COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 70E 1ère chambre 1ère section ARRET No CONTRADICTOIRE DU 23 MARS 2006 R.G. No 04/08892 AFFAIRE :
Alain X... ... C/ Jean-Louis Y... ... Décision déférée à la cour :
Jugement rendu(e) le 26 Octobre 2004 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES No Chambre : 2 No Section : No RG : 03/00498 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP DEBRAY SCP LISSARRAGUE REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur Alain X... 93 bis Grande Rue - 78240 AIGREMONT Madame X... 93 bis Grande Rue - 78240 AIGREMONT représentés par la SCP DEBRAY-CHEMIN - N du dossier 04993 rep/assistant : Me BEGARD - CROQUEZ (avocat au barreau de VERSAILLES) APPELANTS Monsieur Jean-Louis Y... 93 ter Grande Rue - 78240 AIGREMONT Madame Kathleen Z... épouse Y... 93 ter Grande Rue - 78240 AIGREMONT représentés par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD - Avoués N du dossier 04.993 rep/assistant : Me MANDICAS (avocat au barreau de VERSAILLES) INTIMES Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Février 2006 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Francine BARDY A... en présence de Madame Françoise SIMONNOT B... chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Francine BARDY, président,
Madame Lysiane LIAUZUN, conseiller,
Madame Françoise SIMONNOT, conseiller, Greffier, lors des débats :
Madame Sylvie C...,
Les époux X..., propriétaires d'un immeuble sis 93 bis grande rue à AIGREMONT, ont fait édifier en 1984 en limite séparative de la propriété voisine, appartenant aux époux Y..., une terrasse sur une profondeur de 3 mètres au lieu de celle de 1,70 mètres autorisée par le permis de construire.
Par arrêté du 11 septembre 1998, le Maire D'AIGREMONT a indiqué qu'il n'est pas fait opposition aux travaux inhérents à la construction d'un mur sur terrasse en limite séparative de propriété pour lesquels une déclaration avait été déposée en mairie le 17 août 1998 et un permis de construire a été délivré aux époux X... le 6 octobre 1998 les autorisant à édifier sur la terrasse une véranda.
L'arrêté du 11 septembre 1998 ayant été annulé par jugement rendu le 23 janvier 2001 par le Tribunal Administratif, les époux X... ont déposé le 19 octobre 2001 une nouvelle déclaration de travaux visant à régulariser le mur et la terrasse à la suite de laquelle a été rendu le 21 novembre 2001 un nouvel arrêté du maire ne faisant pas opposition aux travaux.
Par arrêt du 3 novembre 2005, la Cour Administrative d'Appel de VERSAILLES a annulé l'arrêté pris le 21 novembre 2001.
Par acte du 6 janvier 2003, les époux Y... avaient fait assigner les époux X... devant le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES pour que soit ordonnée la démolition du mur et de la véranda construits sur la terrasse et la remise sous astreinte, en état des lieux, sollicitant en outre le paiement de la somme de 1.600ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par jugement du 26 octobre 2004, le Tribunal, visant le jugement définitif rendu le 23 janvier 2001 par le Tribunal Administratif de VERSAILLES annulant l'arrêté du maire de la commune d'AIGREMONT du 11 septembre 1998, a : - rejeté la demande de sursis à statuer des époux
X... et celle de dommages et intérêts, - ordonné la démolition du mur et de la véranda construits sur la terrasse des époux X..., - ordonné la remise en état des lieux sous astreinte de 100ç par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, - condamné les époux X... à payer aux époux Y... la somme de 1.600ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamné ceux-ci aux dépens pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Appelants, les époux X..., aux termes de leurs dernières écritures signifiées le 5 janvier 2006 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de leurs moyens, concluent à l'infirmation de la décision entreprise et demandent à la Cour de : - constater que les époux Y... n'établissent pas l'intérêt qu'ils ont à agir contre eux, - constater qu'ils ne donnent aucun fondement juridique à leur action, - dire en conséquence leur demande irrecevable, - subsidiairement, surseoir à statuer sur les demandes des époux Y... dans l'attente de la décision de la Cour Administrative d'appel, - plus subsidiairement, constater que le Tribunal a omis de statuer sur un argument essentiel développé par eux, - constater en effet que la véranda et le mur pignon ou mur écran ont fait l'objet d'un permis de construire en date du 6 octobre 1998, régulièrement affiché, contre lequel aucun recours n'a été exercé, - dire en conséquence que cette véranda et ce mur ne sauraient être démolis, - débouter les époux Y... de toutes leurs demandes, - les condamner à leur payer la somme de 4.600ç à titre de dommages et intérêts et celle de 2.000ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - Les condamner aux entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières écritures signifiées le 11 janvier 2006 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de leurs moyens,
les époux Y..., visant l'arrêt rendu le 3 novembre 2005 par la Cour Administrative d'Appel, concluent à la confirmation de la décision entreprise et demandent à la Cour de : - dire qu'il n'y a pas lieu de surseoir à statuer sur leur demande, - rejeter les demandes des époux X... tendant à leur condamnation au paiement de dommages et intérêts et au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - ordonner la démolition du mur et de la véranda construits sur la terrasse des époux X..., - ordonner la remise en état des lieux sous astreinte de 200ç par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, - débouter les époux X... de toutes leurs demandes, - les condamner à leur payer la somme de 2.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - les condamne aux entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. SUR CE SUR LES FINS DE NON RECEVOIR
Considérant que les époux Y... reprochent aux époux X..., propriétaires de la parcelle de terrain contige à la leur, l'édification irrégulière d'un mur en limite séparative de leur propriété et le trouble de voisinage qui en résulterait ;
qu'ils ont donc un intérêt légitime à agir, étant observé que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l'action et que l'existence du trouble invoqué par le demandeur n'est pas une condition de recevabilité de son action, mais de son succès ;
que c'est donc à bon droit que le Tribunal a rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir, la décision entreprise étant confirmée de ce chef ;
Considérant que la mention du jugement rendu par une juridiction administrative ne constitue pas le fondement juridique de la demande des époux Y..., laquelle est fondée sur l'existence d'un trouble de
voisinage ;
que la fin de non recevoir tirée du défaut de fondement juridique sera donc également rejetée ; SUR LA DEMANDE DE SURSIS A STATUER
Considérant que la Cour Administrative dAppel a rendu son arrêt le 3 novembre 2005 ;
que la demande de sursis à statuer des époux X... est donc sans objet ; SUR LE FOND
Considérant qu'il est constant que la terrasse a été construite avec un dépassement de 1,30 mètres de la longueur autorisée par le permis de construire délivré le 28 septembre 1983 et que les dispositions actuelles du POS rendent impossible toute régularisation des travaux effectués sans autorisation ;
Considérant que l'arrêt rendu par la Cour Administrative d'Appel le 3 novembre 2005, qui est exécutoire, prononce l'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2001 par lequel le maire de la commune d'AIGREMONT ne s'est pas opposé à la construction d'un mur écran sur l'extension litigieuse de la terrasse, étant rappelé qu'un précédant jugement du Tribunal Administratif, en date du 23 janvier 2001, définitif, avait annulé l'arrêté du 11 septembre 1998 ayant initialement autorisé "la construction d'un mur sur la terrasse en limite de propriété en parpaings couverts d'un enduit pierre" ;
que l'édification du mur litigieux est donc illégale, étant observé que, contrairement à la thèse soutenue par les époux X..., la Cour Administrative ayant annulé l'arrêté du 21 novembre 2001 sans aucune restriction, c'est la construction du mur sur toute sa longueur qui est entachée d'illégalité et non seulement la partie construite sur l'extension illégale de la terrasse ;
Considérant que le permis de construire délivré le 6 octobre 1998 pour la construction de la véranda ne régularise pas l'édification du mur visé à la déclaration de travaux dans la mesure où le permis de
construire a été délivré avant l'annulation de l'arrêté du maire ne s'opposant pas à son édification, sur des bases qui se sont avérées par la suite erronées, et que par suite, l'arrêt de la Cour Administrative d'Appel affecte par ricochet la validité du permis de construire, du moins au regard des conséquences civiles de la construction qui ne peut être considérée comme régulière ;
Considérant que la démolition d'un ouvrage construit irrégulièrement ne peut être ordonnée par une juridiction civile que si celui qui la demande établit qu'elle lui cause un préjudice ;
Considérant que les époux Y... font état d'un trouble de voisinage qui résulterait du caractère disgracieux de la construction ;
que toutefois les photographies versées à leur dossier à titre de preuve ne révèlent pas le trouble d'ordre esthétique invoqué, étant rappelé que pour être sanctionné, le trouble invoqué doit excéder les inconvénients normaux du voisinage, lesquels sont appréciés en fonction de l'environnement ;
Qu'en conséquence, les époux Y... seront déboutés de leur demande aux fins de démolition ;
Considérant que les époux X... ne justifient pas d'un préjudice à l'appui de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts ; qu'ils en seront déboutés ;
Considérant que les époux Y..., qui succombant, devront indemniser les époux X... des frais non répétibles qu'ils sont contraint à exposer à concurrence de la somme de 1.600 ç ; PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort,
DÉCLARE l'appel recevable,
CONFIRME la décision entreprise en ce qu'elle a dit que les époux Y... ont un intérêt à agir, qu'il n'y a pas lieu de surseoir à statuer et en ce qu'elle a retenu le caractère illicite de la
construction du mur écran eu égard aux décisions administratives,
L'INFIRME pour le surplus,
CONSTATE qu'il n'est pas rapporté la preuve d'un trouble excédant les troubles normaux de voisinage,
DEBOUTE les époux Y... de toutes leurs demandes,
DEBOUTE les époux X... de leur demande de dommages et intérêts,
CONDAMNE les époux Y... à payer aux époux X... la somme de 1.600 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
CONDAMNE les époux Y... aux dépens d'appel avec faculté de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. - prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile. - signé par Madame Francine BARDY, président et par Monsieur Didier ALARY, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER,
Le A...,