Vu la requête présentée pour la société anonyme Les X... Etienne, dont le siège social est à Arles (Bouches-du-Rhône), ... tendant à ce que le Tribunal, en application de l'article 17 du décret du 26 octobre 1849 modifié, déclare la juridiction judiciaire compétente pour statuer sur la demande tendant à l'annulation de l'état exécutoire émis à son encontre le 9 avril 1993 par l'établissement public Voies navigables de France, au titre de la taxe hydraulique pour les années 1992 et 1993 à la suite du conflit négatif résultant de ce que :
1° par un jugement du 29 décembre 1993 le tribunal administratif de Lyon a déclaré la juridiction administrative incompétente pour connaître de sa demande ;
2° par un jugement du 30 juin 1995 le tribunal de grande instance de Tarascon a déclaré la juridiction judiciaire incompétente pour connaître du même litige ;
La société requérante soutient qu'il résulte de la jurisprudence du Conseil d'Etat que les taxes dues pour l'utilisation d'une prise d'eau sur le domaine public fluvial ont le caractère de taxes indirectes dont le contentieux ressortit à la compétence des juridictions judiciaires ;
Vu les jugements précités ;
Vu le mémoire présenté pour l'établissement public Voies navigables de France, tendant à ce que le Tribunal déclare la juridiction administrative compétente pour statuer sur la demande de la SA X... Etienne ; Voies navigables de France soutient que toute taxe n'entre pas nécessairement soit dans la catégorie des contributions directes soit dans celle des contributions indirectes ; que dans ce cas elle doit être rattachée au contentieux général des actes et des opérations de la puissance publique ; qu'il en va ainsi des taxes dues par les occupants du domaine public ; que cette solution est applicable pour les taxes perçues par Voies Navigables de France, qui ne peuvent être assimilées à des contributions indirectes, et dont le régime est conçu en fonction de l'occupation du domaine public ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849, modifié ;
Vu l'article 124 de la loi n° 90-1168 du 29 décembre 1990 ;
Vu le décret n° 91-797 du 20 août 1991 ;
Considérant qu'aux termes des deux premiers alinéas du I de l'article 124 de la loi de finances du 29 décembre 1990 :
" L'exploitation, l'entretien, l'amélioration, l'extension des voies navigables et de leurs dépendances et la gestion du domaine de l'Etat nécessaire à l'accomplissement de ces missions sont confiés à l'établissement public créé par l'article 67 de la loi du 27 février 1912 portant fixation du budget général des dépenses et des recettes de l'exercice 1912. Pour assurer l'ensemble de ces missions, l'établissement public perçoit à son profit des taxes sur les titulaires d'ouvrages de prise d'eau, rejet d'eau ou autres ouvrages hydrauliques destinés à prélever ou à évacuer des volumes d'eau sur le domaine public fluvial qui lui est confié ainsi que les redevances et droits fixes sur les personnes publiques ou privées pour toute autre emprise sur ce domaine et pour tout autre usage d'une partie de celui-ci " ; qu'aux termes du premier alinéa du II du même article 124 : " La taxe sur les titulaires d'ouvrages de prise d'eau, rejet d'eau ou d'autres ouvrages hydrauliques destinés à prélever ou à évacuer des volumes d'eau a un taux unique par catégorie d'usagers et comprend deux éléments : a) un élément égal au produit de la superficie de l'emprise au sol des ouvrages correspondants par un taux de base (...) ; b) un élément égal au produit du volume prélevable ou rejetable par l'ouvrage par un taux de base (...) ;
Considérant que la taxe sur les titulaires d'ouvrages de prise d'eau, prévue par ces dispositions, qui ne peut être rangée ni parmi les contributions indirectes ni parmi les impôts directs et qui ne constitue pas davantage une redevance pour service rendu, est directement liée à l'occupation du domaine public et que son contentieux relève, à ce titre, de la juridiction administrative ;
Considérant qu'il suit de là que la demande formée par la SA X... Etienne et dirigée contre l'état exécutoire émis le 9 avril 1993 par l'établissement public Voies navigables de France pour obtenir paiement de la somme dont cet établissement estime cette société redevable au titre des dispositions précitées de l'article 124 de la loi de finances du 29 décembre 1990 relève de la compétence de la juridiction administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La juridiction de l'ordre administratif est compétente pour connaître du litige opposant la SA X... Etienne et Voies navigables de France ;
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 29 décembre 1993 par lequel cette juridiction a décliné sa compétence est déclaré nul et non avenu ;
Article 3 : La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.