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12/09/2022 | FRANCE | N°19/02960

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 12 septembre 2022, 19/02960


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



C H A M B R E C I V I L E





GROSSES + EXPÉDITIONS : le 12/09/2022

la SCP LAVAL - FIRKOWSKI

Me Estelle GARNIER

la SCP THAUMAS AVOCATS ASSOCIES

Me Jacqueline PIERNE

Me Nelly GALLIER

Me Alexis DEVAUCHELLE

la SCP CRUANES-DUNEIGRE, THIRY ET MORENO



ARRÊT du : 12 SEPTEMBRE 2022



N° :156/2022 - : N° RG 19/02960 - N° Portalis DBVN-V-B7D-GAPU





DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 13 Juin 2019




PARTIES EN CAUSE



APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 2494 8827 7792



La SA MMA IARD ( MUTUELLE DU MANS ASSURANCE IARD) inscrite au RCS du MANS sous ...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 12/09/2022

la SCP LAVAL - FIRKOWSKI

Me Estelle GARNIER

la SCP THAUMAS AVOCATS ASSOCIES

Me Jacqueline PIERNE

Me Nelly GALLIER

Me Alexis DEVAUCHELLE

la SCP CRUANES-DUNEIGRE, THIRY ET MORENO

ARRÊT du : 12 SEPTEMBRE 2022

N° :156/2022 - : N° RG 19/02960 - N° Portalis DBVN-V-B7D-GAPU

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 13 Juin 2019

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 2494 8827 7792

La SA MMA IARD ( MUTUELLE DU MANS ASSURANCE IARD) inscrite au RCS du MANS sous le n°440 048 882, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social venant aux droits de la SA COVEA RISKS qu'elle a absorbée et en qualité de co-assureur

[Adresse 2]

[Localité 13]

représentée par Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat postulant au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant Me Guillaume REGNAULT de la SCP RAFFIN & ASSOCIES, du barreau de PARIS

D'UNE PART

INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 2499 3200 5165

Monsieur [K] [I]

né le 05 Février 1958 à FALAGUEIRA ( PORUGAL)

[Adresse 1]

[Localité 12]

représenté par Me Estelle GARNIER, avocat postulant au barreau d'ORLEANS et ayant pour avocat plaidant Me Anne-Florence MERCILLON, du barreau de VERSAILLES

Madame [T] [M] épouse [I]

née le 10 Février 1961 à [Localité 19] ([Localité 19])

[Adresse 1]

[Localité 12]

représenté par Me Estelle GARNIER, avocat postulant au barreau d'ORLEANS et ayant pour avocat plaidant Me Anne-Florence MERCILLON, du barreau de VERSAILLES

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 2486 2194 9549

Mademoiselle [N] [F] es qualité de liquidateur de la SCP [A] [F] suivant procès verbal du 28 juin 2016 et venant aux droits de Maître [A] [F] décédé le 26/01/2019

née le 24 Novembre 1988 à [Localité 21] ([Localité 21])

[Adresse 9]

[Localité 14]

ayant pour avocat postulant Me Sofia VIGNEUX de la SCP THAUMAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOURS et pour avocat plaidant Me Michel RONZEAU de la SCP RONZEAU ET ASSOCIES, du barreau de VAL D'OISE

Mademoiselle [B] [F] venant aux droits de Maître [A] [F] décédé le 26 janvier 2016

née le 18 Mai 1994 à [Localité 21] ([Localité 21])

[Adresse 7]

[Localité 14]

ayant pour avocat postulant Me Sofia VIGNEUX de la SCP THAUMAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOURS et pour avocat plaidant Me Michel RONZEAU de la SCP RONZEAU ET ASSOCIES, du barreau de VAL D'OISE

Mademoiselle [S] [F] venant aux droits de Maître [A] [F] décédé le 26 janvier 2016

née le 21 Mars 1991 à [Localité 21] ([Localité 21])

[Adresse 6]

[Localité 14]

ayant pour avocat postulant Me Sofia VIGNEUX de la SCP THAUMAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOURS et pour avocat plaidant Me Michel RONZEAU de la SCP RONZEAU ET ASSOCIES, du barreau de VAL D'OISE

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 2487 3449 3217

La SELARL SMJ, prise en la personne de Me [X] [P], mandataire judiciaire agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI [Adresse 20] suivant arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 28 mai 2015

[Adresse 11]

[Localité 16]

ayant pour avocat postulant Me Maxime MORENO de la SCP CRUANES-DUNEIGRE, THIRY ET MORENO, du barreau de TOURS et pour avocat plaidant Me Thierry SERRA de la SELARL SERRA AVOCATS, du barreau de PARIS

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 2455 1121 3772

La CAISSE RÉGIONALE NORMANDE DE FINANCEMENT (NORFI), dont le numéro de SIRET est 353172232, agissant poursuites et diligence de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, du barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Mickaël DARTOIS de la SCP DARTOIS-BARAIS & ASSOCIÉS, du barreau de CAEN,

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 2516 8362 0010

La SARL ATELIER L'ECHELLE ( anciennement dénommée SARL cabinet d'architecture [U] [H] et [O] [L]) immatriculée sous le n° B 388 244 329, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 8]

[Localité 10]

ayant pour avocat postulant Me Nelly GALLIER, du barreau de BLOIS

représentée par Me BARDON substituant Me Martine MEUNIER, avocat plaidant au barreau de TOURS,

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 2496 9010 1909

La MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 5]

[Localité 15]

ayant pour avocat postulant Me Jacqueline PIERNE de la SELARL RENARD - PIERNE, du barreau de TOURS et pour avocat plaidant Me Marc FLINIAUX, du barreau de PARIS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du :08 Août 2019

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 17 mai 2022

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, du délibéré :

Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,

Madame Laure Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

Greffier :

Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats et du prononcé.

DÉBATS :

A l'audience publique du 13 JUIN 2022, à laquelle ont été entendus Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.

ARRÊT :

Prononcé le 12 SEPTEMBRE 2022 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

M. [K] [I] et Mme [T] [M] épouse [I] ont été démarchés par la société EPI Capital en vue d'acquérir, sous le statut de loueur meublé non professionnel, un bien immobilier situé au sein d'une résidence de tourisme à construire intitulée « le Hameau du Valloire » à [Localité 17] (37) et de le donner en location selon bail commercial à une société de gestion.

M. et Mme [I] ont conclu, le 18 octobre 2006, un contrat de réservation portant sur l'appartement n° 155, au prix de 105 740 euros, la livraison du bien étant fixée pour le quatrième trimestre 2007.

Afin de financer cette acquisition, M. et Mme [I] ont contracté un prêt auprès de la Caisse régionale normande de financement (NORFI) d'un montant de 105 740 euros sur une durée de 288 mois au taux de 4,40 %.

Le 4 janvier 2007, l'acte authentique de vente était établi par le notaire, Maître [A] [F].

Une somme de 37 009 euros correspondant à 35 % du prix était débloquée le jour de la signature, sur la foi d'une attestation du cabinet d'architecture [H] & [L] certifiant que les travaux de terrassement, réalisation des plates-formes étaient réalisés.

Le solde du prix devait être libéré à hauteur de 20 % à l'achèvement des planchers hauts du rez-de-chaussée, 15 % à la mise hors d'eau, 15 % à l'achèvement des cloisons, 10 % à l'achèvement de l'immeuble et 5 % à la remise des clés.

Des appels de fonds ont été adressés aux demandeurs et une somme de 98 338,20 euros a été débloquée.

La SCI [Adresse 20] a annoncé à plusieurs reprises du retard dans la livraison des biens. Les travaux ont été arrêtés puis repris, mais le chantier n'a pas été terminé, la SCI [Adresse 20] ayant fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte le 2 juillet 2012, convertie en liquidation judiciaire le 26 novembre 2012.

Le bien n'ayant pas été livré, M. et Mme [I] ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Tours, par actes d'huissier des 18, 23 octobre et 15 novembre 2012, la SCI [Adresse 20], prise en la personne de son mandataire judiciaire Me [Y] [J] et Me [Y] [D], désigné administrateur judiciaire, ainsi que Me [A] [F], notaire, aux fins d'obtenir la nullité de la vente et la réparation de leur préjudice. Les demandeurs ont ensuite fait assigner la Caisse NORFI et la société MMA Iard, assureur de Me [A] [F].

Me [A] [F] en sa qualité d'ancien notaire et de liquidateur de la SCP [A] [F] a mis en cause le cabinet d'architecture [U] [H] et [O] [L], devenu la société Atelier l'échelle, et son assureur la Mutuelle des architectes français (MAF).

Par décision du 27 avril 2015, le juge de la mise en état a suspendu l'exécution du contrat de prêt souscrit le 26 octobre 2006 par les demandeurs auprès de la caisse NORFI jusqu'à l'issue du litige pendant devant le tribunal de grande instance.

Me [A] [F] est décédé le 26 janvier 2016 entraînant l'interruption de l'instance. Celle-ci a été reprise à la suite de l'intervention volontaire de ses héritières, Mme [N] [F], Mme [S] [F] et Mme [B] [F], Mme [N] [F] reprenant aussi l'instance ès qualités de liquidateur de la SCP Philippe Montcerisier.

Par jugement en date du 13 juin 2019, le tribunal de grande instance de Tours a :

1- constaté l'intervention de Mesdames [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], notaire décédé le 26 janvier 2016, et l'intervention de Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP Philippe Montcerisier ;

2- mis hors de cause Me [Y] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI [Adresse 20], et constaté que la SELARL SMJ a été désignée à cette fin par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 28 mai 2015 ;

3- mis hors de cause Me [J], ès qualités de mandataire au redressement judiciaire de la SCI [Adresse 20] ;

4- mis hors de cause Me [D], ès qualités d'administrateur dans le cadre du redressement judiciaire de la SCI [Adresse 20] ;

5- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 4 janvier 2007, entre la SCI [Adresse 20] et M. et Mme [I] portant sur un appartement lot numéro 200 au rez-de-chaussée du bâtiment G comprenant chambre, coin cuisinette, salle d'eau, WC, terrasse et les 27/ 10 000e des parties communes générales, et ce, pour non-respect des dispositions de l'article R261'18'b du code de la construction et de l'habitation ;

6- dit que la SCI [Adresse 20] doit restituer à M. et Mme [I] la somme de 98 338,20 euros, avec intérêts à compter de la date de l'assignation soit 18 octobre 2012 ;

7- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 ancien du code civil ;

8- déclaré irrecevable la demande visant à l'inscription au passif de la liquidation judiciaire de la SCI [Adresse 20] ladite somme ;

9- déclaré recevable l'action de M. et Mme [I] à l'encontre de la banque NORFI comme étant non prescrite ;

10- prononcé la nullité du contrat de prêt conclu entre M. et Mme [I] et la caisse NORFI souscrit le 13 novembre 2006 ;

11- condamné M. et Mme [I] à restituer à la NORFI le capital emprunté et débloqué de 98 338,20 euros, outre les intérêts à compter de la signification des conclusions du 8 mars 2019 ;

12- condamné la NORFI à restituer à M. et Mme [I] les échéances versées et les intérêts arrêtés au 27 avril 2015, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, sans préjudice des versements postérieurs en capital et intérêts opérés par M. et Mme [I] ;

13- ordonné la compensation entre ces créances respectives ;

14- dit que la SCI [Adresse 20] et Me [F] engagent leur responsabilité à l'égard de M. et Mme [I] sur le fondement des dispositions de l'article 1147 et 1382 anciens du code civil ;

15- dit que Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F] doivent garantir la restitution du prix à hauteur de 98 338,20 €, compte tenu de l'insolvabilité de la SCI [Adresse 20] ;

16- dit que la société MMA doit garantir son assuré, Me [F] ;

17- débouté M. et Mme [I] de leurs demandes au titre du remboursement de la TVA et du préjudice financier et moral ;

18- débouté Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F] et la société MMA de leurs recours en garantie à l'encontre de la SARL l'échelle et de son assureur la MAF, et à l'égard de la NORFI ;

19- condamné Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F] et les MMA à verser à la société NORFI les intérêts échus jusqu'au 31 août 2015 s'élevant à la somme de 30 860,57 euros, outre les intérêts dus à compter du 31 août 2015, au taux contractuel de 4,40 % l'an sur la somme de 75 401,78 euros, au titre des intérêts perdus ;

20- dit que l'hypothèque conventionnelle inscrite sur le bien sera maintenue jusqu'à la parfaite restitution des sommes inhérentes à l'annulation du contrat de vente et de prêt ;

21- rejeté les demandes de garantie présentées par les consorts [F] et la société MMA à l'encontre de la SARL L'échelle et son assureur, la MAF, et de la société NORFI ;

22- condamné in solidum Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], et la société MMA aux dépens de la présente instance, qui comprendront les frais hypothécaires, dont distraction au profit de Me Vincent David, de la SCP Renard-Pierné, de Me Bengounia et de la SELARL CM&B et Associés avocat au barreau de Tours ;

23- condamné in solidum Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], et la société MMA à verser à M. et Mme [I] une somme de 4 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

24- débouté les autres parties de leurs demandes d'indemnité procédure ;

25- ordonné l'exécution provisoire,

26- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent jugement ;

27- ordonné la publication du jugement ayant prononcé l'annulation de l'acte de vente du 4 janvier 2007 entre la SCI [Adresse 20] et M. et Mme [I] portant sur le lot numéro 200 de l'ensemble immobilier nouvellement cadastré [Cadastre 18] au lieu-dit [Adresse 20] situé à [Localité 17], acte publié le 22 février 2007 à la conservation des hypothèques de Tours 2 bureau volume 2007 P numéro 1242.

Par déclaration du 8 août 2019, la société MMA Iarda interjeté appel de ce jugement quant aux chefs n° 5 à 16, et 18 à 27 précités, en visant les parties présentes en première instance à l'exception de celles mises hors de cause.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 20 avril 2020, la société MMA Iard demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a annulé le contrat de vente, et retenu la responsabilité de Maître [F] ;

En conséquence,

- dire et juger qu'aucune faute ne peut être reprochée à Maître [F] ou à la SCP Philippe Montcerisier ;

- dire et juger que la preuve d'un lien de causalité entre les manquements reprochés et le préjudice allégué n'a pas été rapportée ;

- dire et juger que les époux [I] ne rapportent pas la preuve d'un préjudice né, actuel et certain ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu un préjudice subi par les époux [I] à hauteur de 98 338,20 € ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu un préjudice subi par la Caisse régionale normande de financement (NORFI) à hauteur de 30 860,57 euros, outre les intérêts dus à compter du 31 août 2015, au taux contractuel de 4,40 % l'an sur la somme de 75 401,78 euros, au titre des intérêts perdus ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes des époux [I], au titre des loyers commerciaux, de la TVA et du préjudice moral ;

- dire et juger qu'il n'existe aucune dette de responsabilité civile et qu'aucune condamnation ne peut être retenue à son encontre ;

- débouter les époux [I], la SCP [H] et [L] aux droits de laquelle vient la SARL Atelier de l'échelle, la société MAF, la Caisse régionale normande de financement (NORFI) de leurs appels incidents et de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- condamner in solidum la SCP [H] [L], la société MAF, la Caisse régionale normande de financement (NORFI) à garantir la compagnie MMA de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;

- condamner les époux [I], ou toute autre partie succombant, à lui payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les époux [I] ou tout autre succombant au paiement des entiers dépens de la présente instance qui seront recouvrés par la SCP Laval Firkowski, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 14 octobre 2020, M. et Mme [I] demandent à la cour de :

- débouter l'appelante de son appel ainsi que de l'ensemble de ses demandes ;

- débouter Mmes [N], [S] et [B] [F], ainsi que toutes parties, de toutes leurs demandes, fins et prétentions, et notamment de leur appel incident ;

En conséquence,

- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qui concerne la réparation du préjudice économique et le préjudice moral des investisseurs ;

- arrêter l'étendue de la garantie due par l'assureur du notaire au montant des condamnations prononcées à l'encontre de la SCI [Adresse 20], soit en principal et intérêts ;

À défaut,

- constater le défaut de livraison ;

- prononcer la résolution de la vente ;

- constater la résolution du contrat de prêt ;

En conséquence,

- condamner in solidum les ayants droit du notaire et le liquidateur de la SCP [F] à titre de dommages-intérêts au remboursement des sommes versées par les acquéreurs pour le prix de vente perdu avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

- ordonner la compensation entre la créance de la banque et la créance de l'investisseur ;

- dire que les ayants droit de Maître [F] et le liquidateur de la SCP [A] [F] devront garantir l'investisseur de toutes condamnations à son égard ;

- recevoir l'appel incident ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux [I] de leurs demandes de réparation des préjudices économique et moral ;

Statuant à nouveau,

- condamner in solidum Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F] et les MMA à réparer le préjudice économique des investisseurs d'un montant de 9 531 € à première demande de l'administration fiscale ;

- condamner in solidum Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F] et les MMA au paiement, au profit des concluants, d'une somme de 20 000 € en réparation du préjudice moral subi par eux ;

- condamner la société MMA Iard à une amende civile de 2 000 € ;

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions dirigées a 'leur encontre ;

- condamner in solidum Mme [N] [F] venant aux droits de son père [A] [F] et ès-qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], Mmes [B] et [S] [F] venant aux droits de leur père [A] [F] et leur assureur les MMA Iard ou toute partie succombante a' leur verser la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Estelle Garnier, avocat aux offres de droit.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 1er mai 2020, Mme [N] [F], tant à titre personnel qu'en qualité de liquidateur de la SCP [A] [F], Mme [S] [F] et Mme [B] [F] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement déféré uniquement en ce qu'il a débouté les époux [I] de leurs demandes d'indemnisation au titre de la TVA et du préjudice moral ;

- et pour le surplus, infirmer le jugement quant aux chefs n° 5 à 16 et de 18 à 27 précités ;

Et statuant à nouveau,

- dire et juger que Maître [A] [F] n'a commis aucune faute ;

- constater, en tout état de cause, l'absence de lien de causalité entre une hypothétique faute de l'étude et le préjudice invoqué ;

- dire et juger que le préjudice invoqué n'est ni actuel, ni certain ;

- déclarer les époux [I] irrecevables, en tout cas mal fondé en toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

En conséquence,

- les en débouter purement et simplement ;

- débouter la NORFI et toutes autres parties, de toutes leurs demandes dirigées à l'encontre du notaire et de ses ayants droit ;

Et à titre subsidiaire, si par impossible la cour venait à confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le notaire avait commis une faute, et l'a condamné à garantir la restitution du prix à hauteur de 98 338,20 €,

- dire que le cabinet d'architecture a commis une faute de nature à engager sa responsabilité professionnelle ;

- dire que la NORFI est également responsable du préjudice subi par les époux [I] ;

En conséquence,

- condamner in solidum, la NORFI, le cabinet d'architecture [H] et [L], et son assureur, la Mutuelle des Architectes Français, et toutes autres parties succombantes à les garantir de toute condamnation qui, par impossible, pourrait être prononcée à leur encontre ;

Et dans l'éventualité où des demandes d'appel en garantie seraient formulées à l'encontre des concluantes,

- déclarer la NORFI, le cabinet d'architecture [H] et [L], et son assureur, la Mutuelle des architectes français et toutes autres parties demanderesses à la garantie du notaire, irrecevables et en tout cas mal fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées à leur encontre et les en débouter ;

Et en tout état de cause,

- condamner in solidum les époux [I] et toutes autres parties succombantes à leur payer la somme de 6 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner in solidum les époux [I] et toutes autres parties succombantes aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Sofia Vigneux, membre du Cabinet Thaumas, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Suivant conclusions récapitulatives du 21 juillet 2020, la Caisse régionale normande de financement (NORFI) demande à la cour de :

A titre principal,

- réformer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'action des époux [I] comme étant non prescrite ;

- constater que l'action initiée par M. et Mme [I] en nullité des contrats de vente, de prêt et d'assurance est prescrite ;

- débouter en conséquence M. et Mme [I] de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions dirigées à son encontre ;

A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement sauf en ce qu'il a fait courir les intérêts légaux dus par les époux [I] sur la somme de 98 338,20 € au jour de la signification des conclusions en date du 8 mars 2019 ;

- dire que les intérêts dus par M. et Mme [I] sur la somme de 98 338,20 € sont dus à compter de la signification des conclusions en date du 8 mars 2016 ;

- condamner solidairement tout autre responsable de la nullité du contrat de vente à lui régler la somme correspondant au montant des intérêts échus du prêt de la date du déblocage des fonds jusqu'à la date de la décision à intervenir à titre de dommages et intérêts, et à tout le moins les intérêts reçus des consorts [I] jusqu'à la date du 2 juillet 2015 soit la somme de 30 860,57 € outre les intérêts au taux contractuel de 4,40 % l'an sur la somme de 75 401,78 € du 2 juillet 2015 jusqu'à la date du parfait règlement ;

En tout état de cause,

- débouter la compagnie MMA, les consorts [F] et la SARL Atelier L'échelle de leurs demandes en garantie formulées à son encontre ;

- condamner toute partie succombante à lui verser la somme de 5 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Devauchelle en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Suivant conclusions récapitulatives du 17 avril 2020, la SARL Atelier L'échelle demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement entrepris, en particulier en ce qu'il a rejeté toutes demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la SARL Atelier l'échelle et dit que tous les appels en garantie formés à son encontre étaient sans objet ou mal fondés ;

En conséquence,

- dire et juger mal fondées toutes les demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre ;

- débouter la SA MMA Iard, Mme [N] [F] venant aux droits de son père [A] [F] et ès qualités de liquidateur de la SCP Philippe Montcerisier, Mmes [B] et [S] [F] venant aux droits de leur père [A] [F] ou toute autre partie, de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre ;

A titre subsidiaire,

- condamner in solidum Mme [N] [F] venant aux droits de son père [A] [F] et ès qualités de liquidateur de la SCP Philippe Montcerisier, Mmes [B] et [S] [F] venant aux droits de leur père [A] [F] et leur assureur SA MMA Iard, ainsi que Caisse Régionale Normandie Financière de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à l'encontre de la SARL Atelier l'échelle ;

En tout état de cause,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre ;

- condamner in solidum Mme [N] [F] venant aux droits de son père [A] [F] et ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], Mmes [B] et [S] [F] venant aux droits de leur père [A] [F] et leur assureur SA MMA Iard ou toute partie succombant à lui verser la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Nelly Gallier, avocat aux offres de droit.

Suivant conclusions récapitulatives du 14 février 2020, la MAF demande à la cour de :

- dire l'appel de la société MMA mal fondé ;

- la débouter par voie de conséquence de l'intégralité de ses prétentions dirigées à son encontre ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a écarté toute condamnation à son encontre ;

- débouter les époux [I] et les consorts [F] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- constater que la faute de la SARL Atelier L'échelle anciennement SARL Cabinet d'architecture [U] [H] et [O] [L] n'est nullement établie et qu'il n'existe pas davantage de lien de causalité entre une hypothétique faute de l'architecte et le préjudice invoqué ;

Subsidiairement,

- dire et juger qu'elle est fondée à opposer une non garantie à la SARL Cabinet d'architecture [U] [H] et [O] [L] dès lors que le sinistre a perdu tout caractère aléatoire en violation des dispositions de l'article 1964 du code civil et en application de la clause d'exclusion 2.111 de la police ;

A titre infiniment subsidiaire,

- dire et juger qu'elle ne pourra garantir la SARL Cabinet d'architecture [U] [H] et [O] [L] que dans les limites et conditions de la police qui contient une franchise opposable aux tiers lésés ainsi qu'un plafond de garantie au titre des dommages immatériels non consécutifs à des dommages matériels garantis de 500 000 € hors actualisation, ledit plafond étant unique pour l'ensemble des réclamations dirigées à son encontre dont la présente procédure et pour les autres procédures en cours, dès lors que ces réclamations ont une seule et même cause technique dans le cadre de la même opération de construction ;

- désigner le cas échéant tel séquestre qu'il plaira à la cour avec pour mission de conserver les fonds dans l'attente de décision définitive tranchant les différentes réclamations formées à son encontre concernant le même sinistre et pour, le cas échéant, procéder à une répartition au marc le franc des fonds séquestrés ;

- condamner Mmes [N] [F], [S] [F], [B] [F] et Mme [N] [F] ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], et la SA MMA à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre en application de l'article 1382 ancien ' 1240 du code civil ;

- condamner solidairement Mmes [N] [F], [S] [F], [B] [F] et Mme [N] [F] ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], la SA MMA Iard à 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

- les condamner aux entiers dépens que la SELARL Renard Pierné pourra recouvrer directement conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Suivant conclusions récapitulatives du 23 janvier 2020, la SELARL SMJ agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI [Adresse 20] demande à la cour de :

- statuer ce que de droit sur la demande de fixation de créances au passif de la liquidation judiciaire de la SCI [Adresse 20] formulée par M. et Mme [I] ;

- débouter M. et Mme [I], ainsi que toute autre partie de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre ès-qualités et tendant notamment à sa condamnation au paiement d'une somme d'argent, à la rendre garante de toute condamnation prononcée à l'encontre d'une autre partie ou à une fixation au passif de la liquidation judiciaire ;

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Il convient de se référer aux conclusions récapitulatives des parties pour un plus ample exposé des moyens soulevés.

La cour a demandé à la NORFI de justifier de la signification de ses conclusions de première instance comportant sa demande de restitution du capital prêté. Par note communiquée par RPVA du 13 juin 2022, la NORFI a produit des pièces relatives à des conclusions signifiées le 19 octobre 2016.

SUR QUOI, LA COUR,

I- Sur la recevabilité des demandes des acquéreurs

La NORFI soutient que l'action initiée par M. et Mme [I] en nullité des contrats de vente, de prêt et d'assurance est prescrite ; que la prescription quinquennale édictée par l'article 1304 n'a pas été modifié par la loi du 17 juin 2008, de sorte que l'action en nullité de l'acte de vente devait être introduite que jusqu'au 4 janvier 2012 ; que c'est à tort que le tribunal a reporté le point de départ du délai de prescription à la date de livraison annoncée par le vendeur après plusieurs reports ; que le contrat préliminaire de vente est raturé en ce qui concerne la date d'achèvement, de sorte que la référence au 4e trimestre 2007 n'a rien de certain ; que surtout, l'acte authentique mentionne expressément que la livraison aura lieu au plus tard au cours du 3e trimestre 2007 de sorte que le point de départ du délai de prescription ne saurait donc être reporté au-delà du 30 septembre 2007 ; que cependant, le vendeur et le notaire n'ont été assignés que par acte en date du 15 novembre 2012 et le prêteur par acte en date du 26 mai 2014.

M. et Mme [I] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré leur action recevable aux motifs qu'ils ne pouvaient agir en nullité de l'acte de prêt à l'encontre de la banque avant d'avoir eu connaissance des causes d'annulation ou de résolution du contrat principal de vente ; que dès lors que l'annulation ou la résolution du prêt ont pour cause l'annulation ou la résolution de la vente, la prescription de l'action en annulation ou en résolution du prêt ne commence à courir que du jour où ils ont eu connaissance des causes d'annulation ou de résolution de la vente ; qu'ils n'ont été informés des causes d'annulation de l'acte de vente qu'à compter du jour où ils ont eu conscience qu'ils ne seront jamais livrés de leur bien ; que la SCI a reporté la date de livraison et ce n'est qu'à compter du dernier report de la livraison au mois d'août 2011 qu'ils ont pris conscience que la livraison de leur immeuble risquait d'être compromise et qu'ils ont fait choix d'un conseil qui a adressé à la SCI [Adresse 20] et au notaire une mise en demeure le 17 octobre 2011.

Les acquéreurs agissent, à titre principal, en nullité de la vente en état futur d'achèvement pour non-respect des articles L.261-11 et R. 261-18 b) du code de la construction et de l'habitation, considérant que la solvabilité réelle et la faisabilité financière leur ont été dissimulées.

L'article 1304 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au litige, dispose :

« Dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.

Ce temps ne court dans le cas de violence que du jour où elle a cessé ; dans le cas d'erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts. »

Il doit être considéré que le délai de l'action en nullité pour violation des dispositions de l'article L.261-10 du code de la construction et de l'habitation ne peut courir qu'à compter de sa découverte par sa victime.

Le vice allégué affectant la vente réside dans l'existence d'une garantie intrinsèque d'achèvement de l'immeuble ou du remboursement des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d'achèvement. Il n'est pas établi que l'insuffisance de la garantie intrinsèque était décelable par des acquéreurs profanes, dont les compétences en cette matière ne sont ni alléguées ni justifiées, lors de la signature de l'acte authentique de vente, et ce d'autant plus que le notaire instrumentaire n'a pas, en sa qualité de professionnel, informé les acheteurs d'une difficulté relative à la garantie promise.

Les acquéreurs n'ont pu avoir connaissance de l'insuffisance de la garantie intrinsèque qu'au jour où l'achèvement de l'immeuble acquis et lorsque les remboursements des sommes versées se sont avérés impossibles. Or, le dépassement de la date théorique de livraison du bien immobilier n'a fourni aux acquéreurs aucune information utile quant à l'éventuelle mise en 'uvre de la garantie intrinsèque d'achèvement.

Il résulte des pièces versées aux débats que la SCI [Adresse 20] a écrit à plusieurs reprises aux acquéreurs pour les informer des retards successifs de livraison de leur bien. Par un courrier du 8 novembre 2010, la SCI [Adresse 20] a ainsi écrit aux acquéreurs pour les aviser que l

a direction des travaux, retardés à raison de la défaillance de plusieurs entreprises, a été confiée à la société Icade Tours et au cabinet Polytec, maître d''uvre d'exécution, aux fins d'achèvement des travaux sur une durée de 8,5 mois. Parallèlement, la SCI [Adresse 20] a versé aux acquéreurs une indemnité correspondant aux loyers qu'ils auraient dû percevoir à compter de la livraison.

Jusqu'à la date d'achèvement annoncée des travaux, soit le 24 juillet 2011, les acquéreurs n'avaient pas connaissance du défaut d'achèvement définitif de l'immeuble et de l'impossibilité de bénéficier de la garantie intrinsèque prévue dans l'acte de vente.

Le délai quinquennal de prescription de l'action en nullité a commencé à courir le 24 juillet 2011, et les acquéreurs ont agi en nullité du contrat de vente en novembre 2012 et en nullité du contrat de prêt le 26 mai 2014. En conséquence, l'action en nullité des contrats de vente, de prêt et d'assurance diligentée par M. et Mme [I] n'est pas prescrite.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action de M. et Mme [I] à l'encontre de la NORFI.

II- Sur la nullité du contrat de vente par acte authentique

Le tribunal a prononcé la nullité du contrat de vente conformément à l'article L.261-10 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version en vigueur à l'époque du contrat, qui sanctionne le non-respect des règles impératives de la vente d'immeubles à construire et en a tiré les conséquences concernant la restitution du prix de vente et a condamné le notaire et son assureur à garantir cette restitution.

La société MMA Iard appelante poursuit l'infirmation du jugement tant en ses dispositions relatives à cette annulation qu'en celles condamnant les ayants-droit et le liquidateur de Me [A] [F], son assuré.

Elle fait valoir que la responsabilité civile de M. [F] ne peut être mise en jeu, dès lors qu'il est étranger au contrat de réservation et que la fiche technique annexée à ce contrat et qui mentionnait une garantie extrinsèque, n'a pas de valeur contractuelle ; qu'en outre, son assuré a adressé aux acquéreurs un projet d'acte de vente mentionnant clairement une garantie intrinsèque quelques semaines avant la vente et qu'il appartenait à ces derniers, qui ont fait choix de donner procuration pour régulariser l'acte authentique, de le lire et de s'informer ; que le notaire n'a pas à proposer une autre garantie puisque la garantie intrinsèque est licite ; que celle-ci était effective compte tenu de la commercialisation déjà très avancée du programme au moment de la signature de l'acte authentique. Il ajoute qu'il faut prendre en compte le prix global des ventes pour évaluer le pourcentage de garantie et non les acomptes versés ; Elle estime qu'il n'existe pas de lien de causalité entre l'intervention du notaire et les faits générateurs des préjudices invoqués par les acquéreurs ; elle insiste sur le fait que le notaire n'était pas concerné par l'engagement préalable des acquéreurs et les rapports avec la société EPI Capital représentant la SCI [Adresse 20] ; que le notaire est également sans lien avec le déblocage des fonds ; qu'aucune solidarité ne lie le notaire à un vendeur dès lors que le notaire n'a pas personnellement perçu le prix de vente ; elle précise qu'il a été procédé au déblocage des fonds par l'établissement bancaire, sur la foi de différentes attestations des architectes qui n'en ignoraient pas la finalité ; que le notaire n'est pas à l'origine de l'arrêt du chantier, au début de l'année 2009, chantier marqué par des interruptions successives en raison des défauts ou retard de paiement des entreprises imputables à la seule SCI [Adresse 20] ; il ajoute que la SCI était in bonis au moment de la régularisation de l'acte authentique ; elle précise que la SCI est aussi à l'origine de la résiliation du bail à construction conclu le 13 mars 2006 avec la commune.

Les consorts [F] font valoir que la preuve des trois éléments permettant de retenir la responsabilité délictuelle du notaire, n'est pas rapportée ; qu'il n'y avait pas lieu, selon elles, à information sur la suppression d'une garantie extrinsèque qui n'a jamais existé ; que la lettre de notification qui a été adressée aux acquéreurs, conformément à l'article R.261-30 du code de la construction et de l'habitation, était particulièrement claire et ceux-ci étaient parfaitement informés tant sur leur droit de rétractation que sur le contenu de l'acte lui-même, signant l'acte en toute connaissance de cause et en possession de tous les documents contractuels ; que l'acte rappelle de manière très précise et dans le détail, les conditions de la garantie d'achèvement dite intrinsèque, à l'instar de la procuration qu'ils ont signée en toute connaissance de cause ; qu'il n'appartenait pas au notaire de les mettre en garde sur le risque du défaut d'achèvement du chantier en l'absence de garantie extrinsèque ou de proposer d'autres garanties ; que les acquéreurs ne peuvent davantage se prévaloir d'un défaut d'information sur la nature des droits acquis et sur la quote-part résultant d'un bail à construction précisément décrit dans l'acte authentique ; qu'en outre, le notaire n'est pas tenu de procéder à des recherches particulières sur l'opportunité économique de l'opération envisagée ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les conditions de la garantie intrinsèque étaient satisfaites lors de la signature de l'acte, les opérations de commercialisation étant bien avancées, l'avance de trésorerie consentie par M. [V], selon acte de prêt du 15 septembre 2006 au montant de 3 500 000 euros annexé à l'acte notarié, devant être regardée comme ayant bénéficié à la SCI à titre de fonds propres du vendeur et le prix du terrain d'assiette estimé par expert à la somme de 8 216 000 euros devant être pris en compte d'autant qu'il conférait au preneur un droit réel immobilier ; qu'il n'existe pas de lien de causalité entre la faute du notaire et les préjudices invoqués, la source de ceux-ci se trouvant exclusivement dans la déconfiture du promoteur vendeur alors que les appartements étaient à 93 % en voie d'achèvement et les équipements collectifs à 45 %, selon le rapport de l'expert judiciaire [R] ; que les préjudices allégués ne sont ni actuels ni certains.

M. et Mme [I] sollicitent la confirmation du jugement qui a prononcé la nullité de la vente, au motif que les conditions posées par l'ancien article R. 261-18 b ancien du code de la construction et de l'habitation étaient loin d'être réalisées ; que le notaire avait l'obligation de veiller au respect de la réglementation d'ordre public relative à cette garantie et d'effectuer des diligences particulières s'il s'apercevait ou décelait que les éléments apportés en garantie étaient insuffisants ou douteux ; que la valeur du terrain ne pouvait pas être prise en compte dans les fonds propres de la SCI [Adresse 20] puisque la garantie d'achèvement doit intervenir précisément lorsque les constructions ne sont pas achevées ; que SCI [Adresse 20] n'était pas propriétaire de ce terrain, puisqu'elle en disposait dans le cadre d'un bail à construction ; que le notaire aurait dû les informer qu'en cas de non réalisation des travaux dans un délai de 4 ans à compter du 13 mars 2006, date de signature du bail à construction, celui-ci pouvait être résilié, et les constructions devenir la propriété de la commune ; que le notaire a méconnu la réglementation d'ordre public concernant la garantie d'achèvement en acceptant d'y faire figurer un prêt consenti ni par une banque ni par un établissement habilité et dont surtout il ne s'était pas assuré qu'il serait maintenu jusqu'à l'achèvement de l'opération.

Afin de solliciter la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé mal fondées les demandes dirigées à son encontre, la société Atelier L'Échelle suivie en son argumentation par son assureur, la MAF, retrace l'historique de ce chantier qui s'est totalement arrêté au début de l'année 2009 ; elle évoque une procédure à l'encontre de la SCI [Adresse 20] pour obtenir paiement de ses propres honoraires ainsi que la résiliation de son contrat de maîtrise d''uvre à effet au 24 février 2010, acceptée par cette SCI, soutient que l'ensemble de ses adversaires est mal fondé à rechercher sa responsabilité ; que les acquéreurs, qui ne produisent aucun document technique concernant leur propre lot, ne démontrent pas qu'elle a fourni des attestations fallacieuses, alors qu'elle a tout mis en 'uvre pour favoriser, malgré les multiples difficultés rencontrées, l'avancement des travaux. Elle ajoute qu'il appartenait aux acquéreurs de refuser les appels de fonds intermédiaires.

La société MAF fait valoir que le fait que les acquéreurs avaient signé des appels de fonds contraires au planning contractuel n'engage que ces derniers. Tant la MAF que la société L'Atelier L'échelle ajoutent qu'il ne peut être tiré argument du rapport de M. [R] du 14 avril 2014 qui ne concerne pas le lot des acquéreurs ; elles font toutefois remarquer qu'il ne retient ni insuffisances ni négligences de la part de l'équipe de maîtrise d''uvre ni, non plus, d'écart significatif entre l'avancement du chantier et les attestations établies ; qu'on ne saurait reprocher aux architectes l'établissement d'attestations de pure complaisance et procéder par analogie alors qu'il conviendrait de se placer au jour précis de leur établissement pour en apprécier la pertinence et qu'au surplus l'expert judiciaire n'a pu retenir qu'un léger écart entre l'avancement réel et les 93 % qui figurent dans les attestations de trois logements étrangers au présent litige.

A- Sur le respect des règles impératives de la vente d'immeubles à construire

L'article L.261-10 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable à la cause, dispose : « Tout contrat ayant pour objet le transfert de propriété d'un immeuble ou d'une partie d'immeuble à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation et comportant l'obligation pour l'acheteur d'effectuer des versements ou des dépôts de fonds avant l'achèvement de la construction doit, à peine de nullité, revêtir la forme de l'un des contrats prévus aux articles 1601-2 et 1601-3 du code civil, reproduits aux articles L. 261-2 et L. 261-3 du présent code. Il doit, en outre, être conforme aux dispositions des articles L. 261-11 à L. 261-14 ».

L'article L.261-11 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable à la cause, prévoit que le contrat doit être conclu par acte authentique et préciser « lorsqu'il revêt la forme prévue à l'article 1601-3 du code civil, reproduit à l'article L. 261-3 du présent code, la garantie de l'achèvement de l'immeuble ou du remboursement des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d'achèvement ».

L'article R.261-17 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable à la cause, prévoyait deux types de garanties d'achèvement de l'immeuble dans le cadre des ventes d'immeubles à construire : une garantie dite intrinsèque résultant « de l'existence de conditions propres à l'opération », et une garantie dite extrinsèque résultant « de l'intervention, [...], d'une banque, d'un établissement financier habilité à faire des opérations de crédit immobilier, d'une entreprise d'assurance agréée à cet effet ou d'une société de caution mutuelle constituée conformément aux dispositions de la loi modifiée du 13 mars 1917, ayant pour objet l'organisation du crédit au petit et moyen commerce, à la petite et moyenne industrie ».

L'article R.261-18 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable à la cause, relatif à la garantie intrinsèque, dispose :

« La garantie d'achèvement résulte de l'existence de conditions propres à l'opération lorsque cette dernière répond à l'une ou à l'autre des conditions suivantes :

a) Si l'immeuble est mis hors d'eau et n'est grevé d'aucun privilège ou hypothèque ;

b) Si les fondations sont achevées et si le financement de l'immeuble ou des immeubles compris dans un même programme est assuré à concurrence de 75 % du prix de vente prévu :

- par les fonds propres au vendeur ;

- par le montant du prix des ventes déjà conclues ;

- par les crédits confirmés des banques ou établissements financiers habilités à faire des opérations de crédit immobilier, déduction faite des prêts transférables aux acquéreurs des logements déjà vendus.

Toutefois, le taux de 75 % est réduit à 60 % lorsque le financement est assuré à concurrence de 30 % du prix de vente par les fonds propres du vendeur.

Pour l'appréciation du montant du financement ainsi exigé, il est tenu compte du montant du prix des ventes conclues sous la condition suspensive de la justification de ce financement dans les six mois suivant l'achèvement des fondations ».

En l'espèce, l'acte de vente notarié dont la nullité est soulevée comporte, en page 21 et dans les termes précisément repris par le tribunal, un chapitre intitulé « garantie d'achèvement » comportant le rappel des dispositions de l'article R.261-18 b du code de la construction et de l'habitation, s'analysant en une garantie intrinsèque d'achèvement supposant la réunion de conditions financières précises qui devaient être remplies au moment de la vente.

La société venderesse précisait notamment que « le prix de vente prévu pour tout l'ensemble immobilier dont dépendent les biens vendus s'élève à la somme de 20 292 656 euros », que « le financement dont la société demanderesse doit justifier aux termes de l'article R. 261-18 b) précité est de 60 % du prix de vente, soit 12 175 593 euros ». Elle justifiait « avoir ce financement à sa disposition ainsi qu'il suit : par le terrain sur lequel sont édifiés des constructions, lequel a été estimé par monsieur [G] [W], expert en estimation immobilière, (...) à la somme de 8 216 000 euros » et « par la trésorerie de la SCI composée :

* des fonds versés par monsieur [E], ainsi qu'il résulte d'une reconnaissance de dette régularisée en l'étude du notaire soussigné le 1er mars 2006, d'un montant de 160 000 €,

* du prêt consenti à la SCI suivant acte reçu par le notaire soussigné le 15 septembre 2006 pour un montant de 3 700 000 €,

* par le montant total du prix des ventes réalisées, sous conditions suspensives avant ce jour, ce qui est attesté par le notaire soussigné, soit la somme de 1 192 280 €, soit une somme de 13 268 280 euros représentant un total supérieur au financement dont la SCI doit justifier ».

Si pour assurer la viabilité financière de l'opération de construction jusqu'à son achèvement, un taux de 60 % de financement suffit lorsque les fonds propres représentent 30 % du prix de vente prévu, ainsi qu'il résulte des dispositions de l'article R 261-18 b) précité, force est de considérer qu'en l'espèce la SCI [Adresse 20] ne satisfaisait pas à ces exigences.

En effet, au rang des fonds propres qui devait s'élever à 30 % du prix de vente total de l'ensemble immobilier, soit, 6 087 796,80 euros, contrairement à ce que soutiennent les consorts [F] et leur assureur, il ne pouvait être tenu compte du terrain d'assiette, lequel conférait, certes, à la SCI preneuse un droit réel immobilier mais non un droit de propriété payé par des fonds appartenant au vendeur, d'autant que le bien était grevé d'hypothèques et que le bail à construction consenti pour une durée de 99 ans était assorti d'une faculté de résiliation anticipée en cas d'inachèvement du chantier dans un délai de quatre ans, ce qui a été effectivement le cas, ainsi qu'il résulte de l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Orléans le 19 octobre 2015 qui a prononcé la résolution judiciaire de ce contrat en raison des manquements de la SCI [Adresse 20].

En outre l'estimation ainsi avancée était dénuée de pertinence puisqu'elle constituait, selon le rapport de monsieur [W], « une estimation en valeur de terrain à bâtir », et non d'après la valeur du droit réel immobilier constitué par le bail à construction consenti le 13 mars 2006 à la SCI.

S'agissant de la trésorerie invoquée dans l'acte authentique, le prêt au montant de 3 500 000 euros consenti le 15 septembre 2006 par un simple particulier pour une durée de huit mois et moyennant le paiement d'intérêts, ne peut être regardé comme entrant dans les fonds propres de la SCI dans la mesure où il se devait d'être disponible jusqu'au terme de l'opération. Par ailleurs, la reconnaissance de dette de M. [E] dont il est fait état, sans plus d'éléments d'explication, ne constitue qu'une autre créance à recouvrer au moyen d'un document contenant, certes, un engagement de payer mais soumis aux aléas de son exécution et, en toute hypothèse, au montant fort modeste en regard du prix de vente de l'ensemble immobilier.

Enfin, s'agissant du produit des ventes déjà conclues (qui s'ajoute aux fonds propres et dont il lui aurait fallu justifier à hauteur de 30 % également), il est patent que le montant de 1 192 280 euros porté à l'acte de vente, pour autant que les acquéreurs concernés aient été solvables, est inférieur au montant requis, les acquéreurs ajoutant à juste titre que même s'il était tenu compte du produit réel des ventes réalisées à la date de l'acte authentique qui a pu être invoqué par les consorts [F] et leur assureur, sans justificatifs comptables, le taux de 75 % requis (soit, en l'espèce 15 219 492 euros) en l'absence de la justification de fonds propres à hauteur de 30 %, n'aurait pas été atteint.

Il résulte de ces éléments que le tribunal a, à juste titre, fait droit à la demande d'annulation de cette vente consentie en méconnaissance des prescriptions d'ordre public en matière de vente en état futur d'achèvement.

B- Sur les conséquences de l'anéantissement du contrat de vente

La nullité d'un contrat, emporte son effacement rétroactif, et a pour effet de remettre les parties dans leur situation initiale.

Le prix de vente débloqué doit être restitué par la société venderesse aux acquéreurs. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que la SCI [Adresse 20] doit restituer à M. et Mme [I] la somme de 98 338,20 euros avec intérêts à compter de la date de l'assignation, soit le 18 octobre 2012, et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 ancien du code civil.

S'agissant du contrat de prêt souscrit par les acquéreurs, il y lieu de rappeler qu'un contrat de prêt se trouve résolu par l'annulation rétroactive de la vente en vue de laquelle il avait été accordé, vente qui est censée n'avoir jamais été conclue, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (Civ. 1re, 16 décembre 1992, n° 90-18.151).

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de prêt précité conclu avec la NORFI. Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné M. et Mme [I] à restituer à la NORFI la somme de 98 338,20 euros, outre les intérêts à compter de la signification des premières conclusions de la banque sollicitant la restitution de la somme.

Cependant, le tribunal a fixé la date du point de départ des intérêts dus à la banque au 8 mars 2019, alors qu'il apparaît que la demande de restitution du capital prêté avait été sollicité par conclusions en date du 1 9 octobre 2016, à compter de laquelle les intérêts ont commencé à courir. Le jugement sera donc infirmé sur ce point.

Il convient également de confirmer le jugement ayant condamné l a banque à restituer aux acquéreurs les échéances versées et les intérêts arrêtés au 27 avril 2015, avec intérêts au taux légal à

compter du jugement, et ayant ordonné la compensation des créances respectives du prêteur et des emprunteurs.

III ' Sur les appels en garantie

A- Sur la garantie du notaire et de son assureur

Me [F] a notifié, dix jours avant de dresser l'acte authentique, un projet d'acte de vente aux acquéreurs contenant une faculté de rétractation qu'ils n'ont pas exercé et mentionnant la garantie intrinsèque d'achèvement.

Même si le notaire n'est pas intervenu à la signature du contrat préliminaire, il n'en demeure pas moins qu'il était supposé avoir une parfaite connaissance du projet, en sa qualité de « notaire de l'opération » et qu'il devait en avoir pris connaissance pour dresser le contrat de vente, de sorte que, même si la fiche technique annexé au contrat préliminaire et mentionnant l'existence d'une garantie extrinsèque ne peut être regardée comme ayant une valeur contractuelle, il reste qu'il incombait au notaire d'attirer l'attention des acquéreurs sur les risques que comportait la substitution d'une garantie intrinsèque à la garantie extrinsèque, contrairement à ce qu'affirment consorts [F].

Si les consorts [F] soulignent le caractère licite de la garantie intrinsèque à cette date et le défaut de pouvoir du notaire dans le choix de la garantie, ce professionnel de la vente immobilière ne pouvait ignorer, à la date de la vente, que la garantie intrinsèque se révélait, dans la pratique, moins sécurisante dans les opérations de ventes en état futur d'achèvement et suscitait une perte de confiance des consommateurs, à telle enseigne que le législateur l'a supprimée en 2013.

Me [F] devait d'autant plus mettre en garde les acquéreurs sur la fragilité de la protection assurée par la garantie intrinsèque telle que détaillée dans l'acte authentique, qu'il avait nécessairement connaissance du caractère insuffisant et inadapté, voire artificiel, de cette garantie dans la mesure où il avait participé à la rédaction du bail à construction et au financement de la SCI au moyen du prêt consenti par M. [V] qu'il avait présenté aux dirigeants de la SCI et qu'il ne pouvait ignorer, en 2008, les difficultés d'avancement du chantier compte tenu des retards de paiement de la SCI.

Au surplus, si les consorts [F] se prévalent d'une information donnée par le notaire aux acquéreurs sur l'existence d'un bail à construction, elles ne démontrent pas qu'il avait attiré leur attention sur la clause de résiliation en cas d'inachèvement du chantier dans le délai de quatre années suivant le démarrage du chantier, ce qui conduisait à la perte de l'assiette foncière de la construction.

Par ailleurs, le crédit de 3 700 000 euros qui, selon l'acte du 15 septembre 2006, avait pour objet « une avance de trésorerie nécessaire au démarrage du programme notamment par le paiement de différentes factures » ne pouvait être considéré comme constitutive de « fonds appartenant au vendeur » au sens de l'article R.261-18 du code de la construction et de l'habitation, de sorte que le taux réduit de 60 % n'avait pas vocation à trouver application pas plus, d'ailleurs, qu'un financement assuré à 75 % du prix de vente qui suppose, « des crédits certains, irrévocables et maintenus jusqu'à l'achèvement des travaux ».

Le notaire qui, compte tenu de son importante implication dans ce programme immobilier dès le bail à construction, ne pouvait méconnaître ces exigences. Il a, ainsi, par l'absence d'information et de conseil sur cette garantie intrinsèque d'achèvement, manqué à l'obligation d'assurer l'efficacité de l'acte auquel il a prêté son ministère, de sorte que les consorts [F] ne sont pas fondés à invoquer une absence de lien de causalité entre ces manquements et le dommage subi par les acquéreurs.

En effet, si la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente, ne constitue pas en elle-même un préjudice indemnisable, tel n'est pas le cas lorsque cette restitution est devenue impossible du fait de l'insolvabilité démontrée du vendeur, de sorte que les acquéreurs, privés de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifient d'une perte subie équivalant au prix de la vente annulée, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation (Civ. 1re, 18 juin 2002, n° 99-17.122 ; Civ. 1re, 5 avril 2018, n° 17-14.114).

La situation juridique et financière de la SCI [Adresse 20] conduit à considérer qu'en dépit de la simple affirmation, non démontrée des consorts [F] sur l'absence de préjudice né et actuel et en l'absence de production d'éléments permettant à la cour de la tenir pour solvable, les acquéreurs peuvent se prévaloir de son insolvabilité.

En conséquence, les acquéreurs sont tant recevables que fondés à rechercher la garantie du notaire, aux droits desquels viennent les consorts [F] et celle de la société MMA Iard assurant la responsabilité civile de Me [A] [F], du fait de l'engagement de la responsabilité du notaire à leur égard.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que Me [F] a engagé sa responsabilité à l'égard des acquéreurs sur le fondement de l'article 1382 ancien du code civil.

B- Sur les appels en garantie à l'égard de la société d'architecture

Les consorts [F] et la société MMA Iard poursuivent l'infirmation du jugement sur ce point qui a débouté ces derniers de leurs réclamations dirigées à l'encontre de cette société d'architecture en demandant à la cour de retenir une faute commise par celle-ci et de la condamner à garantie.

Il est, en substance, reproché à la société [H] & [L] devenue la SARL Atelier L'Échelle, d'avoir délivré six attestations d'avancement des travaux ayant conduit au déblocage de fonds au profit de la SCI [Adresse 20] suivant l'échéancier convenu en contradiction avec l'état d'avancement réel du chantier incluant, selon eux, la réalisation des équipements collectifs faisant partie intégrante du projet, ceci en toute connaissance de cause, les consorts [F] et leur assureur estimant que ces fautes sont à l'origine directe et exclusive du paiement du prix de vente. Il est, pour ce faire, tiré argument du rapport d'expertise judiciaire dressé par M. [R] dans une procédure concernant le même programme qui se prononce sur l'avancement de travaux relatifs à des lots d'autres acquéreurs. La société MMA Iard fait en outre valoir que cette société d'architecture, qui écrivait elle-même à la SCI, le 3 juillet 2008, qu'elle n'était pas payée de ses honoraires depuis plus d'un an et demi, ne pouvait ignorer les difficultés financières de la SCI et les impayés subis par les entrepreneurs à l'origine de suspensions successives des travaux.

Il convient de relever que les attestations incriminées ont été émises les 19 mars 2007 (achèvement des planchers hauts, à l'exclusion de divers lots parmi lesquels ne figure pas le lot en cause), 29 novembre 2007 (mise hors d'eau pour les logements 60 à 65), 23 juin 2008 (ensemble des cloisons terminé dans les logements 60 à 65), 08 décembre 2008 (« certifions pour les logements suivants l'avancement ci-dessous : Travaux d'achèvement : avancement 93 % pour les logements 1 à 151 ») et qu'il échet de les distinguer de l'état d'avancement des travaux portant sur les travaux relatifs aux infrastructures collectives prévues dans le projet de cette résidence (piscine, restaurant, salle polyvalente...), la société d'architecture et son assureur se prévalant au surplus du fait qu'il s'agissait d'une résidence de tourisme de la catégorie deux étoiles qui ne requiert, selon le référentiel de classement applicable, qu'une surface du hall de réception d'environ 50 m².

Il est certain que cette société d'architecture ne peut raisonnablement nier qu'elle savait que les attestations qu'elle délivrait servaient au déblocage progressif des fonds au profit de la venderesse et elle ne peut se retrancher derrière l'intervention de la société Cogeba dès lors qu'elle prenait seule la responsabilité de les approuver en apposant sa signature.

Force est néanmoins de considérer que les parties recherchant sa responsabilité ne prouvent, comme il leur appartient de le faire, que le contenu des attestations ne correspondait pas à l'état d'avancement effectif du lot précisément concerné au jour de leur établissement, quand bien même le chantier dans sa globalité accusait des retards ou que le promoteur connaissait des difficultés de trésorerie, et qu'il s'agirait donc, selon les termes employés, d'attestations « de complaisance ».

À cet égard, ces parties ne sauraient tirer seulement argument du rapport d'expertise de M. [R] portant sur l'avancement des travaux afférents à des lots acquis par d'autres acquéreurs et réalisée dans le cadre d'une autre instance - et reprocher, incidemment, au tribunal de ne pas en avoir tenu compte - pour affirmer que la société d'architecture a, par la délivrance de ces attestations, contribué à la réalisation du dommage causé par un défaut d'achèvement que rien ne permettait sérieusement de garantir et sur lequel les acquéreurs ont été tenus dans l'ignorance.

En outre, elles ne contredisent pas la société Atelier l'Échelle lorsqu'elle ajoute, en individualisant précisément onze lots de cette autre procédure, que l'expert judiciaire n'a pas trouvé d'écart significatif entre l'avancement du chantier et les attestations établies.

Il ne peut davantage lui être reproché la méconnaissance de l'échéancier prévu à l'acte de vente dans la mesure où l'initiative du déblocage des fonds tel que pratiqué, ceci avec l'accord des acquéreurs, est imputable à la seule SCI [Adresse 20].

Il s'ensuit que les consorts [F] et la société MMA Iard, faute d'en justifier, ne sont pas fondés en leurs demandes de garantie à l'encontre de la société d'architecture et de son assureur.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées à leur encontre.

C- Sur l'appel en garantie à l'égard du prêteur

Les consorts [F] et l'assureur du notaire recherchent la garantie totale du prêteur qui, selon elles, faisait partie intégrante de l'opération projetée et elles concluent au rejet de la demande de garantie qu'il formule à leur encontre. La société MMA Iard soutient que sa demande en garantie n'est pas prescrite dès lors qu'elle a été assignée par M. et Mme [I] le 26 mai 2014, et que sa demande en garantie a été formulée en novembre 2018.

Elles soutiennent que le prêteur ne pouvait ignorer les caractéristiques de l'opération projetée dans la mesure où il les avait étudiées et avalisées avec la société chargée de sa commercialisation ; elles lui reprochent de n'avoir pas attiré l'attention des emprunteurs sur ses caractéristiques, en particulier sur l'absence de garantie extrinsèque et sur le risque que l'endettement né de l'octroi du crédit soit supérieur à celui qu'avait envisagé l'emprunteur. Selon elles, il n'appartenait pas au notaire de procéder à des recherches particulières sur l'opportunité économique de l'opération envisagée par les acquéreurs ; elles estiment que la responsabilité de la banque, intervenant en amont de l'opération et bien avant l'intervention du notaire, préexistait nécessairement à celle du notaire qui n'est intervenu qu'au stade de la régularisation de l'acte authentique.

La NORFI réplique que les consorts [F] et la société MMA Iard sont irrecevables en leurs demandes à son encontre du fait de la prescription ; qu'en tout état de cause, elle n'a aucun lien de droit avec le notaire et son assureur ; qu'elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ; que l'obligation de conseil du banquier est limitée par son devoir de non-ingérence qui lui interdit de s'immiscer dans les affaires de son client ; qu'il ne saurait être contesté qu'au moment de sa souscription, la charge de remboursement de l'emprunt n'excédait pas les facultés contributives de M. et Mme [I] et l'octroi du prêt, ne comportait pas de risque d'endettement de sorte qu'elle n'était pas tenue d'un devoir de mise en garde ; qu'elle n'est pas intervenue au niveau du montage de l'opération et n'était pas la banque des promoteurs ni celle de la SCI ; que les consorts [I] avaient déjà pris la décision de faire cette acquisition dans le cadre d'une opération de dé'scalisation avant l'intervention de la banque pour le 'nancement ; qu'il n'est pas établi qu'elle possédait des informations sur l'opération dont les investisseurs ne disposaient pas ; qu'elle n'était débitrice d'aucune obligation de conseil et d'information sur l'opération en elle-même et n'avait nullement à juger de l'opportunité économique du projet auquel les consorts [I] ont souscrit.

La fin de non-recevoir tirée de la prescription du recours en garantie des consorts [F] et de la société MMA Iard ne figure pas dans le dispositif des conclusions de la NORFI, qui seul saisit la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile. La cour n'est donc pas saisi de cette prétention et ne peut qu'examiner le bien-fondé des recours en garantie contre la banque.

Il est constant que le prêteur n'est tenu à l'égard des emprunteurs qui au demeurant, ne se prévalent pas d'un manquement qui lui serait imputable, qu'à une obligation de mise en garde sur les éventuels risques liés à un endettement excessif. En revanche, il appartient au notaire d'informer les acquéreurs sur les risques résultant de l'absence de garantie extrinsèque ou sur les conséquences d'une garantie intrinsèque dont les conditions posées par les articles 261-11 et R 261-18 b) du code de la construction et de l'habitation ne sont pas réunies.

L'argument tiré de la préexistence de la responsabilité du prêteur ne saurait donc prospérer, dès lors que leurs obligations respectives ne sont pas identiques et que l'obligation d'information et de conseil sur la garantie intrinsèque pesait exclusivement sur le notaire qui devait, en particulier, assurer l'efficacité de l'acte qu'il instrumentait et qui a manqué à cette obligation en soumettant le contrat de vente litigieux à la signature d'acquéreurs profanes.

La garantie du prêteur ne saurait, par conséquent, être recherchée par les consorts [F] et la société MMA Iard. Ces demandes seront donc rejetées, et le jugement sera confirmé de ce chef.

IV- Sur la réparation des préjudices

Au regard de ce qui précède, l'échec du programme immobilier est imputable à la SCI [Adresse 20].

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé que la SCI [Adresse 20] a engagé sa responsabilité à l'égard des acquéreurs sur le fondement des dispositions de l'article 1147 ancien du code civil.

Le notaire - aux droits duquel viennent les consorts [F] - qui, par ses fautes en lien direct avec l'annulation du contrat de vente, en exposant les parties à un risque d'annulation de vente qui s'est finalement réalisé, a engagé sa responsabilité délictuelle ainsi que la société MMA Iard assurant la responsabilité professionnelle du notaire. Elles sont donc tenues de garantir intégralement les acquéreurs.

A- Sur le préjudice des acquéreurs

Les acquéreurs font valoir qu'ils ont subi un préjudice lié au risque de recouvrement de la TVA et un préjudice moral.

' Sur la TVA

Les acquéreurs sollicitent l'infirmation de la décision des premiers juges en ce qu'ils ont jugé qu'ils ont investi dans une opération immobilière soumise à la TVA qu'ils ont partiellement récupérée et que du fait de l'anéantissement de cette opération ils vont devoir restituer à l'administration fiscale le montant du crédit de TVA. La société MMA Iard et les consorts [F] soutiennent que les acquéreurs ne justifient pas de la réalité du préjudice subi ; que la TVA est une imposition et non un préjudice réparable et que faute de pouvoir bénéficier du programme de défiscalisation, les acquéreurs doivent être remis dans la situation fiscale qui aurait dû être la leur vis-à-vis de l'impôt.

Ainsi que le tribunal l'a jugé, si les acquéreurs produisent, à titre de preuve, une attestation du service des impôts mentionnant qu'ils ont obtenu le remboursement du crédit de TVA au titre de l'année 2007 pour un montant de 9 531 euros, ils ne justifient pas qu'ils ont été contraints de rembourser cette somme à l'administration fiscale du fait de l'anéantissement de l'opération de défiscalisation. Le risque d'avoir à rembourser cette somme à l'administration fiscale, sur le fondement allégué de l'article 207 du code général des impôts, est donc dépourvu de caractère certain, et ce d'autant que les demandes en remboursement ne sont pas imprescriptibles.

' Sur le préjudice moral

Les acquéreurs réclament l'allocation d'une somme de 20 000 euros au titre du préjudice moral et critiquent le tribunal qui, pour les débouter, énonce que leur investissement était destiné à une opération de défiscalisation de sorte qu'aucun préjudice moral n'est démontré eu égard à cette circonstance. Ils font valoir que cette opération pesait sur leur budget et pour éviter que les échéances du prêt ne perdurent indéfiniment, ils ont été contraints d'engager différentes procédures pour faire valoir leurs droits sans contrepartie avec le versement des loyers ; qu'ils ont perdu l'espoir de s'assurer une retraite financée la location du bien et la possibilité de le revendre à l'issue de neuf années.

La société MMA Iard sollicite la confirmation du jugement qui a rejeté cette prétention en l'absence de justificatif, étant par ailleurs rappelé que les époux [I] ont fait le choix et pris le risque de se lancer dans une opération d'investissement fiscal en signant un contrat de réservation en dehors de toute participation de Maître [F]. Les consorts [F] sollicitent également la confirmation du jugement sur ce point, le préjudice étant inexistant.

La société MMA Iard n'est pas fondée à opposer aux acquéreurs le choix qu'ils ont fait en prenant le risque de se lancer dans une opération d'investissement comportant des avantages fiscaux, dès lors que les divers tracas et contraintes financières subis durant de longues années de procédure, tels qu'exposés et justifiés par des attestations, constituent un préjudice distinct de celui réparé par l'annulation du contrat de vente et qu'en application du principe de la réparation intégrale du préjudice, ce dommage justifie une indemnisation spécifique, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (Civ. 1re, 15 juin 2016, n° 15-14.192, 15-17.370, 15-18.113).

Le préjudice moral tel qu'explicité étant effectif, il sera alloué aux acquéreurs la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral subi de sorte que le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande. Les consorts [F], le liquidateur de la SCP [A] [F], et la société MMA Iard seront condamnés in solidum à leur verser cette somme en réparation de leur préjudice moral.

B- Sur le préjudice du prêteur

Les consorts [F], le liquidateur de la SCP [A] [F] et la société MMA Iard sollicitent l'infirmation de leurs condamnations au profit du prêteur. La société MMA Iard soutient que la banque n'établit pas l'existence d'une faute du notaire, d'un préjudice et d'un lien de causalité ; que les restitutions dues à la suite de l'anéantissement d'un contrat de prêt ne constituent pas, en elles-mêmes, un préjudice réparable ; que le préjudice de la banque s'agissant des intérêts à échoir ne saurait s'analyser qu'en une perte de chance ; que le tribunal a retenu un préjudice au titre des intérêts perdus sans préciser les méthodes de calcul utilisées pour aboutir au montant déterminé et sans apporter plus d'éléments sur la répartition de cette somme entre les intérêts échus et les intérêts à échoir, qui ne sont pas justifiés ; que si la NORFI a produit, par année, l'ensemble des mouvements intervenus en rapport avec le prêt souscrit, il n'en demeure pas moins que le cumul des intérêts conventionnels et des primes d'assurances versés par les époux [I] n'est pas apparu expressément. Les consorts [F] et le liquidateur de la SCP [A] [F] considèrent la banque a manqué à ses obligations et engagé sa responsabilité ; que le préjudice allégué n'est qu'une perte de chance qui ne peut être égale au gain espéré ; qu'il est certain qu'au regard des taux aujourd'hui pratiqués pour les prêts immobiliers, les acquéreurs auraient nécessairement renégocié leurs crédits, afin de bénéficier d'un taux plus avantageux ; qu'il est indéniable que la banque n'aurait pas perçu les intérêts dont elle sollicite aujourd'hui le paiement ; que le dommage allégué par la banque est nul.

La NORFI indique que si les restitutions dues à la suite de l'anéantissement du contrat de prêt ne constituent en elles-mêmes un préjudice réparable, cela n'empêche aucunement la condamnation des responsables de la résolution de la vente ; que c'est à juste titre que le tribunal a retenu que le notaire avait commis une faute en régularisant un acte inef'cace, laquelle est à l'origine de l'annulation des contrats ; que la résolution des contrats de vente et la nullité subséquente des contrats de prêts la prive du béné'ce du paiement des intérêts contractuels échus et restitués aux emprunteurs, ce qui engendre à son égard un préjudice matériel indiscutable dont elle est fondée à être indemnisée ; que de même, elle subit un préjudice du fait de l'absence de perception des intérêts depuis la suspension du contrat de crédit selon ordonnance en date du 27 avril 2015, qui n'est compensé par aucune restitution ; que la faute du notaire et son lien de causalité avec le préjudice subi par elle sont établis ; que c'est à tort que la MMA remet en cause le décompte opéré par elle et la cour pourra se référer utilement au tableau d'amortissement produit ; que si la MMA persiste à contester cette demande au motif que la perte des intérêts à échoir ne serait pas chiffrée, celle-ci étant liée à la date de règlement, elle ne pouvait être préalablement déterminée, mais elle était toutefois parfaitement déterminable.

La banque n'a commis aucune faute à l'origine de l'annulation de la vente immobilière, et de l'annulation des contrats de prêts ainsi qu'il a été précédemment exposé. En revanche, il est établi que le notaire et la société venderesse ont commis une faute ayant conduit à l'annulation de ce contrat.

S'il est exact que les restitutions dues à la suite de l'anéantissement d'un contrat de prêt ne constituent pas, en elles-mêmes, un préjudice réparable, de sorte que le notaire ne peut être tenu à garantir ces sommes qu'en cas d'insolvabilité des emprunteurs, la banque dont le contrat est annulé par la faute d'un tiers est fondée à agir à l'encontre du responsable en réparation du préjudice subi, sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

Il est constant qu'à la suite de l'annulation d'un contrat de prêt accessoire à un contrat de vente, la banque peut être indemnisée au titre de la restitution des intérêts échus et peut se prévaloir de la perte de chance de percevoir les intérêts à échoir, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (Civ. 3e, 1er juin 2017, n° 16-14.428).

La NORFI justifie que les intérêts échus perçus par elle, jusqu'à la dernière échéance réglée par les emprunteurs le 31 août 2015, s'élèvent à la somme de 30 860,57 euros. Ces intérêts devant être remboursés par la banque à l'emprunteur, ils constituent un préjudice certain subi par le prêteur causé par la faute commise par la SCI [Adresse 20] et Me [F].

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a condamné Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], ainsi que l'assureur du notaire, la société MMA Iard, à payer à la NORFI la somme de 30 860,57 euros.

Le tribunal a cependant omis de statuer sur la demande de solidarité formée par la NOR FI. Les fautes de la SCI [Adresse 20] et du notaire ayant toutes deux concourues au préjudice causé à la banque, il convient de les condamner in solidum à réparer celui-ci, l'assureur du notaire, la société MMA Iard étant également tenu au paiement in solidum avec son assuré. Le jugement sera donc complété en ce sens.

L'article 1231-7 du code civil dispose :

« En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement.

En cas de confirmation pure et simple par le juge d'appel d'une décision allouant une indemnité en réparation d'un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance  ».

En application de cette disposition, l'indemnité allouée à la banque ne peut que produire des intérêts au taux légal et non des intérêts au taux contractuel stipulé au contrat de prêt désormais annulé. Le jugement sera donc infirmé de ce chef et la somme de 30 860,57 euros produira intérêts au taux légal à compter du jugement du 13 juin 2019.

Enfin, il y a lieu de constater que la banque ne s'est pas prévalu d'une perte de chance au titre des intérêts à échoir, au titre du préjudice subi, de sorte que la critique du jugement par l'appelante portant sur l'absence de distinction entre intérêts échus et intérêts à échoir est infondée.

V- Sur les autres demandes

L' article 32-1 ne saurait être mis en 'uvre que de la propre initiative de la juridiction saisie, une partie ne pouvant avoir intérêt au prononcé d'une amende civile à l'encontre d'une autre. Il n'y a donc pas lieu de prononcer une amende civile à l'encontre de l'appelante dont il n'est pas établi qu'elle ait commis une faute dans son droit d'exercer un recours à l'encontre du jugement.

Les consorts [F] et la société MMA Iard qui succombent seront déboutés de leurs prétentions au titre des dépens et frais irrépétibles et condamnés, in solidum, à supporter les entiers dépens d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au regard de la solution donnée au litige, il convient de condamner in solidum les consorts [F], le liquidateur de la SCP [A] [F] ès qualités ainsi que la société MMA Iard à payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, aux acquéreurs et à chacune des parties intimées constituées, à l'exclusion de la SELARL SMJ ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI [Adresse 20].

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :

- fixé au 8 mars 2019, le point de départ des intérêts au taux légal dus par M. et Mme [I] à la Caisse régionale normande de financement, sur la somme de 98 338,20 euros ;

- débouté M. et Mme [I] de leur demande de réparation du préjudice moral ;

- condamné Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de Me [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F] et les MMA à verser à la Caisse régionale normande de financement des intérêts dus à compter du 31 août 2015, au taux contractuel de 4,40 % l'an sur la somme de 75 401,78 euros, au titre des intérêts perdus ;

LE CONFIRME pour le surplus des chefs critiqués ;

STATUANT À NOUVEAU sur les chefs infirmés et y AJOUTANT :

CONDAMNE M. et Mme [I] à payer à la Caisse régionale normande de financement les intérêts au taux légal sur la somme de 98 338,20 euros à compter du 19 octobre 2016 ;

CONDAMNE in solidum Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de [A] [F], Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], et la société MMA Iard à payer à M. et Mme [I] la somme de 20 000 euros au titre du préjudice moral ;

DIT que Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de [A] [F], Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], et la société MMA Iard sont tenus in solidum au paiement à la Caisse régionale normande de financement de la somme de 30 860,57 euros au titre de la perte des intérêts échus ;

CONDAMNE in solidum Mmes [N], [S] et [B] [F], en qualité d'ayants droit de [A] [F], Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], et la société MMA Iard à payer à la Caisse régionale normande de financement les intérêts au taux légal produits par la somme de 30 860,57 euros à compter du jugement du 13 juin 2019 ;

DÉBOUTE la Caisse régionale normande de financement de sa demande en paiement d'intérêts au taux contractuel sur la somme de 75 401,78 euros ;

CONDAMNE in solidum Mmes [N], [S] et [B] [F], ès qualités d'ayants droit de [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F], ainsi que la société MMA Iard à verser, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à M. et Mme [I] la somme complémentaire de 3 000 euros au titre de l'instance d'appel et cette même somme de 3 000 euros respectivement à chacune des parties intimées suivantes : la société Atelier l'Échelle SARL (anciennement société [H] & [L] SARL), la Mutuelle des architectes français, la Caisse régionale normande de financement ;

CONDAMNE in solidum Mmes [N], [S] et [B] [F], ès qualités d'ayants droit de [A] [F], et Mme [N] [F], ès qualités de liquidateur de la SCP [A] [F] ainsi que la société MMA Iard aux dépens d'appel :

DIT que Maître Estelle Garnier, Maître Devauchelle, Maître Nelly Gallier et la SELARL Renard Pierné pourront recouvrer directement contre les parties condamnées ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Madame Fatima HAJBI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/02960
Date de la décision : 12/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-12;19.02960 ?
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