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02/08/2024 | FRANCE | N°22/01912

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Chambre 01, 02 août 2024, 22/01912


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 01

N° RG 22/01912 - N° Portalis DBZS-W-B7G-V33I


JUGEMENT DU 02 AOUT 2024



DEMANDERESSE :

Mme [V] [L]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Jérôme DOUIN, avocat au barreau de LILLE



DÉFENDERESSE :

E.U.R.L. PAUSE DEJ’LICE,
immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n°529887358, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Sylvain STRIDE,

avocat au barreau de LILLE



COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Aurélie VERON, Vice-présidente, statuant en qualité de Juge Unique, en applicati...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 01

N° RG 22/01912 - N° Portalis DBZS-W-B7G-V33I

JUGEMENT DU 02 AOUT 2024

DEMANDERESSE :

Mme [V] [L]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Jérôme DOUIN, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSE :

E.U.R.L. PAUSE DEJ’LICE,
immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n°529887358, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Sylvain STRIDE, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Aurélie VERON, Vice-présidente, statuant en qualité de Juge Unique, en application de l’article R 212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire,

Greffier : Benjamin LAPLUME,

DÉBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 05 Octobre 2023 ;

A l’audience publique du 15 Avril 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 10 Juin 2024 puis prorogé pour être rendu le 02 Août 2024

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 02 Août 2024, et signé par Aurélie VERON, Présidente, assistée de Benjamin LAPLUME, Greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 1er octobre 2007, Mme [V] [L] a donné à bail à la S.A.R.L. Noblet Diffusion des locaux situés [Adresse 1] à [Localité 2] pour une durée de neuf ans à compter du 1er octobre 2007.

Par acte du 16 février 2011, le fonds de commerce a été cédé, en ce compris le droit au bail, à la SARL CD Pâtes devenue l'EURL Pause Dej'Lice en 2017.

Par acte extrajudiciaire du 30 juillet 2019, la société Pause Dej'Lice a sollicité le renouvellement du bail. Faute d'opposition manifestée par Mme [L], le bail a été renouvelé.

Par courrier du 22 juin 2020, le conseil de Mme [L] demandait le retrait des climatiseurs installés au-dessus du local et invitait le preneur à respecter la destination des lieux.

Par courrier du 30 juillet 2020, le conseil de la société Pause Dej'Lice s'y opposait.

Par exploit d’huissier délivré le 2 février 2022, Mme [V] [L] a assigné l'EURL Pause Dej'Lice devant le tribunal judiciaire de Lille aux fins de résiliation du bail.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 5 mai 2023, Mme [V] [L] sollicite de la juridiction de :

Déclarer la société « PAUSE DEJ’LICE » mal fondée,
La Débouter de l’ensemble de ses demandes, fins, et conclusions,
En conséquence,

Prononcer la résiliation bail commercial aux torts exclusifs du preneur ;
Ordonner en conséquence que dans la quinzaine de la signification du Jugement à intervenir, la société « PAUSE DEJ’LICE » sera tenue de délaisser les lieux, et que faute par elle de le faire, elle sera autorisée à la faire expulser ainsi que tous occupants de son chef, avec au besoin l'aide et l'assistance de la force publique ;
Fixer au montant du loyer outre les charges, le montant de l'indemnité d'occupation jusqu'au jour de l'expulsion effective de la société « PAUSE DEJ’LICE » ainsi que tous occupants de son chef ;
Condamner la société « PAUSE DEJ’LICE » à payer cette indemnité jusqu’au jour de son expulsion définitive, et de l’expulsion définitive de tous occupants de son chef ;
La Condamner à payer une somme de 4 000 € à titre de dommages et intérêts ;
La condamner au paiement d'une somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens de la procédure, outre les frais du constat de Maître [G] [P], huissier de justice à [Localité 3] ;
Dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 6 juillet 2023, l'EURL Pause Dej'Lice s’oppose aux demandes formées à son encontre. Elle demande à la juridiction de :

A titre liminaire,

Constater que la bailleresse est déchue de toute contestation au titre de l’activité exploitée dans les lieux loués en application de l’article L.145-47 du code de commerce;
Constater qu'elle a accepté sans réserve le renouvellement de bail suite à la demande du 30 juillet 2019;
La Débouter en conséquence de ses demandes, fins et conclusions à ce titre ;

A titre principal,

Déclarer que l’activité exploitée dans les lieux loués est conforme au bail commercial liant les parties ;
Déclarer que l’installation des deux climatiseurs par le preneur ne saurait justifier la résiliation judiciaire du bail commercial ;
A titre reconventionnel,

Condamner la bailleresse à faire réaliser à ses frais l’installation d’un système d’extraction de l’air pollué, et lui ordonner de faire procéder aux travaux nécessaires sous 6 mois à compter de la décision à intervenir, sous peine d’astreinte de 1000 € par mois de retard ;
Ordonner la consignation des loyers jusqu’à l’accomplissement des travaux de mise aux normes des lieux loués par l’installation d’un système d’extraction de l’air.
Condamner Mme [L] à lui verser la somme de 7 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire ;
En tout état de cause :

Débouter la bailleresse de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
La Condamner à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens ;
Écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir, s’agissant de la demande en résiliation judiciaire du bail et en expulsion du preneur.

Il est renvoyé aux conclusions récapitulatives des parties pour un plus ample exposé des motifs conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture des débats est intervenue par ordonnance du 5 octobre 2023 avec fixation de l'affaire à l'audience du 15 avril 2024 à l'issue de laquelle la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 10 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, les demandes des parties tendant à voir le tribunal "constater", « déclarer » ou "dire et juger" ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31, 768 et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n'y a pas lieu de statuer sur celles ci.

I- Sur la résiliation du contrat de bail

Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

L’article 1353 du code civil dispose qu'il incombe à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver. Celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.

Selon l'article 1226 du même code, le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat. Lorsque l'inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent. Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution.

L'article 1227 du code civil dispose que la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice.

Selon l'article 1228 du même code, le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.

L'article 1728 dispose que le preneur est tenu de deux obligations principales :

1° D'user de la chose louée raisonnablement, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention;

2° De payer le prix du bail aux termes convenus.

En l'espèce, dans ses conclusions qui ne respectent pas les prescriptions de l'article 768 du code de procédure civile, Mme [L] évoque la violation par le preneur de ses obligations légales et contractuelles et semble, d'après la citation in extenso des courriers entre les avocats, se plaindre du non-respect de la destination contractuelle et de l'installation de deux climatiseurs sans autorisation.

A- Sur le non-respect de la destination contractuelle

Il est stipulé au contrat de bail la destination autorisée suivante :

« Fabrication et vente de pâtes fraiches alimentaires – vente de boissons ne nécessitant pas de licence IV – vente à emporter aux particuliers et livraison aux entreprises – prestations de services », laquelle correspond exactement à l'objet social du preneur initial Noblet Diffusion.

Il résulte du procès-verbal de constat d'huissier de justice du 14 décembre 2020, qu'outre des pâtes fraîches, la société Pause Dej'lice offrait à la vente des paninis, des salades, des desserts et divers plats tels que lasagnes, risottos, soupes... Le preneur produit par ailleurs en pièce 11 la carte du commerce qu'il exploite désormais sous l'enseigne « Le Festival Pizza » et qui comporte 17 pizzas pour 3 plats de pâtes et des desserts.

1° Sur la déchéance de la bailleresse de son droit à contester l'activité exercée

Aux termes de l'article L.145-47 du code de commerce, le locataire peut adjoindre à l'activité prévue au bail des activités connexes ou complémentaires. A cette fin, il doit faire connaître son intention au propriétaire par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, en indiquant les activités dont l'exercice est envisagé. Cette formalité vaut mise en demeure du propriétaire de faire connaître dans un délai de deux mois, à peine de déchéance, s'il conteste le caractère connexe ou complémentaire de ces activités. En cas de contestation, le tribunal judiciaire, saisi par la partie la plus diligente, se prononce en fonction notamment de l'évolution des usages commerciaux. Lors de la première révision triennale suivant la notification visée à l'alinéa précédent, il peut, par dérogation aux dispositions de l'article L.145-38, être tenu compte, pour la fixation du loyer, des activités commerciales adjointes, si celles-ci ont entraîné par elles-mêmes une modification de la valeur locative des lieux loués.

La société Pause Dej-Lice se prévaut d'un courrier daté du 27 mars 2018 adressé par son conseil à la bailleresse (pièce 4), lequel constituerait la lettre recommandée prévue à l'article L.145-47 pour faire connaître au bailleur son intention d'adjoindre des activités connexes ou complémentaires.

Or, il n'est pas justifié de l'accusé réception de ce courrier, de sorte qu'il n'est pas établi que le formalisme a été respecté. Il n'est pas davantage établi que la bailleresse en a eu connaissance, seul le conseil du preneur y faisant référence dans un courrier du 30 juillet 2020 (pièce 4 demandeur).

Dès lors qu'il n'est pas justifié du respect de la procédure de déspécialisation partielle par le preneur, aucune déchéance du droit du bailleur à contester l'adjonction d'activités ne peut être retenue.

De plus, il ne peut être déduit du fait que Mme [L] ait concouru à la cession du fonds de commerce par Noblet Diffusion à la société CD Pâtes en 2011, qu'elle avait connaissance de la vente de sandwichs, de paninis et de salades dans les locaux, alors que ledit acte de cession n'est pas produit, qu'il n'est pas établi que les statuts du cessionnaire lui aient été communiqués et qu'en toute hypothèse, la dénomination de la société « CD Pâtes » pouvait raisonnablement lui faire croire à un commerce de pâtes, conforme à la destination contractuelle.

Il sera rappelé que ce n'est que postérieurement à la cession, soit le 5 décembre 2017 (pièce 20 défendeur), que la dénomination sociale sera changée pour Pause Dej'Lice.

Par ailleurs, le fait que la bailleresse n'ait pas répondu à la demande de renouvellement du bail signifiée par acte extrajudiciaire du 30 juillet 2019, de sorte que le bail a été renouvelé, ne constitue pas davantage une renonciation à contester ou un acquiescement à la modification de la destination, puisqu'il n'est pas établi que Mme [L] avait connaissance à cette date de l'extension des denrées vendues dans le local.

En toute hypothèse, il sera rappelé que la tolérance du bailleur ne le prive en aucun cas de la possibilité de se prévaloir du non-respect de la clause de destination contractuelle.

Au total, Mme [L] n'est pas déchue de son droit à contester l'activité exercée par le preneur dans les locaux en application de l'article L. 145-47 du code de commerce.

2° Sur la conformité à la destination contractuelle

La clause relative à la destination contractuelle des locaux vise précisément les « pâtes fraiches », de sorte que les parties n'ont pas entendu prévoir la vente à emporter de tout produit de restauration rapide ou de type snacking, bien que ce type de clause soit courant, mais ont bien souhaité restreindre l'activité à la seule fabrication et vente de pâtes.

Il ne peut être sérieusement soutenu que les parties ont entendu englober dans la notion de « pâtes fraiches », tout type de produit à base de « pâte », soit également pâte à pizza, pâte à pain et donc sandwich, pâte à tarte etc. Le terme de « pâtes fraiches » correspond à un type de produit particulier communément appelé « pâtes », de type coquillettes, macaronis, spaghettis..., les pâtes fraiches s'opposant aux pâtes sèches.

Ainsi la destination contractuelle n'englobe pas les produits présentés sur la carte du commerce tels que constatés par l'huissier de justice, soit pour rappel, outre les pâtes fraiches, des salades, paninis, quiches, plats de saison tels que risotto, soupes, crêpes, desserts (pièce 5 demandeur), ou encore des pizzas (pièce 11 défendeur)

La société La Pause Dej'Lice soutient encore qu'il s'agit d'une activité incluse, qui si elle n'est pas expressément mentionnée dans le bail, l'est implicitement au regard des usages et de l'évolution du commerce.

Or, elle n'explique pas quelle est l'évolution des usages de la profession, l'évolution des techniques ou celle des besoins de la clientèle qui justifierait de considérer que l'ajout à la carte de sandwichs, paninis pizza etc. serait une évolution naturelle d'un commerce spécifique de vente de pâtes à emporter.

De plus, il sera relevé que lors du constat d'huissier en 2020, les alternatives aux pâtes représentaient environ la moitié de la carte. La pièce 11 de la défenderesse atteste que les plats de pâtes sont devenus tout à fait minoritaires sur la carte et que le commerce n'est plus signalisé comme un commerce de pâtes mais comme un snack de pizzas. Le preneur ne peut plus dans ces circonstances prétendre qu'il s'agit de la simple adjonction d'une nouvelle activité à l'activité initiale, puisqu'en réalité il s'agit davantage d'une substitution des pizzas aux plats de pâtes qui sont devenus accessoires.

Ainsi, il n'est pas établi que l'activité de vente de paninis, sandwichs, plats etc. et désormais de pizzas est une activité incluse dans la destination contractuelle en raison de l'évolution du commerce, de sorte que le preneur était autorisé à développer ce type d'activité.

3° Sur la faute contractuelle

Il résulte des développements précédents que le preneur a adjoint des activités non prévues et non incluses dans la destination contractuelle, sans que la procédure de déspécialisation partielle ou totale n'ait été respectée.

Cette adjonction d'activités dure depuis plusieurs années, à tout le moins depuis 2018.

En outre, la dernière évolution du commerce avec une vente quasi exclusive de pizzas caractérise un éloignement important de la destination contractuelle, et ce alors que la bailleresse manifeste depuis 2020 son opposition à l'élargissement de la gamme de produits vendus.

Dans ces conditions, le preneur a commis une faute d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du bail.

B- Sur les effets de la résiliation du bail

Compte tenu de la résiliation du bail, il convient d'ordonner l'expulsion du preneur à défaut de libération effective des locaux dans le mois de la signification de la présente décision, au besoin avec le concours de la force publique.

Le preneur sera par ailleurs redevable d'une indemnité d'occupation pour l'occupation des locaux à compter de la résiliation du bail jusqu'à leur libération effective.

Il convient de fixer l'indemnité d'occupation mensuelle au montant du loyer mensuel outre les charges.

II- Sur la demande de dommages-intérêts présentée par la bailleresse

Aux termes de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

D'après l'article 1231-2, les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé.

En vertu de l'article 1231-3, le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf lorsque l'inexécution est due à une faute lourde ou dolosive.

En l'espèce, Mme [L] argue d'un préjudice justifiant une indemnisation à hauteur de 4 000 euros sans préciser la nature du préjudice subi et sans produire aucune pièce à l'appui de sa demande.

Or, l'octroi de dommages-intérêts en raison du manquement contractuel nécessite non seulement la preuve d'une faute, mais encore celle d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.

Dès lors, faute de justifier d'un préjudice lié au non-respect de la destination contractuelle ou d'un préjudice lié à l'installation prétendument fautive des climatiseurs, Mme [L] sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

III- Sur les demandes au titre du manquement du bailleur à ses obligations

Compte tenu du prononcé de la résiliation, l'EURL la Pause Dej'Lice n'est plus fondée à solliciter la réalisation de travaux par le bailleur.

En conséquence, ses demandes tendant à l'installation d'un système d'extraction de l'air pollué sous astreinte et à la consignation des loyers sont sans fondement et seront rejetées.

IV Sur la demande de dommages-intérêts présentée par le preneur

Sur le fondement de l’article 1240 du code civil, l’exercice d’une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant justifier l’octroi de dommages et intérêts que dans le cas de la mauvaise foi ou de l’intention de nuire.

En l'espèce, l'EURL Pause Dej'Lice ne démontre pas que Mme [V] [L] a agi de mauvaise foi ou avec l'intention de nuire, d'autant qu'il est fait droit à sa demande de résiliation du bail aux torts exclusifs du preneur. En conséquence, elle sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

V- Sur les demandes accessoires

1. Sur l'exécution provisoire

Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Rien ne justifie d'écarter l'exécution provisoire, celle-ci étant compatible avec la nature et l'issue du litige.

2. Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'EURL Pause Dej'Lice succombant au principal, elle supportera les dépens de la présente instance en ce compris le coût du constat d'huissier et sera redevable d’une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile qui sera justement fixée à la somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par décision contradictoire et en premier ressort,

PRONONCE la résiliation du bail commercial liant Mme [V] [L] à l'EURL Pause Dej'Lice aux torts exclusifs du preneur ;

ORDONNE l'expulsion de l'EURL Pause Dej'Lice et de tous occupants de son chef de l'immeuble loué sis [Adresse 1] à [Localité 2] à défaut de libération volontaire effective dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision et avec le concours de la force publique si nécessaire ;

CONDAMNE l'EURL Pause Dej'Lice à une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer mensuel outre les charges à compter de la résiliation du bail, soit à compter de la présente décision et jusqu'à la libération complète des locaux avec remise des clés ;

DÉBOUTE Mme [V] [L] de sa demande de dommages-intérêts ;

DÉBOUTE l'EURL Pause Dej'Lice de sa demande d'installation d'un système d'extraction de l'air pollué sous astreinte ;

La DEBOUTE de sa demande de consignation des loyers ;

La DÉBOUTE de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE l'EURL Pause Dej'Lice à payer à Mme [V] [L] la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE l'EURL Pause Dej'Lice de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit ;

DÉBOUTE Mme [V] [L] de ses autres demandes ;

DÉBOUTE l'EURL Pause Dej'Lice de ses autres demandes ;

CONDAMNE l'EURL Pause Dej'Lice aux dépens de la présente instance, en ce compris le coût du constat d'huissier de Me [G] [P] du 14 décembre 2020.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

Benjamin LAPLUME Aurélie VERON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Chambre 01
Numéro d'arrêt : 22/01912
Date de la décision : 02/08/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-02;22.01912 ?
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