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03/09/2024 | FRANCE | N°21/08590

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 6ème chambre 1ère section, 03 septembre 2024, 21/08590


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




6ème chambre 1ère section

N° RG 21/08590 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUWEP

N° MINUTE :




Assignation du :
28 juin 2021




JUGEMENT
rendu le 03 septembre 2024











DEMANDEURS

Monsieur [K] [U]
[Adresse 1]
[Localité 5]

Madame [J] [S] épouse [U]
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentés par Maître Laurence LECLERCQ DEZAMIS, avocat au barr

eau de PARIS, vestiaire #A0551


DÉFENDEURS

Monsieur [B] [F]
[Adresse 1]
[Localité 5]

Madame [Y] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentés par Maître Sandra THENOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0791

Déci...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

6ème chambre 1ère section

N° RG 21/08590 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUWEP

N° MINUTE :

Assignation du :
28 juin 2021

JUGEMENT
rendu le 03 septembre 2024

DEMANDEURS

Monsieur [K] [U]
[Adresse 1]
[Localité 5]

Madame [J] [S] épouse [U]
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentés par Maître Laurence LECLERCQ DEZAMIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0551

DÉFENDEURS

Monsieur [B] [F]
[Adresse 1]
[Localité 5]

Madame [Y] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentés par Maître Sandra THENOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0791

Décision du 03 septembre 2024
6ème chambre 1ère section
N° RG 21/08590 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUWEP

PARTIE INTERVENANTE

S.D.C. IMMEUBLE [Adresse 2] représenté par son syndic la société IMMOBILIERE DU CHATEAU
[Adresse 3]
[Localité 4]

représenté par Maître Tiphaine EOCHE DUVAL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1383

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Céline MECHIN, vice-président
Marie PAPART, vice-président
Clément DELSOL, juge

assisté de Catherine DEHIER, greffier,

DÉBATS

A l’audience du 03 juillet 2024 tenue en audience publique devant Marie PAPART, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Contradictoire
en premier ressort
Décision publique
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Céline MECHIN, président et par Catherine DEHIER greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******************

EXPOSE DU LITIGE :

Monsieur [K] [U] et Madame [J] [S] épouse [U] sont propriétaires indivis d’un appartement sis au 2e étage au [Adresse 1] à [Localité 5].

Des dégâts des eaux sont survenus en provenance de l’appartement du dessus, appartenant à Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z].

Les époux [U] ont mis en demeure leurs voisins d’effectuer les travaux pour mettre un terme à cette situation par courrier recommandé daté du 09 avril 2019 et par mail du 22 mai 2019.
Un procès-verbal de constat a été établi par huissier de justice le 11 octobre 2019.

Par actes d’huissier de justice signifiés les 29 et 31 octobre 2019, les époux [U] ont fait assigner M. [F] et Mme [Z] aux fins de référé-expertise devant la présente juridiction.

Monsieur [W] a été désigné comme expert judiciaire par ordonnance en date du 17 janvier 2020 et a déposé son rapport le 13 mai 2021.

De nouveaux dégâts des eaux sont survenus les 20 avril et 08 décembre 2020 ainsi que les 16 octobre et 05 novembre 2022.

Par acte d'huissier de justice signifié le 28 juin 2021, les époux [U] ont fait assigner M. [F] et Mme [Z] au fond devant la présente juridiction, aux fins de les voir condamner à faire procéder à des travaux de réparation sous astreinte, ainsi qu’à leur verser des indemnités en réparation des préjudices subis.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 juillet 2022, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] (ci-après « le SDC ») est intervenu volontairement à l’instance aux mêmes fins.

Par conclusions numérotées 4 notifiées par voie électronique le 27 octobre 2023, les époux [U] sollicitent de voir :

« DECLARER recevables et bien fondés Monsieur et Madame [U] en leurs présentes écritures,

Vu le rapport d’expertise de Monsieur [W],
Vu les articles 18, 33 et 45 du Règlement sanitaire départemental de [Localité 6],
Vu l’article R.111-8 du Code de Construction et de l’Habitation,
Vu le DTU 52.1,
Vu l’article 1.2 de l’avis technique CSTB cahier n°3265,
Vu la théorie des troubles anormaux du voisinage,

DEBOUTER purement et simplement Madame [Y] [Z] et Monsieur [B] [F] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions

En conséquence,

HOMOLOGUER purement et simplement le rapport d’expertise déposé par Monsieur [W] le 13 mai 2021

En conséquence,

CONDAMNER solidairement Madame [Y] [Z] et Monsieur [B] [F] à procéder à l’ensemble des travaux chiffrés au devis n°2020-2021-4097 de l’Entreprise LACROIX, dûment avalisé par l’Expert Judiciaire, sous la surveillance d’un architecte spécialiste en étanchéité et plomberie et ce, sous astreinte de 500 € par jour de retard passé un délai d’un mois suivant le prononcé du Jugement à intervenir.

DECLARER que ladite astreinte courra jusqu’à la justification de la réalisation intégrale des travaux préconisés par l’Expert Judiciaire dans toutes les pièces dites humides par la remise aux époux [U] d’une copie des Procès-Verbaux de réception des travaux sans réserve

Sur le préjudice matériel

CONDAMNER solidairement Madame [Y] [Z] et Monsieur [B] [F] à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 24.904 €, valeur avril 2023 qui sera réévaluée selon le dernier indice BT01 connu au moment de la réalisation desdits travaux, au titre de la remise en état des embellissements de leur appartement

Sur les préjudices immatériels :

CONDAMNER solidairement Madame [Y] [Z] et Monsieur [B] [F] à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 3.851,24 € arrêtée au mois de juin 2021, à parfaire jusqu’à la réalisation effective de l’intégralité des travaux préconisés par l’Expert, à titre de dommages-intérêts en réparation de la perte de jouissance de la salle de bains attenante à la Chambre n°1, inutilisable depuis juillet 2018

CONDAMNER solidairement Madame [Y] [Z] et Monsieur [B] [F] à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 14.270,29 € à titre de dommages-intérêts en réparation de la perte de jouissance de la chambre n°1 attenante à la salle de bains, inutilisable de juillet 2018 à juillet 2020

CONDAMNER solidairement Madame [Y] [Z] et Monsieur [B] [F] à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 42.616,88 € arrêtée au mois de juin 2021, à parfaire jusqu’à la réalisation effective de l’intégralité des travaux préconisés par l’Expert, à titre de dommages-intérêts en réparation du trouble de jouissance par eux subi portant sur des pièces de vie principales depuis 35 mois

CONDAMNER solidairement Madame [Y] [Z] et Monsieur [B] [F] à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 2.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices esthétiques inhérents aux désordres occasionnés dans la cuisine et l’entrée de leur appartement

CONDAMNER solidairement Madame [Y] [Z] et Monsieur [B] [F] à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral et de leurs pertes de temps

CONDAMNER solidairement Madame [Y] [Z] et Monsieur [B] [F] au paiement de la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Les DEBOUTER de ce chef de demande

Les CONDAMNER de même solidairement aux entiers dépens, lesquels comprendront notamment le coût de l’expertise judiciaire, dont distraction sera faite au profit de Maître LECLERCQ-DEZAMIS, Avocat à la Cour, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile

DIRE n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de plein droit de la décision à intervenir »

A l'appui de leurs prétentions, les époux [U] exposent que :

- sur la demande de condamnation sous astreinte :

* les défendeurs ne contestent pas les causes retenues par l’expert judiciaire au terme de son rapport ; par ailleurs, de nombreux textes imposent une étanchéité parfaite des sols et murs dans les pièces humides (article R.111-8 du code de la construction et de l’habitation, article 33 de l’arrêté du 23/11/1979 portant règlement sanitaire du département de [Localité 6]) ; aux termes de l’expertise judiciaire, seule la réalisation intégrale des travaux de mise en conformité des installations sanitaires et la réalisation d’une parfaite étanchéité du sol et des murs des pièces humides de l’appartement des défendeurs permettront de mettre un terme définitif aux désordres subis à répétition ;

* la répétition de dégâts des eaux dans l’appartement des concluants du fait de la non-conformité des installations sanitaires et des pièces humides de l’appartement des défendeurs situé au-dessus constitue un trouble anormal du voisinage ;

* aucune des pièces produites par les défendeurs (devis sans justificatif de versement d’acomptes, clichés) ne permet de s’assurer de la réalité des travaux qui auraient déjà été engagés selon eux ; ils reconnaissent qu’il reste encore des travaux à réaliser parmi ceux préconisés par l’expert judiciaire sans justifier des motifs pour lesquels ces travaux ne sont toujours pas terminés, alors que les dégâts des eaux continuent de survenir dans l’appartement des concluants que ceux-ci occupent ;

- sur la demande de condamnation à l’indemnisation des préjudices : l’expert judiciaire a retenu l’ensemble des demandes présentées par les concluants en réparation de leurs préjudices matériel et immatériels :

* sur le préjudice matériel :
- il sera rappelé que l’expert judiciaire a déjà rejeté les contestations des défendeurs, lesquelles sont reprises dans le cadre des débats ;
- au vu du délai écoulé depuis le dépôt du rapport d’expertise judiciaire, les concluants ont fait actualiser le devis de l’entreprise RPM n°134335 du 27 juillet 2020 (annexe 19 pièce 29 du rapport) relatif aux travaux de remise en état de la salle de bains, de l’entrée et du couloir, d’un montant initial TTC de 22 149 euros, désormais d’un montant TTC de 23 210 euros au mois d’avril 2023 (pièce n°58) ;
- pour le même motif, les concluants ont fait actualiser le devis n°134395 du 02 octobre 2020 relatif aux travaux de remise en état de la cuisine, d’un montant initial TTC de 1 474 euros (annexe 19 pièce 30 du rapport), désormais d’un montant TTC de 1 694 euros au mois de juin 2023 (pièce n°59) ;

* sur les préjudices immatériels :
- sur les pertes et troubles de jouissance : il a été constaté in situ que les conditions de vie de la famille [U] se sont trouvées très fortement dégradées du fait de la survenance de ces dégâts des eaux à répétition, et ce sans contestation de la part des défendeurs, comme l’expert judiciaire l’a constaté dans son rapport ; que la valeur locative mensuelle de leur appartement de 136,69 m2 se situe entre 4 600 et 4 800 euros, hors charges (pièce n°41) ; que la salle de bains attenante à la chambre n°1 d’une superficie de 3,27 m2 est inutilisable depuis le mois de juillet 2018 et l’est toujours ; que la réparation de la perte de jouissance subie de ce chef par les concluants s’évalue donc à la somme arrêtée au mois de juin 2021 de 3 851,24 euros (3,27 x 4 600/136,69 x 35 mois), à parfaire jusqu’à la date de réalisation effective de tous les travaux de mise en conformité ; que la chambre n°1 de 17,67 m2 attenante à cette salle de bains n’a pu être utilisée entre juillet 2018 et juillet 2020 du fait de l’humidité importante qui y régnait et de l’odeur de moisi constatées lors des opérations d’expertise ; que la réparation de la perte de jouissance subie de ce chef par les concluants s’évalue donc à la somme de 14 270,29 euros (17,67 x 4 600/136,69 x 24 mois) ; que du fait de l’impossibilité d’utiliser cette chambre, le salon a dû être vidé pour servir de dortoir et la salle à manger donnant directement dessus n’a pu être utilisée, ces pièces représentant une surface de 40,71 m2 ; que le salon a dû être vidé et les affaires qu’il contenait entassées dans le couloir de 19,70 m2 et l’entrée de 11,96 m2 ; qu’il en est résulté un trouble de jouissance affectant une surface de 72,37 m2 pendant 35 mois, dont la réparation doit être calculée sur la base de la moitié de ce qui est réclamé au titre de la perte de jouissance soit un montant de 42 616,88 euros à parfaire jusqu’à la réalisation effective de l’intégralité des travaux préconisés par l’expert judiciaire [(72,37 x (4 600/136,69)/ 2) x 35] ;
- sur les préjudices esthétiques : ceux-ci sont inhérents aux désordres occasionnés dans la cuisine et l’entrée, et en réparation les concluants sollicitent une indemnisation forfaitaire à hauteur de 2 000 euros ;
- sur le préjudice moral : doivent être pris en considération le fait que les concluants n’ont eu de cesse d’obtenir des défendeurs qu’ils prennent les mesures pour mettre un terme définitif aux dégâts des eaux récurrents, en vain, l’impact sur la santé de l’une de leurs filles (pièce n°18), le temps passé avec leur assureur, à faire établir des devis, à se rendre disponible pour les experts d’assurance ainsi que dans le cadre de l’expertise judiciaire, alors que les défendeurs, de l’aveu même du SDC, se sont montrés « arrogants et dédaigneux » comme en témoignent les échanges de courriels et courriers, conservent une attitude empreinte de mauvaise foi même s’ils sont à l’origine de l’état actuel de leurs installations sanitaires et de l’absence d’étanchéité dans les pièces dites humides, ce qu’ils prétendent avoir découvert lors des opérations d’expertise alors qu’ils ne pouvaient l’ignorer dans la mesure où ils ont interverti lors de travaux la cuisine et la salle de douche, et où au surplus M. [F] est architecte DPLG ; qu’ à ce titre, les époux [U] sont bien fondés à solliciter une indemnité globale de 3 000 euros.

*

Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 30 octobre 2023, le SDC sollicite de voir :

« Vu les articles 8, 9, 15 et 25 b) de la loi du 10 juillet 1965,
Vu le Règlement de copropriété,
Vu l’article 1240 du Code civil,
Vu le rapport de Monsieur [W] (Pièce n° 11),

- DEBOUTER Monsieur [F] et Madame [Z] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions formées contre le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2],

- CONDAMNER in solidum Monsieur [F] et Madame [Z] à réaliser les travaux de mise en conformité de leurs installations sanitaires selon devis LACROIX n° 2020-2021-4097 du 26 janvier 2021 retenu par l’Expert judiciaire, et ce sous le contrôle de l’architecte de la copropriété dont les honoraires seront à leur charge exclusive,

- ASSORTIR cette condamnation d’une astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,

- CONDAMNER in solidum Monsieur [F] et Madame [Z] à payer au Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] la somme de 10.087,40 € correspondant à son préjudice matériel retenu par l’Expert judiciaire,

- CONDAMNER in solidum Monsieur [F] et Madame [Z] à payer au Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] la somme de 3.000 € pour préjudice distinct de la procédure,

EN TOUTES HYPOTHESES

- CONDAMNER in solidum Monsieur [F] et Madame [Z] à payer au Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER in solidum Monsieur [F] et Madame [Z] aux entiers dépens. »

A l'appui de ses prétentions, le SDC expose que :

- sur la demande de condamnation à la mise en conformité des installations des défendeurs : l’expert judiciaire a retenu que les infiltrations à répétition dans l’appartement des époux [U] sont directement causées par les installations sanitaires non conformes et non étanches de l’appartement des consorts [N] ; or :

* les défendeurs ne justifient nullement en l’état, par la seule production de devis, et en l’absence ne serait-ce que d’ordres de services, qu’ils ont satisfait à la demande de l’expert judiciaire de mettre en conformité l’ensemble de leurs installations sanitaires ;

* contrairement à ce qu’ils avancent, le concluant a qualité pour solliciter leur condamnation dans la mesure où les infiltrations dans l’appartement des époux [U] au 2e étage, causées par les installations sanitaires non conformes de leur appartement situé au-dessus au 3e étage, ont migré à travers le gros œuvre du plancher, partie commune, et qualifié en tant que tel par le règlement de copropriété (pièce n° 1 pages 14-15) ;

- sur la demande de condamnation à indemniser les préjudices subis par le concluant :

* l’expert judiciaire a relevé le raccordement de l’évacuation de la cuisine des défendeurs à une descente d’eaux usées via un trou réalisé depuis l’intérieur de la cuisine de l’appartement en question avec rebouchage à la mousse expansive ; aucune autorisation préalable de l’assemblée générale des copropriétaires n’a été accordée pour ce percement, autorisation pourtant imposée par les dispositions d’ordre public de l’article 25 b) de la loi du 10 juillet 1965 s’agissant des travaux affectant les parties communes ; compte tenu de l’attitude des défendeurs, le concluant a été contraint de diligenter dans le cadre de l’expertise judiciaire et à ses frais des investigations de piochage de la façade sur courette au niveau du percement illégal sous le contrôle de l’architecte de la copropriété afin de vérifier la solidité de la structure de l’immeuble ; l’expert judiciaire a retenu au titre des préjudices supportés par le concluant les frais engendrés par les investigations nécessaires de piochage et les honoraires de l’architecte de la copropriété pour contrôler lesdits travaux de piochage, ainsi que ceux engendrés par les travaux de rebouchage de la façade suite au piochage pour un montant total de 10 087,40 euros ;

* les défendeurs ne justifient aucunement de leurs allégations selon lesquelles le percement du mur de façade ne serait pas de leur fait et existait déjà au moment de leur acquisition de l’appartement courant 2010 ; de même, les défendeurs font état de la dégradation de la courette constatée par l’architecte de la copropriété, sans davantage le démontrer ; ils font également état de percements similaires à d’autres étages sans les démontrer ;

- sur la demande de condamnation à indemniser les préjudices subis par le concluant : celui-ci été contraint de se démultiplier afin de vérifier la matérialité des travaux illégaux entrepris par les défendeurs et assister aux réunions d’expertise et a donc dépensé une énergie et un temps précieux pour le suivi de la procédure, au détriment d’autres difficultés rencontrées par la copropriété, ce qui justifie une indemnisation à hauteur de 3 000 euros.

*

Par conclusions récapitulatives numérotées 2 notifiées par voie électronique le 17 septembre 2023, les défendeurs sollicitent de voir :

« Vu l'article 700 du code de procédure civile
Vu l'article 699 du Code de procédure civile
Vu le rapport d'expertise du de Monsieur [X] [W] de mai 2021
Vu les pièces versées

Il est demandé au Tribunal Judiciaire de Paris :

SUR LES TRAVAUX DE MISE EN CONFORMITE :

CONSTATER que Madame [Z] et Monsieur [F] ont engagé dans leur appartement l'ensemble de travaux préconisés par l’expert judiciaire dans son rapport d'expertise ;

Par voie de conséquence :

REJETER la demande de Madame et Monsieur [U] tendant à la condamnation de Madame [Z] et Monsieur [F] à procéder à l'ensemble des travaux chiffrés au devis n°2020-2021-4097 de l’entreprise LACROIX, sous la surveillance d'un architecte spécialiste en étanchéité et plomberie sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un mois suivant le prononcé du jugement à venir ;

SUR LA DEMANDE INDEMNITAIRE DE MADAME ET MONSIEUR [U] RELATIVE AU PREJUDICE MATERIEL :

JUGER que devis de l’entreprise RPM n°134335 du 27.07.2020 de remise en état de la salle de bain, de l'entrée et du couloir d'un montant total de 22 149,00 € TTC comprenant 15.830,05 € pour la salle d'eau et 3.460,80 € pour l’entrée, est surévalué et comprend des prestations injustifiées ;

Par voie de conséquence :

REJETER la demande indemnitaire pour préjudice matériel de Madame et Monsieur [U] pour un montant total de 22 149,00 € TTC

FIXER le préjudice matériel de Epoux [U] au titre de la remise en état de la salle d'eau, à la somme de 5.000 € TTC,

FIXER le préjudice matériel de Epoux [U] au titre de la remise en état de l'entrée à la somme de 1.050 € TTC,

FIXER le préjudice matériel de Epoux [U] au titre de la remise en état du couloir à la somme de 844,60 € TTC

FIXER le préjudice matériel de Epoux [U] au titre de la remise en état de la cuisine à la somme de 1 470,00 € TTC.

Si le Tribunal devait faire droit à la demande de Madame et Monsieur [U] relative à la condamnation des Consorts [N] au paiement de la somme de 23 623 euros, Il est demandé au Tribunal de :

DEDUIRE de la somme de 23 623 euros le montant des indemnités versées à Madame et Monsieur [U] par la compagnie d’assurance.

SUR LA DEMANQE INDEMNITAIRE DE MADAME ET MONSIEUR [U] RELATIVE AU PREJUDICE IMMATERIEL :

REJETER les demandes indemnitaires de Madame et Monsieur [U], à savoir :

- La somme de 14 270,29 € au titre de dommages et intérêts pour préjudice de trouble de jouissance de la chambre 1 attenante à la salle de bain ;
- La somme de 42 616,88 € au titre de dommages et intérêts pour préjudice de trouble de jouissance des pièces de vies principales depuis 35 mois (72,37 m2 sur les 136,69 m2) ;
- La somme de 2 000 € au titre de dommages et intérêts pour préjudice esthétique des désordres occasionnés dans la cuisine et l'entré de leur appartement ;
- La somme de 3.000 € au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et pertes de temps.

Par voie de conséquence :

FIXER le préjudice de Madame et Monsieur [U] au titre de la perte de jouissance de la salle de bain attenante à la chambre n°1 à la somme de 3.345€

SUR LA DEMANDE INDEMNITAIRE DU SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES :

DIRE ET JUGER que le syndicat des copropriétaires n’a qualité pour solliciter la condamnation d'un copropriétaire pour des désordres causés dans des parties privatives

DIRE ET JUGER que Madame [Z] et Monsieur [F] ne sont pas à l'origine du trou sur la façade côté courette ;

DIRE ET JUGER que le syndicat des copropriétaires ne rapporte pas la preuve que la structure de l’immeuble aurait été endommagée par Madame [Z] et Monsieur [F]

Par voie de conséquence :

REJETER la demande du syndicat des copropriétaire tenant à ce que les consorts [F] [Z] soient condamnés à réaliser sous astreinte de 200 € par jour de retard les travaux de conformité de leurs installations sanitaires.

REJETER la demande du syndicat des copropriétaires en ce que Madame [Z] et Monsieur [F] soient condamnés à lui verser la somme de 10 087,40 € au titre d'un prétendu préjudice matériel.

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

REJETER la demande de Madame et Monsieur [U] tendant à la condamnation des Madame [Z] et Monsieur [F] au paiement de la somme de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETER la demande de Madame et Monsieur [U] tendant à la condamnation des Madame [Z] et Monsieur [F] aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise au titre de l’article 699 du code de procédure civile _

CONDAMNER Madame et Monsieur [U] au règlement de la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure Civile et aux entiers dépens de l’article 699 du Code de procédure civile;

CONDAMNER Madame et Monsieur [U]' à verser à Madame [Z] et Monsieur [F] a somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure Civile et aux entiers dépens de l’article
699 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER le syndicat des copropriétaires à verser à Madame [Z] et Monsieur '[F] la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure Civile et aux entiers dépens de l’article 699 du Code de procédure civile ; »

Au soutien de leur défense, les consorts [Z]-[F] font valoir que :

- sur la réalisation des travaux : les concluants ont réalisé ou sont en train de réaliser les travaux ;

* sur les travaux préconisés par l’expert judiciaire : ces travaux sont en cours de réalisation ;
- s’agissant des travaux de réfection de la salle de bains n°2 : les concluants ont fait procéder à une vérification d’étanchéité à la suite de la demande de l’expert judiciaire, laquelle a révélé l’existence d’une telle étanchéité permettant d’éviter la démolition totale de la salle de bains et de limiter les travaux à la dépose du WC sanibroyeur conformément aux prescriptions de l’expert judiciaire ;
- s’agissant des travaux de réfection de la cuisine et de la salle de bains n°1 : les concluants produisent, outre les devis correspondant aux travaux à réaliser dans la cuisine et la salle de bains n°1, des clichés de la première phase de travaux réalisés de mise en étanchéité des pièces d’eau (WC, buanderie, couloir) ;

Au final, sur les 5 phases de travaux que les concluants devaient entreprendre, 3 ont été effectuées totalement (buanderie, WC et salle de bains des enfants) et 2 partiellement (salle de bain parentale avec le changement des 4 raccords des arrivées d'eau chaude-eau froide sous les robinets suite au dégât des eaux du 16 octobre 2022, et changement à neuf complet du siphon d'évier) ;

* sur les travaux réalisés suite au dégât des eaux du 16 octobre 2022 : la réparation a eu lieu le jour même de la signature du devis, et la facture a été émise le 25 novembre 2022 ;

- sur l’absence de faute de la part des concluants : preuve en est le fondement sur lequel les époux [U] assignent les concluants, à savoir, sur le trouble anormal de voisinage qui ne nécessite pas la preuve d'une faute contrairement à la responsabilité civile où une faute doit être prouvée :

* lors de l'achat de l’appartement, aucune information n'a été communiquée par le vendeur sur l'absence de revêtement d'étanchéité des pièces humides ; ce défaut n’était pas visible, il était donc impossible aux concluants d’identifier la non-conformité des installations sanitaires au regard de la réglementation évoquée par l'expert judiciaire ;

* lors de chaque dégât, les concluants ont pris les mesures qu'ils estimaient appropriées et dans les délais les plus brefs, étant précisé qu’il n’y a pas eu 10 dégâts des eaux mais 6 fuites dont 4 seulement ont fait l’objet de déclarations auprès de l’assureur en 2015, 2017, 2018 et 2020, et son liées respectivement à l’usure du joint d’origine de la chasse d’eau WC, du joint de l’arrivée d’eau, à l’usure du siphon de la baignoire et aux sondages effectués par la société ERATHIS ; l’expert judiciaire note que M. [F] a remplacé à plusieurs reprises les joints défectueux mais lui reproche de n’avoir pas fait appel à une société spécialisée dans les installations sanitaires alors qu’une telle intervention n’est pas obligatoire afin de remplacer des joints défectueux et que les concluants n’avaient pas connaissance de la non-conformité de leurs installations sanitaires et des pièces humides de leur appartement avant que l’expert judiciaire ne les constate ; si M. [F] est architecte, il sera précisé qu’il est architecte d’intérieur en charge du chiffrage de travaux et de l’aménagement intérieur de propriété et non spécialisé en étanchéité/plomberie ;

* sur les préjudices :
- sur le préjudice matériel : les concluants avaient sollicité de l’expert judiciaire un délai afin de pouvoir produire des devis complémentaires, sans réponse de la part de l’expert qui a validé le devis transmis par les époux [U], sans comparaison avec d’autres devis, sans confirmer que les prestations correspondaient aux travaux préconisés, et alors que la somme totale de 22 149 euros TTC portée à ce devis est surévaluée compte tenu de la surface totale à remettre en état (17 m2) et de la nature des travaux (travaux de peinture essentiellement) ; les prix des prestations sont nettement supérieurs aux prix du marché tandis que certaines prestations du devis ne correspondent pas aux travaux de remise en état et sont donc injustifiées ; les concluants ont demandé à ce que soit déduit le montant des indemnités versées par l’assureur des époux [U], à quoi ceux-ci ont simplement listé ces indemnités et les dégâts des eaux pour lesquels aucune indemnisation n’aurait été accordée ;
- sur le préjudice immatériel : seule une salle d'eau parentale de 3,27 m2 était partiellement inutilisable et impropre à sa destination sur un appartement de 136 m2, l’expert judiciaire n’ayant en revanche pas précisé que le couloir, la buanderie, la cuisine, l’entrée et la chambre attenant à la salle d’eau étaient impropres à leur destination ; par ailleurs, les époux [U] vivent à Berlin et l’appartement est occupé par leurs deux filles, le lit ouvert dans le salon étant le lit d’appoint des parents lorsqu’ils reviennent à [Localité 6] ; en outre, les époux [U] incluent la période de confinement sanitaire liée à l’épidémie de covid-19 alors que l’appartement était inoccupé à cette période soit du 17 mars au 10 mai 2020 ; enfin, la valeur locative de l’appartement est de 31 euros/m2 selon le site SELOGER.COM ; il en résulte qu’au titre du préjudice immatériel ne peut être retenue que la somme de 3 345 euros (3,27 x 31 x 33 mois) ; les préjudices esthétiques liés aux désordres survenus dans la cuisine et l’entrée de l’appartement n’ont pas été constatés par l’expert judiciaire ; le préjudice moral n’est pas démontré par l’attestation produite à l’appui de la demande formulée à ce titre ;

- sur le rejet des demandes du SDC :

* la demande de condamnation sous astreinte à mettre en conformité les installations sanitaires privatives des concluants formulée par le SDC est irrecevable, celui-ci ne pouvant agir que dans l’hypothèse de désordres causés sur les parties communes et non dans le cadre des parties privatives ; par ailleurs, ces travaux sont en cours de réalisation ;

* contrairement à ce qui est allégué par le SDC :
-le percement du mur de façade sur courette constaté au niveau de la cuisine des concluants existait déjà au moment de l’achat de l’appartement par les concluants ; à chaque étage de cette courette existe le même percement évacuant toutes les salles de douches des appartements des copropriétaires comme il a été constaté par huissier le 26 septembre 2022 ; le rapport d’expertise judiciaire sur ce point est insuffisant dès lors qu’il n’a effectué aucun constat sur la façade côté courette et n’a pas précisé que le percement existait à tous les étages, jetant le doute quant à l’imputabilité aux travaux des concluants de l’atteinte à la solidité de la façade côté courette, laquelle était au surplus déjà dégradée et faisait l’objet d’échanges entre les copropriétaires et le syndic pour son ravalement, un audit de la structure de l’immeuble ayant été commandité par le conseil syndical lequel se refuse à communiquer le rapport de cet audit;
-le rebouchage auquel ont procédé les concluants n’avait aucune visée dissimulatrice et avait pour objectif de réparer temporairement la fissure affectant le tuyau d’évacuation constatée à l’occasion de la recherche de fuite en 2019, réparation effectuée par les concluants après conseil pris auprès de leur assureur.

*

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 mars 2024, l'audience de plaidoirie a été fixée au 12 juin 2024, les débats ont été réouverts et l'audience de plaidoirie nouvellement fixée au 03 juillet 2024, l'affaire mise en délibéré au 03 septembre 2024, date du présent jugement.

MOTIVATION :

Préalables :

A titre liminaire, il convient de préciser que les demandes des parties tendant à voir « dire et juger » ou « constater » ne constituent pas nécessairement des prétentions au sens des dispositions des articles 4 et 30 du code de procédure civile dès lors qu'elles ne confèrent pas de droit spécifique à la partie qui en fait la demande. Elles ne feront alors pas l'objet d'une mention au dispositif.

Sur la recevabilité de la pièce n°42 produite par les défendeurs et de la note en délibéré en date du 25 juillet 2024 produite par les demandeurs :

Aux termes de l’article 802 alinéa 1 du code de procédure civile : « Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office. »

Après la clôture, toutes les nouvelles pièces sont irrecevables, cette irrecevabilité pouvant être relevée d’office sans que le juge ait à inviter les parties à s’expliquer.

En l’espèce, les défendeurs ont déposé une nouvelle pièce n°42 par message électronique daté du 27 juin 2024, certes postérieurement à la réouverture des débats intervenue le 12 juin 2024 et antérieurement à l’audience de plaidoirie du 03 juillet 2024, mais postérieurement à l’ordonnance de clôture rendue le 11 mars 2024. Il sera en effet rappelé que la réouverture des débats ne vaut pas révocation de l’ordonnance de clôture avec renvoi à la mise en état, qui seule aurait permis aux défendeurs de communiquer une nouvelle pièce valablement.

Par conséquent, la pièce n°42 produite par les défendeurs sera déclarée irrecevable.

Pour les mêmes motifs, la note en délibéré produite par les demandeurs en date du 25 juillet 2024 soit postérieurement à la clôture des débats sera déclarée irrecevable.

Sur la recevabilité de la demande de mise en conformité des installations sanitaires des défendeurs formulée par le SDC :

Aux termes de l'article 31 du code de procédure civile : « L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.»

Aux termes de l'article 122 du même code : « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »

Aux termes de l'article 789 6° du même code : « Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
(...)
6° Statuer sur les fins de non-recevoir. »

Aux termes de l'article 791 du même code : « Le juge de la mise en état est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées distinctes des conclusions au sens de l'article 768, sous réserve des dispositions de l'article 1117. »

Il résulte de ce qui précède que, jusqu'à son dessaisissement, le juge de la mise en état est seul compétent pour connaître d'une fin de non-recevoir présentée postérieurement à sa désignation, à l'exclusion de toute autre formation, et qu'il doit en être saisi dans des conclusions distinctes des conclusions au fond.

En l'espèce, les défendeurs ont soulevé la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir contre eux du SDC, au motif que celui-ci ne peut agir que dans l’hypothèse de désordres causés sur les parties communes et non dans le cadre des parties privatives.

Cependant, s’ils ont soulevé cette fin de non-recevoir postérieurement à la désignation du juge de la mise en état, ils l'ont fait uniquement dans le cadre de leurs conclusions au fond adressées au tribunal, ils n'en ont pas saisi le juge de la mise en état par conclusions distinctes, ce dernier étant alors seul compétent pour la trancher.

Par conséquent, il y a lieu de constater l'irrecevabilité de cette demande aux fins de non-recevoir.

I – Sur les demandes de mise en conformité des installations sanitaires de l’appartement des défendeurs :

I.A – Sur le fondement délictuel de la demande formulée par le SDC:

Aux termes de l’article 1240 du code civil : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

La responsabilité délictuelle suppose la réunion d’une faute, d’un dommage et d’un lien de causalité.

En l’espèce, si les dégâts des eaux survenus dans l’appartement des époux [U] en provenance de l’appartement des défendeurs ont migré à travers le gros-œuvre du plancher partie commune tel que qualifié en pages 14-15 du règlement de copropriété selon le SDC, celui-ci n’apporte nullement la preuve de l’existence d’un dommage causé à ce gros-œuvre du plancher partie commune lors de ces dégâts des eaux, cette partie commune n’ayant fait l’objet d’aucun constat, notamment dans le cadre des opérations d’expertise judiciaire.

Par conséquent, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de mise en conformité formulée par le SDC sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

I.B – Sur la demande formulée par les époux [U] :

I.B.1 – Sur l’existence d’un trouble anormal du voisinage :

Selon le principe général posé par la jurisprudence de la Cour de Cassation en vertu duquel : « Nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage », constitue un trouble de voisinage anormal celui excédant les inconvénients normaux du voisinage, lequel est apprécié souverainement par les juges du fond.

La responsabilité pour troubles anormaux du voisinage est une responsabilité sans faute prouvée, l’existence du trouble anormal de voisinage suffisant à engager la responsabilité de son auteur indépendamment de la preuve de toute faute.

En l’espèce, l’expert judiciaire a constaté en pages 20 à 23 de son rapport :

- dans l’appartement des époux [U] :
* au niveau du couloir, des dégradations des peintures et taches d’humidité au plafond, dans l’angle du mur de refend et de la buanderie ;
* une boursouflure de l’enduit au plafond de la buanderie ;
* dans la cuisine :
-d’anciennes traces de coulures d’eau sur les vitres de la fenêtre côté droit ;
-le décollement d’un parement en contreplaqué côté droit du plan de travail ;
-de légères dégradations de peinture au droit d’un coffrage ;
* dans l’entrée :
-une dégradation des peintures au plafond ;
-un enduit fissuré au niveau d’une corniche ;
-une dégradation des peintures au niveau du soubassement du mur de droite ;
* dans la salle d’eau attenante à l’ancienne chambre sur rue, de très importantes dégradations :
-sur le mur côté courette, une peinture cloquée en-dessous de la fenêtre ;
-un descellement du bâti de la fenêtre ;
-un décollement de plusieurs carreaux de faïence à l’intérieur de la douche ;

- dans l’appartement des défendeurs :
* dans la cuisine :
-une évacuation en tube PVC DN40 reprenant l’évier et le lave-vaisselle, encastrée dans le sol et se raccordant à l’extérieur dans la courette à la descente des eaux usées ;
-l’absence de fourreau de protection entre les canalisations eau chaude/eau froide et le carrelage au sol ;
-l’absence de traitement du point singulier entre le sol et le mur ;
-l’absence d’un relevé d’étanchéité du sol ;
* dans le cabinet d’aisances :
-une fêlure du couvercle du réservoir de chasse ;
-le blocage du robinet d’arrêt de la chasse alors que celui-ci doit être entretenu régulièrement, les joints devant être vérifiés au minimum une fois par an ;
-l’absence d’un revêtement d’étanchéité au sol ;
-une évacuation en PVC en partie encastrée dans le sol ;
* dans la salle d’eau parentale :
-l’absence d’un relevé d’étanchéité du sol au droit du collecteur ;
-l’absence d’un regard sous le receveur de douche permettant un accès à la bonde ;
* dans la salle d’eau des enfants :
-l’absence de regard sous le receveur permettant un accès à la bonde ;
-l’absence du traitement du point singulier entre d’une part, les raccords encastrés sur lesquels est montée la robinetterie, et d’autre part le revêtement de faïence ;
-le raccordement des eaux vannes du WC broyeur au collecteur d’évacuation des eaux usées ;
-le raccordement du collecteur unique d’eaux usées et d’eaux vannes à l’extérieur dans la cour à une chute eaux usées/eaux vannes.

L’expert judiciaire précise en pages 12-13 et 23 de son rapport que les installations sanitaires des pièces humides de l’appartement des défendeurs ne sont pas conformes à la réglementation des installations, en ce que :
- dans toutes les pièces humides, aucun revêtement d’étanchéité au sol ni sur les murs n’a été réalisé, alors que le sol et les murs doivent être en parfait état d’étanchéité (articles 33 et 45 de l’arrêté du 23/11/1979 portant règlement sanitaire du département de [Localité 6] et articles R.111-8 et R.322-20 du code de la construction et de l’habitation) ;
- l’évacuation des eaux usées du WC broyeur doit être gravitaire, indépendante de toute autre canalisation et doit se raccorder uniquement à une chute eaux vannes ce qui ne semble pas être le cas, alors que l’installation d’un WC broyeur doit être conforme aux dispositions de l’article 47 de l’arrêté du 23/11/1979 portant règlement sanitaire du département de [Localité 6].

L’expert judiciaire précise également en page 23 de son rapport que l’origine et la cause des désordres subis par les époux [U] proviennent de la défectuosité et de la non-conformité des installations sanitaires des défendeurs.

Il résulte également des pièces versées aux débats les éléments suivants, concernant des dégâts des eaux survenus dans l’appartement des époux [U] depuis l’appartement des défendeurs :

- sur les dégâts des eaux signalés, trois dégâts des eaux survenus depuis l’appartement des défendeurs dans l’appartement des époux [U], les 19 novembre 2017, 08 décembre 2020 et 16 octobre 2022, ont fait l’objet d’un constat amiable entre les parties ;

- un constat d’huissier a été effectué le 11 octobre 2019 dans l’appartement des époux [U], dont il résulte :
* une odeur de moisi dans l’atmosphère de l’appartement notamment dans la chambre jouxtant la salle d’eau WC ;
* dans la salle d’eau WC :
-des cloques et boursouflures de la peinture sous la fenêtre et tout autour, la peinture étant crevée par endroits ;
-un léger affaissement du faux-plafond lequel est humide au toucher ;
-le décollement et descellement du cadre de la fenêtre du côté droit et sur sa partie horizontale haute avec des traces brunes d’infiltration sur ce décollement ;
-un début de décollement du carrelage mural dans le coin douche ;
* dans la chambre contigüe, une forte odeur d’humidité ;
* dans l’entrée :
-des cloques et une déformation de la peinture sur le soubassement et sur le mur de droite séparatif de la salle d’eau WC ;
-des cloques et l’apparition de fissurations sur la peinture au plafond au-dessus de ce mur ;
* un trou important avec une conduite en PVC pénétrante sur le mur de la courette intérieure de l’immeuble, sur lequel donne la fenêtre de la cabine WC à droite de l’entrée.

Il sera fait observer que certains des autres éléments versés aux débats tels les clichés et enregistrements vidéo, ne permettent pas de s’assurer de la date ni de la provenance des fuites observées.

En revanche, il sera également fait observer que les constats rappelés ci-dessus ne sont pas contestés.

Or, la multiplicité des dégâts des eaux survenus dans l’appartement des époux [U], sur une période de quelques années seulement, tous en provenance de l’appartement des défendeurs, et quand bien même seulement 4 dégâts des eaux auraient été déclarés par les époux [U] à leur assureur comme l’affirment les défendeurs, constitue un inconvénient anormal de voisinage, et doit être réparé à ce titre.

Les consorts [N] sont propriétaires de l’appartement d’où proviennent les dégâts des eaux causés aux époux [U] ; partant, leur responsabilité est engagée de plein droit du fait du trouble anormal de voisinage ainsi caractérisé, et ils seront condamnés à indemniser les époux [U] à ce titre.

I.B.2 – Sur la mise en conformité des installations sanitaires de l’appartement des défendeurs :

Il résulte en pages 12-13 et 24-25 du rapport d’expertise judiciaire que la mise en conformité des installations sanitaires de l’appartement des défendeurs, consistant en une réfaction totale des installations de plomberie selon les règles de l’art ainsi que la réalisation d’une parfaite étanchéité du sol et des murs dans les deux salles d’eau, les WC, la buanderie et la cuisine, est indispensable afin de faire cesser le trouble définitivement, l’expert judiciaire invitant au surplus les défendeurs à se rapprocher d’un architecte spécialiste en étanchéité pour conduire les travaux de mise en conformité.

Les défendeurs ont produit lors de l’expertise un devis en date du 26 janvier 2021 des ETABLISSEMENTS LACROIX pour un montant TTC de 73 951,28 euros dont l’expert a précisé dans ses conclusions en page 25 de son rapport qu’il correspondait aux travaux demandés sur le plan technique.

Il sera fait observer que la nature et l’objet des travaux à réaliser n’ont pas fait l’objet de contestation par les parties.

Il sera également fait observer que les clichés versés aux débats (pièces n°16 à 26) par les défendeurs afin de justifier de l’état d’avancement des travaux de mise en conformité ne sont ni datables, ni localisables, et ne permettent pas de vérifier si la nature des travaux en cours de réalisation sur ces clichés correspond aux travaux préconisés par l’expert judiciaire.

De même, les devis versés aux débats sans facture ni ordre de service à l’appui ne permettent pas de démontrer que les travaux de mise en conformité ont réellement débuté.

La facture de l’entreprise SAS BAIXO datée du 25 novembre 2022 établie d’après le devis daté du 15 novembre 2022 correspond à un diagnostic, et non à des prestations de mise en conformité des installations telles que prévues au devis des ETABLISSEMENTS LACROIX, seul devis validé par l’expert judiciaire après avoir fait l’objet d’une discussion contradictoire entre les parties.

En revanche, il résulte de la facture établie par la SARL MIL le 25 octobre 2021 sur la base d’un devis n°1-2021-477-1 également versé aux débats que cette société a effectué des prestations correspondant aux prestations de mise en conformité telles que figurant au devis des ETABLISSEMENTS LACROIX, au niveau de la buanderie et des WC.

Dès lors, en l’absence d’éléments justifiant effectivement de l’engagement des travaux de mise en conformité tels que préconisés par l’expert au niveau des trois pièces restantes (cuisine et les deux salles d’eau), il y a lieu de condamner in solidum les consorts [N] à faire réaliser les travaux de mise en conformité de leurs installations sanitaires dans leur cuisine et leurs salles d’eau selon le devis des ETABLISSEMENTS LACROIX n° 2020-2021-4097 du 26 janvier 2021.

En revanche, l’expert judiciaire ayant simplement invité les défendeurs à se rapprocher d’un architecte spécialiste en étanchéité et plomberie sans que la nécessité de cette intervention n’ait été par lui retenue, il n’y a pas lieu d’ordonner que ces travaux soient réalisés sous le contrôle de l’architecte de la copropriété.

Afin d'assurer la bonne exécution de cette condamnation, elle sera assortie d'une astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard passé le délai d’un mois suivant la signification de la présente décision, conformément à l’article 491 alinéa 1er du code de procédure civile et aux articles L.131-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution. Cette astreinte courra pendant un délai de 150 jours.
II – Sur les demandes de dommages et intérêts :

II.A - Sur les demandes de dommages et intérêts formulées par le SDC :

Aux termes de l’article 1240 du code civil : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

La responsabilité délictuelle suppose la réunion d’une faute, d’un dommage et d’un lien de causalité.

En l’espèce, le SDC reproche aux défendeurs d’avoir effectué des travaux illégaux de percement du mur de façade pour raccorder l’évacuation de leur cuisine sur une descente d’eaux usées située en façade sur la courette intérieure sans autorisation préalable de l’assemblée générale, en violation des dispositions d’ordre public de l’article 25 b) de la loi du 10 juillet 1965 relative à la copropriété, s’agissant des travaux affectant des parties communes.

Cependant, le SDC ne verse aucun élément permettant d’établir que ces travaux ont été menés par les défendeurs, alors qu’il lui revient, étant en demande, de démontrer ce qu’il avance.

Au surplus, les défendeurs versent aux débats un procès-verbal de constat d’huissier daté du 26 septembre 2022 dont il ressort que des travaux similaires auraient été effectués à d’autres étages, ce qui permet d’autant moins de démontrer que les travaux effectués au niveau du raccordement de la cuisine des défendeurs à la descente d’eaux usées le long de la façade côté courette intérieure de l’immeuble serait bien de leur fait.

Par conséquent, en l’absence de démonstration de l’existence d’une faute à l’encontre des défendeurs, il n’y a pas lieu de faire droit aux demandes de dommages et intérêts du SDC.

II.B – Sur les demandes de dommages et intérêts formulées par les époux [U] :

En application du principe de réparation intégrale du préjudice, la victime doit être replacée dans une situation aussi proche que possible de la situation qui aurait été la sienne si le dommage ne s'était pas produit, les dommages-intérêts alloués devant réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit.

En l’espèce, il résulte de ce qui précède (cf I.B.) que les époux [U] ont subi des dommages du fait d’un trouble anormal de voisinage consistant en la survenance de multiples dégâts des eaux depuis l’appartement des défendeurs en l’espace de quelques années seulement, dommages constatés lors des opérations d’expertise entre autres et ayant causé préjudices aux époux [U].

II.B.1 - Au titre du préjudice matériel :

Si l’existence d’un préjudice matériel des époux [U] n’est pas contestée, en revanche son ampleur et les travaux de reprise validés par l’expert judiciaire ainsi que leur montant le sont.

Il sera tout d’abord fait observer que les constatations effectuées par l’expert judiciaire relatives aux dommages affectant l’appartement des époux [U] n’ont fait l’objet d’aucune contestation de la part des parties, et que l’existence de tels dommages dont il convient d’ordonner réparation a été constatée au niveau du couloir, de la buanderie, dans la cuisine, dans l’entrée et dans la salle d’eau attenante à l’ancienne chambre sur rue.

Il sera également fait observer que si les défendeurs reprochent à l’expert judiciaire de ne pas leur avoir accordé de délai supplémentaire afin de produire des devis complémentaires aux fins de comparaison, les devis établis à la demande des époux [U] l’ont été dès le mois de juillet 2020 pour les travaux de remise en état de la salle de bains, de l’entrée et du couloir, et dès le mois d’octobre 2020 pour les travaux de remise en état de la cuisine, et ces devis ont été communiqués aux défendeurs à compter du 23 novembre 2020 au moins au regard de l’annexe n°9 au rapport d’expertise judiciaire, soit plusieurs mois avant que l’expert judiciaire ne rende sa note de synthèse.
Dans la mesure où l’expert judiciaire a bien repris dans ses conclusions l’intégralité des devis fournis par les époux [U] au titre des travaux de remise en état qu’il estime nécessaires afin de réparer le préjudice matériel subi, il s’ensuit qu’il a ainsi confirmé que les prestations figurant sur ces devis correspondaient aux travaux préconisés, contrairement à ce qu’affirment les défendeurs.

Par ailleurs, les devis datant de juillet et octobre 2020, il y a lieu de tenir compte de l’actualisation des prix, aussi les devis actualisés en date des 25 avril et 21 juin 2023 pour des montants respectifs de 23 210 euros TTC et 1 694 euros TTC seront-ils pris en compte.

Il sera enfin fait observer que dans leur note versée en pièce n°10, les défendeurs contestent :
- le montant des prestations comprises dans les devis produits par les époux [U], sans pour autant étayer leurs contestations ni les prix des prestations qu’ils avancent par quelque élément que ce soit ; aussi ne sera-t-il pas tenu compte de leurs contestations sur ce point ;
- le dimensionnement excessif de la fenêtre de la salle d’eau attenante à l’ancienne chambre sur rue, dont le remplacement est prévu, sans élément pour corroborer leur contestation ; aussi ne sera-t-elle pas prise en compte.

En revanche, si l’expert judiciaire a pu indiquer en page 17 de son rapport qu’une pièce ancienne qui subit un dégât des eaux doit être refaite entièrement, il n’a pas davantage détaillé ni explicité cette affirmation. Or, les prestations suivantes figurant aux devis validés par l’expert judiciaire et actualisés ne correspondent à aucun des dommages constatés et seront par conséquent écartées ; il s’agit, dans la salle d’eau attenante à l’ancienne chambre sur rue, de :
* pour les prestations relatives au poste « plâtrerie/maçonnerie » : la fourniture d’un carrelage à définir pour le sol à un prix de 64,76 euros/m2 HT, soit un montant de 211,76 euros HT et de 232,94 euros TTC, la salle de bains ayant une surface de 3,27m2 et le taux de TVA étant de 10% (64,76 x 3,27 x 1,1) ;
* pour les prestations relatives au poste « plomberie » :
-la modification du réseau PVC au diamètre approprié pour le receveur d’un montant de 172,69 euros HT soit 189,96 euros TTC le taux de TVA étant de 10% (172,69 x 1,1) ;
-la fourniture et la pose d’un receveur, bonde et rehausse pour un montant de 949,82 euros HT soit 1 044,80 euros TTC le taux de TVA étant de 10% (949,82 x 1,1) ;
-la fourniture et la pose d’un plan vasque en corian pour recevoir la vasque en céramique préservée qui seront évaluées à 75% de la prestation correspondante d’un montant de 1 025,37 euros HT, laquelle prévoit également la pose de la vasque préservée, soit un montant de 769,03 euros HT et 845,93 euros TTC le taux de TVA étant de 10% (1 025,37 x 0,75 x 1,1) ;
-la fourniture et la pose d’une crédence autour de la vasque en corian d’un montant de 237,45 euros HT soit 261,19 euros TTC le taux de TVA étant de 10% (237,45 x 1,1).

Il y a lieu de déduire de l’évaluation du préjudice le montant des indemnités versées aux époux [U] par leur assureur, celui-ci disposant d’un recours subrogatoire à l’encontre des défendeurs aux fins de remboursement de l’indemnité versée.
Les époux [U] font état aux termes de leurs écritures de ce qu’une indemnité d’un montant de 1 492,70 euros leur aurait été octroyée dont 1 227,16 euros seulement leur auraient été versés, le solde devant être versé sur présentation de factures des travaux de remise en état, lesquels n’ont pas pu être réalisés, les désordres s’étant accentués, ces allégations étant corroborées par le courrier émanant de l’assureur des époux [U] daté du 18 mars 2019 versé au dossier. Par conséquent, la somme de 1 227,16 euros sera déduite du montant accordé aux époux [U] au titre du préjudice matériel.

Par conséquent, après déduction de l’indemnité d’un montant de 1 227,16 euros accordée par leur assureur, le montant de l’indemnité à accorder au titre des travaux de remise en état sera de 21 125,76 euros TTC (23 210 + 1 694 - 232,94 - 189,96 - 1 044,80 - 845,93 - 237,45 – 1 227,16), avec actualisation en fonction de l’évolution de l’indice BT01 entre le 25 avril 2023 et la date du présent jugement.

II.B.2 - Au titre des préjudices immatériels :

II.B.2.a - Sur les pertes et troubles de jouissance :

Il sera rappelé qu’il n’appartient pas à l’expert judiciaire de se prononcer sur l’impropriété à destination ou non d’un ouvrage, et qu’au surplus, l’expert judiciaire n’a pas précisé dans son rapport en quoi, hormis pour la salle d’eau parentale, le logement des époux [U] serait devenu impropre à sa destination dans son intégralité.

S’il ressort du constat d’huissier en date du 11 octobre 2019 une forte odeur de moisissure dans la chambre attenant à cette salle d’eau parentale consécutivement au dégât des eaux survenu le 11 juin 2018, une telle odeur n’a pas été constatée dans le cadre des opérations d’expertise judiciaire qui ont eu lieu postérieurement à ce constat, aussi la perte de jouissance de cette chambre ne pourra-t-elle être retenue qu’à compter du mois de juillet 2018 comme le sollicitent les époux [U], jusqu’au 11 octobre 2019, date du constat.

De même, s’il n’est pas contesté par les parties que le salon de l’appartement des époux [U] ait pu servir de chambre d’appoint, les clichés du salon fournis à l’appui de ce constat ne sont pas datés, et surtout, ne permettent pas d’évaluer la période pendant laquelle le salon a pu servir de chambre d’appoint, l’appartement comportant trois chambres au total, et les époux [U] ne fournissant aucun justificatif de ce qu’ils étaient régulièrement présents à leur domicile parisien ainsi qu’ils l’affirment, alors qu’ils reconnaissent avoir séjourné à Berlin pour motifs professionnels jusqu’à quelques mois encore avant la notification de leurs dernières conclusions le 27 octobre 2023 ; aussi le trouble de jouissance lié à la transformation du salon en chambre d’appoint n’est-il pas démontré.

Il en découle que le trouble de jouissance de la salle à manger donnant sur le salon, lié à l’impossibilité d’avoir une vie sociale à domicile, n’est pas non plus démontré.

Il n’est pas davantage démontré que la chambre attenant à la salle d’eau parentale ait été débarrassée, et que l’entassement des cartons dans le couloir et l’entrée soit lié à l’utilisation du salon comme chambre d’appoint ; aussi le trouble de jouissance du couloir et de l’entrée lié à la transformation du salon en chambre d’appoint n’est-il pas démontré.

Il ressort en revanche en page 24 du rapport d’expertise judiciaire qu’en raison des différents dégâts des eaux subis et constatés, la salle d’eau parentale de l’appartement des époux [U] ne peut plus être utilisée depuis le dégât des eaux survenu le 11 juin 2018 et jusqu’ à la date du présent jugement, ce qui constitue un préjudice de perte de jouissance devant donner lieu à indemnisation.

En l’absence d’éléments corroborant les allégations des défendeurs selon lesquelles l’appartement des époux [U] aurait été inoccupé lors du premier confinement lié à l’épidémie de covid-19, il n’y a pas lieu de retirer de cette période la durée de deux mois de ce premier confinement.
Compte tenu de ce que l’estimation de la valeur locative mensuelle de leur appartement produite par les époux [U] est basée sur des éléments personnalisés (adresse, plan, superficie, caractéristiques d’aménagement et éléments architecturaux), la valeur basse de celle-ci soit 4 600 euros hors charges sera retenue aux fins de calcul des préjudices liés à la perte de jouissance de la salle d’eau parentale et de la chambre attenante.

Ces préjudices seront évalués à hauteur des montants suivants :
- 8 044,26 euros pour la salle d’eau d’une superficie de 3,27m2 au sein de l’appartement de 136,69 m2, le préjudice de jouissance étant toujours d’actualité à la date du présent jugement et ce depuis le mois de juillet 2018 soit depuis une durée de 73 mois et 3 jours [(4 600 x 3,27/136,69 x (73 + 3/30)] ;
- 9 104,84 euros pour la chambre attenante d’une superficie de 17,62 m2, le préjudice de jouissance s’étendant du mois de juillet 2018 au 11 octobre 2019 soit sur une période de 15 mois et 11 jours [(4 600 x 17,62/136,69 x (15 + 11/31)].

II.B.2.b - Sur les préjudices esthétiques :

En l’absence de caractérisation par les époux [U] de préjudices esthétiques distincts des préjudices déjà indemnisés, leur demande d’indemnisation à ce titre sera rejetée.

II.B.2.c - Sur le préjudice moral :

Il ressort des éléments versés aux débats que les époux [U] ont subi de multiples dégâts des eaux pendant plusieurs années en provenance de l’appartement des défendeurs ; qu’ils ont mis en demeure ceux-ci de procéder aux travaux nécessaires afin de faire cesser ces fuites à de multiples reprises depuis plusieurs années ; que l’expert judiciaire a souligné qu’aucune mesure réellement propre à arrêter ces désordres n’avait été prise, alors que les défendeurs savaient avoir fait réaliser des travaux ayant pour objectif d’intervertir leur cuisine et leur salle de douche en 2012 ; qu’il en résulte que les époux [U], au regard du temps passé et des tracas générés par les dégâts subis, justifient d’un préjudice moral distinct des préjudices déjà indemnisés ; qu’à ce titre, ce préjudice moral sera indemnisé à hauteur de 3 000 euros.

III – Sur les demandes accessoires :

Aux termes de l'article 695 du code de procédure civile : « Les dépens afférents aux instances, actes et procédures d'exécution comprennent :
1° Les droits, taxes, redevances ou émoluments perçus par les greffes des juridictions ou l'administration des impôts à l'exception des droits, taxes et pénalités éventuellement dus sur les actes et titres produits à l'appui des prétentions des parties ;
2° Les frais de traduction des actes lorsque celle-ci est rendue nécessaire par la loi ou par un engagement international ;
3° Les indemnités des témoins ;
4° La rémunération des techniciens ;
5° Les débours tarifés ;
6° Les émoluments des officiers publics ou ministériels ;
7° La rémunération des avocats dans la mesure où elle est réglementée y compris les droits de plaidoirie ;
8° Les frais occasionnés par la notification d'un acte à l'étranger ;
9° Les frais d'interprétariat et de traduction rendus nécessaires par les mesures d'instruction effectuées à l'étranger à la demande des juridictions dans le cadre du règlement (CE) n° 1206/2001 du Conseil du 28 mai 2001 relatif à la coopération entre les juridictions des Etats membres dans le domaine de l'obtention des preuves en matière civile et commerciale ;
10° Les enquêtes sociales ordonnées en application des articles 1072, 1171 et 1221 ;
11° La rémunération de la personne désignée par le juge pour entendre le mineur, en application de l'article 388-1 du code civil ;
12° Les rémunérations et frais afférents aux mesures, enquêtes et examens requis en application des dispositions de l'article 1210-8. »

Aux termes de l’article 696 alinéa 1 du même code : « La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.»

Aux termes de l'article 699 du même code : « Les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision.
La partie contre laquelle le recouvrement est poursuivi peut toutefois déduire, par compensation légale, le montant de sa créance de dépens. »

Aux termes de l'article 700 alinéas 1 et 2 du même code : « Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer:
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. »

En l'espèce, le SDC et les défendeurs succombent au moins en partie en leurs prétentions essentielles, aussi, ils seront condamnés aux dépens, en ce compris notamment les frais d’expertise judiciaire, dont distraction au profit des avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre en vertu des dispositions de l’article 699 du code de procédure.

Les dépens de l’instance seront partagés à hauteur de 75% à la charge des défendeurs et de 25% à la charge du SDC.

En équité, il convient de condamner les défendeurs à payer aux époux [U] la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort ;

Déclare irrecevable la pièce n°42 produite par Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z] ;

Déclare irrecevable la note en délibéré produite le 25 juillet 2024 par Monsieur [K] [U] et Madame [J] [U];

Déclare irrecevables Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z] en leur fin de non-recevoir soulevée pour défaut d’intérêt à agir à l’encontre du syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] représenté par son syndic la société IMMOBILIERE DU CHATEAU ;

Déboute le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] représenté par son syndic la société IMMOBILIERE DU CHATEAU de l’intégralité de ses demandes ;

Condamne in solidum Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z] à faire réaliser les travaux de mise en conformité de leurs installations sanitaires dans la cuisine et les salles d’eau de l’appartement dont ils sont copropriétaires sis au 3e étage de l’immeuble [Adresse 1], selon le devis des ETABLISSEMENTS LACROIX n° 2020-2021-4097 du 26 janvier 2021, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard passé le délai d’un mois suivant la signification de la présente décision ;

Dit que l’astreinte courra pendant un délai de 150 jours ;

Condamne in solidum Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [U] et à Madame [J] [U] la somme de 21 125,76 euros TTC au titre de leur préjudice matériel ;

Dit que la somme allouée au titre des travaux de reprise sera actualisée en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 25 avril 2023, jusqu’à la date du présent jugement ;

Condamne in solidum Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [U] et à Madame [J] [U] la somme de 8 044,26 euros euros TTC au titre de leur préjudice de jouissance de la salle d’eau parentale;

Condamne in solidum Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [U] et à Madame [J] [U] la somme de 9 104,84 euros TTC au titre de leur préjudice de jouissance de la chambre attenante à la salle d’eau parentale ;

Condamne in solidum Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [U] et à Madame [J] [U] la somme de 3 000 euros TTC au titre de leur préjudice moral ;

Condamne Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z], ainsi que le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] représenté par son syndic la société IMMOBILIERE DU CHATEAU aux dépens de l'instance dont les frais d’expertise judiciaire, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Partage les dépens de l’instance à hauteur de 75% à la charge de Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z], et de 25% à la charge du syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] représenté par son syndic la société IMMOBILIERE DU CHATEAU ;

Condamne in solidum Monsieur [B] [F] et Madame [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [U] et à Madame [J] [U] la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Rappelle que l’exécution provisoire du présent jugement est de droit ;

Rejette le surplus des demandes.

Fait et jugé à Paris le 03 septembre 2024

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 6ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 21/08590
Date de la décision : 03/09/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-03;21.08590 ?
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