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30/07/2024 | FRANCE | N°23/03713

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Chambre 02, 30 juillet 2024, 23/03713


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 02
N° RG 23/03713 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XEBZ


JUGEMENT DU 30 JUILLET 2024



DEMANDERESSE:

Mme [K] [O]
[Adresse 5]
[Localité 7]
représentée par Me Cécile CARRILLON, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEURS:

M. [P] [N], exerçant sous l’enseigne PRO RENOVATION [N]
[Adresse 2]
[Localité 6]
défaillant

S.A.R.L. EPSILON CONSEIL, prise en la personne de son liquidateur amiable M. [D] [H], en sa qualité d’assureur de M.[P] [N], exerçant sous l’ense

igne PRO RENOVATION [N], demeurant
[Adresse 1]
[Localité 8]
défaillant

S.A.S. LNA SOLUTIONS
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Clo...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 02
N° RG 23/03713 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XEBZ

JUGEMENT DU 30 JUILLET 2024

DEMANDERESSE:

Mme [K] [O]
[Adresse 5]
[Localité 7]
représentée par Me Cécile CARRILLON, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEURS:

M. [P] [N], exerçant sous l’enseigne PRO RENOVATION [N]
[Adresse 2]
[Localité 6]
défaillant

S.A.R.L. EPSILON CONSEIL, prise en la personne de son liquidateur amiable M. [D] [H], en sa qualité d’assureur de M.[P] [N], exerçant sous l’enseigne PRO RENOVATION [N], demeurant
[Adresse 1]
[Localité 8]
défaillant

S.A.S. LNA SOLUTIONS
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Clotilde HAUWEL, avocat au barreau de LILLE, Me Saadia ESSAKHI, avocat au barreau de NIMES

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Claire MARCHALOT, Vice Présidente
Assesseur : Sarah RENZI, Juge
Assesseur : Maureen DE LA MALENE, Juge
Greffier : Dominique BALAVOINE, Greffier

DÉBATS

Vu l’ordonnance de clôture en date du 22 Mars 2024.

A l’audience publique du 21 Mai 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 30 Juillet 2024.

Vu l’article 804 du Code de procédure civile, Sarah RENZI, juge préalablement désigné par le Président, entendu en son rapport oral, et qui, ayant entendu la plaidoirie, en a rendu compte au Tribunal.

JUGEMENT : réputé contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 30 Juillet 2024 par Claire MARCHALOT, Présidente, assistée de Dominique BALAVOINE, Greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [K] [O] est propriétaire d’une maison à usage d’habitation située [Adresse 5] à [Localité 7].

Par devis en date du 15 octobre 2017, Madame [K] [O] a confié à la société Dupont Couverture la réalisation de travaux portant sur la réfection de la toiture de l’extension de sa maison.

Les travaux ont été réalisés par Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] et assuré auprès de la société Epsilon conseil, pour un montant de 13.800 euros hors taxes, intégralement réglé le 27 novembre 2017.

Se plaignant de désordres consistant notamment en des infiltrations d’eau, Madame [K] [O] a fait assigner Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] et la société LNA Solutions, courtier en assurances, devant le juge des référés par actes d’huissier des 14 et 15 novembre 2019.

Par ordonnance du 17 janvier 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille a ordonné une expertise judiciaire et l’a confiée à Monsieur [M].

Il a déposé son rapport le 30 mai 2020.

Par actes d’huissier délivrés les 19 et 20 octobre 2020, Madame [K] [O] a fait assigner Monsieur [P] [N] et la société LNA Solutions devant le tribunal judiciaire de Lille.

La société Epsilon conseil a fait l’objet d’une liquidation amiable, et Monsieur [D] [H] a été désigné en qualité de liquidateur amiable.

Par acte d’huissier délivré le 17 mai 2021, Madame [K] [O] a attrait dans la cause la société Epsilon conseil, prise en la personne de son liquidateur amiable, Monsieur [D] [H], en sa qualité d’assureur de Monsieur [P] [N].

Par ordonnance du 16 septembre 2022, l’affaire a fait l’objet d’une radiation. Elle a été réinscrite sous le numéro de RG 23/3713 suite aux conclusions récapitulatives prises par Madame [K] [O] le 14 mars 2023.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives, notifiées par voie électronique le 17 novembre 2023, Madame [K] [O] sollicite, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, et L.242-1 et suivants du code des assurances, de :
prononcer la jonction de la présente procédure avec la procédure ayant pour n° RG20/07132 actuellement pendante devant le Tribunal judiciaire de LILLE, condamner Monsieur [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N], à lui payer :
- 1.500 euros pour la mise hors d’eau de la couverture,
- 100 euros par mois pour le préjudice de jouissance de la pièce à vivre, et ceci jusqu’à la parfaite indemnisation des travaux de mise hors d’eau de cette pièce,
- 300 euros pour le préjudice de jouissance lié à l’inhabitabilité du logement durant les quinze jours de travaux de reprise,

- 500 euros pour les frais de protection des biens, déplacement des biens et nettoyage,
- 1.500 euros pour la reprise des désordres de plâtrerie,
- 50 euros par mois depuis le mois de novembre 2017, et ceci jusqu’à parfait paiement des travaux de remise en état, au titre du préjudice lié à la surconsommation d’énergie,
- 20.000 euros au titre des travaux de reprise,
- 3.000 euros au titre des frais de maîtrise d’œuvre.

condamner la société Epsilon, prise en la personne de son liquidateur amiable Monsieur [D] [H], à garantir Monsieur [N] de l’ensemble de ses condamnations, condamner la société LNA Solutions à garantir Monsieur [N] de l’ensemble de ses condamnations, sous les réserves exprimées, condamner Monsieur [N], la société EPSILON Conseil, prise en la personne de son liquidateur amiable Monsieur [D] [H], et la société LNA Solutions à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, en ce compris les frais de l’expertise judiciaire qui s’élèvent à la somme de 4.006,03 euros, ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 26 mai 2023, la société LNA Solutions sollicite, au visa des article L.114-1 du code des assurances et L.124-3 du code des assurances, de :
juger qu’elle s’en rapporte à justice sur la demande de jonction formulée ;débouter Madame [K] [O] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;prononcer sa mise hors de cause ;condamner Madame [K] [O] à lui payer à la SAS Les Nouvelles Assurances la somme de 5000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.juger n’y avoir lieu à exécution provisoire de droit.
Monsieur [P] [N], assigné à étude, et Monsieur [L] [H] pris en sa qualité de liquidateur amiable de la société Epsilon Conseil, cité selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile, n’ont pas constitué avocat. Il sera par conséquent statué par décision réputée contradictoire conformément aux dispositions de l’article 474 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure est intervenue au 22 mars 2024 et l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 21 mai 2024. Elle a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 30 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

En vertu de l’article 472 du code de procédure civile si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande de jonction
En vertu de l’article 367 du code de procédure civile, Le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.

En l’espèce, l’affaire enregistrée sous le numéro de répertoire général 20/07132 n’est pas pendante mais a été clôturée à l’occasion de la radiation ordonnée par le juge de la mise en état du 16 septembre 2022. L’affaire a été réinscrite sous un nouveau numéro de répertoire général – le 23/3713 – suite aux conclusions du 14 mars 2023.

La demande de jonction est, par conséquent, sans objet.

Sur les demandes de condamnation formées par Madame [O]
Madame [O] sollicite que soit engagée la garantie décennale de Monsieur [N], au motif qu’il n’a pas achevé les travaux de rénovation de sa toiture, et que les travaux effectués sont entachés de désordres compte tenu, notamment, de la présence d’infiltrations.

Sur la réception
L’article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère.
A titre liminaire, il convient de rappeler que la garantie décennale ne trouve à s'appliquer que dans l'hypothèse où l'ouvrage a été réceptionné par le maître de l'ouvrage.
L’article 1792-6 du code civil définit la réception comme « l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement. ».

Il est admis que la réception peut être tacite, lorsque la prise de possession manifeste une volonté non équivoque d’accepter l’ouvrage.

Il est également admis que le paiement de l’intégralité du prix et la prise de possession par le maître de l’ouvrage valent présomption de réception tacite.

*

En l’espèce, Madame [K] [O] a réglé l’intégralité du prix de la réfection de la toiture de son extension le 27 novembre 2017, et ce alors que la prise de possession de l’ouvrage est caractérisée.

Ce faisant, elle a manifesté une volonté non équivoque d’accepter l’ouvrage à cette date et ce indépendamment du fait qu’elle ait inscrit la mention « sous réserves » en pied de facture. En effet, cette mention doit s’analyser comme la présence de réserves à la réception, à savoir la présence de finitions non exécutées, et plus précisément l’absence d’étanchéité apposée sur l’habillage en rive visible à la jonction des murs extérieurs et de la toiture.

Il convient dès lors de considérer qu’une réception tacite a eu lieu, avec réserves, le 27 novembre 2017.

Sur la nature, l’origine et la qualification des désordres
Madame [K] [O] soutient que les travaux effectués par Monsieur [P] [N] n’ont pas été achevés et que les travaux effectués sont entachés de désordres, caractérisés par des infiltrations d’eau dans les pièces situées dans l’extension objet des travaux.

En l’espèce, à défaut de devis de cette entreprise, il résulte de la facture émise le 27 novembre 2017 par Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N], que ce dernier s’est engagé à effectuer notamment la dépose de l’ancienne couverture, la pose d’une charpente avec création d’un châssis, et la pose d’une terrasse zinc de 65m2.

A compter de mai 2018, Madame [K] [O] s’est plainte d’infiltrations d’eau dans son extension. Elle a par conséquent, avant même de solliciter la désignation d’un expert judiciaire, envoyé plusieurs courriers à Monsieur [P] [N] et à la société LNA Solutions entre mai et octobre 2018. Elle a également mandaté un huissier de justice lequel a constaté, par procès-verbal du 24 septembre 2018, de nombreux désordres, tout comme le cabinet Eurexo, expert mandaté par sa protection juridique le 29 mars 2019.

Dans son rapport remis le 30 mai 2020, l’expert judiciaire relève une série de désordres affectant la toiture de l’extension, à savoir : la pose des chevrons à plat et non à champs ; la présence importante d’humidité en sous face du support bois de la couverture ; la présence importante d’infiltrations d’eau sur les faux plafonds posés sous le support bois de la couverture ; l’absence d’étanchéité à l’eau et à l’air des rives posées ; les dégradations importantes des rives ; l’absence d’étanchéité contre le mitoyen ; la fixation sommaire des éléments de charpente ; et la pente nulle de la couverture zinc.

L’expert attribue la cause de ces désordres à des défauts d’exécution de la part de l’entrepreneur, Monsieur [P] [N].

Ainsi, il relève notamment que l’entrepreneur a posé les chevrons à plat et non à champs comme l’exigent les règles de l’art. Il indique encore que Monsieur [P] [N] n’a pas posé de solins, de bardage ou d’enduit pour assurer l’étanchéité avec le mur mitoyen, et a utilisé des rives en bois, non adaptées à l’usage qui en a été fait. Les rives en bois ont été fixées sommairement entre le haut de la maçonnerie et la charpente bois de la couverture zinc, sans étanchéité ni à l’air, ni à l’eau, des jours étant visibles sur les photographies versées au dossier. Les intempéries ont dégradé ces matériaux inadaptés, en provoquant des décollements, des courbures, et des pourrissements du bois qui constitue les rives. L’expert relève encore que la pente de la couverture en zinc ne répond pas aux règles de l’art en ce qu’une pente minimale de 5% aurait dû être respectée, tandis que la pente a été mesurée en l’espèce à 0,04%.

L’ensemble de ces éléments entraîne la présence d’humidité et de moisissures sur le support bois de la couverture, ainsi que la présence d’humidité et de traces d’infiltrations d’eau sur les faux plafonds des pièces situées dans l’extension.

Ces désordres, apparus à la faveur des épisodes de pluie postérieurs à la réception de l’ouvrage, rendent nécessairement l’ouvrage impropre à sa destination.

Ils relèvent par conséquent de la garantie décennale au sens de l’article 1792 du code civil.

Sur la responsabilité de Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N], en sa qualité de constructeur
L'article 1792-1 du code civil dispose qu’est réputé constructeur de l'ouvrage :
1° Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ;
2° Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ;
3° Toute personne qui, bien qu'agissant en qualité de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, accomplit une mission assimilable à celle d'un locateur d'ouvrage.

S’agissant d’une responsabilité de plein droit, la mise en œuvre de la responsabilité décennale des constructeurs suppose uniquement l’existence d’un lien d’imputabilité entre le dommage constaté et l’activité des personnes réputées constructeurs.

En l’espèce, Monsieur [P] [N] a effectué les travaux de rénovation de la toiture de l’extension de l’habitation de Madame [K] [O] comme cela résulte de la facture produite aux débats.

Les désordres à l'origine du préjudice subi par la demanderesse sont imputables à l'activité de ce dernier.

Sur la réparation des préjudices
Le régime de la garantie décennale prévu aux articles 1792 et suivants du code civil et les régimes de responsabilités de droit commun visent à rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime, aux dépens du responsable, dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était point produit. Ce principe de réparation intégrale connaît toutefois une limite, celle de ne pas autoriser l’enrichissement sans cause du maître de l'ouvrage.

Au titre de la mise hors d’eau de la couverture
Madame [K] [O] sollicite la condamnation de Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N] à lui payer la somme de 1.500 euros à ce titre.

En l’espèce, l’expert judiciaire relève l’absence d’étanchéité de la charpente et de la couverture. Il souligne qu’une intervention rapide est nécessaire pour limiter l’aggravation des désordres et préconise pour cela qu’un système de mise hors d’eau soit prévu, par exemple à l’aide de bâches. Il estime ce poste de préjudice à la somme de 1.500 euros TTC.

Il convient de faire droit à cette demande.

Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N], sera condamné à payer cette somme à Madame [K] [O].

Au titre des travaux de reprise
Madame [K] [O] sollicite la condamnation de Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N] à lui payer la somme de 20.000 euros à ce titre.

Il résulte du rapport d’expertise que l’unique moyen de mettre fin aux désordres est de déposer et reposer l’intégralité de la couverture.

Quatre devis ont été fournis par la demanderesse pour des montants allant de 14.539,02 euros TTC à 19.880,72 euros TTC. Toutefois, dans la mesure où ils ne comprennent pas de mission de maître d’œuvre considérée comme nécessaire par l’expert judiciaire, ce dernier n’a pas pris position sur ces devis, tout en estimant le montant des travaux à la somme de 20.000 euros TTC.

Il convient de faire droit à cette demande.

Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N], sera condamné à payer cette somme à Madame [K] [O].

Au titre des frais de maîtrise d’œuvre
Madame [K] [O] sollicite la condamnation de Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N] à lui payer la somme de 3.000 euros à ce titre.

L’expert judiciaire estime qu’un maître d’œuvre doit être missionné pour les phases de conception, d’étude et de suivi des travaux, et estime ses honoraires à 3.000 euros TTC.

Il convient dès lors de faire droit à cette demande.

Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N], sera condamné à payer cette somme à Madame [K] [O].

Au titre de la reprise des plâtreries
Madame [K] [O] sollicite la condamnation de Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N] à lui payer la somme de 1.500 euros à ce titre.

L’expert judiciaire relève la dégradation des faux plafonds des pièces situées dans l’extension objet des travaux litigieux. Il estime la préparation des supports et la mise en peinture des murs et plafonds à la somme de 1.500 euros TTC.

Il convient dès lors de faire droit à cette demande.

Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N], sera condamné à payer cette somme à Madame [K] [O].

Au titre des préjudices de jouissance
Madame [K] [O] sollicite la condamnation de Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N] à lui payer la somme de :
- 100 euros par mois pour le préjudice de jouissance de la pièce à vivre, et ceci jusqu’à la parfaite indemnisation des travaux de mise hors d’eau de cette pièce,
- 300 euros pour le préjudice de jouissance lié à l’inhabitabilité du logement durant les quinze jours de travaux de reprise.

En l’espèce, l’expert judiciaire préconise la dépose et la repose de la charpente et de la couverture pour remédier aux désordres. Or, l’extension de l’habitation de Madame [K] [O] abrite les pièces de vie, à savoir la pièce principale, la cuisine et les sanitaires.

Il estime par ailleurs les travaux de reprise à quinze jours, et évalue à 300 euros TTC le montant du préjudice de jouissance induit pendant cette période.

Il sera fait droit à cette demande.

S’agissant du préjudice de jouissance de la pièce à vivre dans l’attente de la mise hors d’eau de la toiture, il est relevé que l’expert n’en fait pas état et ne le compte pas parmi les chefs de préjudice.

Pour autant, il résulte du rapport d’expertise que les principales pièces de vie se situent dans l’extension objet des travaux litigieux, que les désordres sont importants et ont entraîné un pourrissement de la charpente en bois, outre le fait que la couverture n’est étanche ni à l’air, ni à l’eau. L’expert estime, dans son rapport du 30 mai 2020, les travaux urgents.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, il est indéniable qu’il existe un préjudice de jouissance, caractérisé par l’impossibilité pour Madame [K] [O] d’user normalement de ses pièces de vie depuis le 28 mai 2018, date de son premier courrier faisant état de désordres. Toutefois, dans la mesure où elle ne produit aucun élément récent permettant d’attester de l’actualité de ce trouble, il convient de limiter la période d’indemnisation du 28 mai 2018, jusqu’au jour du rapport d’expert soit le 30 mai 2020.

Ce chef de préjudice, estimé à 100 euros par mois, sera par conséquent indemnisé à hauteur de 2.400 euros.

Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N], sera condamné à payer ces sommes à Madame [K] [O].

Au titre des frais de protection des biens, déplacement des biens et nettoyage
Madame [K] [O] sollicite la condamnation de Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N] à lui payer la somme de 500 euros à ce titre.

En l’espèce, ces prestations sont justifiées par les travaux de reprise de la charpente mais également des plâtreries. L’expert judiciaire les estime à la somme de 500 euros.

Il convient de faire droit à cette demande.

Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N], sera condamné à payer cette somme à Madame [K] [O].

Au titre de la surconsommation d’énergie
Madame [K] [O] sollicite la condamnation de Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N] à lui payer la somme de 50 euros par mois depuis le mois de novembre 2017, et ceci jusqu’à parfait paiement des travaux de remise en état à ce titre.

En l’espèce, il résulte du rapport d’expertise que la charpente posée par Monsieur [P] [N] n’est étanche ni à l’eau, ni à l’air. Des jours entre les rives sont visibles sur les photographies. Ces circonstances entraînent nécessairement une surconsommation d’énergie, et ce d’autant que l’extension abrite les pièces de vie de Madame [K] [O]. Cette dernière a produit, dans le cadre de l’expertise judiciaire, le tableau de bord de sa consommation de gaz dont il résulte que sa régularisation au 30 janvier 2017 s’élevait à 372,03 euros, tandis qu’elle s’élevait en janvier 2018 et décembre 2018 respectivement à 410,92 euros et 712,86 euros. Elle impute cette augmentation importante aux désordres liés à l’absence d’étanchéité de la couverture.

Il convient de considérer le point de départ de cette surconsommation d’énergie au jour du premier courrier émis par Madame [K] [O], soit le 28 mai 2018, et ce jusqu’au jour du dépôt du rapport, soit le 30 mai 2020, dans la mesure où rien ne permet de déterminer que ce préjudice est encore actuel.

Il convient par ailleurs d’évaluer ce préjudice à la somme de 25 euros par mois, soit 600 euros.

Monsieur [P] [N], exerçant sous l’enseigne Pro Rénovations [N], sera condamné à payer cette somme à Madame [K] [O].

Sur les autres demandes formées par Madame [K] [O] A la lecture du dispositif de ses dernières écritures, il apparaît que Madame [K] [O] sollicite de voir « condamner la société Epsilon, prise en la personne de son liquidateur amiable Monsieur [D] [H], à garantir Monsieur [N] de l’ensemble de ses condamnations » et voir « condamner la société LNA Solutions à garantir Monsieur [N] de l’ensemble de ses condamnations, sous les réserves exprimées ».
Ces demandes ne s’analysent pas en des actions directes ouvertes, par l’article L.124-3 du code de assurances, au tiers lésé à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable et seront rejetées.

Sur les demandes accessoires
Sur les dépens
L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l’espèce, il y a lieu de condamner Monsieur [P] [N] et la compagnie Epsilon Conseil à payer à Madame [K] [O] aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire.

Sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
En vertu de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En l’espèce, il y a lieu de condamner Monsieur [P] [N] et la compagnie Epsilon Conseil à payer à Madame [K] [O] la somme de 3.000 euros en application des dispositions précitées.

La demande de Madame [K] [O] à l’encontre de la société LNA Solutions sera rejetée, compte tenu de la mise hors de cause de cette dernière.

Il convient, en équité, de débouter la société LNA de sa demande formée à ce titre à l’encontre de Madame [K] [O].

Sur l’exécution provisoire
L'article 514 du code de procédure civile dispose que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

L'article 514-1 du même code précise que le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, au regard de la nature de l'affaire, et des condamnations prononcées, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire, comme le sollicite la société LNA Solutions.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe de la juridiction, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

DIT que la demande de jonction est sans objet ;

MET la société LNA Solutions hors de la cause ;

REJETTE la demande de Madame [K] [O] tendant à voir l’ensemble des condamnations prononcées à l’encontre de Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] garanties par la société LNA Solutions  ;

REJETTE la demande de Madame [K] [O] tendant à voir l’ensemble des condamnations prononcées à l’encontre de Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] garanties par la compagnie Epsilon Conseil ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de 1.500 euros TTC au titre de la mise hors d’eau de la couverture ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de 20.000 euros TTC au titre des travaux de reprise ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de 3.000 euros TTC au titre des frais de maîtrise d’œuvre ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de 1.500 euros TTC au titre de la reprise des plâtreries ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de 300 euros TTC au titre de l’indemnisation du préjudice de jouissance lié à l’inhabitabilité du logement pendant les travaux de reprise ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de 2.400 euros au titre de l’indemnisation du préjudice de jouissance du fait des désordres ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de 500 euros TTC au titre des frais de protection des biens, déplacement des biens et nettoyage ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de 600 euros TTC au titre de la surconsommation d’énergie ;

DÉBOUTE Madame [K] [O] du surplus de ses demandes indemnitaires ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] et la compagnie Epsilon Conseil prise en la personne de son liquidateur amiable à payer à Madame [K] [O] la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE Madame [K] [O] de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à l’encontre de la société LNA Solutions ;

DÉBOUTE la société LNA Solutions de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à l’encontre de Madame [K] [O] ;

CONDAMNE Monsieur [P] [N] exerçant sous l’enseigne Pro Rénovation [N] et la compagnie Epsilon Conseil prise en la personne de son liquidateur amiable aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

Dominique BALAVOINE Claire MARCHALOT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Chambre 02
Numéro d'arrêt : 23/03713
Date de la décision : 30/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-30;23.03713 ?
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