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14/06/2023 | FRANCE | N°21/02988

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Ct0196, 14 juin 2023, 21/02988


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre
3ème section

No RG 21/02988 -
No Portalis 352J-W-B7F-CT37S

No MINUTE :

Assignation du :
18 février 2021

JUGEMENT
rendu le 14 juin 2023
DEMANDERESSES

SYNDICAT DES FABRICANTS AVEYRONNAIS DU COUTEAU DE [Localité 4]
Mairie de [Localité 4]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

COMMUNE DE [Localité 4]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

représentées par Maître Arnaud LELLINGER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0112

DÉFENDERESSE

S.A.S. ACTIFORGE
[Adres

se 1]
[Adresse 1]

représentée par Maître Denis GANTELME de l'ASSOCIATION OLTRAMARE GANTELME MAHL, avocat au barreau de PARIS, avocats posutlant, vestiaire ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre
3ème section

No RG 21/02988 -
No Portalis 352J-W-B7F-CT37S

No MINUTE :

Assignation du :
18 février 2021

JUGEMENT
rendu le 14 juin 2023
DEMANDERESSES

SYNDICAT DES FABRICANTS AVEYRONNAIS DU COUTEAU DE [Localité 4]
Mairie de [Localité 4]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

COMMUNE DE [Localité 4]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

représentées par Maître Arnaud LELLINGER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0112

DÉFENDERESSE

S.A.S. ACTIFORGE
[Adresse 1]
[Adresse 1]

représentée par Maître Denis GANTELME de l'ASSOCIATION OLTRAMARE GANTELME MAHL, avocat au barreau de PARIS, avocats posutlant, vestiaire #R0032 et par Maître HORDOT de la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Jean-Christophe GAYET, premier vice-président adjoint
Linda BOUDOUR, juge
Arthur COURILLON-HAVY, juge

assistés de Lorine MILLE, greffière,

DÉBATS

A l'audience du 05 janvier 2023 tenue en audience publique devant Jean-Christophe GAYET et Linda BOUDOUR, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l'audience, et, après avoir donné lecture du rapport, puis entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 22 mars 2023, puis prorogé en dernier lieu au 14 juin 2023.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
___________________________

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

1. Le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] (ci-après SFACL), constitué en 2013, indique avoir pour objectif de protéger le couteau de [Localité 4] fabriqué en nord-Aveyron, de promouvoir et maintenir le savoir-faire des couteliers de cette région et de garantir l'origine géographique des couteaux de [Localité 4]. Il est composé de sept sociétés à responsabilité limitée.

2. La commune de [Localité 4] est située dans le département de l'Aveyron.

3. La société par actions simplifiée (ci-après SAS) Actiforge, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Saint-Étienne, a pour activité l'étude, la réalisation, la commercialisation et la représentation de tous produits à usage domestique et industriel et précise commercialiser, principalement via son site internet, des couteaux de type [Localité 4].

4. Elle est titulaire :
- de la marque semi-figurative française no4013824, déposée le 20 juin 2013 et modifiée le 3 janvier 2014 à l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), en classe 8 pour les "outils et instruments à main entraînés manuellement, coutellerie, fourchettes et cuillers, armes blanches, rasoirs tous les produits précités étant d'origine française ou fabriqués en France" :
- du modèle communautaire no008197107, déposé le 8 octobre 2020 et publié le 22 octobre 2020.

5. Estimant que la SAS Actiforge communiquait très largement sur internet, par le biais de la vente et de la promotion de ses produits, de nombreuses allégations fausses, approximatives et dénigrantes à l'encontre des couteliers de [Localité 4], de nature à tromper le consommateur et susceptibles de constituer une concurrence déloyale et parasitaire, le SFACL et la commune de [Localité 4] l'ont mise ne demeure de cesser ses agissements par courrier du 17 juin 2020.

6. Par réponse du 3 août 2020, la SAS Actiforge a contesté les allégations de tromperie des consommateurs et a retiré une vidéo de présentation historique de [Localité 4] de son site internet et accepté d'intervenir auprès d'un site marchand tiers pour lui demander de corriger sa présentation de ses produits.

7. Par courrier du 12 octobre 2020, le SFACL et la commune de [Localité 4] ont mis en demeure la SAS Actiforge de renoncer à sa marque semi-figurative française en raison de sa déchéance, ce que cette dernière refusait par réponse du 29 octobre 2020.

8. Par acte d'huissier du 18 février 2021, le SFACL et la commune de [Localité 4] ont fait assigner la SAS Actiforge devant ce tribunal en nullité et déchéance de sa marque semi-figurative française et en paiement de dommages et intérêts.
9. L'instruction a été close par ordonnance du 7 avril 2022 et l'affaire fixée à l'audience du 5 janvier 2023 pour être plaidée.

10. Par conclusions adressées le 13 juillet 2022 au juge de la mise en état, la SAS Actiforge a demandé la révocation de l'ordonnance de clôture en vue de produire la décision du 11 avril 2022 de l'INPI rejetant la demande d'indication géographique protégée formulée par le SFACL. Par conclusions notifiées le 7 septembre 2022, le SFACL et la commune de [Localité 4] se sont opposés à cette demande. Le juge de la mise en état a rejeté la demande par décision du 27 septembre 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

11. Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 29 mars 2022, le SFACL et la commune de [Localité 4] demandent au tribunal de :
- les déclarer recevables et fondés en leurs demandes ;
- déclarer la SAS Actiforge irrecevable, à tout le moins mal fondée, en toutes ses demandes, fins et conclusions, et l'en débouter purement et simplement ;
- dire et juger que la SAS Actiforge s'est rendue coupable d'actes de tromperie du consommateur ;
- dire et juger que la SAS Actiforge s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale et parasitaire à leur encontre ;
- prononcer la nullité de droits de la SAS Actiforge sur l'enregistrement de la marque semi-figurative française no4013824 pour l'ensemble des produits couverts, pour caractère trompeur et atteinte aux droits de ses membres et de la commune de [Localité 4] ;
- prononcer la déchéance des droits de la SAS Actiforge sur l'enregistrement de la marque semi-figurative française no4013824 pour l'ensemble des produits couverts, pour caractère trompeur ;
- prononcer la déchéance des droits de la SAS Actiforge sur l'enregistrement de la marque française no4013824 pour les produits pour lesquels un usage sérieux ne serait pas démontré, à l'expiration du délai légal de 5 ans à compter de la publication de son enregistrement au BOPI du 3 janvier 2014, soit à compter du 3 janvier 2019 ;
- prononcer la nullité du modèle communautaire no008197107 ;
- ordonner que la défenderesse justifie, dans le délai d'un mois de la signification du jugement à intervenir, de l'inscription de celui-ci au registre national des marques auprès de l'INPI, et à défaut autoriser le SFACL à faire inscrire ledit jugement ;
- interdire à la SAS Actiforge d'exploiter sous quelque forme et quelque support que ce soit (en ce compris sur des vidéos, brochures, catalogues, sites internet, applications mobiles sur tous types de systèmes d'exploitation (Ios, Android etc.), publications Instagram, Facebook ou tout autre réseau social et sur toutes chaînes de télévision) le terme [Localité 4] ou toute déclinaison, sous astreinte de dix mille (10 000) euros par infraction constatée et par jour de retard à compter d'un délai de cinq (5) jours suivant la signification du jugement à intervenir ;
- ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir, dans un délai de trois (3) jours à compter de la signification du jugement à intervenir et sous astreinte de dix mille (10 000) euros par jour de retard, sur les pages d'accueil du site internet www.couteau-[Localité 4].com, du compte Facebook https://www.facebook.com/Couteau-[Localité 4]-Actiforge- 408353919244089/ exploités par la SAS Actiforge, pendant le délai de un (1) mois ;
- ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir, accompagné d'un message objectif et explicatif, dans cinq (5) journaux ou revues au choix de la SAS Actiforge, en France ou à l'international, aux frais avancés par Actiforge, sans que le coût n'excède la somme de cinq mille (5000) euros hors taxes par insertion ;
- condamner la société Actiforge à payer aux demandeurs la somme de 150 000 euros, à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, sauf à parfaire ou compléter au vu des éléments dont la production interviendra en cours de procédure ;
- se réserver la liquidation des astreintes ordonnées aux termes du jugement à intervenir,
- condamner la SAS Actiforge aux entiers dépens d'instance et à payer aux demandeurs 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- prononcer l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

12. Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 28 mars 2022, la SAS Actiforge a conclu à :
- débouter le SFACL et la commune de [Localité 4] de l'intégralité de leurs demandes ;
- débouter le SFACL et la commune de [Localité 4] de leur demande d'annulation de ses droits sur l'enregistrement de la marque française no4013824 pour caractère trompeur ;
- déclarer irrecevable et infondée la demande d'annulation de ses droits sur l'enregistrement de la marque française no4013824 pour atteinte aux droits des membres du SFACL et de la commune de [Localité 4],
- débouter le SFACL et la commune de [Localité 4] de leur demande tendant à voir prononcer la déchéance de ses droits sur l'enregistrement de la marque française no4013824 pour caractère trompeur et absence d'usage sérieux,
- débouter le SFACL et la commune de [Localité 4] de leur demande de nullité du modèle communautaire no008197107 pour absence de nouveauté et caractère individuel et atteinte au nom [Localité 4] ;
- débouter le SFACL et la commune de [Localité 4] de leur demande tendant à lui interdire sous astreinte, d'exploiter sous quelque forme et quelque support que ce soit le terme [Localité 4],
- débouter le SFACL et la commune de [Localité 4] de leur demande tendant voir ordonner sous astreinte la publication du dispositif du jugement à intervenir sur son site internet et son compte Facebook ;
- débouter le SFACL et la commune de [Localité 4] de leur demande tendant à voir ordonner la publication du jugement à intervenir dans 5 journaux ou revues ;
- débouter le SFAC et la commune de [Localité 4] de leurs demandes de dommages et intérêts pour actes de concurrence déloyale et parasitisme ;
- condamner le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] (SFACL) ainsi que la commune de [Localité 4] à lui verser :
etgt; 15 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
etgt; 15 000 € à titre de participation sur le fondement de l'article 700 CPC,
- les condamner aux entiers dépens dont droit de recouvrement direct au profit de Me Gantelme, avocat, sur son affirmation de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
- écarter l'exécution provisoire de droit.

MOTIVATION

I - Sur la forclusion par tolérance de la marque semi-figurative française no4013824

Moyens des parties

13. La SAS Actiforge soutient que la demande en nullité de sa marque litigieuse, déposée le 20 juin 2013 et constamment exploitée depuis, est prescrite compte tenu de l'absence d'opposition des demandeurs à cette exploitation antérieurement au 18 février 2021.

14. Le SFACL et la commune de [Localité 4] avancent que la défenderesse ne démontre pas qu'ils aient eu connaissance de l'usage de cette marque depuis plus de cinq et l'avoir toléré et que la commune de [Localité 4] est légitime à préserver l'usage de son nom dans la perspective d'un intérêt commun.

Réponse du tribunal

15. Aux termes de l'article L.716-2-8 du code de la propriété intellectuelle, "le titulaire d'un droit antérieur qui a toléré pendant une période de cinq années consécutives l'usage d'une marque postérieure enregistrée en connaissance de cet usage n'est plus recevable à demander la nullité de la marque postérieure sur le fondement de l'article L.711-3, pour les produits ou les services pour lesquels l'usage de la marque a été toléré, à moins que l'enregistrement de celle-ci ait été demandé de mauvaise foi".

16. La tolérance de l'usage d'une marque postérieure suppose la connaissance de cet usage par le titulaire d'une marque antérieure (voir en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 28 mars 2006, no05-11.686).

17. L'existence d'une tolérance peut résulter des circonstances qui conduisent à considérer que le titulaire de la marque antérieure ne pouvait pas ignorer l'exploitation de la marque postérieure (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 5 juillet 2016, no14-18.540).

18. Le délai de tolérance s'apprécie au regard du temps écoulé entre la date à laquelle le titulaire de la marque première acquiert la connaissance de l'usage de la marque seconde, et celle de la délivrance par ses soins d'un acte interruptif de prescription (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 31 mai 2005, pourvoi no04-11.496 et 03-20.956).

19. Au cas présent, la SAS Actiforge verse au soutien de sa demande :
- une facture de création de son site internet etlt;couteau-[Localité 4].cometgt; du 31 mars 2011 (sa pièce no18)
- une facture de montage d'un film intitulé "[Localité 4]" du 30 juillet 2014 (sa pièce no19).

20. Toutefois, il ne ressort d'aucune de ces pièces que la marque semi-figurative française no4013824, que la SAS Actiforge a déposé le 20 juin 2013, figurait sur son site ou dans ce film à compter de cette date ou antérieurement.

21. Dès lors, la date à laquelle la SFACL ou la commune de [Localité 4] a eu connaissance, ou ne pouvait pas ignorer, l'exploitation de cette marque litigieuse n'est pas établie.

22. Ainsi, la SAS Actiforge ne démontre pas que le délai de tolérance de cinq ans de sa marque litigieuse était acquis à la date de l'assignation, le 18 février 2021.

23. Le moyen de la SAS Actiforge tiré de la forclusion par tolérance de la marque semi-figurative française no4013824 sera, en conséquence, rejetée.

II - Sur la demande en nullité de la marque semi-figurative française no4013824

II.1 - S'agissant du moyen tiré du caractère descriptif de la marque litigieuse

Moyens des parties

24. Le SFACL et la commune de [Localité 4] font valoir que la marque semi-figurative française no4013824 doit être annulée en raison de son caractère descriptif et de sa nature à tromper le public. Ils précisent que l'élément dominant de cette marque est l'élément verbal "[Localité 4]" en attaque dans une police de grande taille, faisant référence à la commune du même nom, célèbre pour ses couteaux, en sorte que cet élément est descriptif des produits désignés ; que l'élément figuratif est un sanglier purement décoratif ou évocateur de la chasse, donc descriptif des produits désignés ; que les éléments verbaux "Actiforge" et "France" sont également descriptifs, le préfixe "acti" évoquant immédiatement le terme "actif", descriptif des produits désignés qui sont des outils à main. Ils ajoutent que le consommateur des produits désignés ne présentant pas une attention spécifique, il sera amené à lier la marque et l'origine géographique des produits qu'elle désigne, laquelle n'est pas appropriable et est totalement descriptive.

25. La SAS Actiforge oppose que sa marque semi-figurative no4013824 est distinctive dans la mesure où elle associe plusieurs éléments verbaux, dont le signe "Actiforge" qui renvoie au secteur de la métallurgie et n'est pas descriptif pour des couteaux, à un élément graphique, un sanglier stylisé qui renvoie au monde de la nature et de la chasse et n'est pas particulièrement évocateur d'un couteau de poche.

Réponse du tribunal

26. En application de l'article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction applicable le 20 juin 2013, "le caractère distinctif d'un signe de nature à constituer une marque s'apprécie à l'égard des produits ou services désignés.
Sont dépourvus de caractère distinctif :
a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ;
b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l'époque de la production du bien ou de la prestation de service ;
c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle.
Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c, être acquis par l'usage".

27. Le caractère distinctif s'apprécie au jour du dépôt de la demande d'enregistrement auprès de l'INPI (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 1er avril 1997, no95-11.162).

28. L'exigence de distinctivité du signe se justifie par la fonction essentielle de la marque qui est de garantir au consommateur ou à l'utilisateur final l'identité d'origine du produit ou du service qu'elle désigne, en luipermettant de le distinguer sans confusion possible de ceux ayant une autre provenance. La perception du signe comme indicateur d'origine doit être immédiate et certaine. Les critères d'appréciation du caractère distinctif d'une marque, outre les produits ou services visés à son dépôt, sont notamment le territoire qu'elle concerne et la perception qu'en a le public pertinent.

29. Une marque est usuelle lorsque le signe qui la compose constitue, dans le langage courant ou professionnel, la façon de désigner le produit ou le service en cause (en ce sens cour d'appel de Paris, pôle 5 chambre 2, 9 octobre 2009, RG 08/02192).

30. En l'occurrence, il est rappelé que la marque semi-figurative française no4013824 a été enregistrée le 3 janvier 2014 à l'INPI, en classe 8 pour les "outils et instruments à main entraînés manuellement, coutellerie, fourchettes et cuillers, armes blanches, rasoirs tous les produits précités étant d'origine française ou fabriqués en France".

31. Elle est composée de l'élément verbal "[Localité 4]", placé en attaque, en caractères italiques imitant l'écriture manuscrite, dans une taille de caractères plus haute que les deux autres éléments verbaux "Actiforge" et "France", placés en dessous et en retrait à droite, en caractères d'imprimerie classiques, donnant ainsi au premier élément verbal un caractère dominant. Ce premier élément verbal est suivi d'un signe figuratif représentant un sanglier stylisé vu de profil.

32. Or, comme le souligne la SAS Actiforge elle-même, pour le consommateur de couteau de cuisine ou de poche, lequel ne se distingue pas du consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, le terme "[Localité 4]" désigne un type de couteau.

33. En effet, il ressort des définitions des dictionnaires produites par les parties que le terme "[Localité 4]" est un nom commun, dérivé du nom propre de la commune éponyme, tant pour le Robert qui le définit comme "couteau de poche" (pièce Actiforge no8) que pour le Larousse qui le définit comme "couteau de poche, fabriqué à [Localité 4], à manche légèrement recourbé et à lame allongée" ou pour l'encyclopédie Universalis qui mentionne "canif fabriqué dans la coutellerie de la ville de [Localité 4]" (pièces SFACL et [Localité 4] no33). Si ces pièces des parties sont datées de mai et août 2021, la circonstance que ces trois éditeurs tiennent ce terme pour un nom commun établit que cet usage était déjà courant dans la langue française depuis plusieurs années.

34. Il ressort, également :
- d'un sondage du 4 mai 2010 réalisé par la société TNS-Sofres que pour 92% de la population française le nom de "[Localité 4]" évoque un couteau (pièce SFACL et [Localité 4] no27)
- de la décision du 29 juin 2011 de la division d'annulation de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (devenu l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle) que "le caractère générique du terme "[Localité 4]" pour désigner un certain type de couteau ne fait pas de doute" (pièce SFACL et [Localité 4] no26)
- des propres conclusions du SFACL et de la commune de [Localité 4] que le mot ou le nom de [Localité 4] évoque spontanément un couteau pour 92% des français en 2010 (leurs conclusions page 19).

35. L'élément verbal dominant "[Localité 4]" de la marque semi-figurative française no4013824 est, pour toutes ces raisons, descriptif pour les produits qu'elle désigne.

36. Il en va, toutefois, différemment de l'élément figuratif du sanglier stylisé qui, s'il renvoie au monde de la nature et de la chasse et, dès lors, désigne indirectement les instruments couramment utilisés lors de la chasse ou pour des activités dans la nature, dont le couteau de poche, n'est, de ce fait, qu'évocateur des produits désignés par la marque litigieuse, ce que les multiples représentation de sangliers sur des lames ou manches de couteau de poche produits par les demandeurs ne font que confirmer (leur pièce no22).

37. Il en va de même de l'élément verbal "Actiforge", syntagme formé par les mots "active" et "forge", lesquels renvoient au mode de production des ustensiles commercialisés par la défenderesse. Toutefois, d'une part, cette référence ne désigne qu'indirectement les produits visés par la marque, d'autre part, l'inversion de l'adjectif et du nom par rapport à l'orthodoxie grammaticale du français et l'abréviation de l'adjectif "active" en "acti" pour désigner la forge, confèrent à cet élément verbal un caractère évocateur.

38. À l'inverse, l'élément verbal "France" renvoie à la nationalité de la société défenderesse ; il est, de ce fait, purement descriptif.

39. Il résulte de l'ensemble que la combinaison de ces éléments, par la présence de deux éléments verbaux évocateurs, mais non purement descriptifs, et de leur agencement, permet de distinguer la marque litigieuse de celle de tiers et, donc, de remplir la fonction essentielle de la marque.

40. Le moyen tiré du caractère descriptif de la marque semi-figurative française no4013824, pour désigner en classe 8 les "outils et instruments à main entraînés manuellement, coutellerie, fourchettes et cuillers, armes blanches, rasoirs tous les produits précités étant d'origine française ou fabriqués en France" sera, en conséquence, rejeté.

II.2 - S'agissant du caractère trompeur de la marque litigieuse

Moyens des parties

41. Le SFACL et la commune de [Localité 4] soutiennent que la marque semi-figurative française no4013824 doit être, également, annulée en raison de son caractère trompeur, compte tenu que le consommateur moyen sera amené à faire un lien entre la marque et l'origine géographique des produits qu'elle désigne, alors qu'aucun des produits commercialisés sous cette marque par la défenderesse ne provient de la commune de [Localité 4] et qu'elle ne démontre pas que les couteaux qu'elle vend soient essentiellement fabriqués à [Localité 8].

42. La SAS Actiforge réfute tout caractère trompeur de sa marque litigieuse, le terme "[Localité 4]" désignant un type de couteau et non une origine géographique, ce que plusieurs définitions de dictionnaires confirment, de même que le sondage que les demandeurs versent aux débats, les consommateurs associant spontanément le nom de [Localité 4] à un couteau ou des ustensiles de cuisine, non à une commune française. Elle considère le SFACL comme de mauvaise foi, l'essentiel de la production de couteaux laguioles étant produits dans le bassin de [Localité 8] et son président étant gérant d'une société basée à [Localité 8] qui commercialise des laguioles, dont le site internet mentionne qu'ils sont fabriqués à [Localité 8], tandis que les demandeurs affirment dans leurs écritures qu'ils seraient fabriqués à [Localité 4]. Elle revendique que le couteau [Localité 4] est historiquement fabriqué majoritairement dans le bassin thiernois, ce que l'enquête publique initiée sur la demande d'indication géographique du SFACL excluant cette zone géographique confirme, elle-même adhérant à l'association Couteau [Localité 4] Aubrac Auvergne qui a déposé une demande d'indication géographique concurrente incluant cette zone.

Réponse du tribunal

43. En application de l'article L.711-3 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction applicable le 20 juin 2013, "ne peut être adopté comme marque ou élément de marque un signe : (...) c) De nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service".

44. Ces dispositions du code de la propriété intellectuelle s'analysent à la lumière des dispositions de la directive 89/104 interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne selon laquelle, le caractère trompeur d'une marque suppose que la marque créé un risque de confusion dans l'esprit du consommateur moyen et d'établir l'existence d'une tromperie effective ou d'un risque suffisamment grave de tromperie du consommateur (en sens CJCE, 30 mars 2006, C-259/04, Elizabeth Emanuel, § 46 et 47).

45. L'existence d'une tromperie effective ou d'un risque suffisamment grave de tromperie ne peut s'apprécier qu'au regard des habitudes des consommateurs dans le domaine considéré (voir en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 18 septembre 2019, no17-27.974).

46. En l'espèce, les pièces produites par le SFACL et la commune de [Localité 4] n'établissent pas que l'élément dominant "[Localité 4]" renvoie à une notion d'origine géographique pour le consommateur d'ustensiles de cuisine ou de couteau de poche qui ne se distingue pas du consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

47. En effet, la commune de [Localité 4] n'est spontanément connue que de 7% des français en 2018 selon un sondage produit par le SFACL et la commune de [Localité 4] (leur pièce no27).

48. Par ailleurs, la ville de [Localité 8] est également renommée pour sa production de couteaux laguioles depuis plus d'un siècle, ce qui ressort de deux articles du Figaro et des Echos ou du site Wikipédia produits par la défenderesse (ses pièces no9, 10 et 11) et de la synthèse de l'enquête publique publiée par l'INPI sur la demande d'indication géographique déposée par le SFACL (sa pièce no25 page 4). Cette renommée de la ville de [Localité 8] pour la production de couteau [Localité 4] fonde, d'ailleurs, une demande concurrente d'indication géographique protégée déposée par l'association Couteau [Localité 4] Aubrac Auvergne dont la défenderesse est membre (sa pièce no32). La SAS Actiforge établit même que l'une des entreprises fabriquant ses couteaux laguioles à [Localité 8] est dirigée par le président du SFACL (ses pièces no12 et 13).

49. De plus, ainsi qu'il a été précédemment établi, le terme "[Localité 4]" est un couteau de poche dans la langue française, en sorte que l'usage de ce terme à titre d'élément verbal dans la marque litigieuse n'est pas susceptible de provoquer une tromperie effective ou d'un risque suffisamment grave de tromperie du consommateur.

50. Le moyen tiré du caractère trompeur de la marque semi-figurative française no4013824 sera, en conséquence, rejeté.

II.3 - S'agissant du moyen tiré de l'atteinte aux droits des membres du SFACL et de la commune de [Localité 4]

Moyens des parties

51. Le SFACL et la commune de [Localité 4] invoquent que la marque litigieuse porte atteinte aux dénominations sociales des membres du SFACL et au nom de la collectivité locale de [Localité 4] dont ils revendiquent l'antériorité, en ce que cette marque reprend indûment la dénomination [Localité 4] et, dès lors que la défenderesse ne fabrique pas ses couteaux à [Localité 4], provoque un risque de confusion chez le consommateur moyen.

52. La SAS Actiforge répond que la commune ne rapporte pas la preuve d'une atteinte à son nom, à son image ou à sa renommée par le dépôt de cette marque isolée et désignant la seule classe 8, non plus que les membres du SFACL qui, n'étant pas partie à l'instance, ne justifient ni d'un droit antérieur, ni d'un quelconque risque de confusion.

Réponse du tribunal

53. Selon l'article L.711-4 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction applicable le 20 juin 2013, "ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment : (...)
b) A une dénomination ou raison sociale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ; (...)
h) Au nom, à l'image ou à la renommée d'une collectivité territoriale".

54. Par application de l'article L.714-3 du même code, "est déclaré nul par décision de justice l'enregistrement d'une marque qui n'est pas conforme aux dispositions des articles L.711-1 à L.711-4".

55. L'article L.711-4 h) du code de la propriété intellectuelle n'ayant pas pour objet d'interdire aux tiers, de manière générale, de déposer en tant que marque un signe identifiant une collectivité territoriale, mais seulement de réserver cette interdiction au cas où résulte de ce dépôt une atteinte aux intérêts publics (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 23 juin 2009, no07-19.542).

56. En premier lieu, la seule pièce produite par le SFACL au titre de l'antériorité de ses droits sur la dénomination "[Localité 4]" est la fiche d'enregistrement de ce syndicat au répertoire Sirène qui mentionne son inscription en juin 2013 (pièce SFACL et [Localité 4] no1).

57. La marque semi-figurative française no4013824 ayant été déposée le 20 juin 2013, cette pièce est insuffisante à démontrer l'antériorité invoquée et, par conséquent, l'atteinte alléguée.

58. En second lieu, la seule circonstance que la marque litigieuse de la SAS Actiforge comporte l'élément verbal "[Localité 4]", pour désigner des "outils et instruments à main entraînés manuellement, coutellerie, fourchettes et cuillers, armes blanches, rasoirs tous les produits précités étant d'origine française ou fabriqués en France", ne constitue pas une atteinte au nom, à l'image ou à la renommée de la commune de [Localité 4].

59. En effet, ainsi qu'il a été précédemment établi, la ville de [Localité 8] est également renommée pour sa production de couteaux [Localité 4] depuis plus d'un siècle et la commune de [Localité 4] n'est spontanément connue que de 7% des français (pièces Actiforge no9 à 11 et pièces SFACL et [Localité 4] no27).

60. De plus, l'élément verbal "[Localité 4]" de la marque litigieuse ne fait pas tant référence à la commune demanderesse qu'au couteau de poche éponyme, issu du langage courant.

61. Le moyen tiré de l'atteinte aux droits des membres du SFACL et de la commune de [Localité 4] sera, en conséquence, écarté.

62. Les moyens d'annulation soulevés par le SFACL et la commune de [Localité 4] au soutien de l'annulation de la marque semi-figurative française no4013824 de la SAS Actiforge étant écartés, sa demande à cette fin sera, en conséquence, rejetée.

III - Sur la déchéance de la SAS Actiforge sur la marque litigieuse

III.1 - S'agissant de la déchéance de la marque litigieuse pour caractère trompeur

Moyens des parties

63. Le SFACL et la commune de [Localité 4] avancent que l'usage que la défenderesse fait de sa marque litigieuse est trompeur dans la mesure où elle use du signe évoquant le couteau de [Localité 4] sur son site internet, mais ne l'accompagne d'aucune mention claire relative au lieu de fabrication de ses produits et combine ce signe avec le dessin de l'abeille, autre élément marquant et iconique des couteaux de [Localité 4]. Les caractéristiques de cette marque font, selon eux, faussement référence à la commune de [Localité 4], déterminant ainsi le choix de la clientèle, alors que ses produits sont fabriqués à plus de deux cents kilomètres, induisant ainsi en erreur le consommateur sur l'origine géographique des produits commercialisés sous cette marque.

64. La SAS Actiforge objecte que le terme "[Localité 4]" qu'elle utilise dans ses communications commerciales désigne le couteau du même nom, non sa provenance géographique, qu'elle ne prétend à aucun moment que ses couteaux sont fabriqués à [Localité 4], mais précise qu'ils le sont à [Localité 8] ou dans les environs.

Réponse du tribunal

65. L'article L.714-6 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version antérieure à l'ordonnance no2019-1169 du 13 novembre 2019 applicable aux faits de l'espèce, prévoit qu'encourt "la déchéance de ses droits le propriétaire d'une marque devenue de son fait (...) b) Propre à induire en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service".

66. La charge de la preuve de l'utilisation trompeuse de la marque après son enregistrement incombe au requérant (en ce sens TPICE, 14 mai 2009, aff. T-165/06, Elio Fiorucci c/ OHMI, Elio Fiorucci, § 36, interprétant les dispositions similaires du règlement CE no40/94 du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire).
67. Le SFACL et la commune de [Localité 4] admettent dans leurs conclusions (page 41) que la SAS Actiforge n'affirme à aucun moment que ses couteaux non plus que ses autres produits sont fabriqués à [Localité 4].

68. Ainsi qu'il a été précédemment établi, le terme "[Localité 4]" est un couteau de poche dans la langue française, en sorte que l'usage de la marque litigieuse contenant cet élément verbal dans le site internet de la défenderesse pour promouvoir la vente de ses produits n'est pas plus susceptible d'induire le consommateur en erreur sur la provenance géographique des produits commercialisés.

69. L'usage du signe d'une abeille stylisée est également lié au couteau [Localité 4] sur lequel il est couramment apposé sur la tête du ressort depuis le début du 20ème siècle (pièces SFACL et [Localité 4] no7 et no24).

70. Par ailleurs, la SAS Actiforge établit qu'elle met en avant sur son site internet que les couteaux qu'elle vend sont fabriqués à [Localité 8] ou dans les communes environnantes (ses pièces no1 et 1bis).

71. Or, il a été précédemment établi que la ville de [Localité 8] est également renommée pour sa production de couteaux [Localité 4] depuis plus d'un siècle et que la commune de [Localité 4] n'est spontanément connue que de 7% des français (pièces Actiforge no9 à 11 et pièces SFACL et [Localité 4] no27).

72. Enfin, la circonstance que les autres produits vendus par la SAS Actiforge ne seraient pas produits en France ne résulte d'aucune des pièces produites par le SFACL et la commune de [Localité 4] sur lesquels pèse la charge de cette preuve.

73. Le moyen tiré du caractère trompeur de l'usage de la marque semi-figurative française no4013824 de la SAS Actiforge sera, en conséquence, écarté.

III.2 - S'agissant de la déchéance de la marque litigieuse pour absence d'usage

Moyens des parties

74. Le SFACL et la commune de [Localité 4] argue que la défenderesse ne justifie pas de l'usage de sa marque litigieuse pour les fourchettes et cuillers d'origine française ou fabriqués en France, pour les outils et instruments à main entraînés manuellement, armes blanches et rasoirs, faute de preuve en ce sens et dans la mesure où le signe utilisé par la défenderesse diffère de la marque litigieuse, par l'ajout d'une abeille stylisée et du terme "Fabrication française".

75. La SAS Actiforge estime justifier depuis 2013 d'une commercialisation continue de couteaux fabriqués en France sous sa marque litigieuse, de même que pour les fourchettes et cuillères, outre que sa marque litigieuse figure sur ses supports commerciaux tels que plaquettes publicitaires, boitiers ou plumiers, et certificats de garantie.

Réponse du tribunal

76. Aux termes de l'article L.714-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version antérieure à l'ordonnance no2019-1169 du 13 novembre 2019 applicable aux faits de l'espèce, "encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans.
Est assimilé à un tel usage :
a) L'usage fait avec le consentement du propriétaire de la marque ou, pour les marques collectives, dans les conditions du règlement ;
b) L'usage de la marque sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif ;
c) L'apposition de la marque sur des produits ou leur conditionnement exclusivement en vue de l'exportation.
La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée. Si la demande ne porte que sur une partie des produits ou des services visés dans l'enregistrement, la déchéance ne s'étend qu'aux produits ou aux services concernés.
L'usage sérieux de la marque commencé ou repris postérieurement à la période de cinq ans visée au premier alinéa du présent article n'y fait pas obstacle s'il a été entrepris dans les trois mois précédant la demande de déchéance et après que le propriétaire a eu connaissance de l'éventualité de cette demande.
La preuve de l'exploitation incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tous moyens.
La déchéance prend effet à la date d'expiration du délai de cinq ans prévu au premier alinéa du présent article. Elle a un effet absolu".

77. Les textes susvisés exigent seulement que la marque exploitée ne diffère des marques enregistrées que par des éléments n'en altérant pas le caractère distinctif (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 3 juin 2014, no13-17.769).

78. La SAS Actiforge verse aux débats à titre de preuve d'usage :
- une facture du 10 juillet 2017 d'édition de 5000 plaquettes publicitaires comprenant la marque semi-figurative française no4013824 (sa pièce no17A)
- plusieurs bons de commande et factures, datées du 22 décembre 2016 au 1er juillet 2019 de divers produits, dont des cuillères de divers types (à café, à soupe), un service à fromage, un service à salade, des fourchettes (ses pièces no17B, 17C, 17E, 17F) supportant le signe suivant :
- un bon de commande du 10 novembre 2017 pour l'apposition de la marque semi-figurative française no4013824 sur 220 plumiers (sa pièce no17H).

79. Elle verse, par ailleurs, des preuves tendant à établir que les produits qu'elle vend sont fabriqués à [Localité 8] ou dans les communes avoisinantes :
- deux factures de poinçonnage "[Localité 4] Actiforge" des 3 mai 2016 et 30 juin 2017 par une entreprise domiciliée à [Localité 8] (ses pièces 21A et 21C)
- trois factures des 1er mars 2018, 30 octobre 2020 et 30 novembre 2020, de "lames [Localité 4]", ressorts forgés, de poinçons, d'une entreprise domiciliée à [Localité 7] (ses pièces 22A à 22C)
- une attestation du 9 novembre 2021 d'expert-comptable rapportant que 100% des lames de couteaux sont fournies, en 2019, 2020 et 2021, par deux entreprises situées dans le Puy-de-Dome et que ses fournisseurs pour les autres produits sont situés dans le Puy-de-Dome en 2019 à 85,59%, en 2020 à 85,56% et en 2021 à 84,28% (sa pièce no28)
- plusieurs factures de la société H. Beligné et Fils de 2021 établissant qu'elle se fournit pour les modèles [Localité 4] Gilles et [Localité 4] Gentleman auprès de l'entreprise Fontenille-Pataud située à [Localité 8] (ses pièces no35 et 36)
- neuf factures de 2021 et 2022 de la société Pereira Antonio située à [Localité 3] pour le polissage de couteaux (ses pièces 41).

80. Il ressort, également, du constat d'huissier des 15 et 16 avril 2020 produit par les demandeurs que la SAS Actiforge fait usage de sa marque : pour des couteaux à pain (pièce SFACL et [Localité 4] no7 page 323), des rasoirs à main (même pièce page 321) et des ménagères comportant couteaux, fourchettes et cuillères assorties (même pièce page 242).

81. Il résulte de l'ensemble, d'abord, que l'usage du signe incluant une abeille stylisée et les termes "Fabrication française" à la marque semi-figurative française no4013824 n'en altèrent pas le caractère distinctif, compte tenu que le premier élément figuratif est évocateur du couteau [Localité 4] et le second élément verbal se substituant à "France" est purement descriptif.

82. Ensuite, les pièces produites par la SAS Actiforge démontrent l'usage continu de la marque litigieuse, à tout le moins entre le 3 mai 2016 et le 4 mars 2022, pour des outils et instruments à main entraînés manuellement, coutellerie, fourchettes et cuillers, rasoirs et armes blanches, les couteaux de tous types étant assimilés à ces dernières, ainsi que, au moins pour partie, leur origine française ou fabriqués en France.

83. En conséquence, la demande du SFACL et de la commune de [Localité 4] de déchéance de la SAS Actiforge de sa marque semi-figurative française no4013824 pour défaut d'usage sérieux sera rejetée.

IV - Sur la validité du modèle communautaire no008197107

IV.1 - S'agissant de la validité au regard de la nouveauté et du caractère propre du modèle litigieux

Moyens des parties

84. Le SFACL et la commune de [Localité 4] concluent à l'annulation du modèle comunautaire no008197107 de la défenderesse pour défaut de nouveauté et de caractère individuel, ne se distinguant des modèles divulgués antérieurement que par des détails insignifiants, dans la mesure où ce modèle reprend le profil traditionnel des couteaux de [Localité 4], la lame pointue caractéristique et une mouche pour seul ornement, outre que le système d'ouverture à pompe n'est en rien nouveau.

85. La SAS Actiforge assure que ce modèle litigieux est nouveau, car il est doté d'un système d'ouverture à pompe fait en corde de piano nécessitant d'utiliser les deux mains pour l'ouvrir.

Réponse du tribunal

86. Un dessin ou modèle communautaire soumis au droit de l'Union européenne consiste en "l'apparence d'un produit ou d'une partie de produit que lui confèrent, en particulier, les caractéristiques des lignes, des contours, des couleurs, de la forme, de la texture et/ou des matériaux du produit lui-même et/ou de son ornementation" aux termes de l'article 3 du Règlement (CE) 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins et modèles communautaires.

87. Aux termes de l'article 4 § 1 du même règlement, "la protection d'un dessin ou modèle par un dessin ou modèle communautaire n'est assurée que dans la mesure où il est nouveau et présente un caractère individuel".

88. L'article 5 dudit règlement précise que : "1. Un dessin ou modèle est considéré comme nouveau si aucun dessin ou modèle identique n'a été divulgué au public:
a) dans le cas d'un dessin ou modèle communautaire non enregistré, avant la date à laquelle le dessin ou modèle pour lequel la protection est revendiquée a été divulgué au public pour la première fois;
b) dans le cas d'un dessin ou modèle communautaire enregistré, avant la date de dépôt de la demande d'enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée ou, si une priorité est revendiquée, la date de priorité.
2. Des dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants".

89. L'article 6 du même règlement énonce que : "1. Un dessin ou modèle est considéré comme présentant un caractère individuel si l'impression globale qu'il produit sur l'utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public:
a) dans le cas d'un dessin ou modèle communautaire non enregistré, avant la date à laquelle le dessin ou modèle pour lequel la protection est revendiquée a été divulgué au public pour la première fois;
b) dans le cas d'un dessin ou modèle communautaire enregistré, avant la date de dépôt de la demande d'enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité.
2. Pour apprécier le caractère individuel, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l'élaboration du dessin ou modèle".

90. L'article 8 de ce règlement prévoit dans son paragraphe 1 que : "un dessin ou modèle communautaire ne confère pas de droits sur les caractéristiques de l'apparence d'un produit qui sont exclusivement imposées par sa fonction technique".

91. L'article 10 de ce même règlement dispose que : "1. La protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'utilisateur averti une impression visuelle globale différente.
2. Pour apprécier l'étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l'élaboration du dessin ou modèle".

92. Le modèle est nouveau lorsqu'il ne peut lui être opposé d'antériorité de toutes pièces, c'est-à-dire présentant toutes les caractéristiques du modèle en cause.

93. Un modèle présente un caractère propre dès lors que s'en dégage une impression visuelle d'ensemble qui lui permet de se démarquer des antériorités opposées, chacune individuellement en tous ses éléments pris dans leur combinaison (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 20 septembre 2016, no15-10.939).

94. L'appréciation de l'impression visuelle d'ensemble est opérée par référence à un observateur averti défini comme un observateur doté d'une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 3 avril 2013, no12-13.356).

95. Enfin, l'antériorité opposée doit avoir date certaine (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 26 octobre 2010, no09-67.107).

96. Le SFACL et la commune de [Localité 4] opposent neuf antériorités ayant dates certaines antérieures au modèle litigieux déposé le 8 octobre 2020.

97. Ils invoquent, également, un modèle "[Localité 4] Le Légende" comportant une encoche située au milieu ou au tiers supérieur du manche similaire à celle du modèle litigieux. Toutefois, ce modèle, présenté en différentes versions issues d'extraits de sites internets datées des 7 et 8 décembre 2021, non du 27 septembre 2020, ne peut donc être valablement opposé à ce titre.

98. Or, le modèle communautaire no008197107 présente une impression d'ensemble lui permettant de se démarquer des antériorités opposées en raison de l'encoche formant un creux située au tiers inférieur de son manche, peu important à cet égard que le système d'ouverture à pompe ne soit pas, en lui-même, nouveau, outre que le positionnement de cette encoche n'est pas exclusivement imposé par la fonction technique du produit.

99. Cette encoche située au tiers inférieur du manche confère au modèle litigieux un caractère propre pour l'observateur averti, défini comme l'amateur de couteaux de poche.

100. Dès lors, les antériorités opposées par le SFACL et la commune de [Localité 4] ayant date certaine ne sont destructrices ni de nouveauté ni de caractère propre ou individuel du modèle communautaire no008197107 et leur moyen en ce sens sera, en conséquence, rejeté.

IV.2 - S'agissant de l'atteinte au nom [Localité 4] du modèle litigieux

Moyens des parties

101. Le SFACL et la commune de [Localité 4] considèrent que le modèle litigieux revendique l'élément verbal "[Localité 4]" et, de ce fait, porte atteinte au nom de la commune de [Localité 4], lequel constitue un signe distinctif susceptible d'être opposé au modèle litigieux.

102. La SAS Actiforge réplique que la commune de [Localité 4] ne dispose pas d'un droit absolu sur son nom et que la gravure du terme "[Localité 4]" sur la lame de son modèle n'est pas constitutive d'une atteinte à son nom.

Réponse du tribunal

103. L'article 25 du Règlement (CE) no6/2002 du Conseil du 12 décembre 2001 sur les dessins et modèles communautaires prévoit que "1. Un dessin ou modèle ne peut être déclaré nul que :
(...) e) s'il est fait usage d'un signe distinctif dans un dessin ou modèle ultérieur et que le droit communautaire ou la législation de l'État membre concerné régissant ce signe confère au titulaire du signe le droit d'interdire cette utilisation (...)".

104. Au cas présent, la SAS Actiforge ne consteste pas que son modèle communautaire no008197107 revendique, dans sa fiche d'enregistrement, l'élément verbal "[Localité 4] Actiforge", ce qui résulte également de l'impression intégrale de cette fiche produite par les demandeurs (leur pièce no48).

105. Pour autant, il a été précédemment établi que cet élément verbal ne constitue pas un signe distinctif pour désigner en classe 8 pour les "outils et instruments à main entraînés manuellement, coutellerie, fourchettes et cuillers, armes blanches, rasoirs tous les produits précités étant d'origine française ou fabriqués en France".

106. Or, le modèle litigieux représente un type de couteau de poche de type "[Localité 4]", en sorte que l'usage de ce signe sur la lame représentée dans ce modèle ne constitue pas l'usage d'un signe distinctif, dès lors que cet élément verbal est dépourvu de distinctivité pour ce type de produits.

107. Aucun autre usage de signe distinctif n'étant critiqué par les demandeurs, le moyen tiré de l'atteinte au nom de [Localité 4] sera écarté.

108. En conséquence, la demande d'annulation du modèle communautaire no008197107 sera rejetée.

V - Sur la concurrence déloyale et le parasitisme

Moyens des parties

109. Le SFACL et la commune de [Localité 4] reprochent à la défenderesse de se placer dans le sillage des couteaux de [Localité 4] originaux, sans nécessité ni justification, dans le but de tromper le consommateur. Ils ajoutent qu'elle utilise une marque déceptive créant un risque de confusion avec leur nom ou leur dénomination sociale, cherche à profiter de manière illégitime de la réputation des couteliers de [Localité 4] dans sa communication et tente de se développer dans leur sillage en profitant de l'image de marque du couteau de [Localité 4] obtenue grâce aux investissements des couteliers du bassin de [Localité 4].

110. La SAS Actiforge objecte qu'au contraire de ce que prétendent les demanderesses, elle participe elle-même au développement de la notoriété des couteaux [Localité 4] par la promotion qu'elle assure des artisans thiernois, lesquels en ont conservé le savoir-faire quand les aveyronnais en avaient cessé la fabrication.

Réponse du tribunal

111. Aux termes de l'article 1240 du code civil, "tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer".

112. Conformément à l'article 9 du code de procédure civile, "il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention".

113. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce, ce qui implique qu'un signe ou un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute, laquelle peut être constituée par la création d'un risque de confusion sur l'origine du produit dans l'esprit de la clientèle, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce.

114. L'appréciation de cette faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté de l'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée.

115. Le parasitisme, qui n'exige pas de risque de confusion, consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale économique et financière, 10 juillet 2018, pourvoi no16-23.694).

116. En premier lieu, s'agissant du grief de concurrence déloyale, la circonstance que la SAS Actiforge fasse usage du signe "[Localité 4]" pour promouvoir ses produits, notamment les couteaux de poche qu'elle offre à la vente, relève de la liberté du commerce et ne porte atteinte à aucun droit du SFACL ou de la commune de [Localité 4] compte tenu du caractère générique de ce signe pour désigner ces produits.

117. En second lieu, s'agissant du grief de parasitisme, le SFACL et la commune de [Localité 4], qui invoquent l'atteinte aux investissements consentis pour promouvoir le nom de "[Localité 4]", ne produisent aucune pièce permettant de caractériser ces investissements.

118. Le SFACL et la commune de [Localité 4] seront, en conséquence, déboutés de leur demande à ce titre.

VI - Sur le dénigrement

Moyens des parties

119. Le SFACL et la commune de [Localité 4] font valoir être la cible du dénigrement de la défenderesse dans sa communication, notamment une vidéo publiée sur son site internet et sur sa page Facebook dans laquelle elle affirme que le couteau de [Localité 4] ou le nom de [Localité 4] ne seraient pas protégeables, elle dénigre les couteliers et le village de [Localité 4], les présentant de façon ironique et peu flatteuse, elle se présente comme un des rares couteliers français fabricants de vrais couteaux, laissant entendre que ce ne serait pas le cas des autres couteliers, et elle qualifie la commune de [Localité 4] de "bonne petite ville d'Auvergne", alors qu'elle est dans l'Aveyron.

120. La SAS Actiforge conteste tout dénigrement contenu dans cette vidéo litigieuse et précise qu'afin de ne pas entrer en conflit avec les demandeurs, elle l'a supprimée de son site internet et de sa page Facebook.

Réponse du tribunal

121. Aux termes de l'article 1240 du code civil, "tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer".

122. Conformément à l'article 9 du code de procédure civile, "il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention".

123. Même en l'absence d'une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l'une, d'une information de nature à jeter le discrédit sur un produit commercialisé par l'autre constitue un acte de dénigrement, à moins que l'information en cause ne se rapporte à un sujet d'intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, et sous réserve qu'elle soit exprimée avec une certaine mesure (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 4 mars 2020, no18-15.651).

124. Au soutien de sa demande à ce titre, le SFACL et la commune de [Localité 4] versent aux débats cinq captures d'écran (leur pièce no19) dont il n'est pas contestée par la SAS Actiforge qu'elles sont extraites de sa page Facebook, etlt;couteau-[Localité 4]-Actiforgeetgt;, et d'une vidéo qu'elle a postée sur le site internet etlt;youtube.cometgt; intitulée "l'histoire du couteau [Localité 4] ?".

125. La première capture d'écran comporte une partie gauche mentionnant des textes illisibles et une partie droite mentionnant : "d'où vient le fameux couteau [Localité 4] ?". La deuxième comporte une image composée d'un marteau et support en bois faisant référence à la justice américaine, d'une étiquette de produit marquée du terme "Label" barrée d'une croix rouge et du panneau routier d'entrée de ville de la commune de [Localité 4]. La troisième comporte un coffre-fort ouvert avec deux sacs pleins et un troisième duquel émergent des pièces d'or, celles-ci également répandues au pied du coffre-fort, un forgeron au centre et une enclume à droite. La quatrième est composée de deux bras aux biceps saillants, avants-bras relevés et poings serrés évoquant la force encadrant le panneau routier d'entrée de ville de [Localité 8] et les termes "200 ans" placés l'un au dessus, l'autre au-dessous de la composition précédente. La cinquième reprend sur fond bleu foncé le panneau routier d'entrée de ville de [Localité 4], un bâtiment stylisé à cheminée fumante mentionnant "[Localité 4]" au fronton, vers lequel convergent trois flèches d'un bleu moins foncé, l'ensemble couvert de quatre cercles rouges disposés en estampille, le terme "original" étant inscrit au-dessus et en-dessous d'un cartouche rouge barrant les cercles et mentionnant en capitales bleues sur fond rouge "Aveyron".

126. Ainsi, aucune de ces captures d'écran ne caractérise par elle-même ou dans leur combinaison les dénigrements allégués. En effet, le SFACL et la commune de [Localité 4] affirment sans le démontrer que la troisième capture d'écran vise les couteliers de [Localité 4], ce que rien ne corrobore.

127. De plus, le mention sur le site internet de la SAS Actiforge de la mention "l'équipe d'Actiforge vous propose mieux qu'un couteau [Localité 4]. Nous vous proposons Votre [Localité 4] Unique. Parce que vous êtes singulier, nous vous permettons d'avoir votre couteau personnalisé (...)" (pièce SFACL et [Localité 4] no5) ne contient aucun dénigrement des couteliers de [Localité 4], mais un argumentaire publicitaire en faveur d'une personnalisation payante.

128. Enfin, si le SFACL et la commune de [Localité 4] affirment que la communication de la SAS Actiforge a contenu ou contient des propos dénigrants des couteliers de [Localité 4] en dehors de cette vidéo litigieuse, dont le contenu n'a pas été versé aux débats, ils ne versent aucune pièce le démontrant.

129. Leur demande à ce titre sera, en conséquence, rejetée.

VII - Sur les pratiques commerciales trompeuses

Moyens des parties

130. Le SFACL et la commune de [Localité 4] font état de pratiques commerciales de la défenderesse trompeuses des consommateurs consistant à utiliser massivement le nom de [Localité 4] dans l'ensemble de sa communication pour faire croire qu'il s'agit de couteaux en provenant alors qu'elle est située à plus de 200 kilomètres, à laisser entendre qu'elle fabrique elle-même les couteaux qu'elle vend alors qu'elle ne possède aucun atelier de fabrication, à commercialiser divers couteaux régionaux dont on ne sait pas où ils sont fabriqués, à opérer des comparaisons trompeuses entre les indications géographiques protégées et son adhésion au système privé "Origine France Garantie", à entretenir la confusion entre le village de [Localité 4] et la ville de [Localité 8], à utiliser sa marque semi-figurative française no4013824 au caractère trompeur, de même que la mention "[Localité 4]" sur ces couteaux, à indiquer sur le site etlt;soutenonsnosentreprises.fretgt; qu'elle est située à [Localité 4] dans la [Localité 5] et à mentionner qu'elle signe ses couteaux en frappant les lames à sa marque alors qu'elles sont marquées au laser.

131. La SAS Actiforge oppose que parmi les couteaux qu'elle commercialise, le [Localité 4] est son produit phare, raison pour laquelle il est mis à l'honneur dans sa communication. Elle ajoute qu'elle garantit une provenance française de ses produits, les laguioles qu'elle vend étant fabriqués de manière artisanale à [Localité 8] ou dans le bassin thiernois, seule la gravure personnalisée à la demande étant réalisée au laser, tandis qu'elle n'a, à aucun moment, indiqué que ses couteaux seraient fabriqués à [Localité 4], qu'elle ne saurait être tenue pour responsable des propos erronés figurant sur des sites tiers et qu'elle dispose d'un atelier de fabrication adapté à son activité.

Réponse du tribunal

132. L'article L.121-1 du code de la consommation dispose que "les pratiques commerciales déloyales sont interdites.
Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service.
Le caractère déloyal d'une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d'une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s'apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.
Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L.121-2 à L.121-4 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L.121-6 et L.121-7".

133. L'article L.121-2 du même code ajoute que "une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes :
1o Lorsqu'elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d'un concurrent ;
2o Lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants :
a) L'existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ;
b) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, notamment au regard des règles justifiant l'apposition des mentions " fabriqué en France " ou " origine France " ou de toute mention, signe ou symbole équivalent, au sens du code des douanes de l'Union sur l'origine non préférentielle des produits, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l'usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, notamment son impact environnemental, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service ;
c) Le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix notamment les réductions de prix au sens du I de l'article L.112-1-1, les comparaisons de prix et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service ;
d) Le service après-vente, la nécessité d'un service, d'une pièce détachée, d'un remplacement ou d'une réparation ;
e) La portée des engagements de l'annonceur, notamment en matière environnementale, la nature, le procédé ou le motif de la vente ou de la prestation de services ;
f) L'identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel ;
g) Le traitement des réclamations et les droits du consommateur ;
3o Lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en oeuvre n'est pas clairement identifiable ;
4o Lorsqu'un bien est présenté comme étant identique à un bien commercialisé dans un ou plusieurs autres Etats membres alors qu'il a une composition ou des caractéristiques différentes".

134. Selon l'article L.121-3 du même code, "une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l'entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte.
Lorsque le moyen de communication utilisé impose des limites d'espace ou de temps, il y a lieu, pour apprécier si des informations substantielles ont été omises, de tenir compte de ces limites ainsi que de toute mesure prise par le professionnel pour mettre ces informations à la disposition du consommateur par d'autres moyens.
Dans toute communication commerciale constituant une invitation à l'achat et destinée au consommateur mentionnant le prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé, sont considérées comme substantielles les informations suivantes :
1o Les caractéristiques principales du bien ou du service ;
2o L'adresse et l'identité du professionnel ;
3o Le prix toutes taxes comprises et les frais de livraison à la charge du consommateur, ou leur mode de calcul, s'ils ne peuvent être établis à l'avance ;
4o Les modalités de paiement, de livraison et d'exécution, dès lors qu'elles sont différentes de celles habituellement pratiquées dans le domaine d'activité professionnelle concerné ;
5o L'existence d'un droit de rétractation, si ce dernier est prévu par la loi ;
6o La qualité de professionnel ou non du vendeur qui propose des produits sur une place de marché, telle qu'elle a été déclarée à l'opérateur de la place de marché en ligne.
Lorsque le consommateur peut rechercher des produits offerts par différents professionnels ou par des particuliers à partir d'une requête consistant en un mot clé, une phrase ou la saisie d'autres données, sont réputées substantielles les informations mises à sa disposition concernant les principaux paramètres qui déterminent le classement des produits qui lui sont présentés et leur ordre d'importance. Ces informations doivent figurer dans une rubrique spécifique de l'interface en ligne, directement et aisément accessible à partir de la page sur laquelle les résultats de la requête sont présentés.
Lorsqu'un professionnel donne accès à des avis de consommateurs sur des produits, les informations permettant d'établir si et comment le professionnel garantit que les avis publiés émanent de consommateurs ayant effectivement utilisé ou acheté le produit sont réputées substantielles".

135. En l'espèce, le SFACL et la commune de [Localité 4], à l'appui de leur demande à ce titre, versent aux débats :
- un constat d'huissier des 15 et 16 avril 2020 duquel il résulte que la SAS Actiforge offre à la vente sur son site internet etlt;couteau-[Localité 4].cometgt; différents types de couteaux, dont un type de couteau de poche dénommé "couteau pliant [Localité 4]" proposé en différents modèles ; que la défenderesse est présentée sur le site etlt;soutenonsnosentreprises.fretgt; comme située à [Localité 4] dans le département de la [Localité 5] ; que cette dernière fait état de son adhésion à l'association ProFrance, promouvant le signe "Origine France Garantie" (leur pièce no7)
- un article du magazine Pyrénées paru en 2021 reprenant les informations du site internet de la défenderesse et un échange de courriels du 13 décembre 2021 avec une journaliste de ce magazine (leurs pièces no53 et 54).

136. Toutefois, la circonstance que la SAS Actiforge use du terme "[Localité 4]" pour désigner les couteaux de poche fabriqués à [Localité 8] ou dans le bassin thiernois qu'elle vend, n'est pas constitutif d'une tromperie du consommateur. En effet, cette dernière démontre par les pièces qu'elle produit, qu'elle revend des couteaux laguioles produits par des entreprises de ce secteur (ses pièces 21, 22, 28, 35, 36 et 41 sus-détaillées) et le concours du bassin thiernois à la préservation du savoir-faire traditionnel de la fabrication artisanale du couteau [Localité 4] ressort de la synthèse de l'enquête publique publiée par l'INPI portant sur la demande d'indication géographique du couteau de [Localité 4] (pièce Actiforge no25 page 4 et 5).

137. L'usage du signe "Origine France Garantie" n'est pas plus constitutif d'une tromperie, dès lors que les demandeurs reconnaissent eux-mêmes que cette affiliation de la SAS Actiforge est délivrée par la société Veritas (leurs conclusions page 71), ce que les pièces de la défenderesse confirment (pièce Actiforge no14).

138. Le fait que la SAS Actiforge ne dispose que d'un atelier de 15 mètres carrés situé à [Localité 6] ne lui interdit pas de se prévaloir de la qualité de fabricant, quand bien même la majorité de ses ventes sont, en réalité, des reventes, dès lors que son site internet fait référence aux entreprises artisanales auprès desquelles elle se fournit (pièce Actiforge no27 et pièce SFACL et [Localité 4] no7).

139. L'offre à la vente d'autres types de couteaux régionaux par la SAS Actiforge sur son site internet n'est pas non plus constitutif d'une tromperie, aucune mention spécifique autre que leur fabrication en France n'étant vantée sur son site internet (pièce SFACL et [Localité 4] no7).

140. L'usage par la SAS Actiforge de sa marque semi-figurative française no4013824 ne constitue pas une tromperie, le moyen d'annulation de ce chef des demandeurs ayant été rejeté.

141. Les mentions erronées du site etlt;soutenonsnosentreprises.fretgt; ne sont pas imputables à la SAS Actiforge, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'elle en est l'auteur.

142. Enfin la circonstance que le marquage des couteaux vendus par la SAS Actiforge serait intégralement effectué au laser ne résulte d'aucune pièce, la défenderesse reconnaissant que seul le marquage individualisé est opéré par ce procédé. La mention d'un marquage par frappe sur le site internet de la défenderesse n'est, de ce fait, pas trompeur.

143. La demande à ce titre du SFACL et de la commune de [Localité 4] sera, en conséquence, rejetée.

144. Les demandes principales du SFACL et de la commune de [Localité 4] étant rejetées, leurs demandes en indemnisation, en publication, en interdiction du terme "[Localité 4]" et en astreinte, seront rejetées par voie de conséquence.

VIII - Sur la demande reconventionnelle en procédure abusive

Moyens des parties

145. La SAS Actiforge demande la condamnation des demandeurs à l'indemniser en raison du caractère manifestement abusif de la procédure.

146. Le SFACL et la commune de [Localité 4] concluent au rejet de cette demande eu égard au caractère légitime de leur action.

Réponse du tribunal

147. L'article 1240 du code civil prévoit que "tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer".

148. En application de l'article 32-1 du code de procédure civile, "celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 € sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés".

149. Le droit d'agir en justice participe des libertés fondamentales de toute personne. Il dégénère en abus constitutif d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil lorsqu'il est exercé en connaissance de l'absence totale de mérite de l'action engagée, ou par une légèreté inexcusable, obligeant le défendeur à se défendre contre une action que rien ne justifie sinon la volonté d'obtenir ce que l'on sait indu, une intention de nuire, ou une indifférence totale aux conséquences de sa légèreté.

150. En l'espèce, la seule circonstance que les demandes du SFACL et de la commune de [Localité 4] soient pour partie rejetées n'est pas de nature à faire dégénérer leur action en abus, l'une de ces demandes ayant été accueillie.

151. En outre, la SAS Actiforge, qui procède par voie d'affirmation dans ses écritures quant au caractère abusif de l'action des demandeurs, ne justifie d'aucun préjudice distinct des frais exposés pour se défendre en justice, lesquels sont indemnisés au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

152. En conséquence, sa demande reconventionnelle pour procédure abusive sera rejetée.

IX - Sur les autres demandes

IX.1 - S'agissant des dépens

153. Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie.

154. L'article 699 du même code prévoit que "les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision.
La partie contre laquelle le recouvrement est poursuivi peut toutefois déduire, par compensation légale, le montant de sa créance de dépens".

155. Le SFACL et de la commune de [Localité 4], parties perdantes, seront condamnées aux dépens, avec distraction au profit de l'avocat de la SAS Actiforge, conformément à sa demande.

IX.2 - S'agissant des frais non compris dans les dépens

156. L'article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

157. Le SFACL et la commune de [Localité 4], parties tenues aux dépens, seront condamnées à verser 10 000 euros à la SAS Actiforge au titre des frais non compris dans les dépens.

IX.3 - S'agissant de l'exécution provisoire

158. Selon l'article 515 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable à la date de l'assignation, "hors les cas où elle est de droit, l'exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d'office, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, à condition qu'elle ne soit pas interdite par la loi.
Elle peut être ordonnée pour tout ou partie de la condamnation".

159. L'exécution provisoire sera ordonnée, étant nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire et la demande de la SAS Actiforge tendant à écarter l'exécution provisoire sera rejetée, compte tenu du rejet des demandes principales.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

REJETTE la demande de la SAS Actiforge tirée de la forclusion de l'action du syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et de la commune de [Localité 4] par tolérance de sa marque semi-figurative française no4013824 ;

DÉBOUTE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] de leur demande d'annulation de la marque semi-figurative française no4013824 de la SAS Actiforge ;

DÉBOUTE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] de leur demande de déchéance de la SAS Actiforge de sa marque semi-figurative française no4013824 pour défaut d'usage sérieux ;

DÉBOUTE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] de leur demande d'annulation du modèle communautaire no008197107 de la SAS Actiforge ;

DÉBOUTE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] de leur demande en concurrence déloyale et parasitisme ;

DÉBOUTE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] de leur demande en dénigrement;

DÉBOUTE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] de leur demande en pratiques commerciales trompeuses ;

DÉBOUTE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] de leurs demandes en indemnisation, en publication, en interdiction du terme "[Localité 4]" et en astreinte ;

DÉBOUTE la SAS Actiforge de sa demande en procédure abusive ;

CONDAMNE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] aux dépens, avec droit pour Maître Denis Gantelme, avocat au barreau de Paris, de recouvrer ceux dont il a fait l'avance sans recevoir provision ;

DÉBOUTE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 4] et la commune de [Localité 4] à payer 10 000 euros à la SAS Actiforge en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE la demande de la SAS Actiforge d'écarter l'exécution provisoire de droit.

Fait et jugé à Paris le 14 juin 2023

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Ct0196
Numéro d'arrêt : 21/02988
Date de la décision : 14/06/2023

Analyses

x


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire.paris;arret;2023-06-14;21.02988 ?
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