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03/09/2024 | FRANCE | N°21/03961

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 1ère section, 03 septembre 2024, 21/03961


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




8ème chambre
1ère section


N° RG 21/03961 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUAIC


N° MINUTE :


Assignation du :
12 Mars 2021







JUGEMENT
rendu le 03 Septembre 2024
DEMANDERESSE

Madame [I], [X], [P] [G]
[Adresse 1]
[Localité 6]

représentée par Maître Eléonore DANIAULT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0282


DÉFENDEURS

La Caisse Régionale d’Assu

rances Mutuelles Agricoles de Rhône Alpes Auvergne dite GROUPAMA RHONE ALPES AUVERGNE
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Maître Matthieu MALNOY de la SELAS L ET ASSOCIES, avocat au barreau de PAR...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

8ème chambre
1ère section

N° RG 21/03961 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUAIC

N° MINUTE :

Assignation du :
12 Mars 2021

JUGEMENT
rendu le 03 Septembre 2024
DEMANDERESSE

Madame [I], [X], [P] [G]
[Adresse 1]
[Localité 6]

représentée par Maître Eléonore DANIAULT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0282

DÉFENDEURS

La Caisse Régionale d’Assurances Mutuelles Agricoles de Rhône Alpes Auvergne dite GROUPAMA RHONE ALPES AUVERGNE
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Maître Matthieu MALNOY de la SELAS L ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0550

Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5], représenté par son syndic, la société LA GESTION FONCIERE
[Adresse 2]
[Localité 6]

représenté par Maître Catherine ROBIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0633
Décision du 03 Septembre 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/03961 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUAIC

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente
Monsieur Julien FEVRIER, Juge
Madame Muriel JOSSELIN-GALL, Vice-Présidente

assistés de Madame Justine EDIN, Greffière,

DÉBATS

A l’audience du 15 Mai 2024 tenue en audience publique devant Madame Laure BERNARD, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 15 décembre 2017, Mme [I] [G] est devenue propriétaire du lot n°205 situé dans le bâtiment A, 1er étage de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 6], consistant en un appartement, au sein duquel elle a fait réaliser des travaux de rénovation, terminés en mai 2018.

Subissant la présence d'insectes xylophages au sein de son lot, Mme [G] a informé le syndic de la situation au mois d'avril 2019, et a quitté les lieux.

Après plusieurs interventions techniques et sondages, il a été voté lors de l'assemblée générale du 27 mai 2020 le principe de travaux de reprise de la structure en pans de bois de l'immeuble et de ravalement de la façade arrière du bâtiment A.

Lors de l'assemblée générale du 11 janvier 2021, Mme [G] a sollicité que les travaux de remise en état de son appartement, postérieurs à ceux de reprise de la structure de l'immeuble, soient pris en charge par le syndicat des copropriétaires, ce qui a été rejeté.

C'est dans ces conditions que, par actes d'huissier du 12 mars 2021, Mme [G] a assigné devant la juridiction de céans, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble en cause, représenté par son syndic en exercice, afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.

Par acte du 16 avril 2021, le syndicat des copropriétaires a assigné en intervention forcée et en garantie son assureur, la SA Groupama Rhône Alpes Auvergne (ci-après " Groupama ").

Les instances ont été jointes.
Décision du 03 Septembre 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/03961 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUAIC

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 10 mai 2022, Mme [G] demande au tribunal de:
" Vu l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965,
Vu les pièces versées aux débats,
- Dire Mme [G] recevable et bien fondée en ses demandes,
- Condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et Groupama Rhône Alpes Auvergne à payer à Mme [G] les sommes suivantes :
16.728 € au titre du préjudice de jouissance subi pour la période allant d'avril 2019 à mars 2021 inclus,
10.719,50 € TTC au titre des travaux de remise en état de son appartement,
1.837,23 € au titre du remboursement des charges de copropriété,
1.285.00 € au titre des frais avancés,
10.000 € au titre du préjudice moral,
5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et Groupama Rhône Alpes Auvergne aux entiers dépens, dont recouvrement au profit de Maître Eléonore Daniault, avocat au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- Dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision à intervenir. "

Au visa de l'article 14 de loi du 10 juillet 1965, Mme [G] sollicite l'engagement de la responsabilité du syndicat des copropriétaires dans les désordres subis par son appartement consistant en l'invasion d'insectes xylophages provenant des parties communes de l'immeuble.

Elle s'estime dès lors fondée à solliciter l'indemnisation des divers préjudices subséquents qu'elle dit avoir subi, soit :
- un préjudice de jouissance des lieux, son bien étant devenu totalement inhabitable, l'obligeant à retourner vivre chez ses parents, à compter du mois d'avril 2019 et jusqu'en avril 2021, date de réalisation des travaux de remise en état de l'appartement ;
- un préjudice matériel consistant en les travaux de remise en état ;
- les charges de copropriété réglées durant la période d'inoccupation du bien ;
- les frais avancés, de recherche et de constats, ainsi que de fumigation;
- un préjudice moral, soutenant avoir subi une situation traumatisante, ayant dû quitter son appartement peu de temps après l'avoir acheté, et l'avoir ensuite récupéré dans un état totalement dégradé du fait des sondages et travaux réalisés par la syndicat des copropriétaires.

Elle précise avoir revendu son bien en septembre 2021.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 12 décembre 2022, le syndicat des copropriétaires demande au tribunal de :
" Vu les dispositions des articles 1240 et suivants du code civil,
Vu l'article L.124-1 du code des assurances,
- Juger Mme [I] [G] irrecevable et mal fondée en ses demandes,
- Débouter Mme [I] [G] en toutes ses demandes, fins et conclusions,

- Juger la clause excluant " les dommages résultant du défaut d'entretien ou de réparation caractérisé et connu de l'assuré " nulle et inopposable au syndicat des copropriétaires,
- Juger les garanties de la compagnie Rhône-Alpes Auvergne acquises au syndicat des copropriétaires,
- Débouter la compagnie Rhône-Alpes Auvergne en toutes ses demandes,
Dans l'hypothèse d'une condamnation prononcée à l'encontre du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5],
- Condamner la compagnie Rhône-Alpes Auvergne à le relever et le garantir indemne de toute condamnation prononcée à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires,
- Condamner tout succombant aux dépens d'instance,
- Condamner tout succombant à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] la somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. "

Le syndicat des copropriétaires soutient avoir été diligent dans la gestion du sinistre dénoncé par Mme [G] et qu'aucune inertie fautive ne saurait lui être valablement reprochée.

Il critique les sommes dont la demanderesse réclame le paiement à titre indemnitaire, qu'il estime infondées tant dans leur principe que dans leur quantum.

Subsidiairement, le syndicat des copropriétaires sollicite la garantie de son assureur, dont il affirme que les conditions sont réunies et qu'elle couvre notamment les préjudices immatériels consécutifs.

Il conteste l'exclusion de garantie opposée par ce dernier, se prévalant de ce qu'elle n'est ni formelle ni limitée et ne peut donc trouver à s'appliquer.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 14 mars 2023, Groupama demande au tribunal de :
" Vu l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965,
Vu l'assignation délivrée à la requête de Mme [G],
Vu l'assignation en garantie du syndicat des copropriétaires,
Vu le contrat d'assurance,
Vu les pièces versées au débat,
- Dire et juger que ce ne sont pas les travaux entrepris par la copropriété qui sont à l'origine des dommages dont Mme [G] demande réparation,
- Dire et juger que le syndicat des copropriétaires a fait toutes diligences pour remédier à la situation dommageable alléguée,
- Dire et juger que le contrat d'assurance souscrit par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] auprès de Groupama Rhône-Alpes Auvergne ne peut trouver application,
- Constater que le syndic savait qu'aucune garantie ne pouvait être due par Groupama Rhône-Alpes Auvergne,
En conséquence,
- Rejeter la demande en garantie présentée par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5],
- Débouter tant Mme [G] que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de toute demande contre Groupama Rhône-Alpes Auvergne,
- Rejeter les demandes au titre des dépens et des frais irrépétibles ".
Décision du 03 Septembre 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/03961 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUAIC

Groupama conclut à l'absence de responsabilité du syndicat des copropriétaires dans la survenance des désordres subis par Mme [G] au sein de son lot, compte tenu des diligences effectuées par le dernier.

Il conclut également que sa garantie n'est pas due, excipant d'une absence de déclaration de sinistre émanant du syndic après information du sinistre, d'une part, et d'une clause d'exclusion de garantie concernant les dommages résultant d'un défaut d'entretien de celui-ci en sa qualité d'assuré, d'autre part.

A titre subsidiaire, Groupama critique le quantum des sommes réclamées par la demanderesse à titre indemnitaire.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, il convient de renvoyer aux termes de leurs dernières écritures susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction a été close par ordonnance du 02 octobre 2023.

L'affaire, appelée à l'audience du 15 mai 2024, a été mise en délibéré au 03 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Relevons à titre liminaire que si, aux termes du dispositif de ses écritures, le syndicat des copropriétaires sollicite du tribunal de " juger Mme [G] irrecevable ", il ne se prévaut d'aucun moyen de droit ou de fait au soutien de cette demande, de sorte que le tribunal n'a pas à l'examiner, en application des dispositions de l'article 768 du code de procédure civile selon lequel " Les conclusions doivent formuler expressément les prétentions des parties ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. (…) Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées. "

Sur les demandes de " dire ", de " juger " et de " dire et juger "

Il n'y a pas lieu de statuer sur ces demandes, lesquelles ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile mais sont la reprise des arguments développés dans les écritures des parties.

Sur la demande principale en indemnisation

Sur la matérialité des désordres

Il ressort des éléments produits aux débats notamment les constats d'huissier - photographies et avis techniques que l'appartement de Mme [G] a subi une invasion d'insectes xylophages, signalée dès le mois d'avril 2019 au syndic de l'immeuble, et qui l'a contrainte à quitter les lieux, devenus inhabitables.

La matérialité de conseil syndical désordres n'est au demeurant pas contesté en défense.

Sur l'origine des désordres et les responsabilités engagées

Selon l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019, le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes et il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

La responsabilité de plein droit du syndicat est donc susceptible d'être engagée en présence de dommages causés aux copropriétaires ayant pour origine les parties communes, indépendamment de toute faute.

La démonstration d'un dommage ayant pour origine les parties communes est la condition nécessaire mais suffisante pour justifier l'engagement de la responsabilité du syndicat des copropriétaires sur ce fondement. Par ailleurs, il est constant qu'en application de ce texte, le syndicat des copropriétaires ne peut s'exonérer de sa responsabilité au motif qu'il n'a commis aucune faute.

Sur ce,

Il s'évince de l'analyse des pièces versées aux débats que, dès le signalement de Mme [G] s'agissant de la présence d'insectes au sein de son lot, il a été effectué des premiers sondages par la société PharmaBois, laquelle a retenu, dans son rapport du 06 juin 2019, qu'il était " fort probable que les insectes type larves xylophages découverts ont été acheminés dans l'appartement de Mme [G] à travers les plinthes creuses de la cuisine mises en place.(...) Suite à nos investigations nous n'avons pas constaté l'existence d'insectes de type larves xylophages vivants dans la copropriété. En conséquence nous préconisons de traiter l'appartement de Mme [G] par fumigation".

Néanmoins et d'une part, ces premiers constats sont contrebalancés par le fait que la même société mentionne, en première page du rapport précité, que " Les sondages réalisés ne permettent pas de déterminer précisément l'origine de l'infestation. Avant la réalisation de sondages complémentaires de plus grande ampleur notamment au niveau du plafond du logement, nous recommandons de faire réaliser un traitement par fumigation de l'appartement ".

Ensuite et d'autre part, à l'issue de nouvelles opérations de sondages effectuées sur initiative du syndic après de nouveaux désordres signalés par Mme [G], il a été établi comme l'indique le syndic à la demanderesse dans son écrit du 26 décembre 2019 que " suite au passage de l'architecte et de l'entreprise pour l'ouverture de la cloison et des sondages ponctuels semi-destructifs, il a été constaté la présence d'insecte dans l structure de l'immeuble au niveau de cet appartement. De ce fait un ingénieur structure (la société ISER) a été mandatée pour un diagnostic technique du pan de bois en pignon, afin de fournir l'état de l'ossature en bois dudit pignon. "

Il s'en évince ainsi que le sinistre subi par Mme [G] au sein de son lot trouve son origine dans la structure de bois de l'immeuble, partie commune, ce que le syndicat des copropriétaires ne conteste au demeurant pas.

Cela suffit à engager la responsabilité du syndicat des copropriétaires au visa de l'article 14 de loi du 10 juillet 1965, sans qu'il soit nécessaire d'établir une éventuelle inertie fautive dudit syndicat dans la gestion de la situation.

S'il est mis en exergue, en défense, la connaissance par Mme [G] de la présence de tels insectes au sein de son lot dès le mois de mai 2018 cet élément ne saurait suffire à exonérer le syndicat des copropriétaires de sa responsabilité, ce d'autant qu'il n'est ni prétendu ni justifié de ce que l'attention de la demanderesse, profane, aurait été attirée par des professionnels sur la nécessité de ne pas faire réaliser les travaux de rénovation de son appartement compte tenu de cette situation.

Par conséquent, la responsabilité du syndicat des copropriétaires doit être retenue dans la survenance du sinistre subi par Mme [G] au sein de son lot.

Sur la réparation des préjudices

Le principe de la réparation intégrale du préjudice subi impose que la personne à l'origine des désordres indemnise celui qui les a subis de l'intégralité de ces préjudices, à les supposer établis.

Il appartient au juge d'évaluer le montant d'un dommage dont il constate l'existence dans son principe (ex. : Civ. 3ème, 25 janvier 2006, n° 04-20.726).

S'agissant de la demande formée au titre des travaux de remise en état de son appartement, il ressort tant du rapport de la société CEDIBAT du 07 janvier 2021 que du procès-verbal de constat d'huissier du 05 février 2021 que nonobstant les travaux de réfection réalisés par le syndicat des copropriétaires ( doublage plafond en BA 13, avec enduit et remise en peinture du plafond et des murs de la cuisine et de la salle de bains), l'appartement de Mme [G] était inhabitable et des travaux de réfection étant indispensables.

Mme [G] est dès lors recevable et fondée à solliciter la prise en charge de ces travaux, le fait qu'elle ait vendu son bien en septembre 2021 étant inopérant.

Décision du 03 Septembre 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/03961 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUAIC

Pour justifier du quantum qu'elle sollicite, Mme [G] fournit aux débats un devis de la société Bella Casa du 04 mars 2021 ainsi qu'une facture de la même société, du 10 février 2021, pour un montant global de 10.719,50 euros.

Il convient dès lors de faire droit à sa demande au titre du préjudice matériel et de lui allouer la somme précitée de 10.719,50 euros.

S'agissant de la demande indemnitaire au titre du préjudice de jouissance, il n'est pas contesté que Mme [G] a cessé d'habiter son appartement dès le mois d'avril 2019, et qu'elle a fait entreprendre des travaux de rénovation en début d'année 2021, afin de le mettre en vente.

En outre, si le syndicat des copropriétaires le conteste, il est établi par les pièces produites, notamment celles précitées soit le rapport de la société CEDIBAT du 07 janvier 2021 et le procès-verbal de constat d'huissier du 05 février 2021 que ledit appartement est resté inhabitable à minima jusqu'au mois de février 2021, le syndicat ne justifiant d'ailleurs pas de la date exacte de fin des travaux réalisés par ses soins.

En revanche, il doit également être tenu compte de ce que Mme [G] connaissait depuis le mois de mai 2018 l'état de dégradation avancée de la structure bois de l'immeuble, comme le souligne l'architecte de la copropriété dans son rapport du 12 novembre 2019 en ces termes : " nous tenons à informer le syndicat que Mme [G] nous a transmis une vidéo du moment où celle-ci réalisait les travaux dans son appartement dans laquelle elle filme l'état de la structure bois qui était déjà dans un état alarmant. Nous pouvons également apercevoir des bêtes qui ressemblent à des larves xylophages. La propriétaire des lieux n'a pas signalé à notre connaissance au syndic l'état de la structure (...) ", ce qui n'est au demeurant pas contesté par la demanderesse.

En n'informant pas en temps utile le syndic de cette situation, Mme [G] a contribué à son propre préjudice de jouissance, qui doit dès lors être considéré comme une perte de chance de pouvoir faire cesser plus rapidement le sinistre et donc de bénéficier plus tôt d'une jouissance paisible des lieux.

Il convient dès lors, en réparation de ce préjudice de perte de chance d'accorder à Mme [G] une somme que le tribunal estime devoir fixer à 8.000 euros, le surplus formé à ce titre étant rejeté.

La demande de Mme [G] d'indemnisation au titre des charges de copropriété réglées par ses soins entre le 1er avril 2019 et le 31 mars 2021 ne saurait prospérer dès lors que le paiement de telles charges est inhérente à sa qualité de propriétaire d'un bien situé dans un immeuble en copropriété et ne saurait être considéré comme préjudiciable à l'intéressée, quelque que soit l'état de plus ou moins grande habitabilité des lieux.

Elle sera donc rejetée.

S'agissant de la demande en remboursement de " frais avancés ", les sommes réclamées au titre des procès-verbaux de constats d'huissier et d'intervention d'un expert doivent être appréhendées comme relevant de la catégorie des frais irrépétibles, qui sera examinée supra.

Il convient en revanche de faire droit à la demande de remboursement des frais de fumigation de l'appartement de l'intéressée à hauteur de 46,80 euros, montant justifié par la production de la facture correspondante, Mme [G] indiquant dans ses écritures que la première opération de fumigation a été prise en charge par le syndicat.

Une somme de 46,80 euros est donc allouée à la demanderesse au titre des frais avancés.

Enfin, la nature même du sinistre (présence d'insectes xylophages) et le fait, non-contesté, que le lot infecté avait été acquis par Mme [G] à titre d'habitation principale, ce dont elle n'a in fine pas pu bénéficier, suffisent à caractériser le préjudice moral dont elle se prévaut, et que le tribunal estime devoir indemniser à hauteur de 1.000 euros.

******************

Au total, il est alloué à Mme [G] les sommes suivantes, en paiement desquelles le syndicat des copropriétaires est condamné :
10.719,50 euros en réparation du préjudice matériel,
8.000 euros en réparation du préjudice de jouissance,
46,80 euros au titre des frais avancés,
1.000 euros en réparation du préjudice moral.

Sur les demandes de condamnation in solidum et de garantie à l'encontre de l'assureur de l'immeuble

L'article 1353 alinéa 1 du code civil dispose que " celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ".

Il appartient à celui qui réclame le bénéfice de l'assurance d'établir que sont réunies les conditions requises par la police pour mettre en jeu cette garantie ; à l'inverse il revient à l'assureur de prouver l'exclusion ou la déchéance de garantie qu'il allègue.

Aux termes de l'article L.113-2 du code des assurances, "L'assuré est obligé :
(...)
4° De donner avis à l'assureur, dès qu'il en a eu connaissance et au plus tard dans le délai fixé par le contrat, de tout sinistre de nature à entraîner la garantie de l'assureur. Ce délai ne peut être inférieur à cinq jours ouvrés.(...) ".

Sur ce,

En l'espèce et comme le relève Groupama à juste titre, le syndicat des copropriétaires ne prétend ni au demeurant ne justifie avoir procédé à la déclaration de sinistre à la suite de l'information donnée par Mme [G] de la présence d'insectes xylophages au sein de son lot, ni à la suite des investigations ayant démontré la présence de ces mêmes insectes dans les parties communes de l'immeuble.

Dans ces conditions, le syndicat des copropriétaires ayant failli à son obligation légale et contractuelle, les conditions particulières produites mentionnant cette obligation de déclaration en page deux, il ne saurait utilement solliciter le bénéfice de la garantie de son assureur.

Ce d'autant plus qu'il sera relevé, à titre surabondant, que le syndicat des copropriétaires ne communique pas l'entièreté de la police d'assurances mais uniquement les conditions particulières, ne permettant pas de déterminer l'exacte étendue des garanties souscrites.

Par conséquent sa demande à ce titre sera rejetée, sans qu'il y ait lieu d'examiner le surplus des moyens allégués par l'assureur.

La demande de condamnation in solidum formée à l'encontre de l'assureur de l'immeuble par Mme [G] sera rejetée, pour les mêmes motifs.

Sur les demandes accessoires

L'article 695 du code de procédure civile dispose que " Les dépens afférents aux instances, actes et procédures d'exécution comprennent:
1° Les droits, taxes, redevances ou émoluments perçus par les greffes des juridictions ou l'administration des impôts à l'exception des droits, taxes et pénalités éventuellement dus sur les actes et titres produits à l'appui des prétentions des parties ;
2° Les frais de traduction des actes lorsque celle-ci est rendue nécessaire par la loi ou par un engagement international ;
3° Les indemnités des témoins ;
4° La rémunération des techniciens ;
5° Les débours tarifés ;
6° Les émoluments des officiers publics ou ministériels ;
7° La rémunération des avocats dans la mesure où elle est réglementée y compris les droits de plaidoirie ;
8° Les frais occasionnés par la notification d'un acte à l'étranger ;
9°Les frais d'interprétariat et de traduction rendus nécessaires par les mesures d'instruction effectuées à l'étranger à la demande des juridictions dans le cadre du règlement (UE) 2020/1783 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relatif à la coopération entre les juridictions des Etats membres dans le domaine de l'obtention des preuves en matière civile et commerciale ;
10° Les enquêtes sociales ordonnées en application des articles 1072, 1171 et 1221 ;
11° La rémunération de la personne désignée par le juge pour entendre le mineur, en application de l'article 388-1 du code civil ;
12° Les rémunérations et frais afférents aux mesures, enquêtes et examens requis en application des dispositions de l'article 1210-8 ".

Il résulte de l'article 695 du code de procédure civile que les dépens d'une instance n'incluent pas les frais de constat d'un huissier de justice non désigné à cet effet par décision de justice (Civ 2ème, 12 janvier 2017, n°16-10.123).

Sur ce,

Succombant au litige, le syndicat des copropriétaires doit être condamné aux dépens, dont distraction au profit de Me Daniault, ainsi qu'à verser à Mme [G] une somme globale de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La demande formée au même titre des frais irrépétibles par Groupama sera en revanche rejetée, en équité.

En application de l'article 514 modifié par le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Il n'y a pas lieu en l'espèce d'écarter l'exécution provisoire de droit.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 6], représenté par son syndic en exercice, à payer à Mme [I] [G] les sommes de :
10.719,50 euros en réparation du préjudice matériel,
8.000 euros en réparation du préjudice de jouissance,
46,80 euros au titre des frais avancés,
1.000 euros en réparation du préjudice moral,

DEBOUTE Mme [I] [G] du surplus de ses demandes en paiement,

DEBOUTE Mme [I] [G] de sa demande de condamnation in solidum à l'encontre de la SA Groupama Rhône Alpes Auvergne,

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 6], représenté par son syndic en exercice, de sa demande de garantie à l'encontre de la SA Groupama Rhône Alpes Auvergne,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 6], représenté par son syndic en exercice, à payer à Mme [I] [G] une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 6], représenté par son syndic en exercice, aux dépens, dont distraction au profit de Me Eléonore Daniault,

RAPPELLE que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

Fait et jugé à Paris le 03 Septembre 2024.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 21/03961
Date de la décision : 03/09/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-03;21.03961 ?
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