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08/06/2022 | FRANCE | N°20/00199

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre sécurité sociale, 08 juin 2022, 20/00199


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE







GROSSE à :

SCP PRIETO - DESNOIX

URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

EXPÉDITION à :

SARL [8]

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Pôle social du Tribunal judiciaire de TOURS



ARRÊT du : 08 JUIN 2022



Minute n°288/2022



N° RG 20/00199 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GDCB



Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire de TOURS en date du 23 Décembre 2019


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APPELANTE :



SARL [8]

[Adresse 4]

[Adresse 4]



Représentée par Me Emeric DESNOIX de la SCP PRIETO - DESNOIX, avocat plaidant au barreau de TOURS, et par Me Estelle GARNIER, avocat ...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE

GROSSE à :

SCP PRIETO - DESNOIX

URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

EXPÉDITION à :

SARL [8]

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Pôle social du Tribunal judiciaire de TOURS

ARRÊT du : 08 JUIN 2022

Minute n°288/2022

N° RG 20/00199 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GDCB

Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire de TOURS en date du 23 Décembre 2019

ENTRE

APPELANTE :

SARL [8]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Emeric DESNOIX de la SCP PRIETO - DESNOIX, avocat plaidant au barreau de TOURS, et par Me Estelle GARNIER, avocat postulant au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART,

ET

INTIMÉE :

URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Mme [U] [I], en vertu d'un pouvoir spécial

PARTIE AVISÉE :

MONSIEUR LE MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Non comparant, ni représenté

D'AUTRE PART,

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

Madame Sophie GRALL, Président de chambre,

Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,

Greffier :

Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

DÉBATS :

A l'audience publique le 14 DECEMBRE 2021.

ARRÊT :

- Contradictoire, en dernier ressort.

- Prononcé le 08 JUIN 2022, après prorogation du délibéré, par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Sophie GRALL, Président de chambre, et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

La SARL [8] exploite un fonds de commerce de restaurant situé [Adresse 4]) depuis 2009.

Le 1er décembre 2016, la société [8] a fait l'objet d'un contrôle dans le cadre de la recherche et de la lutte contre le travail dissimulé pour la période du 1er janvier 2013 au 1er décembre 2016.

Le 12 juillet 2017, l'URSSAF Centre a émis une lettre d'observations à l'encontre de la société [8] portant sur les chefs de redressement suivants d'un montant total de 9 265 euros, outre les majorations de retard et 746 euros au titre de la majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé:

1 - Travail dissimulé avec verbalisation - dissimulation d'emploi salarié: taxation forfaitaire: soit une régularisation d'un montant de 1 288 euros et 515 euros au titre de la majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé.

2 - Travail dissimulé avec verbalisation - dissimulation d'emploi salarié: assiette réelle - Mme [X] [L]: soit une régularisation d'un montant de 577 euros et 231 euros au titre de la majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé.

3 - Annulation des réductions générales de cotisations suite au constat de travail dissimulé: soit une régularisation d'un montant de 6 563 euros.

4 - Annulation des déductions patronales 'loi TEPA' suite au constat de travail dissimulé: soit une régularisation d'un montant de 837 euros.

Par lettre du 21 août 2017, la société [8] a formulé des observations en réponse à la lettre d'observations.

Par lettre du 29 août 2017, l'inspecteur du recouvrement a répondu aux contestations de l'employeur et a maintenu l'intégralité du redressement.

La société [8] a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF d'une contestation de ce redressement.

Le 18 octobre 2017, l'URSSAF Centre a émis une mise en demeure à l'encontre de la société [8] pour un montant total de 10 954 euros dont 746 euros de majoration de redressement pour infraction de travail dissimulé de 40'% et 943 euros de majorations de retard.

Par requête enregistrée le 19 janvier 2018, la société [8] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Orléans d'une contestation du redressement.

Par décision du 22 février 2018, la commission de recours amiable de l'URSSAF a rejeté la demande de la société [8].

Par jugement du 18 septembre 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Orléans s'est déclaré incompétent territorialement et a renvoyé l'affaire au tribunal des affaires de sécurité sociale de Tours.

L'instance a été reprise par le Pôle social du tribunal de grande instance de Tours en application de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016.

Par jugement du 16 août 2019, le Pôle social du tribunal de grande instance de Tours a ordonné la réouverture des débats pour que les procès-verbaux de la procédure pénale diligentée pour travail dissimulé soient mis à la disposition des parties au greffe du Pôle social pour y être consultés.

Par jugement du 23 décembre 2019, le Pôle social du tribunal de grande instance de Tours a:

Vu le jugement du Pôle social en réouverture des débats du 16 août 2019,

- déclaré recevable le recours formé par la société [8] mais l'a déclaré mal fondé,

- rejeté la demande de nullité du redressement de l'URSSAF Centre Val de Loire diligenté à l'encontre de la société [8],

- validé la décision de la commission de recours amiable du 22 février 2018,

- débouté la société [8] de ses demandes,

- condamné la société [8] à payer à l'URSSAF Centre Val de Loire la somme de 10 954 euros comprenant 10 011 euros de cotisations et 943 euros de majorations de retard au titre des causes de la mise en demeure du 18 octobre 2017,

- condamné la société [8] aux entiers dépens.

Selon déclaration d'appel du 20 janvier 2020, la société [8] a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de conclusions soutenues oralement à l'audience, la société [8] demande à la Cour de:

Vu l'article L. 8221-5 du Code du travail,

Vu l'article 202 du Code de procédure civile,

- la déclarer recevable et bien-fondée en son appel.

Y faisant droit,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a,

' rejeté la demande de nullité du redressement de l'URSSAF Centre Val de Loire diligenté à son encontre.

' validé la décision de la commission de recours amiable du 22 février 2018.

' l'a déboutée de ses demandes.

' l'a condamnée à payer à l'URSSAF Centre Val de Loire la somme de 10 954 euros, comprenant 10 011 euros de cotisations et 934 euros de majorations de retard au titre des causes de la mise en demeure du 18 octobre 2017.

' l'a condamnée aux entiers dépens.

Statuant à nouveau,

- déclarer l'infraction de travail dissimulé non constituée.

- déclarer l'URSSAF non fondée en droit comme en fait dans ses demandes de lui régler la somme de 10 011 euros au titre des cotisations sociales et 943 euros au titre des majorations de retard.

- annuler, en conséquence, la décision de rejet rendue par la commission de recours amiable à son encontre.

- mettre à néant et annuler la mise en demeure en date du 18 octobre 2017.

- la dégrever, en conséquence, des redressements et majorations du chef de la mise en demeure du 18 octobre 2017, qui lui a été adressée, suivant lettre d'observations en date du 12 juillet 2017.

- condamner l'URSSAF Centre à lui régler la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance d'appel et de première instance.

- débouter l'URSSAF Centre de l'ensemble de ses demandes plus amples ou contraires.

Aux termes d'écritures soutenues oralement à l'audience, l'URSSAF Centre Val de Loire demande à la Cour de:

- déclarer l'appel formé par la société [8] recevable mais non fondé et l'en débouter.

- confirmer le jugement entrepris.

A titre de demande reconventionnelle,

- valider la mise en demeure du 18 octobre 2017 et condamner la société [8] au paiement de ses causes pour la somme de 10 954 euros, soit 10 011 euros de cotisations et 943 euros de majorations de retard.

En application de l'article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs écritures respectives.

SUR CE, LA COUR:

A titre liminaire, il convient d'observer que l'appelante n'invoque à hauteur d'appel aucun moyen au soutien de sa contestation de la régularité du contrôle. Le jugement entrepris n'est, dès lors, pas valablement remis en cause en ce qu'il a rejeté ladite contestation.

Sur le fond, en vertu de l'article L. 311.2 du Code de la sécurité sociale, 'sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat'.

L'article L. 311-3 du même code prévoit que:

'Sont notamment compris parmi les personnes auxquelles s'impose l'obligation prévue à l'article L. 311-2, même s'ils ne sont pas occupés dans l'établissement de l'employeur ou du chef d'entreprise, même s'ils possèdent tout ou partie de l'outillage nécessaire à leur travail et même s'ils sont rétribués en totalité ou en partie à l'aide de pourboires:

(...)

3° les employés d'hôtels, cafés et restaurants; (...)'.

L'article L. 8221-5 du Code du travail dispose que:

'Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur:

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales'.

La société [8] soutient qu'il n'y a pas lieu à redressement en l'espèce, qu'elle n'a jamais eu l'intention de se soustraire à ses obligations déclaratives, que la déclaration préalable à l'embauche a été réalisée pour les salariés concernés, qu'il aurait été surprenant qu'elle déclare sans raison sur son registre unique du personnel une date différente de celle à laquelle elle avait déclaré les salariés sur les DADS 2013,2015 et 2016, que le tribunal a retenu à tort que les attestations produites étaient dépourvues de force probante au motif qu'elles ne respectaient pas le formalisme prévu par l'article 202 du Code de procédure civile, que des bulletins de paie ont été délivrés aux salariés concernés, et que les déclarations relatives aux salaires ont été réalisées auprès des organismes compétents.

' Sur le chef de redressement n° 1:

Aux termes de la lettre d'observations du 12 juillet 2017, l'inspecteur du recouvrement a indiqué qu'il résultait de ses investigations et de la procédure gendarmerie les éléments suivants:

'Mr [Y] [A] est gérant de deux restaurants spécialisés dans la restauration traditionnelle thaïlandaise:

- de la société [8] (...) situé [Adresse 4].

- de la société [7] (...) situé [Adresse 1].

(...) lorsque M. [Y] [A] recrute un salarié, il met en place une 'période d'essai' informelle qui n'est pas incluse dans le contrat de travail et qui lui permet de décider de l'embauche éventuelle du salarié. Selon ses termes 'C'est du donnant-donnant'. Il n'établit pas de Déclaration Préalable A l'Embauche (DPAE) pour cette 'période d'essai'.

Or l'embauche d'un salarié, qui n'a pas fait l'objet d'une DPAE, pour lequel la rémunération, versée en espèce ou par chèque n'a pas fait l'objet d'un bulletin de salaire et pour laquelle la période d'emploi n'est pas déclarée sur la DADS de l'entreprise et les déclarations de cotisations de l'entreprise, est constitutif de l'infraction de travail dissimulé.

L'employeur ne pouvait ignorer ses obligations puisqu'il réalise les DPAE, remet des bulletins de paye aux salariés lorsqu'il est certain de les embaucher. En outre, l'employeur déclare certains salariés sur la Déclaration Annuelle des Données Sociales (DADS) pour une période globale allant du 1er janvier au 31 décembre de l'année qui ne correspond pas à la période d'emploi précisément accomplie et qui ne permet donc pas de contrôler les dates d'entrée et d'arrivée de chaque salarié.

(...) Par conséquent, il convient de réintégrer dans l'assiette de cotisations de l'entreprise [8] les rémunérations des salariés concernés.

Aucune comptabilité sincère et probante n'a permis dans le cadre du contrôle de déterminer le montant exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations dues, le montant des cotisations est fixé forfaitairement sur la base du SMIC'.

L'URSSAF fait valoir que les auditions du gérant de l'entreprise, et des salariés, ainsi que l'analyse des déclarations sociales de l'entreprise ont démontré que quatre salariés n'avaient pas été déclarés à bonne date (M. [C] [B], Mme [F] [O], Mme [M] [E] et Mme [W] [S]) et que la société [8] conteste la régularisation opérée seulement pour deux salariés, Mme [M] [E] et Mme [W] [S].

Elle soutient que les investigations de la gendarmerie ont démontré que ces salariées avaient effectué des périodes d'emploi qui ne sont pas reprises dans les DADS et les déclarations de cotisations de l'entreprise [8], bien que le registre unique du personnel les mentionne.

Concernant Mme [M] [E], l'inspecteur du recouvrement a retenu ce qui suit:

'Mme [E] [M] (...) a travaillé comme serveuse selon le registre unique du personnel à partir du 25 juin 2013 jusqu'au 1er novembre 2013. Or elle est déclarée pour une période d'emploi à partir du 1er juillet 2013 sur la DADS 2013. Il convient donc de réintégrer dans l'assiette des cotisations la rémunération reconstituée pour une semaine de travail (5 jours de 7 heures soit 35 heures) rémunérées sur la base du SMIC horaire, soit 35 heures x 9,43 euros = 330,05 euros en 2013".

La société [8] fait valoir que Mme [M] [E] a bien été déclarée sur toute la période, qu'elle a perçu un salaire sur la même période, et qu'il ne peut se déduire de la simple incohérence entre la DADS 2013 et le contrat d'apprentissage accompagné des bulletins de paie, l'existence d'un travail dissimulé, la période litigieuse ne portant, au surplus, que sur quelques jours.

La société [8] verse aux débats le contrat d'apprentissage conclu sous l'égide de la [5] avec Mme [M] [E], qui prévoyait une date de prise d'effet au 25 juin 2013 ainsi qu'un bulletin de paie de novembre 2013, qui mentionnait en commentaire 'Régularisation de la semaine 26 soit du 25 juin 2013 au 29 juin 2013".

Il convient de rappeler que, s'il procède du constat d'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, le redressement a pour objet exclusif le recouvrement des cotisations afférentes à cet emploi, sans qu'il soit nécessaire d'établir l'intention frauduleuse de l'employeur (Cass. 2e Civ., 21 septembre 2017, pourvoi n° 16-22.307).

En outre, le défaut d'accomplissement par l'employeur, auprès d'un organisme de recouvrement, de ses obligations déclaratives relatives aux salaires ou aux cotisations sociales, s'apprécie à la date à laquelle les déclarations sont ou auraient dû être transmises à cet organisme, peu important toute régularisation ultérieure (Cass. 2e Civ., 21 septembre 2017, pourvoi n° 16-22.303).

Au cas présent, Mme [M] [E] figure sur la DADS 2013 de la société [8] pour une période d'emploi à compter du 1er juillet 2013 et non à compter du 25 juin 2013.

Il y a lieu, à cet égard, de relever que la société [8], qui invoque sur ce point l'existence d'une simple erreur matérielle en ce que le contrat d'apprentissage avait pris effet le 25 juin 2013 et non le 1er juillet 2013, avait néanmoins fait valoir dans son courrier du 21 août 2017 en réponse à la lettre d'observations du 12 juillet 2017 que 'Mme [E] [M] en contrat d'apprentissage de l'école [6] devait prendre son poste en date du 25 juin 2013 mais n'a réellement commencé sa prise en poste que le 1er juillet 2013", ce qui ressort également de son argumentaire tel que repris dans la décision de la commission de recours amiable, saisie par l'employeur le 19 octobre 2017, la société [8] ayant, en outre, soutenu devant le tribunal que 'le contrat de travail du 25 juin 2013 ne débutait que le 1er juillet 2013 pour la prise de poste de cet apprentie'.

Au regard de ces contradictions et incohérences, le fait que Mme [M] [E] ait été déclarée sur la DADS 2013 pour une période d'emploi à compter du 1er juillet 2013 et non à compter du 25 juin 2013 ne saurait s'analyser comme une simple erreur matérielle ainsi que le prétend la société [8].

Concernant Mme [W] [S], l'inspecteur du recouvrement a retenu ce qui suit:

'Mme [S] [W] (...) a travaillé selon le registre unique du personnel jusqu'au 12 mars 2015. Or elle est déclarée pour une période d'emploi jusqu'au 7 mars 2015 sur la DADS 2015. Il convient donc de réintégrer dans l'assiette des cotisations la rémunération reconstituée pour une semaine de travail (5 jours de 7 heures soit 35 heures rémunérées sur la base du SMIC horaire, soit 35 heures x 9,61 euros = 336,35 euros en 2015".

L'URSSAF relève, en outre, que la procédure de la gendarmerie a déterminé que le remplissage du registre unique du personnel était effectué par le gérant ou par un employé administratif et que des incohérences apparaissaient entre les dates remplies sur les déclarations sociales et les dates réelles d'emploi des salariés.

La société [8] fait valoir que Mme [W] [S] a travaillé pour elle jusqu'au 7 mars 2015 et non jusqu'au 12 mars 2015.

Elle en veut pour preuve, outre les mentions du certificat de travail remis à Mme [W] [S], les termes d'une attestation établie par la salariée dont l'authenticité ne saurait, selon elle, être remise en cause dès lors que l'écriture est la même que celle qui figure sur la lettre de démission adressée par Mme [W] [S].

Le certificat de travail établi le 12 mars 2015 mentionne que Mme [W] [S] a été employée en qualité de serveuse du 9 septembre 2014 au 7 mars 2015 et précise que 'Mme [S] [W] nous quitte ce jour, libre de tout engagement'.

Un bulletin de paie a été établi concernant Mme [W] [S] pour la période du 1er au 7 mars 2015 et non jusqu'au 12 mars 2015.

L'attestation datée du 20 octobre 2017, dont se prévaut la société [8], comme émanant de Mme [W] [S], est libellée en ces termes 'J'atteste sur l'honneur être parti du restaurant [8] le 7 mars 2015 et avoir était chercher mon solde de tout compte le 12 mars 2015".

Il est constant que ladite attestation ne satisfait pas au formalisme de l'article 202 du Code de procédure civile en ce qu'elle n'est, d'une part, accompagnée d'aucun document justifiant de l'identité de son auteur et comportant sa signature et en ce qu'elle n'indique pas, d'autre part, qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation de sa part l'expose à des sanctions pénales.

Pour autant, il convient de rappeler que les dispositions de l'article 202 ne sont pas prescrites à peine de nullité et qu'il appartient au juge du fond d'apprécier souverainement si l'attestation non conforme à l'article 202 présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction.

Sur ce point, il y a lieu de relever qu'il n'a pas été procédé à la mise en conformité de l'attestation produite après que sa régularité a été contestée et que si l'écriture qui figure sur l'attestation en cause apparaît effectivement similaire à celle de la lettre de démission versée aux débats, ladite lettre mentionne 'la date de mon départ ce fera le 11 mars 2015", ce qui est conforme à ce qui est indiqué sur le registre unique du personnel ainsi que l'a constaté l'inspecteur du recouvrement.

En l'état de ces éléments, il apparaît que le chef de redressement n° 1, qui n'est au demeurant que partiellement contesté, en ce que le redressement opéré concernant M. [C] [B] et Mme [F] [O] ne fait pas expressément l'objet de critiques, n'est pas valablement contesté.

' Sur le chef de redressement n° 2:

Il ressort de la lettre d'observations du 12 juillet 2017 que l'inspecteur du recouvrement a effectué les constatations suivantes:

'Suite au contrôle opéré le 1er décembre 2016, et reprenant la procédure Gendarmerie citée au motif précédent, il apparaît également que les périodes d'emploi des salariés déclarés sur les DADS du [8] et de l'Indochine ne correspondent pas exactement aux dates d'entrée et de sortie inscrites sur le registre unique du personnel des deux restaurants. La procédure Gendarmerie démontre en effet que l'employeur a 'basculé' des postes de travail d'un restaurant à l'autre (entre le Mao et l'Indochine) sans accomplir les formalités requises, qui sont pourtant deux entités distinctes et donc deux employeurs distincts.

Par conséquent, le fait de transférer dans les faits un salarié d'un restaurant à l'autre en l'état sans respect des formalités d'embauche et de refacturation n'est pas conforme à la législation en vigueur et est constitutif de travail dissimulé par l'absence de déclarations sociales et non-respect de la formalité de DPAE des salariés objet de ces transferts.

Ainsi, Mme [X] [L] (...) a été embauchée par le restaurant l'Indochine en tant que cuisinière le 11 décembre 2012 en CDI. En date du 15 septembre 2016, l'employeur lui a affecté un poste de travail au restaurant [8]. Sur le registre unique du personnel de l'Indochine figure la mention 'transférée au Mao le 1er juin 2016'. Lors du contrôle effectué le 1er décembre 2016, elle n'est pas inscrite au registre unique du personnel du Mao.

D'après les déclarations de Mme [X], son transfert a été réalisé le 15 septembre 2016.

L'analyse de ses bulletins de paye et ses déclarations démontrent que son salaire brut mensuel est de 2 215,69 euros pour un emploi à temps plein depuis le mois de juin 2016.

L'analyse de la DADS 2016 de l'entreprise [8] démontre que l'employeur a déclaré pour elle une période globale du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016 pour une rémunération annuelle brute de 6 776 euros en totalité.

Or l'employeur aurait dû déclarer sur le SIREN de l'entreprise [8] la rémunération perçue entre la date de son transfert au 15 septembre 2016 et le 31 décembre 2016. Il apparaît donc que l'employeur n'a pas déclaré la période du 15 septembre 2016 au 30 septembre 2016 sur la DADS 2016 du Mao.

Il convient donc de réintégrer la somme de 1 107,85 euros correspondant à son salaire mensuel pour 15 jours travaillés soit 2 215,69 x 15/30 = 1 107,85 euros'.

La société [8] soutient que le contrat de travail de Mme [L] [X] a débuté à compter du 1er octobre 2016 et en veut pour preuve une attestation établie par celle-ci le 23 septembre 2021, dans les formes prescrites par l'article 202 du Code de procédure civile, qui est rédigée en ces termes: 'J'atteste par la présente avoir été engagée par la société [8] en qualité de serveuse à compter du 1er octobre 2016", ainsi qu'un avenant à contrat de travail établi le 16 septembre 2016 entre la société [7] et Mme [L] [X] selon lequel le lieu de travail de la salariée sera situé au restaurant le Mao à partir du 1er octobre 2016.

Il n'est cependant pas contesté que Mme [L] [X] a déclaré lors de son audition par les services de gendarmerie avoir commencé à travailler le 15 septembre 2016 au restaurant [8] où elle avait été transférée.

Il y a lieu également de relever que le contrat de travail conclu entre la société [8] et Mme [L] [X] n'est pas versé aux débats.

Les constatations de l'inspecteur du recouvrement, qui font foi jusqu'à preuve contraire, n'étant dès lors pas valablement remises en cause, le redressement opéré de ce chef est justifié.

Les faits établissant l' élément matériel du délit de travail dissimulé constituent le fait générateur du versement des cotisations et contributions dues au titre du redressement et justifient l'annulation par l'organisme de recouvrement des mesures d'exonération et de réduction de celles-ci (Cass. 2e Civ., 10 octobre 2013, pourvoi n° 12-26.123, Bull. 2013, II, n° 188).

Les chefs de redressement n° 3 et 4 ne sont donc pas valablement remis en cause.

Il s'ensuit que, par les moyens qu'elle invoque, les demandes de la société [8] tendant à voir annuler la mise en demeure du 18 octobre 2017 et à obtenir le dégrèvement des redressements et majorations du chef de ladite mise en demeure qui lui a été adressée en suite de la lettre d'observations en date du 12 juillet 2017 ne sauraient être accueillies.

Il convient, par conséquent, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris.

' Sur les demandes accessoires:

Compte tenu de la solution donnée au présent litige, il y a lieu de condamner la société [8] aux dépens d'appel et de rejeter sa demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 23 décembre 2019 par le Pôle social du tribunal de grande instance de Tours;

Y ajoutant;

Rejette la demande de la société [8] fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile;

Condamne la société [8] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 20/00199
Date de la décision : 08/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-08;20.00199 ?
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