COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 04/11/2021
la SELARL AROBASE AVOCATS
la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS
ARRÊT du : 04 NOVEMBRE 2021
No : 210 - 21
No RG 20/00415
No Portalis DBVN-V-B7E-GDP5
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 10 Janvier 2020
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265245235547435
SARL JMM représentée par Madame [J] [B] en sa qualité de gérante
[Adresse 7]
[Localité 2]
Ayant pour avocat Me Quentin MOUTIER, membre de la SELARL AROBASE AVOCATS, avocat au barreau de TOURS
D'UNE PART
INTIMÉES : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265268657551458
La SARL ORDICUBE
Est prise en la personne de son gérant, en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliés ès-qualité audit siège.
[Adresse 1]
[Localité 3]
Ayant pour avocat postulant Me Isabelle TURBAT, membre du cabinet LEXAVOUE, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Patrick BARRET, membre de la SELARL BARRET PATRICK et ASSOCIES, avocat au barreau d'ANGERS
Timbre fiscal dématérialisé No: 1265258382078200
S.A.S. GESTIMUM
[Adresse 4]
[Localité 5]
Ayant pour avocat postulant Me Gaëtane MOULET, membre de la SELARL ACTE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Albert ANSTETT, avocat au barreau de PARIS
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 12 Février 2020
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 26 Août 2021
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l'audience publique du JEUDI 16 SEPTEMBRE 2021, à 14 heures, Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, en son rapport, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Ferréole DELONS, Conseiller,
Greffier :
Madame Emmanuelle PRADEL, Greffier lors des débats,
Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 04 NOVEMBRE 2021 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE :
La société JMM exerce sous la dénomination commerciale Amikinos une activité de vente à distance d'aliments, de produits de soins et d'hygiène, et de compléments alimentaires pour chiens et chats. Pour ce faire, elle dispose d'un site de vente en ligne qui fonctionne sous Prestashop.
Désirant remplacer son système de gestion commerciale et comptable, à fin de développer son activité de vente en ligne, la société JMM est entrée en relations avec la société Gestimum, éditrice de logiciels à destination des petites et moyennes entreprises.
Le 21 octobre 2013, la société JMM a reçu une offre commerciale des sociétés Gestimum et Ordicube, qu'elle a acceptée le 30 octobre suivant.
La convention, qui précise par qui, de l'éditeur et de l'intégrateur, les prestations seront réalisées et facturées, porte sur :
-l'acquisition des licences du logiciel ERP (Entreprise Ressource Planing) de Gestimum, au prix HT de 8 500 euros, comprenant les licences du module serveur, du module connecteur e-commerce et du module décisionnel
-l'acquisition de matériels (serveurs et écran), au prix HT de 1 600 euros
-la maintenance du système, au prix HT de 2 450 euros par an
-l'installation du système et la formation des utilisateurs en 2013 et 2014, au prix HT de 16 200 euros HT
Exposant que les sociétés Gestimum et Ordicube, qui s'étaient engagées à installer et paramétrer le logiciel de gestion Gestimum ERP, ainsi que le connecteur e-commerce, en quelques jours, voire quelques semaines, ont considéré avoir exécuté toutes leurs prestations dès la fin 2013 (12 novembre 2013 pour Ordicube et 31 décembre 2013 pour Gestimum), qu'elle a été contrainte d'émettre des réserves dès le 17 janvier 2014 car le système installé ne permettait pas d'inter-opérer avec sa boutique e-commerce fonctionnant sous Prestashop, que le connecteur e-commerce n'a finalement été installé que fin janvier, début février 2016, mais n'a pas non plus permis la synchronisation des commandes avec ses stocks et l'édition de factures, de sorte qu'elle a dû remplacer le logiciel ERP Gestimum par un logiciel de gestion EBP et un connecteur Vaisonet, la société JMM a fait assigner les sociétés Ordicube et Gestimum devant le tribunal de commerce de Tours par actes des 9 et 15 mars 2018, à fin d'obtenir la résolution du contrat du 30 octobre 2013 et l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis.
Par jugement du 10 janvier 2020, le tribunal a :
-débouté la société JMM de sa demande de résolution du contrat conclu le 30 octobre 2013 entre les sociétés JMM, Gestimum et Ordicube pour la délivrance d'un progiciel connecté
-débouté la société JMM de ses demandes corolaires de dommages et intérêts, et de toutes ses demandes, fins et conclusions
-condamné la société JMM à payer à la société Gestimum la somme de 2 390euros HT au titre des frais d'assistance engagés hors cadre contractuel
-condamné la société JMM à payer à la société Ordicube la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
-condamné la société JMM à payer à la société Gestimum la somme de 9 475 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
-laissé à la charge de la société JMM les entiers dépens
Pour statuer comme ils l'ont fait, les premiers juges ont commencé, dans les motifs de leur décision, par écarter des débats deux pièces de la société JMM, à savoir deux procès-verbaux de constat dressés par huissier de justice le 19 novembre 2014 et le 12 octobre 2016, en considérant qu'en portant à la connaissance de l'éditeur et de l'installateur, plusieurs années après leur réalisation, ces constats établis hors leur présence, après avoir désinstallé le logiciel litigieux, la société JMM n'avait pas respecté le principe de contradiction et ne lui permettait pas non plus de faire respecter ce principe.
Sur le fond, le tribunal a ensuite relevé que la société JMM avait réglé sans réserve, les 9 janvier, 3 février et 4 mars 2014, les factures des sociétés Ordicube et Gestimum, qu'elle ne justifiait pas avoir commandé à ces dernières l'adaptation du module de connexion à son site e-commerce Prestashop, ni avoir fourni les informations nécessaires à la réalisation de cette prestation spécifique, qu'il était établi que les informations techniques et les fichiers nécessaires à l'adaptation du connecteur G-change avaient été communiqués à la société JMM, que si les formations conventionnellement prévues n'avaient pas toutes été dispensées par la société Gestimum, du fait de la société JMM, il était établi que la société Gestimum avait assuré une importante assistance dans le cadre de sa mission de maintenance à distance et que la société JMM, qui a fait le choix de ne pas renouveler le contrat de maintenance en novembre 2014, de confier à une société tierce les prestations que la société Ordicube aurait été en capacité de réaliser, puis de désinstaller le logiciel litigieux, ne démontrait pas que les sociétés Gestimum et Ordicube auraient failli à leurs obligations ni que les interventions de la société Gestimum, en février-mars 2016, n'auraient pas permis de remédier aux difficultés qu'elle avait signalées.
Les premiers juges en ont déduit que la société JMM devait être déboutée de sa demande de résolution, ainsi que de ses demandes subséquentes en dommages et intérêts.
Reconventionnellement enfin, ils ont retenu que la société Gestimum n'apportait pas la preuve d'un préjudice moral réparable et l'ont déboutée de sa demande indemnitaire formée sur ce chef. Ils lui ont en revanche accordé, à titre de dommages et intérêts, une somme HT de 2 390 euros, en dédommagement des frais d'assistance qu'elle a supportés en acceptant d'aider la société JMM dans la mise au point du connecteur e-commerce, alors qu'il avait été prévu que cette prestation fasse l'objet d'un devis séparé, en fonction du cahier des charges transmis par la cliente.
La société JMM a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 12 février 2020, en critiquant expressément tous les chefs du jugement en cause lui faisant grief.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 24 juillet 2021, la société JMM demande à la cour, au visa des articles 1184 et 1147 anciens du code civil, de :
-confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Tours le 10 janvier 2020 en ce qu'il a débouté la société Gestimum de sa demande reconventionnelle en paiement d'une somme de 26 300 euros au titre d'un prétendu préjudice moral
-infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Tours le 10 janvier 2020 en ce qu'il a :
etgt;débouté la société JMM de sa demande de résolution du contrat du 30 octobre 2013
etgt;débouté la société JMM de ses demandes de dommages intérêts subséquentes, et de toutes ses demandes, fins et conclusions
etgt;condamné la société JMM à payer à la société Gestimum la somme de 2 390 euros HT au titre des frais d'assistance engagés hors cadre contractuel
etgt;condamné la société JMM à payer à la société Ordicube la somme de 4 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
etgt;condamné la société JMM à payer à la société Gestimum la somme de 9 475 euros à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
etgt;laissé à la charge de la société JMM les entiers dépens liquidés et taxés, concernant les frais de greffe, à la somme de 101,94 euros
Et statuant à nouveau,
-prononcer la résolution judiciaire du contrat du 30 octobre 2013 conclu entre les sociétés JMM, Gestimum et Ordicube
En conséquence
-condamner in solidum les sociétés Gestimum et Ordicube à lui restituer la somme de 23 269,97 euros
-condamner in solidum les sociétés Gestimum et Ordicube à lui payer la somme de :
etgt; 18 630,58 euros en réparation du préjudice lié à la perte de temps et la désorganisation subi par la société JMM
etgt;521 207 euros au titre de la perte de chance pour la société JMM de connaître une croissance de son activité depuis 2014
etgt;10 276 euros au titre des frais exposés par la société JMM pour tenter de pallier les défaillances du logiciel et à l'inaction subséquente des sociétés Gestimum et Ordicube
etgt;8 000 euros au titre du préjudice moral
En tout état de cause,
-débouter les sociétés Gestimum et Ordicube de toutes leurs demandes, fins et conclusions
-condamner in solidum les sociétés Gestimum et Ordicube aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à lui payer la somme de 17 065,10 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Au soutien de son appel, la société JMM commence par rappeler qu'un constat d'huissier fait foi jusqu'à preuve du contraire, ce dont elle déduit, non seulement que les constats qu'elle a fait établir non contradictoirement valent à titre de preuve dès lors qu'ils ont été soumis à la discussion des parties, mais encore que les constats en cause valent preuve des manquements contractuels des intimées.
L'appelante, qui souligne ensuite qu'elle n'est pas une professionnelle de l'informatique et qu'elle achetait pour la première fois en 2013 un progiciel pour développer son activité, fait valoir que les sociétés Gestimum et Orbicude, co-traitantes, étaient tenues à son égard à la fois d'une obligation de conseil, et d'une obligation de délivrance emportant le respect des délais et la conformité de la chose vendue aux caractéristiques convenues.
Sur le manquement des intimées à leur obligation de délivrance, la société JMM assure que les deux constats qu'elle a fait dresser par huissier de justice établissent que le logiciel de gestion présente un grand nombre d'anomalies, dans sa partie commerciale aussi bien que dans sa partie comptable, qui le rendent inapte à remplir les fonctionnalités les plus basiques, en soulignant que, s'agissant d'un produit complexe, le paiement des factures, à leur réception, ne saurait valoir réception sans réserve.
Concernant le connecteur e-commerce, la société JMM souligne que la plaquette de présentation des intimées présentait ce connecteur comme un outil qui lui permettrait une parfaite interopérabilité entre sa boutique en ligne, fonctionnant sous Prestashop, et l'outil de gestion Gestimum ERP, et qu'alors que cette fonction avait été déterminante de son consentement, le connecteur e-commerce ne lui a été remis que le 4 mars 2014, soit plus de quatre mois après la conclusion du contrat et son entière facturation, que l'outil n'a été installé qu'en février et mars 2016, soit plus de deux ans après la conclusion du contrat, et s'est finalement révélé inapte lui aussi à remplir des fonctions basiques.
L'appelante souligne que les intimées ne peuvent lui reprocher un manque de collaboration et que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le connecteur, qui lui a été facturé au prix HT de 2 500 € et qui lui avait été présenté comme un produit déjà abouti, fonctionnant dans l'environnement Prestashop, ne nécessitait d'adaptation et de personnalisation qu'à titre optionnel. Elle ajoute que contrairement à ce que lui ont fait croire les sociétés Gestimum et Ordicube, le connecteur e-commerce n'existait en réalité pas à l'époque de la conclusion du contrat, et n'a été développé qu'en janvier 2014, comme l'établit le fichier du connecteur qui lui a été transmis le 4 mars 2014 en format zip sous le nom « GChange-CodePHP2014-01-23 ».
La société JMM en déduit que, faute de lui avoir livré dans un temps raisonnable un logiciel qui réponde à ses besoins, les intimées engagent leur responsabilité contractuelle à son égard et que leurs manquements sont d'une gravité telle qu'ils justifient la résolution du contrat.
En conséquence de cette résolution, la société sollicite la restitution de la somme totale de 23 269,97 euros.
Exposant que la tentative avortée de mise en place de la solution informatique qui lui avait été proposée par les intimées lui a fait perdre du temps, a désorganisé son activité, lui a fait perdre une chance d'optimiser son chiffre d'affaires, et l'a amenée à engager des frais (frais d'intervention d'un prestataire externe et pénalités supportées à raison d'une déclaration tardive de TVA résultant des anomalies du logiciel), la société JMM sollicite, en conséquence de la résolution du contrat, la condamnation in solidum des sociétés Gestimum et Ordicube à l'indemniser de ses entiers préjudices, en précisant que la société Gestimum ne saurait lui opposer une clause limitative de responsabilité qui ne figure pas dans le contrat qui les lie.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 5 août 2021, la société Ordicube demande à la cour, au visa des articles 1147, 1134 et 1184 [du code civil] dans leur version en vigueur au jour de la conclusion du contrat, de :
A titre principal,
-dire et juger la société JMM infondée en son appel
En conséquence, débouter la société JMM de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions
A titre subsidiaire,
-condamner la société Gestimum à la relever indemne des condamnations qui pourraient prononcées à son encontre,
En tout état de cause,
-condamner la société JMM à lui verser la somme de 16 617 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
La société Ordicube commence par rappeler qu'elle est un partenaire habituel de la société Gestimum, qui lui a fait appel pour établir la proposition commerciale destinée à la société JMM, et qu'aux termes de la convention conclue les parties, elle s'est engagée à fournir le logiciel produit par Gestimum ainsi que le matériel, puis à procéder au pré-paramétrage de l'installation, tandis que la société Gestimum s'est de son côté engagée à fournir à la société JMM les formations destinées à personnaliser son logiciel.
La société Ordicube expose ensuite qu'elle a livré le matériel et les logiciels le 12 décembre 2013, et que la société JMM a procédé le 9 janvier suivant, sans aucune réserve, au paiement de sa facture.
Elle souligne qu'elle n'a jamais été destinataire des courriels que la société JMM a adressés à la société Gestimum pour lui faire part des difficultés qu'elle rencontrait dans l'utilisation du logiciel, qu'elle n'a pas non plus été sollicitée par la société Gestimum pour tenter de remédier aux difficultés dénoncées, et que, dès lors que sa prestation était limitée à la pré-installation des logiciels, et ne comportait aucune mission de maintenance, aucun manquement ne peut lui être reproché.
La société Ordicube ajoute que l'appelante ne peut lui reprocher d'avoir failli à son obligation de conseil, alors qu'elle n'a pas communiqué clairement sur ses attentes, en indiquant tout à la fois que la société JMM disposait de compétences informatiques acquises par l'activité de vente en ligne à laquelle elle se livre depuis 2009, et que les difficultés rencontrées s'expliquent par la réticence de ladite société à changer ses processus de gestion pour prendre en considération les contraintes inhérentes à l'informatisation de son activité.
La société Ordicube indique que l'objectif de la société JMM a été de réaliser des économies en limitant en connaissance de cause les prestations souscrites auprès d'elle et de la société Gestimum, en soulignant que la société JMM ne leur a pas confié la récupération des données de son ancien ERP, de sorte qu'elle a dû procéder gracieusement au transfert de certaines informations, avec l'assistance de la société Gestimum, sans qu'aucun critère ni périmètre de transfert n'ait été préalablement défini.
La société Ordicube assure ensuite qu'aucun manquement à son obligation de délivrance ne saurait lui être reproché, en faisant valoir que compte tenu de l'aléa technique inhérent à l'intégration d'un logiciel, aucune obligation de résultat ne pesait sur elle, et que les constatations faites par l'huissier de justice mandaté par la société JMM, sur la base de manipulations informatiques réalisées par la gérante de la société JMM, ne démontrent pas que les difficultés constatées proviendraient d'une mauvaise installation, et pas seulement d'une mauvaise utilisation des logiciels, en soulignant sur ce dernier point que la personnalisation des installations devait être réalisée par la société JMM elle-même, après des formations délivrées par la société Gestimum qui étaient destinées à permettre à l'appelante de comprendre les fonctionnalités des logiciels, pour pouvoir les adapter à ses besoins, mais que la société JMM a fait le choix, par souci d'économie là encore, de ne pas suivre la seconde formation prévue au contrat.
S'agissant du e-connecteur, la société Ordicube soutient que le module n'a été transmis à la société JMM qu'en mars 2014 car elle n'en avait pas l'utilité auparavant, que la dénomination du fichier transmis ne signifie nullement que le module n'existait pas en 2013, mais seulement que la société Gestimum a transmis à sa cliente la dernière version de son module. Elle ajoute que la société JMM ne démontre pas que l'e-connecteur ne fonctionne pas correctement, mais que si tel était le cas, l'appelante ne pourrait lui faire aucune reproche à ce sujet dès lors qu'elle a choisi d'acheter la licence du module e-connecteur sans commander, comme il lui avait été proposé, l'adaptation du module à son propre site internet.
Soulignant enfin qu'elle n'était chargée que de la pré-installation des logiciels, que sa prestation a été réalisée correctement puisque la première formation prévue au contrat a pu intervenir normalement, et qu'on ne saurait lui imputer d'éventuelles anomalies constatées après que les logiciels pré-installés par elle eurent été modifiés par la société JMM, par le service de maintenance de la société Gestimum, puis par la société Tetraed mandatée par cette dernière, la société Ordicube conclut qu'aucun manquement à l'obligation de délivrance ne peut être retenu contre elle et que la société JMM devra en conséquence être déboutée de l'intégralité de ses prétentions.
A titre subsidiaire, la société Ordicube demande que la Gestimum soit condamnée à la relever indemne de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, sans expliquer le fondement de cette prétention, en indiquant seulement qu'aucune faute ne peut être retenue à son égard.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 24 août 2021, la société Gestimum demande à la cour, au visa des articles 1101, 1134, 1149 et 1184 [anciens] du code civil, 16, 232, 244, 699, 700 et 954 du code de procédure civile, de :
-déclarer la société JMM mal fondée en son appel
En conséquence :
A titre principal :
-confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Tours en date du 20 janvier 2020 pour l'ensemble de ses dispositions
-débouter la société JMM de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions
A titre subsidiaire :
-condamner Ordicube à supporter seule toute indemnisation de JMM
A titre infiniment subsidiaire :
-limiter la condamnation prononcée contre Gestimum à 10 950 € ;
En tout état de cause :
-condamner la société JMM à lui verser la somme de 31 980 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
-condamner la société JMM aux entiers dépens
La société Gestimum commence par expliquer qu'en tant qu'éditeur d'un progiciel ERP ouvert et personnalisable, elle met disposition d'intégrateurs partenaires, telle la société Ordicube en 2013 et 2014, son logiciel, qui est un produit standard, identique pour tous ses clients, et que ce sont les intégrateurs qui personnalisent ensuite son produit, en réalisant les interfaces avec les systèmes externes et en réalisant le cas échéant les développements nécessaires, soit immédiatement, par un paramétrage réalisé à partir des besoins exprimés par le client, soit selon un processus itératif, en faisant progressivement évaluer le paramétrage en fonction des retours du client.
La société Gestimum souligne que l'offre commerciale acceptée par la société JMM émane de la société Ordicube. Elle en déduit tout à la fois que la seule relation contractuelle directe qui existe entre elle et l'appelante concerne les deux sessions de formation, et que le reste de la prestation, notamment la fourniture des licences, a été confié à la seule société Ordicube. dont elle indique être le sous-traitant.
La société Gestimum explique ensuite que ses logiciels ne sont pas des logiciels livrés et installés clés en main, mais des produits complexes, dont le bon fonctionnement dépend de l'implication du client, de sa volonté d'apprendre à les utiliser, et de son souci de communiquer les informations nécessaires à leur personnalisation.
Sur ces points, l'éditeur relève qu'en dépit de ses rappels et mises en garde, la société JMM n'a suivi, en 2013, que la première formation qui lui avait été proposée et qui était destinée à la prise en main du logiciel, mais qu'en raison de difficultés rencontrées pour son règlement, la deuxième formation, prévue en 2014, n'a pas été dispensée.
Elle ajoute que la société JMM n'a pas non plus souhaité souscrire de convention de maintenance au-delà de la première année.
Elle en déduit qu'en refusant, par souci d'économie, de former son personnel à l'utilisation de ses logiciels et de souscrire une convention de maintenance associée à l'utilisation des licences, la société JMM a contribué elle-même aux difficultés qu'elle cherche désormais à lui faire supporter ou à faire supporter sur son intégrateur.
S'agissant du connecteur e-commerce, la société Gestimum soutient d'abord que l'installation et le paramétrage de cet outil n'étaient pas prévus au contrat, et qu'elle n'était donc tenue d'aucune obligation à ce titre. Elle explique ensuite que le connecteur a été livré une première fois le 4 mars 2014, puis que, selon ses termes, elle s'est de nouveau « impliquée » dans ce connecteur en mars 2015, puis janvier et février 2016, alors qu'elle n'y était pas obligée. L'intimée explique ensuite que si la société JMM a rencontré des difficultés avec le connecteur, c'est qu'elle ne s'est pas contentée de l'utilisation standard et restreinte de cet outil, mais qu'elle a cherché à le personnaliser, et ce sans accepter de payer le service optionnel de paramétrage personnalisé qui lui avait été proposé par la société Ordicube.
En faisant valoir que les constats dressés le 19 novembre 2014 et le 12 octobre 2016 sont dénués de valeur probante, et devront être écartés des débats en ce qu'ils ont été réalisés, puis produits tardivement, dans des circonstances qui ne permettent pas d'assurer le respect du principe de contradiction, la société Gestimum conclut que l'appelante devra être déboutée de l'intégralité de ses prétentions.
Subsidiairement, la société Gestimum fait valoir que la société JMM, qui a profité au moins durant quatre années de ses logiciels, n'établit pas la réalité des préjudices dont elle réclame réparation en sus de la résolution du contrat, et que les demandes indemnitaires se heurtent à son égard à la clause limitative de responsabilité figurant dans ses conditions générales de vente.
Plus subsidiairement encore, la société Gestimum ajoute que les obligations relatives à l'intégration de son logiciel ERP n'incombaient qu'à la société Ordicube, dont elle maintient qu'elle n'est que le sous-traitant, et en déduit que si des condamnations devaient être prononcées, elles ne pourraient l'être qu'à l'encontre de l'intégrateur.
Pour finir, la société Gestimum, qui ne développe aucun moyen au soutien de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts, s'explique sur le montant des indemnités qu'elle sollicite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 26 août 2021, pour l'affaire être plaidée le 16 septembre suivant et mise en délibéré à ce jour.
SUR CE, LA COUR :
Sur la qualité de sous-traitante alléguée par la société Gestimum
La sous-traitance est définie à l'article 1er de la loi no 75-1334 du 31 décembre 1975 comme l'opération par laquelle un entrepreneur confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité, à une autre personne appelée sous-traitant, l'exécution de tout ou partie du contrat d'entreprise ou d'une partie du marché public conclu avec le maître de l'ouvrage.
L'article 3 de la même loi, dont les prescriptions sont d'ordre public, précise que l'entrepreneur qui entend exécuter un contrat ou un marché en recourant à un ou plusieurs sous-traitants doit, au moment de la conclusion et pendant toute la durée du contrat ou du marché, faire accepter chaque sous-traitant et agréer les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance par le maître de l'ouvrage.
En l'espèce, la société Gestimum, qui soutient être sous-traitante de la société Ordicube, ne produit pas le sous-traité qui aurait été conclu entre elle et la société Ordicube qui, pour sa part, ne se présente nullement comme entrepreneur principal.
La société Gestimum ne produit ni même ne se prévaut non plus d'aucun agrément du maître de l'ouvrage.
Le seul fait que l'offre de contracter du 23 octobre 2013 ait été adressée à la société JMM par la société Ordicube ne suffit pas à caractériser une relation de sous-traitance.
Cette offre, rédigée au nom des deux sociétés, Gestimum et Ordicube, ne fait aucune référence à une relation de sous-traitance entre ces deux sociétés ; elle a été adressée à la société JMM après que cette dernière eut pris contact, non pas avec la société Ordicube, mais avec la société Gestimum qui, par un courriel du 13 mai 2013, lui avait indiqué avoir compris son projet, lui avait communiqué les plaquettes de présentation des différentes fonctionnalités de ses logiciels ERP, en lui précisant qu'un de ses partenaires se mettrait en relation avec elle pour son projet, mais en l'invitant à revenir vers elle pour tout complément d'information.
Sauf à omettre qu'une relation de sous-traitance est exclusive d'une relation contractuelle, la société Gestimum ne peut à la fois soutenir qu'elle serait la sous-traitante de la société Ordicube et opposer à la société JMM ses conditions générales de vente de produits et services quand il s'agit de se prévaloir d'une clause limitative de responsabilité ou d'établir sa qualité de sous-traitante.
Sans qu'il soit nécessaire, à ce stade, d'examiner l'opposabilité, discutée, de ces conditions générales, le certain est que lesdites conditions n'indiquent en toute hypothèse nullement que Gestimum serait sous-traitante de ses partenaires intégrateurs, telle la société Ordicube, puisqu'elles prévoient que « les prestations éventuellement proposées par Gestimum en complément de ses progiciels, [le sont] directement au client "ou" en sous-traitance d'un intégrateur ».
Le contrat liant les parties prévoit clairement, en page 9, dans un tableau intitulé « gestion de projet », que certaines prestations sont réalisées par la société Ordicube (installation matériels et logiciels), que les formations sont réalisées par la société Gestimum, et que le reste des prestations (paramétrage ERP Gestimum et paramétrage connecteur e-commerce), comme la validation même du projet, relèvent à la fois des sociétés Ordicube et Gestimum.
Le contrat prévoit en outre, en page 10, que la société Gestimum est payée par la cliente, la société JMM, et non par la société Ordicube.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments, exclusifs d'une relation de sous-traitance, que les sociétés Gestimum et Ordicube ont co-traité avec la société JMM.
Sur la demande de résolution du contrat conclu le 30 septembre 2013 entre les parties
Si, en application de l'article 1184 du code civil, pris dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisferait pas à son engagement, la résolution d'un contrat ne peut être prononcée que si l'inexécution invoquée présente une particulière gravité.
Il convient dès lors d'examiner successivement les manquements reprochés par l'appelante aux intimées.
-sur l'allégation d'un manquement des sociétés Gestimum et Ordicube à leur obligation de conseil
La société JMM est une spécialiste de la vente à distance, y compris en ligne. Elle a acquis, pour les besoins de son activité, une bonne maîtrise des outils informatiques ; elle n'est pas pour autant un professionnel de l'informatique et, dans le cadre de la fourniture d'un logiciel aussi complexe qu'un ERP, les sociétés Gestimum et Ordicube étaient assurément tenues à son égard d'une obligation de conseil.
La société JMM, qui ne développe aucun moyen dans la partie discussion de ses écritures sur les conseils qu'elle reproche aux intimées de ne pas lui avoir délivrés, mentionne simplement, dans un tableau récapitulatif, un défaut de prise en compte de ses besoins.
Il apparaît d'abord, en l'espèce, que compte tenu de la complexité du système proposé, les intimées n'ont pas vendu à la société JMM le logiciel ERP comme un simple progiciel livrable clés en main, mais comme un produit nécessitant la formation de ces utilisateurs.
A cet effet, deux formations étaient conventionnellement prévues. La première formation a été délivrée normalement et, alors même qu'il n'avait pas été prévu, pour la deuxième formation, que la société Gestimum serait une nouvelle fois rémunérée directement par l'OPCA dont dépend la société JMM, cette dernière n'a pas voulu faire l'avance des frais de formation.
En renonçant ainsi à régler une formation qui lui avait été conseillée et qu'elle avait commandée, la société JMM s'est elle-même privée d'une prestation qui était destinée à former ses préposés à l'utilisation des différents applicatifs du logiciel ERP, et ne peut reprocher aux intimées aucun manquement à leur obligation de conseil relative aux modalités d'utilisation des logiciels litigieux.
Il ne résulte par ailleurs d'aucun élément du dossier que les sociétés Gestimum et Ordicube auraient proposé à la société JMM des prestations ou des produits qui ne correspondaient pas, ou n'étaient pas adaptés, aux besoins de son entreprise.
Aucun manquement des intimées à leur obligation de conseil ne peut donc être retenu.
-sur l'allégation d'un manquement des sociétés Gestimum et Ordicube à leur obligation de délivrance
-sur l'allégation d'une délivrance non-conforme
La société JMM a fait procéder à deux reprises, par huissier de justice, à des constatations du mauvais fonctionnement des logiciels litigieux.
Dans un procès-verbal dressé le 19 novembre 2014, un premier huissier de justice a constaté que lorsqu'il ouvrait sur un ordinateur de bureau de la société JMM le logiciel ERP Gestimum de gestion comptable, les journaux auxquels il accédait étaient vides, tandis que lorsqu'il ouvrait le logiciel dans sa partie commerciale, certaines anomalies apparaissaient, concernant notamment l'identification des fournisseurs, des clients et des prospects, la présentation, la lecture ou l'édition de certaines factures, ou encore la sauvegarde des données du logiciel.
Dans un procès-verbal dressé le 12 octobre 2016, un second huissier a rapporté les difficultés que la gérante de la société JMM lui a indiqué rencontrer pour transférer les données du site de vente en ligne de la société fonctionnant sous Prestashop vers le logiciel Gestimum, puis a constaté, lorsque la gérante de la société appelante procédait devant lui à des tentatives de synchronisation, que le logiciel G-change ne signalait aucune erreur, mais que les données transférées présentaient des anomalies, notamment des erreurs dans la synchronisation des prénoms ou des noms des clients, des différences de prix entre les commandes enregistrées sous Prestashop et sous Gestimum, ou encore des anomalies dans la prise en compte de la TVA.
Ces constats, dressés non contradictoirement, ont été communiqués aux débats et soumis à la libre discussion des parties. Rien ne justifie donc de les écarter des débats, comme l'ont fait les premiers juges et comme le demande encore la société Gestimum devant la cour.
Il reste que si ces constats, mêmes non contradictoirement dressés, valent à titre de preuve dès lors qu'ils ont été soumis à la libre discussion, ils ne valent preuve que de ce que les huissiers ont effectivement constaté.
Les huissiers ont constaté en novembre 2014 puis en octobre 2016 que les logiciels ERP Gestimum installés sur les ordinateurs de la société JLL ne fonctionnaient pas correctement.
Si leurs constats apportent la preuve d'un mauvais fonctionnement des logiciels litigieux, ces constats ne permettent cependant pas de déterminer la cause du mauvais fonctionnement des logiciels.
Les huissiers ne sont pas des techniciens en matière informatique ; leurs constats n'apportent donc aucunement la preuve que les dysfonctionnements constatés traduiraient un manquement des intimées à leur obligation de délivrance.
En choisissant, à deux reprises, de faire procéder à des constats par huissier de justice de manière non contradictoire, alors que rien ne justifiait de faire procéder à ces mesures hors la présence des sociétés Gestimum et Ordicube, la société JMM a pris le risque d'affaiblir les preuves qu'elle entendait se constituer, et s'est finalement privée de la possibilité de produire des constats permettant d'établir que les dysfonctionnements des logiciels, tels qu'ils ont été constatés, ne proviennent pas seulement d'une mauvaise utilisation ou d'une erreur de manipulation, de sa part ou de la part de l'huissier qui s'y est essayé.
En l'état de ces deux constats et des autres productions, rien ne permet en effet d'écarter que le mauvais fonctionnement des logiciels ERP et du connecteur e-commerce destiné à permettre une synchronisation des données de l'ERP avec celles de l'outil Prestashop dédié au site de vente en ligne de l'appelante, ne provient pas d'une mauvaise utilisation ou de mauvaises manipulations des utilisateurs de la société JMM, dont il convient de rappeler qu'ils n'ont pas reçu la formation qui avait à la fois été conseillée et commandée, mais dont l'appelante, pour des raisons financières, a décidé de les dispenser.
En considération de tous ces éléments, il y a lieu de constater que la société JMM, qui supporte la charge de la preuve, n'établit pas que le mauvais fonctionnement des logiciels et/ou du connecteur e-commerce litigieux proviendrait d'un manquement des sociétés intimées à leur obligation de délivrance conforme.
-sur l'allégation d'un retard dans la délivrance
La société JMM reproche aux intimées d'avoir tardé à livrer, puis ensuite à installer, le connecteur e-commerce, en ajoutant que le connecteur en cause, qui lui a été vendu en octobre 2013, n'existait pas à cette époque.
Le seul fait que le connecteur e-commerce ait été remis à la société JMM sous la forme d'un fichier dont la dénomination peut faire penser qu'il a été créé le 23 janvier 2014, soit postérieurement à la vente, ne suffit pas à établir qu'il n'existait pas déjà en octobre 2013, dans une version antérieure notamment, ou ne pouvait pas être produit dans un délai raisonnable. Cet argument est donc inopérant.
Il est constant que le e-connecteur litigieux a été remis à la société JMM le 4 mars 2014, soit un peu plus de quatre mois après la conclusion du contrat.
Le module de connexion des logiciels ERP Gestimum au site web de la société JMM ne pouvait cependant être installé avant que les logiciels ERP aient eux-même été installés, et paramétrés.
Compte tenu de la complexité des logiciels ERP vendus à la société JMM, la solution de progiciels proposée ne pouvait être opérationnelle avant que l'ensemble des paramétrages aient été réalisés, ce qui supposait, comme il était conventionnellement prévu en page 9 du contrat, un travail commun des sociétés Gestimum, Ordicube et JMM. La solution informatique en cause ne pouvait pas non être opérationnelle tant que ses utilisateurs n'avaient pas reçu une formation idoine, elle aussi conventionnement prévue, fin 2013, puis début 2014.
Les courriels échangés entre les parties révèlent que ce n'est qu'à la fin du mois de février 2014, lorsqu'elle a souhaité, avec le développeur de sa boutique web, mettre en ligne sa boutique fonctionnant sous Prestashop, que l'appelante a alors sollicité la société Gestimum qui, après avoir vérifié que la société JMM avait effectivement commandé le module e-connecteur, lui a fait transmettre ce logiciel par la société Ordicube, moins d'une semaine plus tard, sous forme de fichiers contenant les documentations d'utilisation G-Change, le connecteur G-change et le code utile à l'administrateur web.
Dans ces circonstances, le délai de livraison de quatre mois, non pas des logiciels ERP, mais du seul logiciel de connexion des logiciels ERP au site e-commerce de l'appelante, n'apparaît pas déraisonnable.
La société JMM reproche par ailleurs aux sociétés intimées de ne pas avoir installé l'e-connecteur en cause avant février 2016.
Le contrat liant les parties prévoit que la société JMM a acquis, au prix de 2 500 euros, le logiciel de module e-Commerce litigieux.
Il est précisé au contrat ce qui suit : « le périmètre du module connecteur e-commerce Prestashop/Gestimum est défini dans le document Gchange.pdf. Les attentes sur ce sujet étant nombreuses et variées, nous avons matière à adapter « GChange » sur cahier des charges réalisé par le demandeur d'ordre. Un devis sera ensuite communiqué pour étudier et adapter le module à la demande ».
Il est constant, en l'espèce, que la société JMM n'a pas opté pour une adaptation particulière du module connecteur, et que les intimées n'étaient donc pas tenues de lui livrer un module adapté aux spécificités de son site e-commerce.
S'agissant de l'installation du module, le contrat, qui définit en page 8 les différentes prestations commandées, prévoit que la société Ordicube devait préinstaller les logiciels SQL et Gestimum, mais ne prévoit pas que le connecteur-e commerce devait lui aussi être installé par l'intégrateur, et pas davantage d'ailleurs par l'éditeur.
Cette différence dans la définition des prestations attachées aux différents logiciels s'explique par la nature des produits. Les logiciels SQL et Gestimum sont des éditions qui, pour fonctionner, doivent être installées sur l'ordinateur, tandis que le module connecteur-e commerce est une édition portable, qui s'exécute sans avoir à être installée sur l'ordinateur, et qui en l'espèce a été fournie à la société JMM sous la forme d'un fichier zip.
L'obligation de délivrance des sociétés intimées ne peut cependant être tenue pour correctement exécutée en cela seul qu'elles ont transmis à la société JMM, en mars 2014, les fichiers permettant l'utilisation du e-connecteur.
Il était en effet prévu au contrat, en page 9 encore, que les sociétés intimées devaient procéder, avec la société JMM et l'administrateur de son site web, au paramétrage du connecteur e-commerce.
Dans la mesure où la société JMM n'avait pas souhaité payer la prestation de personnalisation du module de connexion, les sociétés intimées n'étaient pas tenues de procéder à un paramétrage du connecteur adapté aux spécificités du site de vente de l'appelante ; elles étaient néanmoins obligées de procéder à un paramétrage standard, et aucune des deux sociétés ne justifie y avoir procédé avant le début de l'année 2016.
Alors que ce paramétrage supposait une collaboration des sociétés intimées, de l'appelante et de l'administrateur de son site web, la société JMM, qui affirme avoir dénoncé à de nombreuses reprises les dysfonctionnements du connecteur, ne justifie pas avoir sollicité l'assistance des sociétés intimées pour le paramétrage de ce connecteur.
Ce n'est respectivement qu'en août 2014 et juillet 2015, à réception de mises en demeure du conseil de la société JMM, que les sociétés Ordicube et Gestimum ont été informées du mécontentement général de l'appelante, et notamment de ce qu'elle estimait que l'e-connecteur n'avait pas été mis en place comme convenu.
A cette époque les relations entre les parties s'étaient fortement dégradées, d'abord parce que au début de l'année 2014, la société JMM avait refusé de régler le coût de la formation qui était pourtant conventionnement prévue, ensuite parce qu'à l'expiration du contrat de maintenance qu'elle n'avait pas souhaité renouveler en novembre 2014, la société JMM a continué de s'adresser aux sociétés intimées comme si elles étaient tenues d'un service de maintenance à son égard.
L'attitude de la société JMM n'exonère pas les sociétés Gestimum et Ordicube de la responsabilité qu'elles encourent pour avoir paramétré le module e-commerce avec retard, mais dès lors qu'il n'est pas établi, on l'a dit, que le mauvais fonctionnement des logiciels puisse être imputé aux sociétés intimées, le seul retard dans le paramétrage du module de connexion e-commerce, dans les circonstances qui ont été rappelées, n'apparaît pas d'une gravité telle que cela puisse justifier l'anéantissement du contrat conclu entre les parties le 30 octobre 2013.
Dans ces circonstances, par confirmation du jugement entrepris, la société JMM ne peut qu'être déboutée de sa demande en résolution, comme de ses demandes de restitution et de dommages et intérêts, toutes deux formées en conséquence de la résolution.
Sur la demande reconventionnelle de la société Gestimum
La société Gestimum, qui sollicite la confirmation du jugement qui lui a accordé une somme de 2 390 euros HT au titre de frais d'assistance engagés hors cadre contractuel, ne développe aucun moyen au soutien de cette prétention, qu'ont accueillie les premiers juges en retenant que la société Gestimum avait apporté assistance à la société JMM dans la mise au point du connecteur e-commerce alors qu'il était prévu que cette prestation fasse l'objet d'un devis en fonction du cahier des charges, et que dans ces circonstances la société Gestimum devait être indemnisée des frais qu'elle estimait avoir engagés à hauteur de 2 390 euros.
Si la société Gestimum n'était pas tenue, en l'absence de commande d'une prestation de cette nature, de paramétrer le connecteur e-commerce en fonction des spécificités du site web de la société JMM, elle était tenue, on l'a dit, de procéder, avec la société Ordicube, la société JMM et son administrateur web, à un paramétrage standard du e-connecteur litigieux.
En intervenant en 2015 puis 2016, la société Gestimum n'a pas accepté d'apporter à la société JMM une assistance à laquelle elle n'était pas tenue ; elle a, avec retard, exécuté une obligation qui lui incombait.
Rien ne justifie donc d'accorder à la société Gestimum la moindre indemnité au titre de ses frais d'assistance.
Le jugement déféré sera en conséquence infirmé sur ce chef.
Sur les demandes accessoires
La société JMM, qui succombe au sens de l'article 696 du code de procédure civile, devra supporter les dépens de première instance et d'appel, et sera déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur ce dernier fondement, elle sera condamnée à régler à la société Ordicube, en sus de l'indemnité de 4 000 euros qui a été accordée en première instance, une indemnité d'égal montant pour les frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel.
Par infirmation du jugement entrepris, il sera accordé à la société Gestimum, en application de l'article 700, une indemnité qu'il apparaît équitable de fixer à 4 000 euros également au titre des frais dit irrépétibles exposés en première instance, outre une indemnité du même montant pour les frais non compris dans les dépens exposés devant la cour.
PAR CES MOTIFS
DIT n'y avoir lieu d'écarter des débats les procès-verbaux de constat dressés le 19 novembre 2014 et le 12 octobre 2016,
INFIRME la décision entreprise, mais seulement en ce qu'elle a condamné la société JMM à payer à la société Gestimum la somme HT de 2 390 euros au titre de frais d'assistance engagés hors cadre contractuel et une indemnité de 9 475 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
STATUANT À NOUVEAU sur les chefs infirmés :
DEBOUTE la société Gestimum de sa demande reconventionnelle en paiement de frais d'assistance,
CONDAMNE la société JMM à payer à la société Gestimum, au titre des frais non compris dans les dépens exposés en première instance, une indemnité de 4 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONFIRME la décision pour le surplus de ses dispositions critiquées,
Y AJOUTANT,
CONDAMNE la société JMM à payer à la société Ordicube, au titre des frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel, la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société JMM à payer à la société Gestimum, au titre des frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel, la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE la demande de la société JMM formée sur le même fondement,
CONDAMNE la société JMM aux dépens.
Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT