T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 05/04030 No MINUTE : Assignation du : 04 Mars 2005 Expéditions exécutoires délivrées le : JUGEMENT rendu le 08 Novembre 2006
DEMANDERESSE S.A.R.L. FRANCE EXCELLENCE ... représentée par Me JEANNE MARIE HENRIOT BELLARGENT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire J 100 DÉFENDERESSE Société PARFUMS TED Z...
... représentée par Me Christian HOLLIER-LAROUSSE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E.1219 COMPOSITION DU TRIBUNAL Elisabeth X..., Vice-Président, signataire de la décision Agnès A..., Vice-Président Pascal MATHIS, Juge assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision DEBATS A l'audience du 17 Octobre 2006 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement Contradictoire en premier ressort FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES: La société FRANCE EXCELLENCE a pour objet la commercialisation de produits de parfumerie, de beauté et de soins. Elle est titulaire de la marque semi figurative "EXCITE" déposée le 3 octobre 2000 sous le no 3055401 pour désigner les produits et services suivants : "Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver; préparations pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser; savons; produits de parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques; lotions pour les cheveux; dentifrices. Produits en ces matières ou en plaqué métaux précieux et leurs alliages à savoir joaillerie; bijouterie, pierres précieuses; horlogerie et instruments chronométriques autres qu'à usage dentaire" (sic) en classes 3 et 14 de la classification internationale. La société PARFUMS TED Z... a déposé le 21 juillet 2004 une marque semi-figurative "EXCITED
Z...
" no 3 304 421 pour désigner les produits et services suivants : "Produits de parfumerie, à savoir : parfums et eau de toilette; produits de beauté, à savoir :
fards à joues, fards à paupières, fonds de teint, masques faciaux et masques de beauté, rouges à lèvres, vernis à ongles, dissolvants pour vernis à ongles; lotions crèmes et autres préparations démaquillantes; produits pour la toilette, à savoir : shampooings, sels pour le bain non à usage médical, gels pour le bain et la douche, bains moussants, savons et savonnettes de toilette, huiles essentielles; cosmétiques, lotions pour les cheveux; savons, crèmes et mousses pour le rasage; lotions et baumes d'après-rasage; dentifrices; produits solaires (à l'exception des produits contre les coups de soleil à usage pharmaceutique), à savoir : huiles, laits, lotions et crèmes solaires ; crèmes auto-bronzantes, produits pour brunir la peau ; préparations non médicales pour les soins de la peau, du corps, du visage, des yeux, des lèvres, du cou, du buste, des mains, des jambes, des pieds ; crèmes antirides; lotions et crèmes vitalisantes et tonifiantes non médicales, lotions et crèmes hydratantes, crèmes désincrustantes, déodorants corporels; produits de nettoyage" en classe 3 de la classification internationale. La société PARFUMS TED Z... commercialise un parfum sous la marque "EXCITED
Z...
". Par assignation en date du 4 mars 2005, la société FRANCE EXCELLENCE fait grief à la société PARFUMS TED Z... d'avoir ainsi commis des actes de contrefaçon par reproduction de sa marque ou à tout le moins par imitation. En réparation elle sollicite l'annulation de la marque "EXCITED
Z...
" pour désigner des produits de la classe 3 de la classification internationale, les mesure usuelles d'interdiction et de publication ainsi que la somme de 400 000 ç à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice, la désignation d'un expert pour évaluer ce dernier, et la somme de 5 000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire. Par dernières conclusions la société FRANCE EXCELLENCE reprend ses
prétentions et porte sa demande de provision à la somme de 2 000 000 ç et sa demande de frais irrépétibles à la somme de 10 000 ç. Suivant dernières écritures la société PARFUMS TED Z... demande au tribunal de constater la nullité de la marque "EXCITE" en ce qu'elle vise les "produits de parfumerie" et conteste avoir commis des actes de contrefaçon faute de risque de confusion. Reconventionnellement, la défenderesse sollicite la somme de 10 000 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. MOTIFS SUR LA VALIDITÉ DE LA MARQUE "EXCITE" Attendu que l'article R. 712-3 1o c) du code de la propriété intellectuelle dispose que : "Le dépôt comprend : 1 La demande d'enregistrement de la marque établie dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article R. 712-26 et précisant notamment : ... c) L'énumération des produits ou services auxquels elle s'applique, ainsi que l'énumération des classes correspondantes ;" Attendu que l'article 2 e) de l'arrêté du 31 janvier 1992 relatif aux marques de fabrique de commerce ou de service précise que : "Art. 2. - Les prescriptions résultant de l'article 1er sont assorties des tempéraments ou modalités suivantes:
... e) Enumération des produits ou services auxquels s'applique la marque: Cette énumération peut résulter soit de la désignation individuelle de chacun de ces produits ou services, soit de l'énumération de la catégorie à laquelle ils appartiennent. Dans ce dernier cas, les termes employés doivent permettre à toute personne d'en délimiter le contenu de façon immédiate, certaine et constante. En particulier, ne doivent figurer dans l'énumération, ni termes étrangers, ni termes de fantaisie (tels que marque ou autre signe distinctif), ni termes vagues (tels que "articles de fantaisie", "cadeaux", "accessoires", "services divers"...), ni référence générale à une ou plusieurs classes ou à leur contenu. Les produits et services relevant d'une même classe de la classification
internationale des produits et services doivent être regroupés et, en regard de chaque paragraphe, doit figurer l'indication du numéro de la classe. En cas de pluralité de classes, cette citation doit être faite dans l'ordre numérique croissant." Attendu que la marque "EXCITE" a été déposée pour désigner les produits suivants :
"Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver; préparations pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser; savons; produits de parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques; lotions pour les cheveux; dentifrices. Produits en ces matières ou en plaqué métaux précieux et leurs alliages à savoir joaillerie; bijouterie, pierres précieuses; horlogerie et instruments chronométriques autres qu'à usage dentaire". Attendu qu'il est fait grief à cette marque de prétendre désigner les "produits de parfumerie" alors que ces termes ne permettent pas à toute personne de délimiter de façon immédiate, certaine et constante le contenu de la catégorie visée. Mais attendu que les textes précités n'exigent pas que le déposant désigne individuellement les produits et services auxquels il entend appliquer la marque mais au contraire lui permettent d'énumérer les catégories concernées par le dépôt de la marque. Attendu qu'en l'espèce la catégorie "produits de parfumerie" a un contenu évident pour tous et bien délimité ; qu'ainsi il n'y a pas lieu de critiquer le dépôt de ce chef. SUR LES ACTES DE CONTREFAOEON Par reproduction Attendu que l'article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que : "Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire : a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que : "formule, façon, système, imitation, genre, méthode", ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement ; b) La suppression ou la modification d'une marque régulièrement apposée." Attendu que le signe "EXCITED
Z...
" ne reproduit pas à
l'identique la marque "EXCITE" ; qu'ainsi le grief ne contrefaçon sera examiné au regard de l'imitation. Par imitation Attendu que l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle dispose que : "Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public : a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ; b) L'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement." Concernant le dépôt de la marque "EXCITED
Z...
" Attendu que les produits visés à l'enregistrement des deux marques sont pour un grand nombre identiques et sinon similaires. Attendu que sur le plan sémantique la marque seconde reprend comme terme d'attaque la première marque en se contentant d'y ajouter avec un jeu de mots le signe TED Z.... Attendu que sur le plan graphique les 6 premières lettres sont les mêmes, et sont écrites sensiblement dans la même police d'imprimerie. Attendu que sur le plan phonétique les deux premières syllabes des deux signes ont sensiblement la même prononciation. Attendu en conséquence, notamment au regard de l'identité des produits concernés, que le consommateur d'attention moyenne n'ayant pas les deux signes simultanément sous les yeux est susceptible d'accorder une origine commune aux deux produits, le signe second apparaissant comme une déclinaison du premier.
Attendu enfin qu'il est constant que l'adjonction d'une marque de renommée (TED Z... en l'espèce) n'est pas de nature à écarter le risque de confusion. Attendu ainsi que le dépôt de la marque seconde réalise un acte de contrefaçon de la marque invoquée par le demandeur.
Concernant l'usage du signe "EXCITED
Z...
" Attendu que pour les mêmes motifs l'usage du signe incriminé pour désigner un parfum ou une eau de toilettes qui sont des produits identiques à ceux visés au dépôt de la marque opposée constitue des actes de contrefaçon par imitation. SUR LES MESURES RÉPARATRICES Attendu qu'il convient de prononcer la nullité de la marque "EXCITED
Z...
" pour l'ensemble des produits et services visés à son dépôt. Attendu qu'une mesure d'interdiction sera prononcée dans les termes du dispositif. Attendu que le préjudice résultant de l'atteinte à la marque sera réparé par l'allocation de la somme de 10 000 ç à titre de dommages et intérêts. Attendu que le préjudice économique enduré par le demandeur sera également réparé par l'allocation d'une somme de 10 000 ç à titre de dommages et intérêts. Attendu que l'entier préjudice de la société FRANCE EXCELLENCE ayant été réparé par les condamnations précitées il n'y a pas lieu d'ordonner une mesure de publication à la charge de la société PARFUMS TED Z... à titre de complément de réparation. SUR LES FRAIS IRREPETIBLES Attendu que l'équité commande d'allouer à la société FRANCE EXCELLENCE la somme de 10 000 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. SUR L'EXÉCUTION PROVISOIRE Attendu que les données de l'espèce commandent d'assortir la présente décision de l'exécution provisoire. SUR LES DÉPENS Attendu que la société PARFUMS TED Z... qui succombe supportera les dépens. PAR CES MOTIFS Le Tribunal, Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort Sous le bénéfice de l'exécution provisoire, Déboute la société PARFUMS TED Z... de son action en nullité de la marque "EXCITE" no 3055401. Dit qu'en déposant à titre de marque le signe "EXCITED
Z...
" pour désigner les produits précités et en en faisant usage pour désigner un parfum, la société PARFUMS TED Z... a commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque "EXCITE" no 3055401 dont est titulaire la
société FRANCE EXCELLENCE au préjudice de cette dernière. En réparation, Prononce la nullité de la marque "EXCITED
Z...
" no 3 304 421 pour l'ensembles des produits et services visés à son enregistrement. Dit que le présent jugement, une fois définitif, sera communiqué à l'INPI par les soins de Madame Y... saisie par la partie la plus diligente, pour être transcrit au registre national des marques. Fait interdiction à la société PARFUMS TED Z... de faire usage du signe "EXCITED
Z...
" pour désigner des produits de parfumerie passé un délai de deux mois suivant la signification du présent jugement sous astreinte de 500 ç par infraction constatée.
Dit que le tribunal se réserve expressément le pouvoir de liquider l'astreinte prononcée en application de l'article 35 de la loi no 91-650 du 9 juillet 1991 modifié par l'article 3 de la loi no 92-644 du 13 juillet 1992.
Condamne la société PARFUMS TED Z... à payer à la société FRANCE EXCELLENCE la somme de 20 000 ç à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice et celle de 10 000 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Déboute la société FRANCE EXCELLENCE de sa demande de publication. Condamne la société PARFUMS TED Z... aux dépens dont distraction au profit de la SCP LARANGOT HENRIOT-BELLARGENT, Avocat, pour la part dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu provision par application des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Ainsi fait et jugé à Paris le 8 novembre 2006 Le Greffier
Le Président