maximum de 20 fois cet indice ;
Attendu, sur l' application de la règle proportionnelle, qu' il résulte des conditions particulières de la police souscrite que l' assuré a déclaré travailler seul ou avec l' aide d' un apprenti ;
qu' en l' état du courrier adressé à la compagnie par l' agent AGF d' où il résulte que Philippe A... l' avait informé en 1994 de l' embauche d' un ouvrier, à l' occasion de l' assurance d' un fourgon, et que l' agent en a informé la compagnie ainsi qu' il résulte d' un écran synthétique, le grief de défaut de déclaration d' une aggravation du risque n' est pas démontré dans sa matérialité ;
que les mentions de l' écran synthétique antérieur au sinistre dont la compagnie AGF conteste la portée, où apparaît une ligne non commentée ainsi libellée : " EFFECTIF : 1 OU CODE CLASSE EFF. SAL. : 01 1 à 2 SALARIES " ne fait pas apparaître que cette information ne lui serait pas parvenue, et par une circonstance imputable à l' assuré ;
Attendu par conséquent que la compagnie AGF sera tenue dans les limites ci- dessus déterminées sans qu' il y ait lieu à application de la règle proportionnelle ;
Attendu que le montant de la somme réclamée, égale aux estimations résultant du rapport d' expertise, ne fait l' objet d' aucune discussion ;
Attendu, sur les intérêts, qu' il y a lieu de faire droit à compter de l' assignation aux demandes à l' égard de Philippe A..., qui a retardé le paiement de l' indemnisation par une plainte avec constitution de partie civile définitivement reconnue non fondée ;
qu' à l' égard de la compagnie d' assurances, la réalisation du risque résulte de l' arrêt de condamnation de l' assuré, qui constitue pour elle le point de départ des intérêts ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,
Infirme la décision déférée et, statuant à nouveau,
1. Déclare Philippe A... responsable sur le fondement des dispositions de l' article 1792 du code civil des dommages subis par les consorts Z... à la suite de l'incendie du château de Belcastel survenu dans la nuit du 4 au 5 mars 1996 ;
2. Le condamne à payer à Jaume Z... ainsi qu' à Lesley Y... et Jacques Z... en leur qualité d' administrateurs légaux de leur fils mineur Alexandre Z... la somme de 1. 065. 237, 40 € au titre des dommages matériels ;
3. Dit que cette somme sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 août 1998, avec capitalisation dans les termes de l' article 1154 du code civil ;
4. Juge que la garantie de la compagnie AGF ASSURANCE est engagée à raison des dommages résultant des travaux exécutés par Philippe A... au mois de mai 1994 ;
5. Juge que le plafond de garantie applicable au sinistre est celui de 3. 000. 000 Francs, soit 457. 347, 05 €, résultant de l' article 2. 61 des conditions générales de la police d' assurance souscrite le 1er décembre 1992, sous réserve de sa revalorisation en fonction de l' évolution de l' indice entre la date de souscription de la garantie et la date d'échéance annuelle précédant la survenance du sinistre ;
6. Déclare la compagnie AGF ASSURANCES mal fondée en sa demande tendant à l' application de la règle proportionnelle et l' en déboute ;
7. Condamne en conséquence la compagnie AGF ASSURANCE in solidum avec Philippe A... au paiement de la condamnation qui précède (point 2) dans les limites du plafond de garantie ci- dessus (point 5), et moyennant application de la franchise contractuelle, opposable aux consorts Z..., fixée à 10 % de l' indemnité avec un minimum de 5 fois l' indice BT 01 et un maximum de 20 fois cet indice ;
8. Met hors de cause la société COVEA RISKS ;
Vu l' article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes de Philippe A..., la compagnie AGF ASSURANCES et la société COVEA RISKS ;
Condamne Philippe A... et la compagnie AGF ASSURANCES in solidum à payer aux Philippe A... et la compagnie AGF ASSURANCES consorts Y... et Z... la somme de 8. 000 € ;
Condamne Philippe A... et la compagnie AGF ASSURANCES in solidum aux entiers dépens de l' instance, en ce compris ceux exposés tant en premier ressort qu' en appel et les honoraires de l' expert, et reconnaît pour ceux d' appel, à la SCP RIVES- PODESTA et Me de LAMY, avoués qui en ont fait la demande, le droit de recouvrement direct prévu à l' article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0038
Numéro d'arrêt : 07/00807
Date de la décision : 04/02/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Castres, 12 janvier 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2008-02-04;07.00807 ?
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