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04/09/2024 | FRANCE | N°24/05464

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 8/section 1, 04 septembre 2024, 24/05464


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT CONTENTIEUX DU
04 Septembre 2024

MINUTE : 24/881

RG : N° 24/05464 - N° Portalis DB3S-W-B7I-ZLQY
Chambre 8/Section 1


Rendu par Monsieur UBERTI-SORIN Stephane, Juge chargé de l'exécution, statuant à Juge Unique.
Assisté de Madame MOUSSA Anissa, Greffière,

DEMANDEUR

Monsieur [L] [Z]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]

comparant


ET

DEFENDEUR

S.A. HLM INTERPROFESSIONNELLE DE LA REGION PARISIENNE
[Adresse 1]
[Localité 2]
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COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DEBATS

Monsieur UBE...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT CONTENTIEUX DU
04 Septembre 2024

MINUTE : 24/881

RG : N° 24/05464 - N° Portalis DB3S-W-B7I-ZLQY
Chambre 8/Section 1

Rendu par Monsieur UBERTI-SORIN Stephane, Juge chargé de l'exécution, statuant à Juge Unique.
Assisté de Madame MOUSSA Anissa, Greffière,

DEMANDEUR

Monsieur [L] [Z]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]

comparant

ET

DEFENDEUR

S.A. HLM INTERPROFESSIONNELLE DE LA REGION PARISIENNE
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Me Nathalie FEUGNET, avocat au barreau de PARIS - E1971, substituée par Me SEVIN

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DEBATS

Monsieur UBERTI-SORIN, juge de l’exécution,
Assisté de Madame MOUSSA, Greffière.

L'affaire a été plaidée le 05 Août 2024, et mise en délibéré au 04 Septembre 2024.

JUGEMENT

Prononcé le 04 Septembre 2024 par mise à disposition au greffe, par décision Contradictoire et en premier ressort.

EXPOSE DU LITIGE

Par requête du 20 mai 2024, Monsieur [L] [Z] a sollicité une mesure de sursis à expulsion de 12 mois poursuivie en exécution d'un jugement rendu le 4 avril 2024 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Aubervilliers, signifié le 7 mai 2024, suivi d'un commandement de quitter les lieux délivré le même jour.

L'affaire a été retenue à l'audience du 5 août 2024 et la décision mise en délibéré au 4 septembre 2024, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées.

A l'audience, Monsieur [L] [Z] a soutenu sa demande. Il explique occuper les lieux avec sa femme qui est enceinte et leur deux filles âgées de 10 et 15 ans. Il déclare percevoir un revenu mensuel de 2.300 euros et avoir formulé une demande de logement social. Il explique que le logement était occupé par ses parents et qu'il y a toujours vécu.

Dans ses conclusions déposées et soutenues à l'audience, le conseil de la SA d'HLM interprofessionnelle de la région parisienne s'est opposé à la demande de sursis aux motifs que le logement est occupé sans droit ni titre tel que cela été constaté par le juge du fond.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, à la requête précitée et, le cas échéant, aux dernières écritures des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de délais pour quitter les lieux

Aux termes des dispositions de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution ne peut délivrer de titre exécutoire hors les cas prévus par la loi et est dépourvu des pouvoirs juridictionnels pour accorder des délais de grâce lorsqu'aucune procédure d'exécution forcée n'est en cours.

Aux termes du premier alinéa de l'article L. 412-3 du code des procédures civiles d'exécution, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. Depuis la Loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite, ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque les occupants dont l'expulsion a été ordonnée sont entrés dans les locaux à l'aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.

Conformément à l'article L. 412-4 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction en vigueur à compter du 29 juillet 2023, la durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.

C'est ainsi que la loi prescrit au juge d'examiner trois éléments pour statuer sur une demande de délai pour quitter les lieux :
- la bonne ou mauvaise volonté de l'occupant dans l'exécution de ses obligations ;
- les situations respectives du propriétaire et de l'occupant ;
- les diligences que l'occupant justifie avoir effectuées en vue de son relogement.

Enfin, le juge de l'exécution ne peut, en vertu des textes précités, accorder qu'un délai maximal de 12 mois.

Il ressort de l'avis d'imposition établi en 2023 au titre des revenus de 2022 que Monsieur [L] [Z] et son épouse ont perçu 31.367 euros, soit un revenu mensuel d'environ 2.614 euros. Par ailleurs, il ressort de l'attestation établie par la caisse d'allocations familiales le 14 mai 2024 que Monsieur [L] [Z] perçoit également 148,52 euros au titre des prestations sociales, soit un revenu mensuel moyen de 2.762 euros. Le requérant justifie également d'un emploi auprès de la société Air France pour un salarie mensuel net imposable d'environ 2.426 euros.

La SA d'HLM interprofessionnelle de la région parisienne s'oppose à la demande de sursis aux motifs que le logement est occupé sans droit ni titre dès lors qu'il était donné en location aux parents du requérant et que le tribunal a considéré qu'ils ne résidaient plus dans les lieux loués de manière régulière rendant l'occupation du requérant et de sa famille sans droit ni titre.

Pour autant, dès lors que la société bailleresse n'allègue ni ne prouve que le requérant serait entré dans les locaux à l'aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte, le fait qu'il soit occupant sans droit ni titre n'est pas de nature à ne pas examiner sa demande de sursis à expulsion. Cependant il n'a pas échappé au tribunal que les parents du requérant étaient locataires des lieux depuis 1975, qu'il n'y résidait plus et que dans ces conditions, sauf à déroger aux règles d'attribution des logements sociaux, le requérant et sa famille ne pouvaient s'y maintenir.

Cependant, il apparaît que les ressources de Monsieur [L] [Z] restent modérés compte tenu que sur un revenu mensuel d'environ 2.762 euros il a sa charge son épouse sans emploi et leurs deux enfants mineurs lesquelles ne paraissent pas lui permettent pas de retrouver dans le parc privé un logement adapté à la composition familiale. Monsieur [L] [Z] justifie en revanche d'une demande de logement social effectuée dès le 27 novembre 2023 selon attestation du 20 mai 2024, ainsi qu'un recours dans le cadre du droit au logement opposable (DALO) daté du 20 mai 2024 (l'accusé de réception n'est cependant pas produit). Enfin, l'indemnité d'occupation mise à sa charge est payée et il n'est redevable à l'égard du bailleur d'aucune dette locative.

S'il est indéniable que les propriétaires disposent d'un droit légitime sur leur bien immobilier, il convient cependant de trouver un équilibre entre les intérêts des parties en présence. Il appartient donc au juge de respecter un juste équilibre entre deux revendications contraires en veillant à ce que l'atteinte au droit du propriétaire soit proportionnée et justifiée par la sauvegarde des droits de l'occupant, dès lors que ces derniers apparaissent légitimes.

Or, une mesure d'expulsion aurait pour Monsieur [L] [Z] et sa famille de graves conséquences.

Pour ces raisons, il conviendra de faire droit à la demande de sursis de Monsieur [L] [Z]. Cependant, dès lors que ce dernier a attendu la procédure diligentée à son encontre pour déposer une demande de logement social alors qu'il aurait dû prendre contact en amant avec le bailleur social pour savoir s'il pouvait rester dans les lieux, ce délai sera nécessairement bref.

En conséquence, le délai du sursis sera fixé 6 mois, soit jusqu'au 4 mars 2025, pour permettre à Monsieur [L] [Z] de mener à bien sa demande de logement social et ainsi éviter son expulsion.

Ce délai sera subordonné au paiement régulier de l'indemnité d'occupation telle que définie dans le jugement rendu le 4 avril 2024 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Aubervilliers.

Sur les demandes accessoires

a) Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Monsieur [L] [Z] supportera la charge des éventuels dépens et ce, malgré le succès de sa prétention, l'instance ayant été introduite dans le seul objectif d'obtenir des délais pour quitter les lieux.

b) Sur les frais irrépétibles

En application de l'article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Par suite, la SA d'HLM interprofessionnelle de la région parisienne sera débouté de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l'exécution, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort et prononcé par mise à disposition au Greffe,

ACCORDE à Monsieur [L] [Z], et à tout occupant de son chef, un délai de SIX mois, soit jusqu'au 4 mars 2025 inclus, pour se maintenir dans les lieux situés [Adresse 4] ;

DIT que Monsieur [L] [Z], ainsi que tout occupant de son chef, devra quitter les lieux le 4 mars 2025 au plus tard, faute de quoi la procédure d'expulsion, suspendue pendant ce délai, pourra être reprise ;

DIT qu'à défaut de paiement à son terme de l'indemnité d'occupation courante telle que fixée par jugement rendu le 4 avril 2024 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Aubervilliers, Monsieur [L] [Z] perdra le bénéfice du délai accordé et la SA d'HLM interprofessionnelle de la région parisienne pourra reprendre la mesure d'expulsion ;

DEBOUTE la SA d'HLM interprofessionnelle de la région parisienne de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [L] [Z] aux entiers dépens ;

RAPPELLE que la présente décision est de plein droit assortie de l'exécution provisoire ;

Ainsi jugé et prononcé au Palais de Justice de Bobigny le 4 septembre 2024.

Le Greffier, Le juge de l'exécution,

Anissa MOUSSA Stéphane UBERTI-SORIN


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 8/section 1
Numéro d'arrêt : 24/05464
Date de la décision : 04/09/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-04;24.05464 ?
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