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27/08/2024 | FRANCE | N°22/09644

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/4 social, 27 août 2024, 22/09644


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :




1/4 social

N° RG 22/09644
N° Portalis 352J-W-B7G-CXOU6


N° MINUTE :


Déboute
P.R

Assignation du :
02 Août 2022






JUGEMENT
rendu le 27 Août 2024

DEMANDERESSE

Madame [J] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Charlotte GRUNDMAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E525


DÉFENDERESSE

ALLIANCE PROFESSIONNELLE RETRAITE AGIRC-ARRCO

- SECTION B2V
[Adresse 4]
[Localité 5]

représentées par Maître Delphine MONTBOBIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1600


COMPOSITION DU TRIBUNAL

Catherine DESCAMPS, 1er Vice-Président
Emman...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :

1/4 social

N° RG 22/09644
N° Portalis 352J-W-B7G-CXOU6

N° MINUTE :

Déboute
P.R

Assignation du :
02 Août 2022

JUGEMENT
rendu le 27 Août 2024

DEMANDERESSE

Madame [J] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Charlotte GRUNDMAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E525

DÉFENDERESSE

ALLIANCE PROFESSIONNELLE RETRAITE AGIRC-ARRCO - SECTION B2V
[Adresse 4]
[Localité 5]

représentées par Maître Delphine MONTBOBIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1600

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Catherine DESCAMPS, 1er Vice-Président
Emmanuelle DEMAZIERE, Vice-présidente
Paul RIANDEY, Vice-président

assistés de Elisabeth ARNISSOLLE, Greffier,
Décision du 27 Août 2024
1/4 social
N° RG 22/09644
N° Portalis 352J-W-B7G-CXOU6

DÉBATS

A l’audience du 28 Mai 2024 tenue en audience publique devant Paul RIANDEY, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

Le délibéré initialement fixé au 23 Juillet 2024 a été prorogé au 27 Août 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Mme [J] [Z] a travaillé au cours de sa carrière au sein d’entreprises privées et de collectivités publiques. Notamment, elle a travaillé du 28 octobre 1991 au 31 mai 1994 pour [7], organisme de droit privé constitué en groupement d’intérêt économique (GIE) cotisant auprès du régime de retraite complémentaire Agirc-Arrco. Le Laboratoire français de fractionnement et des biotechnologies (LFB), groupement d’intérêt public (GIP) a repris le personnel du GIE [7] sous un statut de droit public à compter du 1er juin 1994, pour lequel Mme [Z] a poursuivi son activité professionnelle jusqu’au 30 septembre 1994.

Mme [Z] s’est vue notifier le 4 février 2020 par la CARSAT la liquidation de sa retraite de base prenant effet au 1er février 2020.

Puis elle a reçu d’une part le 6 février 2020 la notification de son titre de retraite complémentaire IRCANTEC au titre des périodes d’emploi en qualité d’agent non titulaire d’une collectivité publique ou assimilée (montant annuel brut de 1.449,99 euros) et d’autre part le 28 février 2020 la notification de ses droits révisés au titre de la retraite complémentaire par l’institution Alliance professionnelle Agirc – Arrco section B2V.

Par divers courriers envoyés en mars et avril 2020, Mme [Z] a fait savoir à l’Agirc-Arrco et à l’IRCANTEC que la période du 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994 était manquante.

Par mail du 21 avril 2020, le conciliateur de l’IRC Alliance professionnelle Agirc – Arrco section B2V lui a indiqué que cette période d’activité relevait de l’IRCANTEC et qu’il lui ne semblait pas possible de répondre favorablement à sa demande tendant notamment au transfert à cette seconde institution des points acquis pendant la période 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994.

Par lettre recommandée avec AR du 24 août 2020, le conseil de Mme [Z] a écrit dans des termes similaires à l’institution Alliance professionnelle Agirc – Arrco section B2V et à l’IRCANTEC les mettant en demeure de lui notifier un courrier détaillant les modalités de transfert de droits et de conversion des points pour la période du 1er janvier 1991 au 31 mai 1994, en fournissant à l’appui des explications un tableau des points transférés par la CGIS - [8] (institution de retraite complémentaire du régime ARRCO).

L’IRCANTEC a écrit par courrier du 28 septembre 2020 qu’il semblait que tous les points AGIRC ARRCO ne lui avaient pas été transférés.

L’institution de retraite complémentaire B2V a indiqué en réponse les 4 et 5 novembre 2020 que le transfert des droits résultant des cotisations de retraite complémentaire avait été effectué pour la période d’emploi par la CGIS ([8]) selon un détail donné, et que cette institution était interrogée à ce sujet.

Par l’intermédiaire de son conseil, Mme [Z] a saisi le 31 mars 2022 le médiateur de l’Agirc-Arrco, lequel par courrier du 6 septembre 2022 a admis que la « différence observée entre le nombre de points figurant sur les relevés de Mme [Z] et celui transféré à l’IRCANTEC nécessit[ait] des explications ».

Ainsi, qu’il sera ultérieurement exposé, l’instance judiciaire a été introduite le 2 août 2022.

En cours de procédure, par mail du 23 janvier 2023, le médiateur AIRC-ARRCO a informé Mme [Z] qu’à sa demande, les services de [8] Agirc-Arrco avaient communiqué à ceux de l’IRCANTEC le montant des droits AGIRC acquis entre novembre 1991 et septembre 1994 et qu’il appartenait désormais à l’IRCANTEC d’en effectuer la conversion, avant de les inscrire au compte de Mme [Z] pour procéder à la révision du calcul de sa retraite.

Sur la base de droits récapitulés par [8] le 24 février 2023, l’IRCANTEC a établi le 5 mai 2023 un nouveau titre de retraite d’un montant annuel brut de 4.121,42 euros bruts et procédait le 26 mai 2023 à un versement correspondant à un rappel de pension de 8.626,71 euros brut.

***
*

Par acte du 2 août 2022, Mme [Z] a assigné la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco Alliance Professionnelle Retraite AGIRC ARRCO section B2V en son siège social situé [Adresse 4], [Localité 5], le procès-verbal de signification à personne morale faisant état d’une délivrance au « Groupement d’intérêt économique AGIRC – ARRCO », au [Adresse 2], [Localité 6], aux fins de :
CONDAMNER la fédération Agirc-Arrco et la caisse liquidatrice section B2V à rétablir les droits de la requérante et lui verser l’intégralité des sommes restant lui devoir CONDAMNER la fédération Agirc-Arrco et la caisse liquidatrice section B2V à lui verser la somme de 16 042,75 euros à titre d’arriérés de pension de retraite complémentaire (compte provisoire), CONDAMNER la fédération Agirc-Arrco et la caisse liquidatrice section B2V à lui verser la somme de 641,79 euros mensuels complémentaires,A titre subsidiaire,
ORDONNER à la fédération Agirc-Arrco de justifier du transfert des points CGIS vers Ircantec,En tout état de cause,
CONDAMNER la fédération Agirc-Arrco et la caisse liquidatrice section B2V, au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux dépens.
Suite aux observations transmises par le juge de la mise en état portant sur les incohérences présentées par cet acte (dirigé contre la Caisse mais remis par l’huissier à une autre entité et contenant des demandes formées à l’encontre de la Fédération Agircc-Arrco qui n’était pas citée) le conseil de Madame [Z] afin de corriger l’erreur de l’huissier portant sur la remise de l’acte et celle portant sur la dénomination du défendeur a transmis par RPVA le 6 octobre 2022 une nouvelle assignation délivrée le 3 octobre 2022.

Par acte du 3 octobre 2022, Mme [Z] a assigné la Caisse de retraite complémentaire AGIRC – ARRCO Alliance professionnelle retraite AGIC – ARRCO – Section B2V le procès-verbal de signification ayant été délivré à cette entité ainsi désignée au [Adresse 4] [Localité 5], aux fins de :
Recevoir les demandes de Madame [Z],
Juger qu’elles sont fondées,
Condamner la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco B2V à rétablir les droits de la requérante et lui verser l’intégralité des sommes restant lui devoir,
Condamner la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V à verser à Madame [Z] la somme de 16.042,75 € à titre d’arriérés de pension de retraite complémentaire, (compte provisoire),
Condamner la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V à verser la somme de 641,79 € mensuels complémentaire à Madame [Z]
A titre subsidiaire :
Ordonner à la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V de justifier du transfert des points CGIS vers Ircantec
En tout état de cause :
Condamner la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V, au paiement de la somme de 2.000 € euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux dépens.

La fédération AGIRC ARRCO et l’Alliance professionnelle retraite Agirc-Arrco – section B2V, institution de retraite complémentaire, ont constitué avocat respectivement les 13 et 14 octobre 2024.

Par conclusions notifiées le 21 novembre 2022, Mme [Z] s’est désistée de son instance introduite par erreur contre le groupement d’intérêt économique Agirc-Arrco.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 9 octobre 2023, Mme [Z] demande au tribunal, au visa des articles R.351-34, L.161-17, R.112-2 du code de la sécurité sociale ainsi que de l’article 1240 du code civil de :
Recevoir Madame [Z] en ses demandes, Juger qu’elles sont fondées, Juger que la Caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V a gravement manqué à son devoir d’information et à son obligation de faire, EN CONSEQUENCE :
CONDAMNER la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V à verser à Madame [Z] la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation d’information ;CONDAMNER la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V à verser la somme à Madame [Z] la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de sa responsabilité extracontractuelle ;CONDAMNER la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V à verser la somme à Madame [Z] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ; CONDAMNER la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V aux dépens de l’instance ; Et :
ORDONNER à la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V de justifier du transfert des points AGIRC et ARRCO sur la période de septembre à décembre 1994 ORDONNER la réintégration de l’ensemble des droits AGIRC- ARRCO acquis au sein du régime privé Agirc-Arrco pour l’ensemble de la période du 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994 ; ORDONNER à la caisse de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V de communiquer l’intégralité des pièces justificatives des calculs des points ARRCO sur la période du 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994 et de justifier par tous moyens du calcul exact du montant de la pension de retraite.
A l’appui de ses prétentions, Mme [Z] fait valoir :

- Que la défenderesse tente de rejeter la faute sur [8] et l’IRCANTEC alors qu’il résulte de l’article R. 351-34 du code de la sécurité sociale que c’est la Caisse saisie par le salarié qui est chargée de l’étude et de la liquidation des droits ; qu’ainsi, l’URSSAF précise que l’assuré peut solliciter toutes ses retraites de base au moyen d’une demande unique à adresser à la dernière caisse à laquelle il était rattaché, celle-ci se chargeant de faire le lien avec les autres caisses ;
- Que l’obligation d’information des assurés mise à la charge des organismes de sécurité sociale est prévue d’une part au titre de l’obligation spéciale en vertu de l’article L.161-17 du code de la sécurité sociale relatif à la délivrance d’un relevé de situation individuelle et à l’estimation indicative globale du montant des pensions de retraite, et d’autre part au titre de l’obligation générale en application de l’article R112-2 du Code de la sécurité sociale qui consiste pour la caisse à répondre de manière précise et exacte à toute demande d’information présentée par un assuré ou un cotisant ; que ses demandes sont restées sans réponse pendant plus de trois ans, ce qui l’a contrainte à saisir le médiateur puis la présente juridiction ; qu’elle n’a été que partiellement remplie de ses droits le 26 mai 2023 ; qu’elle ne dispose toujours pas actuellement d’un document explicatif s’agissant du traitement des points ARCCO sur la période du 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994, carence rendant impossible la vérification du montant de sa pension de retraite ;
- Que ce manquement à l’obligation d’information est à l’origine d’un préjudice, d’une part au titre de l’absence de liquidation de ses droits à retraite au 1er février 2020, d’autre part au titre des tracas occasionnés par l’ensemble des procédures rendues obligatoires par la résistance abusive de la Caisse ;
- Que la responsabilité de la Caisse est fondée sur le droit commun de responsabilité extracontractuelle, soit les articles 1240 et 1241 du code civil, la responsabilité de l’organisme défaillant étant susceptible d’être engagée chaque fois qu’il manque aux obligations qui lui incombent dans l’exécution de ses missions de service public ;
- Qu’en l’espèce, elle a perçu pendant trois ans une pension de retraite d’un montant de 128,57 euros, en l’absence du versement de 345,45 euros mensuels de pension de retraite complémentaire ; qu’elle a été dans l’impossibilité de déménager pour un logement de plain-pied comme recommandé par son médecin traitant et de différer pendant cinq ans la prise en charge de soins dentaires.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 11 décembre 2023, l’Alliance professionnelle retraite Agirc-Arrco -Section B2V demande au tribunal de :

- DEBOUTER Mme [Z] de toutes ses demandes.
- CONDAMNER Mme [Z] à verser à ALLIANCE PROFESSIONNELLE AGIRC ARRCO – Section B2V, la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
- CONDAMNER Mme [Z] au paiement des entiers dépens au titre des articles 696 et 699 du Code de procédure civile.

Elle soutient :
Que c’est la dernière caisse de retraite complémentaire qui doit procéder à la liquidation de l’ensemble des droits du salarié, selon les points calculés par chaque caisse ; que le régime dit « IRCANTEC », distinct du régime complémentaire Agirc-Arrco, est celui dont relève Mme [Z] pour la période du 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994 ; qu’il n’existe donc aucun point Agirc-Arrco à réintégrer en régime complémentaire des salariés de droit privé, alors que Mme [Z] dispose d’une retraite complémentaire IRCANTEC sur cette période ; que les droits acquis auprès du régime Agirc-Arrco au cours de cette période ont été transférés gratuitement au régime IRCANTEC qui avait la compétence de calculer, liquider et verser une retraite relevant de l’activité d’agent non titulaire des collectivités publiques ; que l’institution de retraite complémentaire [8] Agirc-Arrco était la caisse de retraite d’adhésion de Mme [Z] en 1991-1994 et avait la responsabilité de ce transfert à l’exclusion de l’Alliance professionnelle retraite Agirc-Arrco – Section B2V qui a seulement pour compétence de liquider la retraite complémentaire Agirc-Arrco en sa qualité de dernière Institution de retraite complémentaire d’adhésion à ce régime ; que pour la période postérieure au 1er juin 1994, Mme [Z] étant employée par un groupement d’intérêt public, le régime IRCANTEC s’est appliqué directement, l’IRCANTEC ayant perçu directement des cotisations qu’elle a transformées en points de retraite ;que l’article R.351-34 du code de la sécurité sociale n’institue aucune responsabilité de plein droit et est relatif au régime de base puisqu’il concerne l’assurance vieillesse (CNAV) ; que l’article R.112-2 du code de la sécurité sociale dont se prévaut Mme [Z] figure parmi les dispositions communes relatives au régime de base, tandis que l’article L.161-17 du code de la sécurité sociale est relatif à l’envoi périodique de relevés et de simulation qui ne sont pas en cause dans le cas d’espèce ; que de plus, des réponses ont été fournies à plusieurs reprises à l’intéressée ; qu’elle n’a commis aucune faute, imprudence ou négligence puisqu’elle n’est pas la caisse liquidatrice ni la caisse d’adhésion sur la période, et que Mme [Z] ne conteste pas le montant de sa retraite Agirc-Arrco ;Que les préjudices dont Mme [Z] se prévaut datent en réalité d’avant sa mise à la retraite si bien que le lien de causalité entre la faute reprochée et son préjudice estimé n’est donc pas caractérisé ; que le préjudice ne paraît paradoxalement révélé à Mme [Z] tardivement, puisqu’elle n’a introduit une demande de dommages et intérêts qu’après que sa retraite IRCANTEC ait été intégralement liquidée.
En application de l’article 455 et 768 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures des parties pour l’exposé complet de leurs moyens, qui seront repris en substance dans les motifs de la présente décision.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 février 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I) Sur la nature de la décision

L’ensemble des parties est représenté à l’instance. La décision sera donc contradictoire.

II) Sur le désistement et la détermination des parties défenderesses

Dans cette affaire la demanderesse a fait délivrer deux assignations à Agirc Arrco Alliance pro retraite B2V :
- la première a été remise par erreur de l’huissier à un tiers, soit au GIE Agirc-Arrco, ce qui ne le rend pas partie au litige ;
- la seconde a été délivrée pour pallier l’irrégularité (et fondamentalement la nullité) de la première et a bien été remise à la défenderesse.

Le dispositif de la première assignation contenait une demande de condamnation contre Agirc Arrco Alliance pro retraite B2V et contre la fédération Agirc Arrco qui n’a jamais été assignée.

La deuxième assignation a modifié la formulation des demandes, uniquement dirigées contre Agirc Arrco Alliance pro retraite B2V.
Maître Monbobier s’est néanmoins ultérieurement  constituée pour la caisse et la fédération, mais ses conclusions en défense ne sont prises que pour Agirc Arrco Alliance pro retraite B2V, puisque la demanderesse depuis la deuxième assignation, (soit la seule saisissant valablement le tribunal), puis dans ses conclusions, ne formule aucune prétention à l’encontre de la fédération.

La  fédération s’est donc constituée sans être assignée.  

En conséquence, il convient de constater :
- que le “désistement” à l’égard du GIE est sans objet puisqu’il n’était pas concerné par la première assignation, qui ne lui a été remise que par erreur de l’huissier ;
- que la constitution de la fédération est également sans objet puisqu’elle n’a jamais été assignée ;
- que le seul défendeur dans cette affaire est Agirc Arrco Alliance pro retraite B2V.

III) Sur le fond

En premier lieu, les prétentions de Mme [Z] se fondent sur les dispositions des articles L.161-17, R.112-2 et R.351-34 du code de la sécurité sociale.

En application de l’article L.161-17 du code de la sécurité sociale ainsi que des dispositions réglementaires prises pour son application, le droit à l’information des assurés sur leur retraite, qui s’étend aux régimes de retraite complémentaire, comprend le droit d’obtenir un relevé de sa situation individuelle, ainsi qu’à compter de 55 ans puis tous les cinq ans un document portant estimation indicative globale du montant total et de chacune de ses pensions, dont l’assuré est fondé à contester le contenu devant la juridiction du contentieux de la sécurité sociale.

Toutefois la mise en œuvre des droits à l’information est mise en œuvre par l’organisme ou le service prévu à l’article R.161-14 du même code.

L’article R.112-2 du code de la sécurité sociale fonde une obligation générale d’information des organismes de sécurité sociale, dont ne relèvent pas les institutions de retraite complémentaire.

De même l’article R.351-34 du même code porte sur les obligations des caisses de sécurité sociale en matière de liquidation des droits à la retraite des régimes de base et ne s’appliquent pas aux institutions de retraite complémentaire.

Décision du 27 Août 2024
1/4 social
N° RG 22/09644
N° Portalis 352J-W-B7G-CXOU6

En second lieu, la demande d’indemnisation se fonde sur régime de responsabilité extra-contractuelle de ces institutions au titre de l’article 1240 du code civil.

L’article 6 du décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 portant création du régime de retraite complémentaire des assurances sociales en faveur des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités publiques, dans sa version applicable du 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994, tel qu’issu du décret n° 78-980 du 20 septembre 1978, dispose qu’ « en cas d'affiliation d'agents d'une entreprise, d'un établissement ou d'un organisme ayant fait l'objet d'une transformation juridique, les droits acquis à titre onéreux ou à titre gratuit, en cours d'acquisition ou susceptibles d'être ouverts aux ayants droit auprès d'autres institutions relevant de l'article L.4 du code de la sécurité sociale ou de l'article 1050 du code rural et correspondant aux périodes d'activité accomplies dans ladite entreprise, ledit établissement ou ledit organisme seront pris en charge par le présent régime à titre gratuit. Ces droits seront convertis en points de retraite de ce régime dans les conditions fixées par un arrêté ».

En l’espèce, l’entité de droit privé à laquelle Mme [Z] était affectée jusqu’au 31 mai 1994 (le GIE [7]) a été reprise par le groupement d’intérêt public LFB. Par voie de conséquence, les points Agirc-Arrco décomptés par l’institution de retraite complémentaire dont elle relevait, à l’époque l’institution CGIS, devenue [8] Agirc-Arrco, devaient donner lieu à une conversion en points IRCANTEC ayant vocation à être intégrés au calcul des droits nécessaires à la liquidation de sa retraite complémentaire IRCANTEC.

Cette information a été portée à la connaissance de Mme [Z] par courrier circonstancié de l’IRCANTEC du 28 septembre 2020. Cette institution mentionnait toutefois en conclusion de ce courrier « comprendre que l’intégralité de [ses] droits n’aurait pas été transféré ». Un rapprochement avec « l’Agirc-Arrco » était annoncé pour vérifier cette situation.

De son côté, l’institution de retraite complémentaire Alliance professionnelle Agirc-Arrco, section B2V a précisé par courrier du 4 novembre 2020 n’être que la caisse de liquidation et non la caisse d’adhésion qui avait réceptionné les cotisations et transféré les droits, soit la CGIS (devenue [8]). Il était néanmoins précisé que [8] avait été contactée par ses services pour fournir une réponse. Et il était annexé les droits transférés à l’époque par la CGIS à l’IRCANTEC en application du décret du 20 septembre 1978 précité, un tableau rectifié de ces droits ayant été transmis le lendemain, soit le 5 novembre 2020.

L’institution [8] Agirc-Arrco a procédé à un décompte rectifié des points acquis pour la période d’emploi au sein du GIE [7] le 24 février 2023 seulement, ce qui a enfin permis la révision de la liquidation de la retraite complémentaire IRCANTEC, la réévaluation de l’échéance mensuelle et le paiement d’un arriéré.

Il s’évince de ces éléments que l’institution de retraite complémentaire Alliance professionnelle Agirc-Arrco, section B2V a exactement informé Mme [Z] de la situation dans laquelle elle se trouvait en indiquant le 4 novembre 2020 que le sort de sa retraite complémentaire IRCANTEC dépendait du nombre de points récapitulés par l’institution de retraite complémentaire à laquelle adhérait le GIE [7]. Elle ne pouvait en lieu et place de [8] Agirc-Arrco déterminer le nombre de points à transférer au régime géré par l’IRCANTEC, alors que le décret précité prévoit expressément que les points gratuits obtenus dans le régime des agents non-titulaires des collectivités publiques dépendent de ceux obtenus au titre de l’emploi transféré dans le nouvel organisme de droit public.

La responsabilité de l’institution de retraite complémentaire Alliance professionnelle Agirc-Arrco, section B2V ne peut être recherchée exclusivement qu’au regard de l’article 105 de l’accord national interprofessionnel Agirc-Arrco du 17 novembre 2017, selon lequel « l'institution compétente chargée de la liquidation verse au participant une allocation correspondant aux points acquis au titre de toutes les périodes de carrière relevant des institutions adhérentes à la Fédération, après application des différentes majorations ».

Or, le litige ne porte pas sur la liquidation de la retraite complémentaire dépendant du régime Agirc-Arrco, ainsi que cela a été précédemment mentionné, la partie demanderesse n’alléguant pas souffrir d’un préjudice lié à un défaut d’information lié à la liquidation de ce régime.

Il ne saurait en outre, dans le cadre de la présente instance, être porté une appréciation plus avancée sur les défaillances éventuelles de [8] Agirc-Arrco, qui n’a pas été attraite à la procédure.

Il n’est donc relevé aucun manquement de la partie défenderesse à son obligation d’information, que ce soint au titre des dispositions particulières du code de la sécurité sociale ou sur le fondement de la responsabilité extra-contractuelle.

La demande de dommages et intérêts sera en conséquence rejetée.

Il est par ailleurs demandé à l’institution de retraite complémentaire Alliance professionnelle Agirc-Arrco section B2V de justifier du transfert des points Agirc et Arrco sur la période de septembre à décembre 1994, de réintégrer l’ensemble des droits Agirc-Arrco acquis au sein du régime privé Agirc-Arrco pour l’ensemble de la période du 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994, de communiquer l’intégralité des pièces justificatives des calculs des points Arrco sur la période du 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994 et de justifier par tous moyens du calcul exact du montant de la pension de retraite.

Toutefois, s’agissant de la période postérieure au 30 septembre 1994, il n’est apporté aucune explication permettant de considérer qu’il existerait une période cotisée non prise en compte au titre du régime complémentaire Agirc-Arrco. Pour la période du 28 octobre 1991 au 30 septembre 1994, il a été précédemment retenu qu’il s’agissait d’une période pendant laquelle les cotisations avaient été recouvrées par la CGIS devenue [8] Agirc-Arrco et non par l’institution de retraite complémentaire Agirc-Arrco section B2V. Enfin, malgré les explications détaillées données par l’IRCANTEC dans son courrier du 30 mai 2023 sur la ventilation des points IRCANTEC pour la période antérieure ou postérieure au 1er juin 1994, Mme [Z] n’apporte aucune contestation précise sur le décompte de points pris en considération.

Ces prétentions seront en conséquence également rejetées.

IV) Sur les demandes accessoires

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Mme [Z], qui succombe, devra supporter les dépens de la présente procédure.
 
Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.
 
En tant que partie perdante, les prétentions de la partie demanderesse ne saurait prospérer sur ce fondement. Etant constaté la régularisation faite par [8] Agirc-Arrco en cours de procédure, qui paraît l’avoir déterminée à répondre aux demandes de renseignement que la partie défenderesse affirme lui avoir adressées depuis plusieurs années, il n’apparaît pas inéquitable que l’institution de retraite complémentaire Alliance professionnelle Agirc-Arrco section B2V conserve la charge de ses frais non répétibles.
 
En application de l’article 514 du code de procédure civile, il est rappelé que la présente décision est exécutoire de droit, étant précisé qu’aucune des parties ne demande d’en écarter l’application.


PAR CES MOTIFS
  
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
 
Déboute Mme [J] [Z] de l’ensemble de ses demandes,

Condamne Mme [J] [Z] aux entiers dépens,

Déboute les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelle que la présente décision est exécutoire par provision.

Fait et jugé à Paris le 27 Août 2024

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/4 social
Numéro d'arrêt : 22/09644
Date de la décision : 27/08/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 04/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-27;22.09644 ?
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