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08/03/2024 | FRANCE | N°24/00494

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre des rétentions, 08 mars 2024, 24/00494


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Etrangers



ORDONNANCE du 8 MARS 2024

Minute N° 30/2024

N° RG 24/00494 - N° Portalis DBVN-V-B7I-G6H3

(1 pages)







Décision déférée : juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 6 mars 2024 à14h04





Nous, Ferréole Delons, conseiller à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Hermi

ne Bildstein, greffier stagiaire en pré-affectétion sur poste, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,





APPELANT :

Monsieur [M] [J]

né le 5 mars 1974 à [Loca...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Etrangers

ORDONNANCE du 8 MARS 2024

Minute N° 30/2024

N° RG 24/00494 - N° Portalis DBVN-V-B7I-G6H3

(1 pages)

Décision déférée : juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 6 mars 2024 à14h04

Nous, Ferréole Delons, conseiller à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Hermine Bildstein, greffier stagiaire en pré-affectétion sur poste, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,

APPELANT :

Monsieur [M] [J]

né le 5 mars 1974 à [Localité 2] (Algérie), de nationalité algérienne

actuellement en rétention administrative dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire du centre de rétention d'[Localité 1]

COMPARANT par visioconférence,

assisté de Me Karima Hajji, avocat au barreau d'Orléans, conseil commis d'office

en présence de M. [S] [O], interpète en langue arabe, expert près la cour d'appel d'Orléans, qui a prêté son concours lors de l'audience et du délibéré.

INTIMÉ :

LA PRÉFECTURE DE LOIRE ATLANTIQUE

NON COMPARANTE, non représentée

MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l'heure de l'audience

À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans, conformément à l'article L. 743-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), le 8 mars 2024 à 14h00,

Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code,

Vu l'ordonnance rendue le 6 mars 2024 à 14h04 par le juge des libertés et de la détention d'Orléans rejetant les exceptions de nullité soulevées, rejetant le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative, ordonnant la prolongation de la mesure de rétention administrative de M. [M] [J] pour une durée de vingt-huit jours à compter du 6 mars 2024 à 8h10 ;

Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 7 mars 2024 à 13h53, complété à 13h59 et 14h03 par M. [M] [J],

Vu les observations et pièces de la préfecture de Loire Atlantique re reçues au greffe le 7 mars 2024 à 16h01 ;

Vu les conclusions d'appeland et pièces transmises par Me Hajji et reçues au greffe le 8 mars 2024 à 8h35 ;

Après avoir entendu :

- Me Karima Hajji, en sa plaidoirie ;

- M. [M] [J], en ses observations, ayant eu la parole en dernier.

AVONS RENDU ce jour, publiquement et contradictoirement, l'ordonnance suivante :

SUR QUOI,

Il résulte de l'article 66 de la Constitution et de l'article L 743-9 du CESEDA que le juge des libertés doit s'assurer que l'étranger est pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir lorsqu'il se trouve placé en rétention administrative.

Aux termes de l'article L 743-12 du CESEDA, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la main levée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Selon l'article L 741-3 du CESEDA , "un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toutes diligences à cet effet, dès le placement en rétention"

Il convient de considérer que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il y a lieu d'adopter sans y ajouter ni y substituer que le premier juge a statué sur l'ensemble des moyens de nullité et de fond soulevés devant lui et repris devant la cour, étant observé, au vu des termes de la déclaration d'appel du retenu du 7 mars 2024 et des moyens repris lors des débats de ce jour :

- Sur la régularité de la procédure, la déclaration d'appel du retenu, rappelant les termes de l'article L741-8 du CESEDA, soulève l'information tardive du procureur de la République du placement en rétention de M. [M] [J], alors même qu'il est possible de constater, au vu des pièces versées à la procédure, que l'intéressé s'est vu notifier une obligation de quitter le territoire avec interdiction de retour prise par le préfet de la Loire-Atlantique pour une durée de 1 an le 4 mars 2024 à 8h05, ainsi qu'un arrêté de placement en rétention administrative à 8h10 le même jour, soit en même temps que sa levée d'écrou, que la préfecture a avisé les parquets de Nantes et d'Orléans à 8h41 soit 31 minutes après. Sur ce point, la cour fait sienne l'analyse et la motivation du premier juge ayant relevé à juste titre qu'il ne ressort d'aucun élément de la procédure ni d'aucune circonstance invoquée par le retenu que ce délai de 31 minutes mis pour aviser le procureur de la République de la décision de placement en rétention prise à l'encontre de M. [M] [J] ait porté atteinte à ses droits. Par ailleurs, la jurisprudence mentionnée dans la déclaration d'appel de l'intéressé (1ère Civ. 23 juin 2021) est applicable à un délai "trop long de 1h52", qu'il ne convient pas de retenir dans cette affaire. Le moyen est rejeté.

- Sur l'absence de communication des coordonnées du consulat, la cour observe que l'arrêté de placement en

rétention pris et notifié le 4 mars 2024 à l'encontre de M. [M] [J] fut accompagné d'un document d'information sur les "droits en locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire", document notifié le 4 mars 2024 à 8h15 (soit cinq minutes après la notification du placement) et indiquant la possibilité pour ce dernier de communiquer avec son consulat ou toute personne de son choix, qu'à cette fin un téléphone est mis à sa disposition, et ce dès son arrivée au centre de rétention administrative, qu'il résulte de la combinaison des articles L741-9 et L744-4 qu'il appartient à l'administration d'informer l'étranger sur le droit de communiquer avec son consulat, sans qu'il soit fait mention d'une obligation de fournir les coordonnées de ce dernier. Enfin, il n'est pas allégué que M. [M] [J] ait formulé une telle demande, et qu'il ait été privé d'un tel droit depuis le début de sa rétention. C'est pourquoi le moyen est rejeté.

- Sur la notification tardive des droits à l'intéressé, la cour reprend les termes de l'article L744-4, alinéa 1er du

CESEDA selon lesquels "l'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieu de rétention, du droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil et d'un médecin, et qu'il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend". En l'espèce, si, comme l'indique le conseil de l'intéressé dans sa déclaration d'appel, un rappel des droits a eu lieu à 12h05, lors de l'arrivée au centre de rétention d'[Localité 1], soit quatre heures et trois minutes après la notification du placement, il convient de rappeler qu'une première notification des droits en rétention a eu lieu à 8h15, permettant dès lors de respecter l'obligation d'informer l'intéressé "dans les meilleurs délais", en l'espèce cinq minutes, conformément aux dispositions de l'article précité. Le moyen est donc rejeté.

- Sur les diligences entreprises par la préfecture, le conseil de M. [M] [J], reprend les termes des articles L741-3 et L751-9 du CESEDA, dont les dispositions impliquent qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toute diligence utile à cet effet. Sur ce point, il appartient au juge des libertés et de la détention, en application des articles précités, de rechercher concrètement les diligences accomplies par l'administration pour permettre que l'étranger ne soit maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ. Or, la cour relève qu'en l'espèce la préfecture a, avant même de se prononcer sur une mesure d'éloignement et sur la décision de placement en rétention administrative, saisi la DNPAF d'une demande de routing le 22 février 2024 à 11h42, celle-ci pouvant se faire sans que ces mesures ne soient prises. L'administration a fait ainsi preuve d'anticipation et de célérité dans les diligences tenant à la mise en 'uvre de l'éloignement de l'intéressé. Les diligences effectuées par la préfecture étant nécessaires et suffisantes à ce stade de la procédure administrative de rétention s'agissant de la première demande de prolongation. À ce jour, l'administration est ainsi en attente d'un routing définitif, pour permettre à l'intéressé de regagner l'Algérie grâce à son passeport en cours de validité, qu'il n'apparaît donc, à cet égard, ni opportun ni exigé d'adresser une nouvelle demande. Le moyen est donc rejeté.

- Sur l'absence d'examen complet et personnalisé du dossier du retenu et sur l'erreur de fait et sur le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la CEDH, le conseil de M. [J] fait état de la situation de ce dernier en France, et soulève notamment des éléments de sa vie personnelle et familiale tels que la présence de ses quatre enfants mineurs résidant en France et de nationalité fraançaise. Est aussi évoquée la procédure de divorce dont il fait l'objet et la possibilité pour lui d'exercer un droit de visite médiatisé auprès de ses enfants, pour lesquels la mère exerce exclusivementl'autorité parentale. La cour considère que de tels arguments constituent en réalité une critique de l'arrêté du préfet portant sur la mesure d'éloignement prise à son encontre, qui relève du juge administratif et non du juge judiciaire. D'où il suit que le moyen doit être rejeté.

- Sur l'incompatibilité de l'état de santé avec la rétention, la cour fait sienne l'analyse et la motivation du premier juge étant rappelé que le centre de rétention administrative dispose d'une unité médicale et que sur le fondement de l'article R 751-8 du CESEDA, le retenu peut faire l'objet, à sa demande, d'une évaluation de son état de vulnérabilité par le service médical de l'OFFI et de la compatibilité de son état de santé avec la mesure de rétention et la mesure d'éloignement, afin de prendre en compte son asthme, maladie qui est effectivement démontrée par la production de preuves médicales. Par ailleurs, l'intéressé n'allègue en aucune manière avoir réalisé une telle demande. Enfin, comme l'a précisé le premier juge dans l'ordonnance attaquée, le juge judiciaire n'a pas vocation à se prononcer sur la compatibilité de l'état de santé de l'étranger avec la mesure de rétention dont il fait l'objet. D'où il suit que le moyen doit être rejeté.

- Sur l'absence de proportionnalité de la mesure et sur les garanties de représentation suffisantes, la cour relève que sont évoquées dans la déclaration d'appel plusieurs éléments, notamment le fait que M. [J] dispose d'un passeport N° 307307956 en cours de validité jusqu'au 4 janvier 2032 actuellement à disposition du greffe du CRA, qu'il est hébergé chez Mme [Z] [W] , en produisant une attestation d'hébergement et une facture téléphonique à l'appui, qu'il propose un autre lieu d'hébergement chez M. [P] [D], en produisant une attestation d'acceptation d'hébergement et une pièce d'identité, mais que toutefois, un hébergement ne peut être considéré comme un logement stable et pérenne, la présence d'un passeport ne s'avérant pas non plus suffisante, étant relevé que l'intéressé, condamné à 6 reprises par la justice, notamment pour divers faits de menaces et de violences conjugales, avec deux incarcérations à l'issue des audiences, présente un comportement délictueux récidiviste constitutif d'une menace pour l'ordre public, que de surcroît ce dernier ne présente aucunement, dans ses démarches, et à la lecture de la déclaration d'appel, l'intention de quitter le territoire français et donc de respecter la décision d'éloignement dont il fait l'objet. Le moyen sera donc rejeté.

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [M] [J] ;

REJETONS les moyens soulevés par Monsieur [M] [J] ;

CONFIRMONS l'ordonnance déférée du juge des libertés et de la détention qui ordonne la prolongation du maintien en rétention administrative de Monsieur [M] [J] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;

ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance au retenu et son conseil, à la préfecture de Loire Atlantique et au procureur général près la cour d'appel d'Orléans,

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.

Et la présente ordonnance a été signée par Madame Ferréole Delons, conseiller, et Madame Hermine Bildstein, greffier présent lors du prononcé.

Fait à Orléans le HUIT MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE, à heures

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Hermine BILDSTEIN Ferréole DELONS

Pour information : L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

L'avocat de l'intéressé

NOTIFICATIONS, le 8 mars 2024 par courriel :

La préfecture de Loire Atlantique

Monsieur le procureur général,

NOTIFICATIONS, le 8 mars 2024 à l'audience :

Monsieur [M] [J] , copie remise par transmission au Greffe du CRA

Me Karima HAJJI, avocat au barreau d'Orléans, copie remise en main propre contre récépissé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre des rétentions
Numéro d'arrêt : 24/00494
Date de la décision : 08/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-08;24.00494 ?
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