TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:
■
8ème chambre
1ère section
N° RG 21/09003
N° Portalis 352J-W-B7F-CUXTB
N° MINUTE :
Assignation du :
28 Juin 2021
JUGEMENT
rendu le 03 Septembre 2024
DEMANDEUR
Monsieur [K] [C] [V] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Maître Véronique GRAMOND, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0016
DÉFENDEURS
Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] [Localité 3], représenté par son syndic, le Cabinet SEGINE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Maître Eric AUDINEAU de l’AARPI AUDINEAU GUITTON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0502
Monsieur [S] [M] [J]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Madame [X] [N] [P] épouse [J]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentés par Maître Anne LEFORT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0547
Décision du 03 Septembre 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/09003 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUXTB
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente
Monsieur Julien FEVRIER, Juge
Madame Muriel JOSSELIN-GALL, Vice-Présidente
assistés de Madame Justine EDIN, Greffière.
DÉBATS
A l’audience du 24 Avril 2024 tenue en audience publique devant Monsieur Julien FEVRIER, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.
JUGEMENT
Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
EXPOSE DU LITIGE
L'ensemble immobilier situé [Adresse 2] [Localité 3] est constitué en copropriété.
M. [K] [Z] est propriétaire de plusieurs lots dans cet immeuble, dont le lot 231 consistant en un local au 5ème étage du bâtiment C.
M. [S] [J] et Mme [X] [P], son épouse, sont propriétaires du lot 230 consistant en un appartement également situé au 5ème étage du bâtiment C.
Le 27 avril 2021, l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble a notamment rejeté les résolutions n° 23 (mandat au syndic pour engager toute action pour obtenir la restitution par les époux [J] du dégagement du 5ème étage de manière à permettre au lot 231 d'accéder à l'escalier C), 24 (mandat à donner à un avocat pour le représenter en justice) et 25 (autorisation donnée à M. [Z] d'utiliser à partir du 5ème étage l'ascenseur desservant l'escalier C et à prendre acte de son engagement de contribuer aux charges d'ascenseur au titre du lot 231).
Par actes d'huissier de justice des 28 et 30 juin 2021, M. [Z] a assigné devant le tribunal les époux [J], ainsi que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] [Localité 3].
*
Dans ses dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 11 novembre 2022, M. [Z] demande au tribunal de :
" Vu les dispositions des articles 16, 25, 26, 42, 43 de la Loi de 1965 sur la copropriété des immeubles bâtis, 544, 1240, 2261 et 2272 du code civil,
Dire Monsieur [K] [Z] recevable et bien fondé en ses demandes,
Annuler les résolutions VINGT-TROIS, VINGT-QUATRE et VINGT-CINQ de l'assemblée générale ordinaire de l'ensemble immobilier du [Adresse 2] à [Localité 3] en date du 27 avril 2021;
Dire réputé non écrit l'article article 11, III, e) du règlement de copropriété en ce qu'il aurait pour effet d'opérer le transfert de propriété à titre gratuit et sans modification de la répartition des charges d'une partie commune à un copropriétaire.
Ordonner, au besoin sous astreinte de 100 € par jour de retard, que les époux [J], propriétaires du lot 230, restituent au syndicat des copropriétaires le dégagement commun du 5 ème étage,
Ordonner que Monsieur [K] [Z] accédera librement aux parties communes que sont le dégagement commun du 5 ème étage, le palier de l'escalier " C " au 5 ème étage, ainsi que l'ascenseur.
Donner acte à Monsieur [Z] de son engagement de participer au paiement des charges de l'ascenseur de l'escalier " C " au titre de l'accès par le 5 ème étage.
Condamner Monsieur et Madame [J] à régler à Monsieur [Z] une somme 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner in solidum Monsieur et Madame [J] et le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens de l'instance dont recouvrement direct au profit de Maître Véronique GRAMOND, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
Ordonner l'application des dispositions de l'article 10-1 de la Loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété des immeubles bâtis et dispenser Monsieur [Z] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure
Dire les époux [J] irrecevables et mal fondés en leurs demandes tendant à ce que le Tribunal juge qu'ils sont devenus propriétaires du dégagement du 5 ème étage par prescription acquisitive abrégée ou en tout état de cause trentenaire, tendant à ce que le Tribunal dise prescrites par application des articles 42 de la Loi du 10 juillet 1965 et 2224 du code civil les demandes de Monsieur [Z] et le condamne sur le fondement de l'article 700 du CPC et encore en tous les dépens.
Débouter les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ;
Dire que l'exécution provisoire est compatible avec la nature de l'affaire et l'ordonner ".
*
Dans leurs dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 15 juin 2023, les époux [J] demandent au tribunal de :
" Vu les articles 9, 26 et 42, 10-1 de la loi du 10 juillet 1965,
DEBOUTER Monsieur [Z] de ses demandes en nullité des résolutions N°23 à 25 de l'Assemblée générale du 27 avril 2021.
JUGER que Monsieur et Madame [J]-[P] sont devenus propriétaires du dégagement du 5ème étage attaché à leur LOT 230 par prescription acquisitive abrégée de 10 ans et en tout état de cause par prescription plus que trentenaire, en application de l'article 2229 du Code civil et [sic]
JUGER PRESCRITES en application des articles 42 de la Loi du 10 juillet 1965 et 2224 du Code Civil, les actions de Monsieur [Z] en restitution au syndicat des copropriétaires du dégagement du 5 ème étage intégré au LOT 230, aux fins de voir réputé non écrit l'article 11 du règlement de copropriété et aux fins d'accéder à l'ascenseur au 5 ème étage, accès auquel il avait bien, de fait, lui-même renoncé en vendant à Mr [B] le lot 230 dont la porte d'entrée restait bien située au droit de la cage d'escalier…
DEBOUTER le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] [Localité 3], de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
DIRE N'Y AVOIR LIEU à exécution provisoire de la décision à intervenir, incompatible avec la nature de l'affaire et qui aurait des conséquences irréversibles en cas d'infirmation par la Cour d'Appel de Paris.
CONDAMNER Monsieur [Z] à payer à Monsieur et Madame [J]-[P] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du CPC.
CONDAMNER Monsieur [Z] aux entiers dépens de l'instance, lesquels pourront être recouvrés par Maître Anne LEFORT, par application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile ".
*
Dans ses dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 9 mars 2023, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] [Localité 3] demande au tribunal de :
" Vu les dispositions des articles 16, 25, 26, 42, 43 de la loi de 1965 sur la copropriété des immeubles bâtis,
Vu le règlement de copropriété du SDC [Adresse 2] [Localité 3] et les plans annexés,
Juger légitime et bien fondée la demande de Monsieur [Z] tendant au rétablissement du dégagement du 5 ème étage comme partie commune avec accès à l'ascenseur et à l'escalier C du bâtiment C, afin qu'il puisse y accéder librement, conformément au règlement de copropriété.
Décision du 03 Septembre 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/09003 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUXTB
Débouter M. [K] [Z] de ses demandes tendant à l'annulation des résolutions 23 et 24 de l'assemblée générale ordinaire de l'ensemble immobilier du [Adresse 2] [Localité 3] en date du 27 avril 2021,
Débouter Monsieur [K] [Z] de sa demande tendant à voir dire réputé non écrit l'article 11, III, e) du règlement de copropriété,
Débouter les époux [J]-[P] de l'ensemble de leurs demandes fin et conclusions,
Condamner in solidum toutes parties succombantes à régler au SDC [Adresse 2] [Localité 3], une somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Juger que l'exécution provisoire est compatible avec la nature de l'affaire et l'ordonner,
Condamner in solidum toutes parties succombantes aux entiers dépens".
*
Il est renvoyé aux conclusions récapitulatives des parties pour l'exposé des moyens de droit et de fait à l'appui de leurs prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
La clôture de la procédure a été ordonnée le 19 juin 2023 et l'affaire a été plaidée le 24 avril 2024. La décision a été mise en délibéré au 3 septembre 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur les demandes principales de M. [Z]
A l'appui de ses demandes principales, M. [Z] fait valoir que :
- en 1995, il a acquis les lots 230 et 231 de l'immeuble ;
- ces lots avaient été réunis à d'autres pour former un duplex, mais chacun conservait un accès direct au palier commun du 5ème étage et à l'escalier ;
- le dégagement commun situé au droit de l'escalier C avait été clos et disposait d'une porte aboutissant à l'escalier de sorte que les lots 230 et 231 bénéficiaient de ce dégagement ;
- en 2005, il a vendu le lot 230 à M. [B] et l'acte de vente renseignait les acquéreurs sur la situation du dégagement ;
- M. [B] s'est engagé à condamner une porte allant du lot 230 au 231 ;
- le 31 mars 2014, M. [B] a vendu le lot 230 aux époux [J] ;
- l'assemblée générale des copropriétaires de 2015 n'a adopté aucune résolution permettant la constitution de nouveaux lots, leur cession, ni l'établissement d'un modificatif du règlement de copropriété ;
- M. [J] a muré la porte du lot 231 permettant d'accéder au dégagement conduisant au palier de l'escalier C (le bâti de la porte a été conservé) ;
- désireux d'affecter le lot 231 à un logement autonome des lots du 4ème étage, il a demandé à M. [J] l'accès au palier du 5ème étage en vain ;
- dans ce contexte, il a soumis à l'assemblée générale des copropriétaires les résolutions litigieuses ;
- le dégagement litigieux est une partie commune selon le règlement de copropriété ;
- la privation d'un accès à l'escalier C affecte la destination et les modalités de jouissance du lot 231 ;
- l'assemblée générale a commis un abus de majorité en rejetant les résolutions litigieuses ;
- les résolutions litigieuses de rejet sont contestables ;
- l'ascenseur est un équipement commun ;
- l'article 11 du règlement de copropriété doit être considéré comme une clause réputée non écrite car il aurait pour effet d'opérer le transfert de propriété à titre gratuit et sans modification de la répartition des charges d'une partie commune ;
- le tribunal doit ordonner la restitution du dégagement commun, ce qui suppose l'enlèvement de la porte séparant le palier de l'escalier et le dégagement ;
- la prescription de l'article 42 n'est pas applicable à l'action tendant à faire déclarer une clause non écrite en application de l'article 43 ;
- M. [U] et M. [Z] n'ont pas prescrit la propriété de la partie commune litigieuse et se sont contentés de jouir privativement d'une partie commune comme autorisé par le règlement de copropriété dès lors qu'ils étaient propriétaires des lots 230 et 231 ;
- leur possession n'a pas duré 30 ans et a été équivoque ;
- même en cas de création de droits, ils n'auraient pu profiter qu'également aux lots 230 et 231 ;
- l'usage d'une partie commune partagée entre plusieurs copropriétaires exclut la possibilité pour l'un d'entre eux de se prévaloir d'une prescription acquisitive ;
- le dégagement litigieux n'a pas été vendu aux époux [J] et ils ne peuvent joindre à leur possession celle de leur auteur ;
- la possession des époux [J] est équivoque et pas en qualité de propriétaire ;
- en sollicitant la création d'un lot privatif et sa vente, M. [J], architecte de la copropriété, a démontré qu'il savait ne pas être propriétaire du dégagement et a reconnu le caractère équivoque de la possession de cette partie commune ;
- les conditions de la prescription acquisitive ne sont pas réunies ;
- les époux [J] ne bénéficient pas d'un juste titre ;
- sa demande d'accès à l'ascenseur n'est pas prescrite car l'action tendant à la cessation de l'appropriation d'une partie commune par un copropriétaire est une action réelle qui échappe à la prescription de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965.
En défense, les époux [J] font valoir que :
- en 1979, M. [U] a acheté les lots 267, 307, 268, 264, 231 et 230 et les a réunis pour former un duplex, après percement d'un escalier privatif intérieur entre les lots 231 et 267 ;
- en application de l'article 11 du règlement de copropriété, M. [U] a intégré à ses lots l'espace délimité au 5ème étage et y a installé une porte blindée d'accès en limite de la cage d'escalier ;
- en 1995, M. [U] a vendu ses biens à M. [Z] ;
- Mme [F], compagne de M. [Z], a occupé le lot 230 et M. [Z] les autres lots ;
- en 2005, le lot 230 a été vendu à M. [B], ami du demandeur ;
- la porte d'entrée blindée de l'appartement est restée à la même place en limite de la cage d'escalier et la porte de communication avec le lot 231 est restée en place mais condamnée au moyen d'une serrure ;
- en mars 2014, ils ont acquis le lot 230 et le vendeur a réalisé des travaux préalables (desserte du logement par l'ascenseur et obturation totale en maçonnerie de la communication avec le lot 231 en accord avec le demandeur) ;
- ils ont acquis en l'état et le dégagement litigieux leur a été vendu comme " entrée " ;
- le règlement de copropriété prévoit qu'en cas d'acquisition des lots 230 et 231 par un même propriétaire, il pourra inclure à ces lots le dégagement du 5ème étage ;
- leur acte d'achat démontre que l'espace litigieux avait bien été intégré à l'appartement acheté par M. [B] à M. [Z] et qu'il en a joui de manière continue, paisible, publique et non équivoque ;
- le dégagement litigieux a été intégré dans les lots 230 et 231 dès la mise en copropriété par le premier propriétaire M. [U] ;
- le vendeur M. [B] atteste lui-même dans l'acte de vente que le palier a été intégré à son appartement par un précédent propriétaire et qu'il l'a acquis en l'état ;
- l'annexion du vestibule palier remonte à plus de 42 ans ;
- il n'y a aucun abus de majorité s'agissant des résolutions litigieuses ;
- l'action au titre de l'article 11 du règlement de copropriété est prescrite;
- l'action en restitution du dégagement est aussi prescrite par 5 ans en application de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 ;
- ils peuvent se prévaloir de l'acquisition par prescription du dégagement litigieux ;
- l'acquisition par prescription trentenaire fait obstacle à l'action de M. [Z] ;
- son action concernant l'accès à l'ascenseur est elle aussi prescrite.
De son côté, le syndicat des copropriétaires fait valoir que :
- M. [U] avait inclus aux lots 230 et 231 le dégagement litigieux conformément à l'article 11 du règlement de copropriété ;
- M. [U] a vendu ses lots à M. [Z] ;
- M. [Z] a vendu le lot 230 à M. [B] sans faire état du dégagement litigieux ;
- M. [B] à vendu le lot 230 aux époux [J] et la désignation du lot est identique à l'acte d'acquisition de M. [B] ;
- des travaux sur parties communes ont été réalisés par les époux [J] sans information préalable du syndic et sans autorisation du syndicat des copropriétaires ;
- le syndic a mis en demeure les époux [J] de restituer les parties communes litigieuses ;
- les résolutions litigieuses sont des résolutions de rejet qui ne constituent pas une décision au sens de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 et le demandeur n'a aucun grief à faire valoir ;
- la position du syndicat des copropriétaires était légitime car le préjudice résultant de l'accaparement est individuel et non collectif ;
- l'article 11 du règlement de copropriété est licite car elle permet la seule jouissance exclusive d'une partie commune et sa clôture, sans transférer sa propriété et sans gêner les autres copropriétaires ;
- il n'y a pas de prescription acquisitive car l'article 11 précité donne au propriétaire un droit de jouissance privative sur le dégagement et les lieux sont donc occupés en vertu d'un titre ;
- jusqu'à l'acquisition du lot 230 par les époux [J], l'occupation privative ne s'est jamais exercée à titre de propriétaire ;
- leur acte d'achat n'est pas un juste titre leur permettant d'invoquer une prescription abrégée de 10 ans car ils ont été informés de la situation et M. [B] n'a pas invoqué un juste titre ;
Décision du 03 Septembre 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/09003 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUXTB
- les époux [J] avaient conscience de la situation car ils ont engagé des démarches pour la régulariser ;
- le début de la prescription acquisitive dont auraient pu bénéficier les époux [J] se situe au mieux au 31 mars 2014 et elle a été interrompue par l'action judiciaire engagée et par les démarches du demandeur auprès d'eux.
*
Vu l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 qui prévoit que les dispositions de l'article 2224 du code civil relatives au délai de prescription et à son point de départ sont applicables aux actions personnelles relatives à la copropriété entre copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat.
Vu l'article 2227 du code civil qui précise que le droit de propriété est imprescriptible. Sous cette réserve, les actions réelles immobilières se prescrivent par trente ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
L'appropriation des parties communes d'une copropriété par l'un des copropriétaires ouvre droit pour le syndicat des copropriétaires et les autres copropriétaires à une action réelle en restitution qui se prescrit par trente ans et non à une action personnelle visée à l'article 42 précitée.
Sur ce,
Quant bien même, aux termes du dispositif de ses dernières écritures précitées, M. [Z] forme d'abord des prétentions tendant à l'annulation de résolutions querellées, le moyen soulevé en défense par les époux [J] tendant à voir déclarer prescrit M. [Z] en ses demandes " en restitution au syndicat des copropriétaires du dégagement du 5ème étage intégré au lot 230 ", et " aux fins de voir réputé non écrit l'article 11 du règlement de copropriété et aux fins d'accéder à l'ascenseur du 5ème étage " nécessite qu'il soit examiné avant celles tendant à l'annulation de résolutions, dont l'objet est lié au sort de ces demandes précitées.
Les parties s'accordent sur le fait qu'à l'origine le dégagement litigieux était une partie commune de l'immeuble, ce qui est confirmé par le règlement de copropriété.
L'article 11 du règlement de copropriété prévoit ainsi que " au cas où les lots 230 et 231 situés au cinquième étage du bâtiment C deviendraient la propriété d'un seul propriétaire celui-ci pourrait inclure à ces lots le dégagement figurant sous les côtes 29-30-31-32 et ce sans autorisation d'assemblée générale des copropriétaires, et sans modification des millièmes, mais ce dégagement sera grevé d'une servitude d'accès au monte charge pour son entretien ou sa réparation...
Les propriétaires profitant de ces parties de couloir, dégagements ou escaliers pourront les clore au droit des côtés figurant sur les plans ci-annexés ".
Il résulte en outre des déclarations concordantes des parties et des actes de vente versés à la procédure que M. [K] [U], ancien propriétaire de divers lots de copropriété et notamment des lots 230 et 231, a annexé, en toute connaissance de cause, le dégagement litigieux à ses lots et a installé une porte au droit de la cage d'escalier commune.
Décision du 03 Septembre 2024
8ème chambre 1ère section
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L'acte authentique de vente entre M. [U] et M. [Z] indique que le premier a lui-même acquis les lots 230 et 231 le 9 mai 1978.
Les époux [J] versent aux débats plusieurs attestations d'anciens copropriétaires, ayant habité l'immeuble entre 1977 et 1981, attestant que " l'appartement en duplex situé dans l'escalier C, qui appartenait à l'époque à monsieur [K] [U] chez qui nous nous réunissions régulièrement puisqu'il était président du conseil syndical et que les AG se déroulaient chez lui, possédait bien au 5è étage une porte blindée semi-vitrée positionnée au droit de la cage d'escalier, comme on peut le voir sur la photo ci-dessous ".
Il ressort des pièces à la procédure que l'occupation du dégagement litigieux partie commune s'est poursuivie par les propriétaires successifs du lot 230, M. [Z], M. [B] et les époux [J], qui ont conservé la porte palière installée devant le dégagement litigieux.
A ce sujet, l'acte de vente [B] [J] indique que " le vendeur déclare et garantit que : … il résulte du plan du lot annexé au règlement de copropriété que le palier d'accès aux lots 230 et 231 a été intégré à l'appartement par un précédent propriétaire... ". Ce précédent propriétaire est manifestement M. [U] auquel M. [Z] a succédé dans l'occupation du dégagement litigieux.
Le délai de prescription de l'action en restitution au syndicat des copropriétaires du dégagement litigieux partie commune a donc commencé à courir en mai 1978 et au plus tard en 1981 puisqu'il est établi que dès cette époque l'annexion de la partie commune litigieuse était connue et visible pour les copropriétaires.
L'action en restitution de parties communes au syndicat des copropriétaires engagée par M. [Z] les 28 et 30 juin 2021 est dès lors largement prescrite car le délai de prescription extinctive de 30 ans a expiré en 2008, voire au plus tard en 2011 même si l'on retenait comme point de départ le plus tardif l'année 1981.
La demande à ce titre est dès lors irrecevable.
Il n'y a dès lors pas lieu d'examiner la question de la prescription acquisitive invoquée par les époux [J] comme un moyen de défense à l'action en restitution de partie commune.
S'agissant la demande de dire réputé non écrit l'article 11 précité du règlement de copropriété, si elle est formée par M. [Z] sous forme d'une prétention dans le dispositif de ses écritures, la lecture du corps de ces mêmes écritures conduit à considérer qu'il ne s'agit pas d'une prétention autonome, mais d'un moyen visant à appuyer la demande de restitution de partie commune et à faire échec à la prescription acquisitive.
Or, la demande principale de restitution de partie commune étant prescrite, la question de la validité de l'article 11 du règlement de copropriété se révèle sans objet.
S'agissant de la demande d'accès au dégagement, au palier de l'escalier C du 5ème étage et à l'ascenseur, dès lors que la demande de restitution du dégagement litigieux est prescrite, la demande d'accès à ce dégagement ainsi que celle d'accès à l'ascenseur via ce dégagement le sont également dès lors qu'elles tendent au même but, à savoir laisser l'accès à M. [Z] au dégagement et à l'ascenseur au niveau du 5ème étage.
Il n'est par ailleurs pas expliqué, ni justifié, en quoi le palier de l'escalier C du 5ème étage, dans une partie ne correspondant pas au dégagement litigieux, serait inaccessible. La demande sera donc rejetée.
La demande de donner acte de M. [Z] de participation au paiement des charges de l'ascenseur de l'escalier C n'est pas une véritable prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile et il n'y a rien à trancher sur ce point.
S'agissant de la demande d'annulation des résolutions n° 23 (mandat au syndic pour engager toute action pour obtenir la restitution par les époux [J] du dégagement du 5ème étage de manière à permettre au lot 231 d'accéder à l'escalier C), 24 (mandat à donner à un avocat pour le représenter en justice) et 25 (autorisation donnée à M. [Z] d'utiliser à partir du 5ème étage l'ascenseur desservant l'escalier C et à prendre acte de son engagement de contribuer aux charges d'ascenseur au titre du lot 231) de l'assemblée générale du 27 avril 2021, l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée sans ses annexes.
M. [Z] est recevable à contester les résolutions précitées car il a bien la qualité de copropriétaire opposant selon procès-verbal de l'assemblée concernée et a engagé son action dans le délai de deux mois de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965.
Par ailleurs, même une décision de rejet peut faire l'objet d'une contestation.
En revanche, les décisions litigieuses de rejet de l'assemblée générale des copropriétaires ne traduisent aucun abus de majorité dès lors que l'action en restitution du dégagement partie commune est prescrite. L'assemblée générale ne pouvait raisonnablement pas prendre une autre décision, et M. [Z] ne se prévaut d'aucun autre moyen au soutien de ses demandes d'annulation.
Dès lors, la demande d'annulation des résolutions litigieuses sera rejetée.
Sur les demandes accessoires
En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
M. [Z], partie perdante, supportera les dépens.
Maître Anne Lefort, avocat, est autorisée à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.
M. [Z] sera condamné à verser aux époux [J] une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [Z] sera également condamné à verser au syndicat des copropriétaires défendeur une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande de M. [Z] au titre des frais irrépétibles sera rejetée.
En application des articles 514 et 515 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue d'office ou à la demande d'une partie.
En l'espèce, il n'y a pas lieu de suspendre l'exécution provisoire du jugement.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant après débats en audience publique, en premier ressort et par jugement contradictoire, par mise à disposition au greffe:
DECLARE irrecevables car prescrites les demandes de M. [K] [Z] au titre de la restitution au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] [Localité 3] du dégagement commun du 5ème étage et en conséquence celles d'accès à ce dégagement et d'accès à l'ascenseur au 5ème étage via ce dégagement ;
DECLARE recevables les autres demandes des parties ;
REJETTE la demande de M. [K] [Z] au titre de l'annulation des résolutions n° 23, 24 et 25 de l'assemblée générale du 27 avril 2021 du syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] [Localité 3] ;
REJETTE les demandes de M. [K] [Z] concernant l'accès au palier de l'escalier C au 5ème étage et à l'ascenseur ;
DECLARE sans objet la demande concernant l'article 11 du règlement de copropriété de l'immeuble du [Adresse 2] [Localité 3] ;
CONDAMNE M. [K] [Z] à verser à M. [S] [J] et à Mme [X] [P] épouse [J] une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [K] [Z] à verser au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] [Localité 3] une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE les demandes de M. [K] [Z] au titre des frais irrépétibles, des dépens et de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965;
CONDAMNE M. [K] [Z] aux dépens ;
AUTORISE Maître Anne Lefort, avocat, à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;
DIT n'y avoir lieu à suspendre l'exécution provisoire.
Fait et jugé à Paris le 03 Septembre 2024.
La Greffière La Présidente