COUR D'APPEL D'ORLÉANS
C H A M B R E C I V I L E
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 10/07/2023
la SELARL LUGUET DA COSTA
la SELARL CASADEI-JUNG
ARRÊT du : 10 JUILLET 2023
N° : - N° RG : 20/01195 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GFF5
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ORLEANS en date du 03 Mars 2020
PARTIES EN CAUSE
APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265255680207705
Monsieur [U], [N], [L] [O]
né le 01 Juin 1933 à [Localité 3]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 3]
représenté par Me Arthur DA COSTA de la SELARL LUGUET DA COSTA, avocat postulant au barreau d'ORLEANS et ayant pour avocat plaidant Me Virginie KLEIN du barreau de HAUTS-DE-SEINE
D'UNE PART
INTIMÉES : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265256868791191
S.C. CLUBHOTEL TENERIFFE 2 société civile d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé, immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 316419183 prise en la personne de Me [G] en qualité d'administrateur provisoire, domicilié [Adresse 2].
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par Me Emmanuel POTIER de la SELARL CASADEI-JUNG, avocat postulant au barreau d'ORLEANS et ayant pour avocat plaidant Me Clothilde CANAVATE, du barreau de PARIS
S.C. CLUBHOTEL TENERIFFE, société civile d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé, immatriculée au RCS de Nanterre sous le 400482550 agissant par la Selarl FHB, prise en la personne de Me [G] en qualité d'administrateur provisoire, domicilié [Adresse 2].
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Emmanuel POTIER de la SELARL CASADEI-JUNG, avocat postulant au barreau d'ORLEANS et ayant pour avocat plaidant Me Clothilde CANAVATE, du barreau de PARIS
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 02 Juillet 2020.
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 02 mai 2023
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 23 Mai 2023, à 14 heures, devant Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller, Magistrat Rapporteur, par application de l'article 786 et 910 alinéa 1 du Code de Procédure Civile.
Lors du délibéré :
Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,
Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller
Madame Laure Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
ARRÊT :
L'arrêt devait initialement être prononcé le 03 juillet 2023, à cette date le délibéré a été prorogé au 10 juillet 2023,
Greffier :
Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats et du prononcé.
Prononcé le 10 JUILLET 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
M. [O] est associé de la société civile Clubhôtel Teneriffe à hauteur de 10 parts sociales, lui permettant de disposer de la jouissance à temps partagé d'un appartement d'un immeuble situé sur l'île de Teneriffe.
Par acte d'huissier de justice en date du 28 novembre 2019, la société Clubhôtel Teneriffe a fait assigner M. [O] devant le tribunal judiciaire d'Orléans notamment aux fins de paiement des charges impayées.
Par jugement du 3 mars 2020, le tribunal judiciaire d'Orléans a':
- condamné M. [O] à payer à la SCI Clubhôtel Teneriffe la'somme de 3'823'€ en principal correspondant aux charges contributives lui incombant restées impayées avec intérêts au taux légal à compter du 28 novembre. 2019, date de l'assignation';
- constaté que M. [O] ne peut entrer en jouissance des droits affectés aux parts sociales correspondant à la fraction des biens immobiliers sociaux jusqu'à complet paiement de la somme de 3'823'€';
- condamné M. [O] à payer à la SCI Clubhôtel Teneriffe la somme de 300'€ à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive';
- condamné M. [O] à payer à la SCI Clubhôtel Teneriffe la somme de 400'€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';
- condamné M. [O] aux entiers dépens comportant notamment le coût de l'assignation.
Par déclaration du 2 juillet 2020, M. [O] a interjeté appel de tous les chefs du jugement.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 30 mars 2023, M. [O] demande de':
In limine litis,
- procéder à la rectification du jugement en ce qu'il comporte la SCI Clubhôtel Teneriffe 2 représentée par son gérant la SARL SGRT comme demanderesse alors que c'est la SCI Clubhôtel Teneriffe représentée par son gérant la SARL Clubhôtel qui est partie à la procédure';
- déclarer les demandes irrecevables';
- constater le défaut de représentation légale de la SCI Clubhôtel Teneriffe lui ôtant toute qualité pour agir en justice avant la désignation de l'administrateur judiciaire';
- déclarer prescrite l'action en recouvrement de charges';
A titre subsidiaire':
- prononcer le sursis à statuer dans l'attente du rapport d'expertise';
A titre infiniment subsidiaire':
- constater l'irrégularité du calcul des charges';
- constater l'absence de justificatifs et de déduction des loyers nécessairement encaissés';
Sur demande reconventionnelle':
- donner injonction à la SCI Clubhôtel Teneriffe de produire le relevé d'occupation des périodes de Monsieur [O] depuis le 01/01/2014';
- autoriser le retrait de M. [O] en raison de son âge (90 ans) ne lui permettant plus d'accéder au site de Teneriffe (art.19-1)';
En toute hypothèse,
- débouter la SCI Clubhôtel Teneriffe en toutes ses demandes, fins, et conclusions';
- condamner la SCI Clubhôtel Teneriffe à lui payer la somme de 5'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile';
- condamner la SCI Clubhôtel Teneriffe aux entiers dépens.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 31 mars 2023, la société Clubhôtel Teneriffe et la société Clubhôtel Teneriffe 2, demandent de':
- recevoir la société Clubhôtel Teneriffe en ses demandes, fins et conclusions, et l'y déclarer bien fondée';
Sur sa créance,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions';
Sur la demande de retrait de M. [O],
A titre principal,
- déclarer irrecevable la demande de retrait formée par M. [O]';
A titre subsidiaire,
- débouter M. [O] de sa demande';
A titre très subsidiaire,
- fixer la valeur des parts sociales détenues par M. [O] à la somme de 15,20 euros';
- condamner M. [O] au paiement de l'ensemble des coûts afférents au retrait, dont les frais occasionnés par le retrait des associés, savoir les frais de greffe liés au changement de propriété des parts puis à leur annulation, les frais relatifs à l'enregistrement de l'opération auprès de la recette des impôts, ainsi que les frais de publicité légale';
En tout état de cause,
- débouter M. [O] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions';
- condamner M. [O] à verser à la société Clubhôtel Teneriffe la somme de 5'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, qui viendra en complément de la condamnation déjà prononcée en première instance à ce titre, outre les entiers dépens de l'instance.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.
MOTIFS
Sur la rectification du jugement
Aux termes de l'article 462 du code de procédure civile, les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande.
Il est établi que la société Clubhôtel Teneriffe a saisi le tribunal d'une action en paiement des charges. Or, la première page du jugement déféré à la cour mentionne la société Clubhôtel Teneriffe 2 en qualité de demanderesse. Il convient donc de remplacer ce nom par le véritable nom de la partie demanderesse.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action
Moyens des parties
L'appelant soutient qu'aux termes de l'article 16 des statuts de la société, la gérance est tenue d'engager toute action en recouvrement dans un délai de 2 mois à compter de la fin de la période de jouissance, de sorte que l'action est prescrite'; que subsidiairement, l'action est également prescrite en application du délai de prescription quinquennal pour les charges antérieures du 28 novembre 2014.
L'intimée réplique que si l'article 16 de ses statuts prévoit que la gérance doit dans un délai de deux mois à compter de l'expiration de la période de jouissance de l'associé défaillant, engager toute action en recouvrement, ce délai de deux mois n'est en aucun cas un délai de prescription'; qu'il impose une simple obligation de diligence à la gérance de la société dans la gestion des associés défaillants'; que ce délai extrêmement court de deux mois serait insuffisant pour qu'elle puisse se saisir de l'absence de paiement des charges, tenter le recouvrement amiable ou introduire une action en justice, seul acte interruptif de la prescription'; que si l'article 2254 du code civil prévoit une possible réduction par accord des parties du délai de prescription de l'article 2224 du code civil à une durée qui par ailleurs ne peut être inférieure à moins d'un an, cette disposition n'est pas applicable aux actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts, comme tel est le cas en l'espèce'; que le délai de prescription applicable en l'espèce est incontestablement le délai de prescription de 5 ans prévu à l'article 2224 du code civil, et le tribunal a fait droit à ses demandes au titre des charges d'associées impayées des 5 dernières exercices à compter de l'exploit introductif d'instance en date du 28 novembre 2019, soit à compter du 28 novembre 2014.
Réponse de la cour
L'article 16 des statuts de la société Clubhôtel Teneriffe, relatif à la défaillance d'un associé, stipule':
«'La gérance est tenue d'engager toute action en recouvrement à l'encontre de l'associé défaillant et dans un délai de deux mois à compter de l'expiration de sa période de jouissance'».
Les dispositions statutaires d'une société civile ont une valeur contractuelle, et il incombe aux juges d'interpréter le sens des clauses qui ne sont ni claires ni précises, pour rechercher quelle a été la commune intention des parties.
Les associés de la société civile disposent d'un intérêt commun tendant à ce que les charges dues par chacun d'entre eux soient régulièrement payées, et à défaut qu'elles soient recouvrées à bref délai. Leur intention ne pouvait donc consister à instaurer un délai de prescription de l'action en recouvrement si bref que toute créance ne pourrait être recouvrée. En outre, il convient de relever que les stipulations statutaires ne font nullement référence à l'engagement d'une action en justice dans le délai de deux mois, mais à une action en recouvrement qui peut notamment consister en la délivrance d'une mise en demeure ou toute autre tentative de règlement amiable, et qu'aune disposition statutaire ne prévoir la sanction du non-respect de ce délai de deux mois.
Il s'ensuit que l'article 16 des statuts de la société Clubhôtel Teneriffe n'instaure nullement un délai de prescription de l'action en recouvrement de charges de deux mois, de sorte que le délai de prescription quinquennal prévu à l'article 2224 du code civil est applicable.
En application de cette disposition, les charges impayées exigibles depuis le 28 novembre 2014, soit cinq ans avant la délivrance de l'assignation, ne sont pas prescrites. La société Clubhôtel Teneriffe ne sollicitant que le paiement de charges impayées exigibles depuis le 28 novembre 2014, sa demande en paiement est donc recevable et la fin de non-recevoir sera rejetée.
Sur le défaut de qualité à agir de la société Clubhôtel Teneriffe
Moyens des parties
L'appelant soutient que la société Clubhôtel a été désignée comme gérante pour une durée indéterminée par les statuts'; que depuis la création de la société Clubhôtel Teneriffe, le mandat du gérant n'a jamais été remis au vote des associés et ne répond donc pas aux conditions de renouvellement de l'article 5 de la loi du 6 janvier 1986, par le vote des associés tous les 3 ans'; que la cour d'appel de Versailles, par un arrêt définitif du 26 mai 2020, jugé que la société SARL Clubhôtel n'avait pas été désignée conformément à l'article 5 de la loi du 6 janvier 1986, et, par un arrêt du 10 novembre 2022, elle a constaté l'illégalité de la gérance en faisant désigner un administrateur judiciaire pour la SCI aux fins d'organiser des élections pour désigner le gérant'; qu'il est établi, qu'au moment de l'assignation, la société n'était pas légalement représentée, de sorte que ni elle ni son gérant n'avaient qualité pour mener une action en recouvrement de charges.
L'intimée fait valoir que le gérant de la société Clubhôtel Teneriffe était bel et bien la société Clubhôtel lors de sa saisine du tribunal'; que le mode de constitution du gérant dans le contrat de société ne saurait dès lors, être modifié par l'application d'une loi postérieure que le législateur n'a pas prévu expressément rétroactive ou d'application immédiate'; que la loi n°2009-888 du 22 juillet 2009 a prévu que le gérant devrait être élu pour un mandat de 3 ans, mais cette disposition ne vaut que pour l'avenir et ne modifie pas l'application des contrats en cours'; que M. [O] ne peut ainsi prétendre à la rétroactivité d'une loi ou à son application immédiate aux contrats en cours, pour disqualifier un gérant qui assure la représentation de la société depuis de nombreuses années sans qu'elle ne le conteste'; qu'au moment de l'assignation, elle était ainsi parfaitement représentée, et aucun administrateur provisoire n'était désigné et aucune décision n'avait jugé illégale sa gérance.
Réponse de la cour
L'article 31 du code de procédure civile dispose que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
En l'absence d'attribution légale de la qualité à agir, toute personne qui a un a intérêt personnel au succès d'une prétention dispose de la qualité à agir. En l'espèce, il n'est pas contestable que M. [O] est associé de la société Clubhôtel Teneriffe et qu'il est tenu, en application des dispositions statutaires, de payer les charges à proportion de ses titres dans la société. Il s'ensuit que la société Clubhôtel Teneriffe qui prétend disposer d'une créance de charges impayées à l'encontre de M. [O], dispose de la qualité à agir à son encontre, peu important la question de sa représentation qui ne relève pas de l'appréciation de la qualité à agir de la personne morale.
Il s'avère que sous couvert de la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir, M. [O] fait en réalité référence à l'exception de nullité pour irrégularité de fond au titre du défaut de pouvoir d'une personne figurant au procès comme représentant personne morale, prévue à l'article 117 du code de procédure civile. Cette exception de procédure devant être soulevée à peine d'irrecevabilité devant le juge de la mise en état, elle ne peut être appréciée au titre du défaut de qualité à agir.
En conséquence, il convient de déclarer la société Clubhôtel Teneriffe recevable à agir et de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité.
Sur la demande de sursis à statuer
Moyens des parties
L'appelant expose que depuis de nombreuses années, un abondant contentieux sur les charges de copropriété s'est développé avec les sociétés défenderesses en raison d'anomalies comptables et d'appels de charges irréguliers dans la comptabilité des SCI'; qu'une expertise comptable a été prononcée par un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 février 2019'; que le sursis à statuer s'impose, car si les charges de l'associé ayant obtenu le prononcé d'une expertise devaient être remises en cause dans leurs modalités de calcul, celles prétendument dues par M. [O] le seraient aussi.
L'intimée réplique que l'expertise judiciaire prononcée ne peut avoir pour effet d'annuler les décisions des associés et de rendre irrécouvrables les appels de charges émis'; que cette expertise ne peut avoir d'effet sur le litige en cours'; qu'il convient de rejeter la demande de sursis à statuer.
Réponse de la cour
Le prononcé d'une expertise judiciaire concernant un autre associé, n'est pas de nature à influer sur l'issue du présent litige, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'ordonner un sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.
Sur le bien-fondé de la demande en paiement
Moyens des parties
L'appelant expose que le calcul des charges est irrégulier, car la SCI Clubhôtel Teneriffe ne distingue pas dans ses appels de charges les différentes catégories de charges et impute donc des charges aux associés quelle que soit l'occupation, ce qui conduit à un calcul erroné de la participation de chaque associé aux charges et à la violation de l'article 9 de la loi du 6 janvier 1989'; que de nombreuses procédures en annulation des assemblées ont abouti à l'annulation des assemblées ou des résolutions visant les charges pour cette même raison'; que la société se contente de produire un décompte qui n'est justifié par aucun décompte des charges de la multipropriété'; que la société compte des charges liées à l'occupation, alors que l'appartement n'est pas occupé, ou alors il l'est mais les loyers ne sont pas reversés à son propriétaire'; que la société ne déduit pas les périodes louées, or l'appartement a sans doute été loué et les loyers encaissés auraient dû venir à son crédit'; qu'il sera donc fait injonction à l'intimée de produire le relevé d'occupation des périodes de M. [O]'; que par ailleurs, il paie des charges sur des périodes qui ne le concernent pas et il paie des charges alors qu'il n'a plus le droit d'occuper et de toutes façons il ne peut plus physiquement se déplacer.
L'intimée réplique que le règlement des charges d'associé constitue une obligation de chacun des associés envers la société'; que les comptes annuels font l'objet d'un contrôle de gestion par un expert-comptable ou un commissaire aux comptes, et sont transmis aux associés'; qu'il n'est en conséquence procédé à aucun vote de charges, tel que cela ressort d'ailleurs des procès-verbaux des assemblées générales'; qu'ainsi qu'il en est justifié, les comptes ont été régulièrement approuvés par chacune des assemblées générales'; que les appels de fonds faisant état du détail des charges appelées ont été régulièrement adressés à M. [O]'; que la jurisprudence constante, considère que la production d'un relevé des charges par catégorie ainsi que des procès-verbaux des assemblées générales sont suffisants pour justifier le principe et le montant de la créance détenue par la société d'attribution à l'égard de l'associé'; que contrairement à ce que soutient M. [O], les charges liées à l'occupation ne sont pas facturées lorsque l'associé n'a pas occupé l'appartement'; que l'objet social de la SC Clubhôtel Teneriffe n'est pas de mettre en location les droits de ses associés, mais de donner à ses associés des appartements en jouissance'; qu'ainsi, aucun loyer ne peut venir au crédit de M. [O] si celui-ci ne s'est pas employé à mettre ses droits en location'; que l'appelant demande la communication de documents qui n'existent pas'; que sa créance est parfaitement fondée tant dans son principe que dans son quantum et le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [O] à lui payer la somme de 3'823 euros au titre des charges impayées arrêtées à la date du 27 juin 2019.
Réponse de la cour
L'article 3 de la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986 relative aux sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé dispose que «'les associés sont tenus, envers la société, de répondre aux appels de fonds nécessités par la construction, l'acquisition, l'aménagement ou la restauration de l'immeuble social en proportion de leurs droits dans le capital social et de participer aux charges dans les conditions prévues à l'article 9 de la présente loi'».
L'article 9 de la même loi dispose':
«'À moins qu'elles ne soient individualisées par les lois ou règlements en vigueur, un décret détermine, parmi les charges entraînées par les services collectifs, les éléments d'équipement et le fonctionnement de l'immeuble, les charges communes et les charges liées à l'occupation.
Les associés sont tenus de participer aux charges des deux catégories en fonction de la situation et de la consistance du local, de la durée et de l'époque de la période de jouissance.
Toutefois, lorsque le local sur lequel l'associé exerce son droit de jouissance n'est pas occupé, l'associé n'est pas tenu de participer aux charges de la deuxième catégorie pendant la période correspondante.
Ils sont tenus de participer aux charges relatives au fonctionnement de la société, à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes en proportion du nombre des parts ou actions qu'ils détiennent dans le capital social.
Le règlement fixe la quote-part qui incombe, dans chacune des catégories de charges, à chaque groupe particulier de parts ou actions défini en fonction de la jouissance.
À défaut, il indique les bases selon lesquelles la répartition est faite'».
L'article 15 des statuts de la société Clubhôtel Teneriffe stipule':
«'Les associés sont tenus de participer':
- d'une part, aux charges relatives au fonctionnement de la société, à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes (charges de première catégorie)';
- d'autre part, aux charges entraînées par les services collectifs, les éléments d'équipement et le fonctionnement de l'immeuble parmi lesquelles on distingue les charges communes (charges de deuxième catégorie) et les charges liées à l'occupation (charges de troisième catégorie). En ce qui concerne ces dernières, lorsque le local sur lequel l'associé exerce son droit de jouissance n'est pas occupé, ou n'a pas fait l'objet d'un échange, l'associé n'est pas tenu d'y participer pendant la période correspondante.
Le règlement de jouissance qui est demeuré annexé, indique les bases sur lesquelles la répartition est faite.
Pour faire face au paiement des charges, les associés sont tenus de répondre aux appels de fonds émis par la gérance et nécessaires à la réalisation de l'objet social. Il est ici précisé que tout appel de fonds, même exceptionnel, sera supporté par le titulaire des parts au moment de la mise en recouvrement de cet appel de fonds, que soit la période ou l'exercice ayant rendu nécessaire ledit appel.
La gérance fixera l'époque et le montant de ces appels de fonds. Elle pourra le faire pour chaque groupe de parts et réclamer trois mois avant le commencement de chaque période, le versement d'une provision égale au montant des charges lui ayant été imparties lors de l'exercice précédent.
Cette provision sera liquidée dès que l'assemblée générale aura approuvé les comptes de l'exercice concerné et donné son quitus.
Les appels de fonds seront adressés au domicile réel ou élu de chaque associé. Il devra y être répondu dans un délai maximum de trente jours. À défaut de versement des sommes réclamées dans ce délai, il sera dû par l'associé défaillant un intérêt de retard calculé au taux d'escompte de la Banque de France majoré de deux points qui courra de plein droit à compter de l'expiration du délai, sans qu'il soit besoin de mise en demeure préalable ou de préjudice judiciaire et sans préjudice des autres conséquences du retard de paiement telles qu'elles seront examinées à l'article 16'».
La société Clubhôtel Teneriffe produit les appels de charges adressés à M. [O] pour les exercices 2015 à 2019, mentionnant les sommes dues au titre des charges «'conserv. patrimoine'» (charges de première catégorie), des charges communes (charges de deuxième catégorie) et les charges liées à l'occupation (charges de troisième catégorie), outre les appels de fonds exceptionnels liés à des travaux.
En conséquence, M. [O] est mal fondé à soutenir que le calcul des charges serait irrégulier au regard des dispositions de l'article 9 de la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986 précité.
La société Clubhôtel Teneriffe produit par ailleurs les procès-verbaux d'assemblée générale mentionnant l'approbation par les associés des budgets et des comptes des exercices 2013-2014, 2014-2015, 2015-2016, 2016-2017, et les budgets des exercices 2017-2018, 2018-2019. Les tableaux des charges de l'immeuble, du budget et des charges prévisionnelles étaient joints aux procès-verbaux d'assemblée générale.
M. [O] allègue l'annulation de résolutions d'assemblée générale relatives aux charges. Cependant, l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 12 janvier 2017 auquel il se réfère concerne l'annulation de résolutions de l'assemblée générale du 14 juin 2013 alors que les charges dont il est demandé paiement à M. [O] résultent de l'approbation de comptes et budgets postérieurs à cette assemblée générale.
Si des provisions ont bien été appelées au titre des charges liées à l'occupation, il résulte de l'état de régularisation des charges qu'aucune charge liée à l'occupation n'a été facturée à M. [O] pour les exercices 2014-2015, 2015-2016, 2016-2017, de sorte que les provisions versées au titre des charges liées à l'occupation ont été déduites des autres catégories de charges. L'appelant est donc mal fondé à soutenir que les charges liées à l'occupation lui ont été facturées que l'appartement ait ou non été occupé.
M. [O] allègue sans le prouver que son appartement aurait été loué pendant sa période de jouissance alors que la décision de louer l'appartement dont il avait la jouissance lui appartenait, la société Clubhôtel Teneriffe n'ayant aucune mission aux fins de mise en location de l'appartement de M. [O] pendant sa période de jouissance. Il conviendra de rejeter la demande de M. [O] tendant à faire injonction à l'intimée de produire le relevé d'occupation relatif à ses périodes de jouissance de l'appartement.
Il résulte des pièces versées aux débats que la société Clubhôtel Teneriffe justifie de l'existence et du quantum de sa créance, et il n'est pas établi qu'elle aurait facturé des charges à M. [O] sur des périodes qui ne le concernent pas.
M. [O] ne justifie pas avoir réglé la somme dûment justifiée de somme de 3'823 euros au titre des charges impayées au 27 juin 2019, et l'incapacité physique de déplacement alléguée n'est pas de nature à le dispenser de ses obligations découlant de sa qualité d'associé.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné M. [O] à payer à la SCI Clubhôtel Teneriffe la'somme de 3'823 euros en principal correspondant aux charges contributives lui incombant restées impayées avec intérêts au taux légal à compter du 28 novembre. 2019, date de l'assignation.
Sur la demande de retrait de l'associé
Moyens des parties
L'appelant soutient qu'il est fondé à solliciter son retrait puisqu'il est en maison de retraite, âgé de 90 ans, il ne peut plus se déplacer, en application de l'article 19-1 de la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986.
La société Clubhôtel Teneriffe réplique que la demande de retrait formée par l'appelant pour la première fois en cause d'appel constitue une demande nouvelle qui sera déclarée irrecevable'; que cette demande ne tend en aucun cas aux mêmes fins que les demandes formées en première instance, étant rappelé que M. [O] était non comparant devant les premiers juges'; que sur le fond, les motifs de retrait ayant trait à la situation personnelle de l'associé sollicitant son retrait doivent s'apprécier de manière particulièrement rigoureuse eu égard aux conséquences d'un tel retrait sur les autres associés, sur lesquels pèsera alors les appels de charges de l'immeuble'; que le retrait ne peut être fondé sur les seules raisons d'âge ou de santé de l'associé, dans la mesure où celui-ci peut jouir de ses droits autrement'; que M. [O] ne justifie d'aucune impossibilité d'occuper personnellement la résidence, d'aucune impossibilité de louer ou vendre ses périodes de jouissance et d'aucune situation financière gravement obérée.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Cependant, l'article 567 du code de procédure civile prévoit que les demandes reconventionnelles sont recevables en appel.
En l'espèce, la demande de retrait formée par M. [O] assignée en paiement de charges, vise à obtenir autre chose que le simple rejet des prétentions adverses, de sorte qu'elle constitue une demande reconventionnelle se rattachant avec un lien suffisant aux prétentions originaires. Cette demande est donc recevable en cause d'appel.
L'article 19-1 de la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986 dispose':
«'Nonobstant toute clause contraire des statuts, un associé peut se retirer totalement ou partiellement de la société, après autorisation donnée par une décision unanime des associés. Ce retrait peut également être autorisé pour justes motifs par une décision de justice, notamment lorsque l'associé est bénéficiaire des minima sociaux ou perçoit une rémunération inférieure au salaire minimum interprofessionnel de croissance, ou lorsque l'associé ne peut plus jouir du lot qui lui a été attribué du fait de la fermeture ou de l'inaccessibilité de la station ou de l'ensemble immobilier concerné'».
M. [O] n'allègue ni ne justifie être dans la situation des cas visés par l'article 19-1 de la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986 qui ne sont toutefois pas limitatifs.
L'exigence légale de justes motifs au retrait d'un associé vise à faire en sorte qu'un tel retrait soit exceptionnel, afin de ne pas léser les intérêts des associés restants qui seraient conduits à supporter les charges des associés sortants.
M. [O] allègue un motif de retrait lié à son âge, à son état de santé et au fait qu'il est admis en maison de retraite, ces deux derniers éléments ne faisant l'objet d'aucune production de pièce. Le fondement de la demande de M. [O] réside dans l'impossibilité d'user personnellement du bien en jouissance partagée. Cependant, la persistance de la possibilité d'user personnellement du bien ne constitue pas un critère déterminant de la qualité d'associé, celui-ci disposant de la possibilité de mettre le bien en jouissance partagée en location pour la période qui lui est attribuée.
L'existence de justes motifs n'étant pas établie, il convient de débouter M. [O] de sa demande de retrait de la société Clubhôtel Teneriffe.
Sur les autres chefs du jugement
L'appelant ne formule aucun moyen à l'appui de la demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a constaté que M. [O] ne peut entrer en jouissance des droits affectés aux parts sociales correspondant à la fraction des biens immobiliers sociaux jusqu'à complet paiement de la somme de 3'823 euros, et en ce qu'il a condamné M. [O] à payer à la SCI Clubhôtel Teneriffe la somme de 300'€ à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.
En conséquence, la cour ne peut que confirmer le jugement sur ces points.
Sur les dispositions accessoires
Compte tenu de la solution donnée au litige, il convient de confirmer le jugement en ses chefs statuant sur les dépens et les frais irrépétibles.
M. [O] sera condamné aux dépens d'appel et à payer à la société Clubhôtel Teneriffe la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
RECTIFIE le jugement déféré en remplaçant, en page 1, la «'SCI Clubhôtel Teneriffe 2'» par «'société civile Clubhôtel Teneriffe';
REJETTE les fins de non-recevoir soulevées par M. [O] et déclare les demandes de la société Clubhôtel Teneriffe recevables';
DIT n'y avoir lieu à surseoir à statuer';
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions';
Y AJOUTANT':
REJETTE la demande tendant à voir délivrer injonction à la société Clubhôtel Teneriffe de produire le relevé d'occupation des périodes de Monsieur [O] depuis le 01/01/2014';
DÉCLARE la demande de retrait formée par M. [O] recevable en cause d'appel';
REJETTE la demande de retrait de la société Clubhôtel Teneriffe formée par M. [O]';
CONDAMNE M. [O] à payer à a société Clubhôtel Teneriffe la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel';
CONDAMNE M. [O] aux entiers dépens d'appel.
Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président à la Cour d'Appel d'ORLEANS et Madame Fatima HAJBI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT