Vu l'ordonnance de référé du président du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion en date du 20 janvier 1992, enregistrée au secrétariat du Tribunal des conflits le 14 janvier 1992, et par laquelle le tribunal administratif renvoie au Tribunal des conflits la question de compétence posée par la demande du département de la Réunion tendant à l'expulsion de la société "Office maraicher fruitier" des locaux qu'elle occupe ;
Vu, enregistré comme ci-dessus le 14 janvier 1992, le jugement du tribunal d'instance de Saint-Denis de la Réunion en date du 2 décembre 1991 se déclarant incompétent pour connaître de cette demande, au motif que le bail consenti par le département de la Réunion à la société "Office maraicher fruitier" revêt le caractère de contrat administratif ;
Vu, enregistrées comme ci-dessus le 25 février 1992, les observations de la société "Office maraicher fruitier" tendant à renvoyer l'affaire devant le tribunal d'instance de Saint-Denis ;
Vu, enregistrées comme ci-dessus, le 5 mai 1992, les observations présentées pour le département de La Réunion, représenté par le président du conseil général et tendant à renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion ;
Vu l'avis de réception de l'avis d'envoi du dossier au Tribunal des conflits adressé au ministre des départements et territoires outre-mer ; Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Vigneron, membre du Tribunal,
- les observations de Me Le Bret, avocat de la société "Office maraicher fruitier" et de M. Issop X..., et de la S.C.P. Desaché, Gatineau, avocat du département de La Réunion,
- les conclusions de M. Abraham, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par contrat en date du 8 mars 1983, le conseil général du département de La Réunion a remis à bail un terrain à usage commercial et industriel à la société d'intérêt collectif agricole Sicama-Bourbon ; qu'à la suite de la liquidation des biens de celle-ci, le bail a été transféré par avenant en date du 20 mai 1988 à la société "Office maraicher fruitier" ; que le 11 février 1991, le conseil général a assigné la société devant le tribunal d'instance en résiliation du contrat pour inexécution des engagements du preneur et en expulsion de ce dernier ; que, par jugement du 2 décembre 1991, cette juridiction a considéré que les clauses insérées au contrat par l'avenant avaient conféré à celui-ci le caractère d'un contrat administratif et s'est en conséquence déclaré incompétent pour connaître du litige ; que le conseil général a sollicité alors du président du tribunal administratif de Saint-Denis, par voie de référé, l'expulsion de la société ; que ce magistrat a, par ordonnance rendue le 10 janvier 1992, renvoyé au Tribunal des conflits le soin de régler cette question de compétence ;
Considérant, d'une part, qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que l'immeuble loué ferait partie du domaine public départemental ; que, d'autre part, le contrat du 20 mai 1988 ne fait pas participer la société à l'exécution même du service public et ne comporte aucune clause exorbitante du droit commun ; que les juridictions de l'ordre judiciaire sont donc compétentes pour connaître des difficultés nées de l'exécution du contrat ;
Article 1er : Il est décidé que les tribunaux judiciaires sont compétents pour statuer sur le litige opposant le conseil général de La Réunion à la société "Office maraicher fruitier".
Article 2 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion est déclarée nulle et non avenue à l'exception de l'ordonnance du 20 janvier 1992.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice qui est chargé d'en assurer l'exécution.