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29/08/2024 | FRANCE | N°21/11968

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 2ème chambre 2ème section, 29 août 2024, 21/11968


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions exécutoires délivrées le :
Copies certifiées conformes délivrées le :





2ème chambre civile

N° RG 21/11968 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUYP6

N° MINUTE :

Assignation du :
03 Août 2021

JUGEMENT
rendu le 29 Août 2024
DEMANDERESSE

Madame [X], [G], [J] [M]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Maître Philippe PERICAUD, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #P0219





DÉFENDEURS

Monsie

ur [R] [U]
[Adresse 4]
[Localité 3]

Madame [C] [U]
[Adresse 4]
[Localité 3]

Tous les deux représentés ensemble par Maître Jérôme DOULET de la SELARL SOCIÉTÉ D’AVOCATS DMALEX, ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions exécutoires délivrées le :
Copies certifiées conformes délivrées le :

2ème chambre civile

N° RG 21/11968 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUYP6

N° MINUTE :

Assignation du :
03 Août 2021

JUGEMENT
rendu le 29 Août 2024
DEMANDERESSE

Madame [X], [G], [J] [M]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Maître Philippe PERICAUD, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #P0219

DÉFENDEURS

Monsieur [R] [U]
[Adresse 4]
[Localité 3]

Madame [C] [U]
[Adresse 4]
[Localité 3]

Tous les deux représentés ensemble par Maître Jérôme DOULET de la SELARL SOCIÉTÉ D’AVOCATS DMALEX, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C2316

S.A.S.U. NEXITY LAMY
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 5]

Défaillante

Décision du 29 Août 2024
2ème chambre civile
N° RG 21/11968 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUYP6

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Madame Caroline ROSIO, Vice-Présidente, statuant en juge unique.

Assistée de Madame Audrey HALLOT, Greffière,

DÉBATS

A l’audience du 28 Mai 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu le 29 Août 2024.

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au Greffe
Réputé contradictoire et en premier ressort

_________________________

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [R] et Madame [C] [U] (les consorts [U]) ont hérité de leur mère, suite au décès de cette dernière en 1993, du lot de copropriété n°20 d’un ensemble immobilier situé à [Localité 7], cadastré section BZ, n°[Cadastre 1], Lieudit [Adresse 2].

Par acte authentique du 3 novembre 2017, les consorts [U] ont vendu à Madame [M] ce bien, d’une superficie dite “Carrez” de 22,15 m2, correspondant à un studio situé au 1er étage du bâtiment C et une cave, moyennant un prix de 195.000 euros.

Par actes d’huissier des 03 août 2021, Madame [M] a assigné les consorts [U] devant le tribunal de céans pour l’audience du 17 novembre 2021 d’une action en garantie des vices cachés.

Les consorts [U] ont assigné en intervention forcée l’agence NEXITY LAMY (SASU NEXITY LAMY) par acte d’huissier du 7 septembre 2022 par signification à personne morale.
L’instance a été enrôlée sous le numéro de RG 22/10736.

Le 05 octobre 2022, le juge de la mise en état a ordonné par mention au dossier la jonction de l’instance enregistrée sous le numéro de RG 22/10736 à la présente procédure.

En l’état de ses conclusions n°1 notifiées par voie électronique le 08 novembre 2022, Madame [M] sollicite du tribunal de céans de:

- juger Madame [M] recevable et bien fondée en son action entreprise devant la présente juridiction à l’encontre des consorts [U] et de l’agence NEXITY LAMY,
- juger que le bien qu’elle a acquis sis au 1er étage gauche du bâtiment C du [Adresse 2] [Localité 7], le 3 novembre 2017 est affecté de vices cachés au moment de la vente tenant en des infiltrations récurrentes en provenance de la toiture du bâtiment C dont elle n’a eu connaissance ainsi que de leur origine et de leur ampleur que le 6 avril 2020,
- juger que Madame [M] n’a eu connaissance de l’ampleur du mauvais état et de l’absence d’entretien de la copropriété que le 9 novembre 2020, cet élément étant également constitutif d’un vice caché au sens des dispositions des articles 1641 et suivants du Code Civil ; l’aggravation de ce vice, quant au risque encouru lié à l’état de délabrement du mur d’échiffre du bâtiment C n’ayant en outre pu être relevée par Madame [M] qu’à l’aide du rapport de l’architecte en date du 18 février 2021,
- juger que les vendeurs, les consorts [U], avaient parfaitement connaissance de l’état réel du bien et de l’immeuble dans lequel il s’inscrit, au jour de la vente,

- juger que le préjudice en résultant pour Madame [M] s’évalue comme suit :
50.000 euros à défaut de chiffrage des travaux de reprise à ce stade, à parfaire, outre les frais occasionnés par la vente au prorata de la réduction du prix,5.000 euros en réparation du préjudice moral subi,5.000 euros en réparation du préjudice de jouissance à venir et découlant des travaux de réfection à entreprendre et de leur durée au sein de son logement.

Et par conséquent,

- juger que les consorts [U] ont engagé leur responsabilité civile à l’égard de leur acquéreur, Madame [M], sur le fondement de la garantie des vices cachés,
- condamner in solidum les consorts [U] à indemniser Madame [M] en l’ensemble de ses préjudices soit à la somme de 60.000 euros à parfaire, tous préjudices confondus,

Subsidiairement et dans l’hypothèse où le Tribunal considèrerait que la garantie des vices cachés n’est pas applicable en l’espèce, alors il devra, de toute façon :

- juger que les consorts [U] ont manqué à leur obligation d’information à l’égard de leur acquéreurs et qu’ils ont donc engagé leur responsabilité civile à l’égard de Madame [M] sur le fondement des dispositions des articles 1602 et 1112-1 du Code Civil,
- condamner in solidum les consorts [U] à indemniser Madame [M] de son entier préjudice en ayant résulté soit à la somme de 60.000 euros répartie comme suit :

50.000 euros à défaut de chiffrage des travaux de reprise à ce stade, à parfaire,5.000 euros en réparation du préjudice moral subi,5.000 euros en réparation du préjudice de jouissance à venir et découlant des travaux de réfection à entreprendre et de leur durée au sein de son logement.

Plus subsidiairement encore,

- juger que la société NEXITY LAMY, tout au moins en sa qualité d’agent immobilier en charge de la vente du bien litigieux et pourtant syndic de l’immeuble à l’époque, a engagé sa responsabilité civile délictuelle à l’égard de Madame [X] [M] et qu’il devra par conséquent, l’indemniser intégralement de son entier préjudice subi, soit à hauteur de la somme de 60.000 euros à parfaire,

Et enfin, à titre extrêmement subsidiaire,

Avant dire droit,

Si par extraordinaire, le Tribunal devait considérer ne pas disposer des éléments nécessaires pour se prononcer désigner tel Expert qu’il lui plaira avec mission suivante :

- Se rendre sur les lieux, après y avoir convoqué les parties,
- Rechercher l'existence des vices allégués dans l'assignation et les pièces annexées, les décrire dans leur nature et dans leur importance, dire s'ils affectent l'usage attendu du bien et, dans l'affirmative, dire dans quelle mesure,

- Indiquer, le cas échéant, s'ils étaient apparents lors de l'acquisition ou s'ils sont apparus postérieurement :
dans le premier cas, indiquer s'ils pouvaient être décelés par un acquéreur profane et si celui-ci pouvait en apprécier la portée,dans le second cas, s'ils trouvent leur origine dans une situation postérieure à l'acquisition, notamment s'ils sont la conséquence des travaux réalisés par le demandeur,
- Dire s’ils étaient forcément connus des vendeurs au moment de la vente,
- Donner un avis sur la moins-value éventuelle causée par ce vice à l'immeuble,
- Après avoir exposé ses observations sur la nature des travaux propres à remédier aux vices et leurs délais d'exécution, chiffrer, à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d'un maître d'oeuvre, le coût de ces travaux nécessaires pour remédier aux vices constatés,

- Fournir tous éléments de fait de nature à caractériser l'existence et l'évaluation du trouble de jouissance pour Madame [M],

- Dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l'aggravation des vices et du préjudice qui en résulte, soit pour prévenir les dommages aux personnes ou aux biens,

dans l'affirmative, à la demande d'une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvegarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire dans un rapport intermédiaire qui devra être déposé aussitôt que possible (Durée X mois, provision Y euros).

En toute hypothèse,

- condamner in solidum les consorts [U] et la société NEXITY LAMY à verser à Madame [M] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 16 janvier 2023, les consorts [U] ont requis du tribunal de :

A titre principal,
- déclarer Madame [M] irrecevable en ses demandes fondées sur la garantie des vices cachés ;

A titre subsidiaire,
- déclarer injustifiées les demandes de Madame [M] sur le fondement de la garantie des vices cachés ;
- débouter notamment Madame [M] de sa demande d’expertise ;
- déclarer injustifiées les demandes de Madame [M] sur le fondement de l’obligation d’information ;
- débouter Madame [M] de l’intégralité de ses demandes.

A titre plus subsidiaire,
- condamner la société NEXITY LAMY à relever et à garantir les consorts [U] de toutes condamnations principales, frais et intérêts accessoires, qui pourraient être prononcées à leur encontre au profit de Madame [M] ;
- condamner la société NEXITY LAMY à restituer aux consorts [U] les honoraires perçus en sa qualité d’intermédiaire en transaction immobilière à l’occasion du mandat de vente conclu le 20 août 2017 ;

A titre reconventionnel,
- condamner Madame [M] à payer aux consorts [U] chacun la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi en raison du caractère abusif de la procédure initiée à leur encontre ;

- condamner Madame [M], ou tout succombant, à payer aux consorts [U] ensemble la somme de 4.680 euros;
- condamner Madame [M], ou tout succombant, aux entiers dépens d’instance ;
- rappeler que le jugement à intervenir est exécutoire par provision de plein droit.

Il sera renvoyé aux conclusions des parties précitées pour un exposé exhaustif des demandes des parties et moyens à leur soutien, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 08 février 2023 et l’audience de plaidoiries fixée au 18 octobre 2023. En raison des nécessités du service, l’audience de plaidoirie a été reportée au 28 mai 2024.

Madame [M] a été autorisée à nous faire parvenir en délibéré les documents relatifs à la dernière assemblée générale des copropriétaires.

A l’issue des débats, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 29 août 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre préliminaire, il sera relevé que les demandes tendant à voir « juger que», qui n’élèvent pas de droit spécifique au profit de la partie qui les formule, ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile, mais relèvent des moyens. Elles ne donneront donc pas lieu à mention dans le dispositif du présent jugement.

1) Sur l‘absence de la société NEXITY LAMY

Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime recevable et bien fondée.

Citée à personne morale, la SAS NEXITY LAMY n’a pas constitué avocat. L’affaire sera réputée contradictoire.

2) Sur la fin de non-recevoir

Les consorts [U] soutiennent que l’action en garantie des vices cachés formée par Madame [M] est irrecevable car formée plus de deux ans après la découverte du vice.

Sur ce,

Selon l'article 789 du code de procédure civile, les parties ne sont plus recevables à soulever une fin de non recevoir après le dessaisissement du juge de la mise en état lorsqu'il y a eu désignation d'un tel juge, à moins que la fin de non recevoir ne soit révélée postérieurement au dessaisissement de ce juge.

Le décret du 11 décembre 2019, applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, a ainsi opéré une extension des pouvoirs du Juge de la mise en état qui peut désormais connaître des fins de non-recevoir.

En vertu de l'article 122 du même code, constitue une fin de non recevoir, relevant donc de la compétence du juge de la mise en état, tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfixe, la chose jugée.

En l'espèce, les consorts [U] ont soulevé dans leurs conclusions au fond notifiées le 05 septembre 2022 une fin de non recevoir, pour prescription, alors qu'un juge de la mise en état, désigné le 26 janvier 2022, était saisi de l'affaire. Les consorts [U] ne justifient d’aucune signification de conclusions distinctes saisissant le juge de la mise en état de leur fin de non recevoir.

Ils n’ont donc pas régulièrement saisi le juge de la mise en état de leur fin de non recevoir, alors que ce dernier était seul compétent pour en connaître.

La fin de non recevoir sera déclarée irrecevable et Madame [M] recevable en son action.

3) Sur la garantie des vices cachés

Madame [M] demande au tribunal de condamner in solidum les consorts [U] à l’indemniser « en l’ensemble de ses préjudices soit à la somme de 60.000 euros à parfaire, tous préjudices confondus ».

Ainsi elle sollicite en premier lieu une réduction du prix d’achat en fonction du coût des travaux et demande une indemnisation de son préjudice matériel à hauteur de 50.000 euros, à parfaire, égale aux frais de déménagement, de relogement, de frais de constats et de frais occasionnés par la vente, outre le coût des travaux suivants:

- de reprise des désordres structurels en toiture, plancher et mur d’échiffre du bâtiment C,
- de reprise de l’escalier C et du passage d’accès à la cour et au bâtiment C (sous l’escalier du bâtiment A à démolir et reconstruire),
- de renforcement du plancher bas de son appartement.

Elle sollicite en second lieu un préjudice moral de 5.000 euros en raison:

- du silence des vendeurs sur le suivi de la copropriété par la préfecture de [Localité 6] depuis 2013 constitutif d’un vice du consentement,
- de ses démarches auprès des syndics successifs pour avoir une parfaite connaissance de la situation de la copropriété.

Elle sollicite en outre une préjudice de jouissance à hauteur de 5.000 euros.

Elle fait valoir que les infiltrations récurentes en provenance de la toiture du bâtiment C et de l’état de la charpente, les désordres affectant le mur d’échiffre de l’escalier du bâtiment C et les fissures structurelles du bâtiment A constituent des vices cachés et que la simple remise des procès-verbaux d’assemblée générale des copropriétaires mentionnant des éléments sur l’état du bien et de l’immeuble ne peut suffire à exonérer le vendeur de la garantie des vices cachés. Elle ajoute qu’elle n’avait pas connaissance de procédures d’arrêtés de périls engagées par la mairie de [Localité 6] à l’encontre de la copropriété antérieurement à la vente et que l’origine et les causes du désordre concernant son plancher bas qui menace de s’effondrer remonte a minima à 2013. Elle soutient que les vendeurs ne peuvent se prévaloir de la clause d’exonération de responsabilité prévue au contrat de vente dès lors que ces vices cachés étaient connus de ceux-ci.

Les consorts [U] opposent qu’ils ne sont pas professionnels de l’immobilier et ne détenaient au sujet de l’état des parties communes de l’immeuble d’autres informations que celles communiquées à Madame [M] dans le cadre de la vente et qui étaient contenues dans les procès-verbaux des assemblées générales des copropriétaires. Ils ajoutent que l’état de la toiture du bâtiment C et l’existence d’infiltrations était un vice apparent qu’elle a pu constater lors des visites et dont elle a eu connaissance antérieurement à la vente dans les procès-verbaux des assemblées générales des copropriétaires qui se sont tenues le 17 décembre 2015 et le 23 février 2017, qu’aucun arrêté de péril concernant l’immeuble n’a été pris par la préfecture, ni ne lui a été caché.

En outre ils soutiennent que ces désordres ne rendent pas le bien acquis impropre à sa destination. Enfin ils estiment que la demanderesse doit être déboutée de ses demandes indemnitaires, le montant de la restitution partielle du prix dans le cadre d’une action estimatoire ne pouvant être fixée en fonction du coût des travaux nécessaires pour remédier aux vices.

Sur ce,

Aux termes des articles 1641 et suivants du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

Dans ce cas, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Il résulte de ces dispositions que le vendeur professionnel, présumé connaître les vices de la chose vendue, ne peut s'exonérer de la garantie des vices cachés.

En l'espèce, l'acte de vente du 3 novembre 2017 stipule que "l'acquéreur prend les biens vendus dans l'état où ils se trouvent au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur.
S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette absence de garantie ne s'applique pas si le vendeur a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la constrution, ou s'il est réputé ou s'est comporté comme tel" ou "s'il est prouvé par l'acquéreur, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du vendeur".

Il n'est pas contesté que les consorts [U] n’ont pas la qualité de professionnels de l’immobilier.

En conséquence, il n'y a pas lieu d'écarter a priori l'application de la clause d'exonération de la garantie des vices cachés stipulée dans l'intérêt du vendeur.

Toutefois cette clause exonératoire ne saurait trouver application s'il est établi par l'acquéreur que le vendeur avait connaissance du vice allégué, ou s'il est établi que le vendeur a lui-même réalisé les travaux à l'origine du vice allégué.

Il conviendrait dès lors d'examiner successivement les vices allégués par Madame [M].

Cependant, avant l’examen de ceux-ci, il sera constaté que Madame [M] ne sollicite pas la restitution d’une partie du prix en raison de la perte de chance d’avoir pu acquérir le bien, en connaissance de cause, à un prix plus modéré, mais elle demande une réduction du prix calculée en fonction du coût des travaux qu’elle sera amenée à régler.

Or, le montant de la restitution, dans le cadre de l’action estimatoire, ne peut être fixée au coût des travaux nécessaires pour remédier au vice, ni en raison du préjudice de jouissance ou du préjudice moral allégué.

Ainsi la demande indemnitaire dans le cadre de l’action estimatoire de Madame [M] sera rejetée.

4) Sur le manquement à l’obligation d’information des vendeurs

Madame [M] soutient que les vendeurs ont manqué à leur devoir d’information en ne l’alertant pas sur l’état réel de l’immeuble où de lourds et coûteux travaux de confortement sont à faire depuis des années.

Les consorts [U] s’opposent à sa demande et font valoir que la vente a fait l’objet d’un compromis conclu les 1er et 4 septembre 2017 par l’entreprise du cabinet Nexity [Localité 6] Nation qui était parallèlement syndic de l’immeuble et qui a ainsi pu communiquer tous les éléments concernant la copropriété, que Madame [M] a eu connaissance du carnet d’entretien de l’immeuble et des trois derniers procès-verbaux des assemblées générales et a également pu visiter l’immeuble et se rendre compte de l’état des parties communes.

Sur ce,

Selon l’article 1112-2 du code civil, il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait et qu’elle n’en a pas eu connaissance.

En l’espèce, Madame [M] soutient que le bien est affecté de problèmes structurels et que cette information ne lui a pas été communiquée lors de la vente.

Il ressort cependant des éléments ci-dessus exposés qu’elle a eu connaissance, au moment de la vente, de l’existence de désordres structurels de l’immeuble et du fait que des travaux allaient être nécessaires à court terme, le procès-verbal de l’assemblée générale du 17 décembre 2015 faisant mention de désordres constatés par l’architecte qui a informé le syndicat des dangers de l’escalier du bâtiment fond de cour et le procès-verbal de l’assemblée générale du 23 février 2017 prévoyant dans sa résolution n°6 des travaux d’urgence sur le plafond de l’escalier Bat C RDC “dans le cadre des travaux d’urgence et sur ordre de la préfecture de police”, ce qui ne pouvait qu’alerter tout acquéreur quant à la solidité de l’immeuble.

Ainsi Madame [M] ne prouve pas qu’elle n’a pas été informée des problèmes structurels de l’immeuble et d’une procédure en cours avec la préfecture de police.

Sa demande à ce titre sera donc rejetée.

5) Sur la responsabilité de l’agent immobilier, syndic de l’immeuble

Madame [M] soutient que l’agent immobilier a manqué à son obligation d’information et de loyauté en ce qu’il disposait de tous les éléments utiles pour alerter et informer de manière expresse et la plus complète le potentiel acquéreur sur la situation de l’immeuble et du bien litigieux.

En l'espèce il est reproché à la société NEXITY LAMY d’avoir manqué à son obligation d’information et de conseil. Cependant il n’est pas contesté que les procès-verbaux d’assemblée générale des copropriétaires ont été communiqués et ceux-ci sont suffisamment explicites sur l’état de l’immeuble.

Ainsi aucune faute n’est caractérisée de la part de la société NEXITY LAMY et la demande indemnitaire sera rejetée.

6) Sur la procédure abusive

Les consorts [U] demandent au tribunal que Madame [M] soient condamnée à leur verser une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi en raison du caractère abusif de la procédure initiée à leur encontre.

Ils soutiennentt que l’action initiée par Madame [M], parfaitement injustifiée, et près de quatre années après son acquisition, revêt un caractère abusif.

Madame [M] n’a pas répondu sur cette demande.

Sur ce,

L’exercice d’une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à indemnisation que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, les consorts [U] seront déboutés de leur demande à ce titre, à défaut de rapporter la preuve d’une quelconque faute ou légèreté blâmable de la part de Madame [M], qui a pu légitimement se méprendre sur l’étendue de ses droits et d’établir l’existence d’un préjudice autre que celui subi du fait des frais exposés pour leur défense.

7) Sur la demande d’expertise

Cette demande présentée à titre extrêmement subsidiaire et avant dire droit par Madame [M] se trouve dépourvue d’objet du fait du rejet de ses demandes en garantie des vices cachés et pour défaut d‘information, comme n’étant plus utile à la solution du litige.

Madame [M] se voit donc déboutée de cette demande.

8) Sur les demandes accessoires

Madame [M] succombant dans la présente instance, il convient de la condamner aux dépens et à verser aux consorts [U] une somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Enfin il sera rappelé, au visa de l'article 514 du code de procédure civile, que le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire par mise à disposition au greffe et en premier ressort,

Déclare irrecevable la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [R] [U] et Madame [C] [U] devant le tribunal de céans;

Reçoit Madame [X] [G] [J] [M] en son action estimatoire en garantie des vices cachés;

Rejette la demande indemnitaire formée par Madame [X] [G] [J] [M] en son action estimatoire en garantie des vices cachés;

Rejette la demande indemnitaire formée par Madame [X] [G] [J] [M] à l’encontre de Monsieur [R] [U] et Madame [C] [U] en raison de leur manquement à leur obligation d’information;

Rejette la demande indemnitaire formée par Madame [X] [G] [J] [M] à l’encontre de la société NEXITY LAMY, tout au moins en sa qualité d’agent immobilier en charge de la vente du bien litigieux ;

Déboute Madame [X] [G] [J] [M] de sa demande d’expertise;

Condamne Madame [X] [G] [J] [M] aux dépens;

Condamne Madame [X] [G] [J] [M] à verser à Monsieur [R] [U] et Madame [C] [U] une somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

Constate l’exécution provisoire du présent jugement;

Fait et jugé à Paris le 29 Août 2024

La Greffière La Présidente
Audrey HALLOT Caroline ROSIO


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 2ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 21/11968
Date de la décision : 29/08/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 07/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-29;21.11968 ?
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