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25/07/2024 | FRANCE | N°22/04026

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 18° chambre 1ère section, 25 juillet 2024, 22/04026


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:






18° chambre
1ère section

N° RG 22/04026
N° Portalis 352J-W-B7G-CWOMS

N° MINUTE : 5

contradictoire

Assignation du :
29 Mars 2022









JUGEMENT
rendu le 25 Juillet 2024

DEMANDERESSE

Société KLEPIERRE GRAND LITTORAL
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Catherine CARIOU de la SELEURL SELARL CATHERINE CARIOU, avocats au barreau de PARIS, ves

tiaire #B0107




DÉFENDERESSE

S.A.S. O’GRILLADOR [Localité 6]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]

représentée par Maître Kamel YAHMI de la SELEURL KAMEL YAHMI, avocats au barreau de PARIS, ves...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

18° chambre
1ère section

N° RG 22/04026
N° Portalis 352J-W-B7G-CWOMS

N° MINUTE : 5

contradictoire

Assignation du :
29 Mars 2022

JUGEMENT
rendu le 25 Juillet 2024

DEMANDERESSE

Société KLEPIERRE GRAND LITTORAL
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Catherine CARIOU de la SELEURL SELARL CATHERINE CARIOU, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #B0107

DÉFENDERESSE

S.A.S. O’GRILLADOR [Localité 6]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]

représentée par Maître Kamel YAHMI de la SELEURL KAMEL YAHMI, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #E0663

INTERVENANT VOLONTAIRE

SAS J AND T
[Adresse 4]
[Localité 8]

représentée par Maître Kamel YAHMI de la SELEURL KAMEL YAHMI, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #E0663

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Sophie GUILLARME, 1ère Vice-présidente adjointe,
Monsieur Jean-Christophe DUTON, Vice-président,
Madame Diana SANTOS CHAVES, Juge,

assistés de Christian GUINAND, Greffier principal,

Rédacteur : Jean-Christophe DUTON

DÉBATS

A l’audience du 02 Avril 2024, tenue en audience publique, devant Madame Sophie GUILLARME, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.
Avis a été donné aux avocats des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.
Puis, le délibéré a été prorogé jusqu’au 25 juillet 2024.

JUGEMENT

Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

Par acte sous seing privé du 13 juin 2021, la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL a donné à bail commercial à la SAS O GRILLADOR [Localité 6], le local n°B107 dépendant du centre commercial GRAND LITTORAL, sis à [Localité 7], pour une durée de dix années, à compter de la livraison du local intervenue le 22 juin 2021, moyennant un loyer minimum garanti de 44.000 euros par an en principal, outre un loyer variable de 7% sur le chiffre d’affaires HT du preneur.

La destination est la suivante : activité de restauration brésilienne à base de viande grillée sur place, à emporter et en livraison.

Par courriers des 22, 26 octobre et 28 novembre 2021, la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL a mis en demeure la SAS O GRILLADOR [Localité 6] d’avoir à régler des dettes locatives. Ces mises en demeure sont restées vaines.

Par courrier du 21 janvier 2022, la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL a mis en demeure la SAS O GRILLADOR [Localité 6] d’avoir à régler la somme de 43.642,13 euros TTC.

Le 8 mars 2022 la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL a fait procéder à une saisie conservatoire ayant pour cause une dette locative de 46.112,13 euros. La saisie a été partiellement fructueuse pour un montant de 2.609,29 euros présents au solde créditeur des comptes bancaires du preneur.

Par acte extrajudiciaire du 14 mars 2022, la saisie a été dénoncée à la SAS O GRILLADOR [Localité 6].

Par exploit d’huissier du 29 mars 2022, la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL a fait assigner la SAS O GRILLADOR [Localité 6] devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de :
condamner la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] au paiement de la somme de 46.112,13 euros TTC, due suivant comptes arrêtés an 31 mars 2022 inclus ;ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;condamner la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] aux entiers dépens qui comprendront le coût de la sommation et les frais de 1a saisie conservatoire, conformément à l’article L.512-2 du code des procédures civiles d‘exécution, ainsi qu’au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Par conclusions notifiées le 12 janvier 2023, la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL demande au tribunal judiciaire de Paris de :

A titre principal,
débouter la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] de l’ensemble de ses demandes ;
prononcer la résiliation judiciaire du bail commercial du 13 juin 2021 aux torts exclusifs de la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] au 1er décembre 2022, date de restitution du local ;
condamner la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] au paiement de la somme de 82.310,61 euros représentant les loyers et charges, selon comptes arrêtés à la date de restitution du local le 1er décembre 2022 inclus ;
Subsidiairement, en cas d’inapplication de l’article 326 du code de procédure civile,

débouter la société J &T de l’ensemble de ses demandes,
En toutes hypothèses,

ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;
condamner la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] et la SAS J AND T aux entiers dépens qui comprendront le coût de la sommation et les frais de la saisie conservatoire, conformément à l’article L 512-22 du Code des procédures civiles d’exécution, le coût des éventuelles dénonciations aux créanciers inscrits, ainsi qu’au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL énonce:
qu’en vertu de l’article 1728 alinéa 2 du code civil, l’obligation essentielle du locataire est de régler le loyer selon les termes convenus ; qu’en l’espèce, et en vertu de l’article 24 du bail, le loyer est payable trimestriellement et d’avance ; que les pièces versées aux débats démontrent la totale bonne foi du bailleur qui, dès la conclusion du bail, et pour tenir compte du contexte sanitaire, a accompagné le preneur en lui octroyant différentes franchises ;que tout manquement aux dispositions de l’article 1728 du code civil et au contrat de bail peut entraîner la résiliation judiciaire du bail ; qu’en l’espèce, la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] n’a rien réglé au titre du bail, pas même le dépôt de garantie ;

que s’agissant du délai de paiement, pour pouvoir bénéficier de tels délais, le preneur doit avoir repris le paiement des loyers et charges courants, ce qui n’est pas le cas ; qu’elle doit également justifier de ce qu’elle sera en mesure de régler les mensualités d’apurement de la dette en plus des loyers et charges contractuels, ce qui n’est pas le cas.

Par conclusions notifiées le 22 mars 2023, la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] demande au tribunal judiciaire de Paris de :

A titre principal,

juger que les charges ne sont pas justifiées ;
la condamner à payer la somme de 76.715,57 euros correspondant à l’arriéré du loyer en principal ;
juger qu’elle peut régler cette somme en 24 mensualités, soit 3.196,48 euros par mois ;
En tout état de cause,

prendre acte que les lieux sont à la disposition du bailleur depuis mai 2022 ;
prendre acte que le preneur a restitué les clés du local au bailleur le 1er décembre 2022 ;
prononcer au besoin la résiliation judiciaire du contrat de bail ;
juger que la SAS J & T n’entend pas intervenir à la présente procédure,
juger qu’il n’y ait pas lieu à l’application de l’article 700 code de procédure civile
statuer sur les dépens.
Au soutien de ses prétentions, la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] énonce :
que le bailleur ne justifie pas du montant des charges; qu’elle ne s’oppose pas à la résiliation judiciaire du bail, précisant qu’elle a quitté les lieux en mai 2022 ; que l’état des lieux de sortie a été régularisé le 1er décembre 2022, avec remise des clés à cette date; que s’agissant des délais de paiement, l’activité du restaurant a subi la crise sanitaire puisqu’un certain nombre de restrictions étaient d’actualité: notamment, couvre-feu jusqu’à 23h, jauges pour les terrasses extérieures (tables au plus de 6 personnes) ; jauge en intérieur réduite à 50%, pass sanitaire obligatoire ;
La clôture a été prononcée le 23 mars 2023.
L’audience de plaidoirie s’est tenue le 2 avril 2024.
La décision a été mise en délibéré au 20 juin 2024, délibéré prorogé au 25 juillet 2024.

MOTIVATION
Sur l’intervention volontaire de la SAS J & T
Aux termes de l’article 330 du code de procédure civile, l'intervention est accessoire lorsqu'elle appuie les prétentions d'une partie. Elle est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie. L'intervenant à titre accessoire peut se désister unilatéralement de son intervention.
En l’espèce, il sera donné acte du désistement unilatéral de la SAS J & T à intervenir volontairement à titre accessoire dans la procédure.

Sur la résiliation judiciaire

Il ressort des articles 1103 et 1728 du code civil que le preneur est tenu de respecter les obligations mises à sa charge par le bail, des manquements à ces obligations pouvant justifier, en vertu de l'ancien article 1184 du même code, le prononcé de la résiliation du contrat s'ils sont suffisamment graves pour interdire la poursuite des relations contractuelles.
Aux termes de l’article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.
Il est constant que la résiliation judiciaire produit ses effets à la date souverainement déterminée par le tribunal, ou à défaut, au jour du jugement.
En l’espèce, la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL sollicite le prononcé de la résiliation judiciaire à la date du 1er décembre 2022. Le preneur reconnaît le défaut de paiement des loyers et des charges, en violation de l’article 24 du bail relatif au paiement du loyer, et ne s’oppose pas à la résiliation judiciaire.

En conséquence, il y a lieu de faire droit à la demande de résiliation judiciaire du bail aux torts exclusifs de la SAS O’GRILLADOR [Localité 6]. La restitution des clefs et des locaux ayant eu lieu le 1er décembre 2022, la date de résiliation judiciaire sera fixée à ladite date.

Sur le montant de la dette locative

Au titre de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
En l’espèce, il ressort du bail commercial litigieux, notamment de ses articles 22 à 24 relatifs au loyer et 27 relatif aux charges que le preneur est redevable d’un loyer variable calculé au taux de 7% sur le chiffre d’affaires hors taxe, et a minima, doit s’acquitter, outre les charges, d’un loyer garanti de 44.000 euros hors taxes, lequel loyer garanti est indexé à l’ILC.

La SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL sollicite le paiement de la somme de 83.310,61 euros représentant les dettes de loyers et charges du preneur, selon comptes qu’elle présente comme arrêtés à la date de restitution du local le 1er décembre 2022 inclus.

Le preneur reconnaît la dette locative de 76.715,57 euros au principal.

Il ressort du dernier décompte produit par la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL prétendument émis le 20 décembre 2022 que la somme de 83.310,61 euros correspond à un solde arrêté au 10 janvier 2023 qui inclut des factures postérieures à la restitution des clefs et des locaux pris à bail, et donc postérieures à la date de résiliation judiciaire souverainement retenue.

Il convient donc de retenir le solde arrêté au 21 décembre 2022 traitant le dernier trimestre 2022, soit la somme de 81.916,90 euros.

Le preneur conteste les charges pour les besoins de la cause, mais cette demande apparaît non étayée, en ce qu’elle ne fait référence à aucune période précise, n’est appuyée par aucune preuve de paiement ou contestation de paiement sur ce motif, ni demande de régularisation des charges. Il est relevé en outre qu’il n’a sollicité par incident la communication d’aucune pièce utile à cet égard. En l’état, sa contestation ne saurait donc prospérer.

En conséquence, il y a lieu de condamner la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] au paiement de la somme de 81.916,90 euros, à la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL.

Sur les délais de paiement

L'article 1244-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, devenu l'article 1343-5 du même code dispose, dans son premier alinéa : «Toutefois, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.»

En l’espèce, si le tribunal relève que la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] a débuté son exploitation le 22 juin 2021, date à laquelle elle fait observer que les restaurants venaient d’être autorisés à exploiter avec les restrictions de la période du COVID 19, le tribunal constate néanmoins que la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] n’a produit aucune pièce ni comptable, ni fiscale, ni bancaire, ni d’aucune nature au soutien de sa demande d’octroi de délai de paiement. En conséquence, les conditions de l’octroi d’un délai de paiement n’apparaissent pas satisfaites.

La demande en ce sens sera rejetée.

Sur les autres demandes

L’article 696 du code de procédure civile prévoit que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l’espèce, la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] ayant succombé dans ses demandes sera condamnée aux entiers dépens.

L’article 700 du code de procédure civile prévoit que la partie condamnée aux dépens ou qui perd son procès peut être condamnée à payer à l’autre partie au paiement d’une somme destinée à compenser les frais exposés pour le procès et non compris dans les dépens. Dans ce cadre, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique des parties.

En l’espèce, la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] sera condamnée à la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe à la date du délibéré;

Donne acte du désistement unilatéral de la SAS J & T à intervenir volontairement à titre accessoire dans la procédure ;
Ordonne la résiliation judiciaire du bail commercial du 13 juin 2021 entre la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] et SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL, rétroactivement à compter du 1er décembre 2022 ;
Fixe la dette locative à la somme de 81.916,90 euros arrêtée au 1er décembre 2022 inclus ;
Condamne la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] au paiement de la dette locative de 81.916,90 euros à la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL ;
Rejette la demande de délai de paiement formée par la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] ;
Condamne la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] aux entiers dépens (en ce, inclus le coût de la saisie conservatoire, et de la dénonciation de l’assignation aux créanciers inscrits) ;
Condamne la SAS O’GRILLADOR [Localité 6] à payer à la SAS KLEPIERRE GRAND LITTORAL la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rejette le surplus des demandes ;
Rappelle que l’exécution provisoire est de droit.

Fait et jugé à Paris le 25 juillet 2024.

Le Greffier Le Président

Christian GUINAND Sophie GUILLARME


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 18° chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 22/04026
Date de la décision : 25/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-25;22.04026 ?
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