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02/09/2024 | FRANCE | N°24/01344

France | France, Tribunal judiciaire de Valenciennes, Première chambre, 02 septembre 2024, 24/01344


N° RG 24/01344 - N° Portalis DBZT-W-B7I-GJHU

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES


PREMIERE CHAMBRE CIVILE
Affaire n° N° RG 24/01344 - N° Portalis DBZT-W-B7I-GJHU
N° minute : 24/175
Code NAC : 64B
LG/AFB


LE DEUX SEPTEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE



DEMANDERESSE

IMMOBILIERE GRAND HAINAUT SIGH, SA à conseil de surveillance et directoire, immatriculée au RCS de Valenciennes sous le n° 548 800 382, dont le siège social est sis [Adresse 5] - [Localité 6], prise en la personne de son représentant légal domicilié es-qualité audir

siège
représentée par Maître Dominique HENNEUSE, associé de la SELARL ADEKWA, avocats au barreau de VALENCIENNES, av...

N° RG 24/01344 - N° Portalis DBZT-W-B7I-GJHU

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES

PREMIERE CHAMBRE CIVILE
Affaire n° N° RG 24/01344 - N° Portalis DBZT-W-B7I-GJHU
N° minute : 24/175
Code NAC : 64B
LG/AFB

LE DEUX SEPTEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

DEMANDERESSE

IMMOBILIERE GRAND HAINAUT SIGH, SA à conseil de surveillance et directoire, immatriculée au RCS de Valenciennes sous le n° 548 800 382, dont le siège social est sis [Adresse 5] - [Localité 6], prise en la personne de son représentant légal domicilié es-qualité audir siège
représentée par Maître Dominique HENNEUSE, associé de la SELARL ADEKWA, avocats au barreau de VALENCIENNES, avocats plaidant

DÉFENDERESSE

Mme [I] [X]
née le [Date naissance 1] 1996 à [Localité 8], demeurant [Adresse 2] - [Localité 8]
représentée par Maïtre Jérôme SZAFRAN, avocat au barreau de VALENCIENNES, avocat plaidant

* * *

Jugement contradictoire , les parties étant avisées que le jugement sera prononcé le 20 août 2024 prorogé à la date de ce jour, par mise à disposition au greffe, et en premier ressort par Madame Leïla GOUTAS, Première Vice-Présidente, assistée de Madame Sophie DELVALLEE Greffier.

Débats tenus à l'audience publique du 20 Juin 2024 devant :

- Madame Leïla GOUTAS, Première Vice-Présidente,
- Madame Aurélie LA ROSA, Vice-Présidente,
- Madame Nathalie REGULA, Magistrat à titre temporaire,

assistées de Madame Sophie DELVALLEE, Greffier.

* * *

EXPOSÉ DU LITIGE :

La Société Civile Immobilière Grand Hainaut (SIGH) est propriétaire d’une maison individuelle sis [Adresse 4] à [Localité 7].

Elle a procédé à sa réhabilitation.

Lors de la réception de ces travaux en date du 11 mars 2022, elle découvrait d’importantes traces d’humidité sur le mur mitoyen avec l’immeuble [Adresse 3], appartenant à Mme [I] [X].

Par ailleurs, en date du 18 juin 2022, un incendie ayant pris naissance dans le jardin appartenant à cette dernière, a endommagé la panne faitière, la couverture du bac acier et les plaques acier de l’abri de jardin de l’immeuble appartenant à la SIGH.

Par ordonnance en date du 31 octobre 2023, rectifiée en date du 15 novembre 2023, le juge des référés a ordonné une mesure d’expertise confiée à M. [C] [P].

Cet expert a déposé son rapport en date du 16 mars 2024.

Par ordonnance en date du 14 avril 2024, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Valenciennes a autorisé la SIGH à inscrire une hypothèque judiciaire pour garantir la somme de 44 256,709 euros correspondant au chiffrage effectué par l’expert de la reprise des désordres.

Par acte d'huissier en date du 29 avril 2024, la SIGH a fait assigner à jour fixe Mme [I] [X] devant le tribunal judiciaire de Valenciennes afin notamment d'obtenir reconnaissance de responsabilité et indemnisation de son préjudice.

Par dernières conclusions signifiées par RPVA en date du 20 juin 2024, developpées oralement à l'audience du même jour, auxquelles il est fait référence pour l'exposé et le détail de l'argumentation, la SIGH sollicite sur le fondement des dispositions des articles 1240 et 1242 du code civil, de :
Condamner Mme [I] [X] à lui payer la somme de 30 150,79 euros en indemnisation de son préjudice matériel,La condamner à lui payer la somme de 15 600 euros, sauf à parfaire, en indemnisation de son préjudice de jouissance,Débouter Mme [I] [X] de l’intégralité de ses demandes,Condamner Mme [I] [X] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,La condamner aux dépens incluant le coût de l’expertise judiciaire.
Au soutien de ses intérêts, la SIGH expose qu’à la réception des travaux de rénovation de l’immeuble lui appartenant, elle a constaté la présence d’importantes traces d’humidité sur le mur mitoyen avec l’immeuble appartenant à Mme [I] [X], que la cause de ces traces a été identifiée comme provenant de la toiture de sa voisine, qu’elle l’a ainsi mise en demeure de faire les recherches de fuites et de procéder aux réparations nécessaires pour faire cesser ces désordres. Elle indique que malgré une mise en demeure à cette fin en date du 15 décembre 2022 et une sommation interpellative effectuée en date du 14 mars 2023, aucun retour n’est intervenu la contraignant à saisir le juge des référés qui a ordonné une expertise. Elle précise, que l’expert judiciaire a conclu que l’origine des désordres constatés dans son immeuble est une infiltration d’eau provenant de l’immeuble de Mme [I] [X] et de la toiture arrière et que l’origine des désordres sur l’abri de jardin est un incendie d’un tas de gravats à proximité de la parcelle située au n°[Adresse 3]. Elle rappelle les dispositions des articles 1240 et 1242 du code civil, en soulignant que Mme [I] [X] ne l’a pas avertie des dégradations en provenance de son bien et que son mutisme est fautif. Elle souligne d’ailleurs que cette dernière reconnait expressément sa responsabilité au titre des désordres relatifs à l’humidité et au titre de l’incendie. Elle met en exergue que cette imputabilité est consacrée par l’expert sans que Mme [I] [X] n’en ait contesté les conclusions au sein du pré-rapport et que ses contestations ne reposent sur aucun élément probant et ne sont pas de nature à remettre en cause ses déclarations faites au contradictoire des parties. Elle indique que l’expert a chiffré les travaux de remise en état à une somme de 27 150,79 euros à laquelle il convient d’ajouter une somme de 3 000 euros pour assurer l’étanchéité entre les deux couvertures arrières et la perte de jouissance locative qu’elle chiffre à une somme de 14 400 euros outre la somme de 2 406 euros correspondant aux frais d’expertise. S’agissant de la mise en cause de la compagnie d’assurance Axa, elle souligne que l’attestation d’assurance versée est postérieure au sinistre pour prendre effet au 1er avril 2024, ce qui ne justifie pas de l’autoriser à assigner à jour fixe son assureur. Elle souligne n’avoir jamais été convoquée par l’assureur de cette dernière à une quelconque expertise et que Mme [I] [X] a reconnu sa responsabilité quant à la survenance du sinistre, cause systématique de garantie dans nombre de contrats d’assurance. Elle prétend que cette dernière conserve la faculté d’exercer un recours contre son assureur pour prendre en charge le sinistre, fait qui lui est étranger et ne saurait justifier que son préjudice continue de s’aggraver quotidiennement. Elle conteste le partage de responsabilité invoquée par Mme [I] [X] en rappelant que l’expert ne l’a pas consacré et a retenu sa pleine responsabilité. Elle conteste sa participation à son préjudice dans la mesure où l’absence de chauffage de l’immeuble est dûe à l’impossibilité de le louer.

Par dernières écritures signifiées par RPVA en date du 20 juin 2024, développées oralement à l’audience du 20 juin 2024, auxquelles il est fait référence pour l’exposé et le détail de l’argumentation, Mme [I] [X] sollicite sur le fondement des dispositions des articles 1240 et 1242 du code civil, de :
A titre principal,Débouter la SIGH de l’ensemble de ses demandes relatif aux désordres liés à l’humidité et à la supposée infiltration d’eau,Rendre opposable la décision à intervenir concernant les conséquences de l’incendie à Axa Iard France et la condamner à garantir toute somme qui serait mise à la charge de Mme [I] [X],A titre subsidiaire,Dire que la SIGH est responsable des désordres invoqués relativement à l’humidité à hauteur de 75%,Dire que Mme [I] [X] est responsable sur le fondement de l’article 1242 du code civil des désordres invoqués relativement à l’humidité à hauteur de 25 %,Dire que Mme [I] [X] est tenue d’indemniser la SIGH à hauteur de 503,43 euros correspondant aux travaux de réfection du mur du salon/séjour,Débouter la SIGH du surplus de ses demandes,En tout état de cause,Condamner la SIGH à la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,La condamner aux dépens.
Au soutien de ses intérêts, Mme [I] [X] reconnait être la propriétaire de l’immeuble voisin appartenant à la SIGH. Elle rappelle que la responsabilité délictuelle de droit commun et du fait des choses impose de démontrer en premier lieu l’existence d’une faute ou un fait d’une chose, d’un lien de causalité et d’un préjudice et que la SIGH se contente de démontrer l’existence d’un préjudice. Elle estime que la SIGH se dit victime d’un préjudice consistant en des désordres au sein de son immeuble et tente de les lui imputer aveuglément sur la base du rapport d’expertise qui n’est pas exhaustif, ne se veut pas certain et déterminant et qui est interprété par la demanderesse. Elle considère que ce rapport d’expertise ne permet pas d’établir de manière certaine sa responsabilité. Elle estime ainsi que la demanderesse se prévaut de faits qui ne sont objectivés par aucun élément versé à la procédure comme la non-étanchéité de son dôme. Elle prétend que l’expert n’a pas indiqué dans son rapport le fondement de son avis qui est purement subjectif en l’état et qui ne constitue qu’une hypothèse probable à son sens. Elle met en exergue que l’expert ne dit pas si une infiltration est possible entre les deux habitations, que ce dernier ne précise pas les matériaux composant ce mur mitoyen ce qui ne permet pas de savoir si ces matériaux sont de nature à permettre l’infiltration d’une quantité importante d’eau. Elle précise que ses murs sont sains, qu’elle n’a pas de problèmes d’humidité dans son logement ou au pied de ses murs alors même que le problème existe toujours au sein de l’immeuble voisin et que ces problèmes auraient dû se propager à son immeuble ce qui n’en est rien. Elle souligne que l’expert n’a réalisé aucun relevé technique au sein de son habitation. Elle remet en cause les affirmations de l’expert quant au défaut d’étanchéité de son dôme et que ce dernier a toujours été protégé par une bâche comme le démontre les clichés photographiques pris en 2022 dans le cadre du rapport d’expertise Axa. Elle s’étonne que l’expert retienne une infiltration provenant de l’extension alors que les dommages constatés sont dans le bâti à l’avant de l’immeuble. Elle met également en exergue que l’expert identifie un défaut d’étanchéité à l’eau des acrotères et toitures arrières ainsi que l’absence de chauffage et de ventilation de l’immeuble appartenant à la SIGH sans en tirer aucune conséquence quant à la cause des désordres et quant à l’indemnisation du préjudice. Elle considère également que l’expert omet d’évoquer trois difficultés qui pourraient être la source des désordres subis ou à tout le moins questionner l’apparition de ces derniers, à savoir l’humidité de la cave , l’existence d’auréoles jaunâtres au niveau du mur du 36 désormais détruit, et la destruction de cet immeuble. Elle soutient ainsi que la partie adverse échoue à lui imputer de manière directe et certaine les divers éléments relevés par l’expert et qu’il est impossible de tenir pour vrai judiciairement l’hypothèse choisie subjectivement par l’expert.
A titre subsidiaire, elle invoque s’agissant du lien de causalité entre les désordres et la faute retenue, que l’expert a indiqué que l’infiltration s’est faite par le mur mitoyen et que l’absence de chauffage et de ventilation a conduit au dommage et qu’elle ne saurait donc dès lors être condamnée qu’au paiement des réparations liées à ce mur mitoyen et qu’il convient de convenir d’un partage de responsabilité en lui imputant 25 % de responsabilité. Elle considère également que s’agissant du chauffage, le lien de causalité n’est pas démontré et qu’il n’en a jamais été fait état dans le cadre du rapport d’expertise qui ne concernait que l’humidité et la dépendance. Elle souligne que faute d’éléments probants, il convient de rejeter cette demande. Elle prétend que les autres postes visés par le devis, ne sont que la conséquence des manquements de la SIGH et de l’absence de chauffage/ventilation au sein de l’immeuble. S’agissant du préjudice de jouissance, elle rappelle que l’immeuble litigieux était en cours de rénovation, qu’aucun locataire n’y vivait, que la SIGH a découvert ces désordres en 2022 et n’a agi que fin 2023 et que le montant a été décidé unilatéralement quand bien même cet immeuble n’ait jamais été loué.
S’agissant des désordres sur la dépendance arrière, elle indique que l’incendie à l’origine des désordres est intervenu en date du 18 juin 2022 vers 18.00 heures et que les pompiers sont intervenus. Elle souligne que personne n’était présent dans son immeuble lors de cet incendie et que les pompiers ont été avertis par un voisin. Elle souligne que le rapport d’expertise diligentée par son assureur a constaté des dommages au niveau de la maçonnerie des voisins et son assureur était dans l’attente d’une éventuelle convocation des voisins pour les dommages occasionnés à leur bâtiment. Elle estime qu’indéniablement, la SIGH ne s’est pas manifestée auprès de son assureur. Elle souligne ne pas être responsable de ces dommages qui relèvent d’un pur accident et qu’elle est assurée pour cela. Elle estime qu’il appartenait à la SIGH de mettre en cause son assureur et que ce litige aurait dû se règler entre assureurs. Etant assurée, elle sollicite l’opposabilité de cette condamnation à son assureur.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité délictuelle :
Aux termes des dispositions de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

De même, en vertu de l’article 1242 du même code, on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.

Enfin, en application de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe aux parties de prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.

S’agissant de l’humidité :

En l'espèce, il ressort des pièces versées dont le rapport d’expertise judiciaire que l’immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 7], appartenant à la SIGH, a d’importantes traces d’humidités dans tout le rez-de-chaussée.

« (…) – Humidité dans l’immeuble de la SIGH
Ce désordre a été signalé par la SIGH à Mme [X] par LRAR en date du 10 juin 2022 ( ci-après copie de la lettre).
Des traces importantes d’humidité ont été constatées dans tout le rez-de-chaussée, au niveau de tous les murs, tous les plafonds et au sol.
Le taux d’humidité mesuré sur tous les murs et proche de 90 %.
En cave, de l’eau au sol est constatée mais en faible quantité.
Dans les pièces du premier et deuxième étage, nous ne constatons pas de désordres liés à l’humidité ni de traces de condensation sur les murs et plafonds, sauf localement sur le mur mitoyen avec le n°[Adresse 3] dans la cage d’escalier. (…) »

Or, l’expert a conclu que les désordres constatés avaient pour origine une infiltration d’eau provenant de l’immeuble appartenant à Mme [I] [X].

« (…) Les traces d’eau constatées ne sont pas des traces liées à des infiltrations d’eau actives dans l’immeuble ni par façade ; s’il y en avait eu on aurait vu des coulées importantes et des traces localisées, ce qui n’est pas le cas ici.
Les traces d’eau ne sont pas liées à un défaut de ventilation/chauffage de l’immeuble : s’il y en avait eu on aurait constaté des traces de condensation dans toute la maison et principalement en cueillies de plafond, or ici nous ne constatons aucune trace dans les pièces des étages et les traces de moisissures sont localisées en partie basse des murs.
Les traces de condensation importantes constatées sont sur la partie située côté intérieur de la pièce, ce qui indique que la condensation et les moisissures sont apparues de l’intérieur de la pièce vers les murs et localement sur le plafond de la cuisine, et non de l’extérieur de l’immeuble vers l’intérieur.
Au sol est présent un revêtement de type PVC, il est fortement humide sur toute la surface.
La VMC et le chauffage ne sont pas en fonctionnement dans l’immeuble de la SIGH, l’humidité ambiante ne peut donc être rejetée mécaniquement par la VMC une fois l’air chauffé.
Il semble donc que l’origine des traces de condensation et moisissures présentes sur les murs et plafonds du rez-de-chaussée soit liée à une arrivée importante d’eau au sol.
Il ne semble pas y avoir de fuites d’eau sur le réseau d’alimentation en EF du logement ni sur le réseau de chauffage.
Dans l’immeuble voisin, nous constatons un logement en cours de travaux.
Mr [X] [J] représentant de Mme [I] [X] ( frère de cette personne) nous indique qu’au rez-de-chaussée de son immeuble est présent un dôme, ce dernier a été posé fin janvier environ, auparavant le dôme n’était pas étanche et de l’eau coulait en quantité importante au sol, Mr [X] a dû notamment remplacer la plâtrerie gorgée d’eau sur le mur donnant sur l’immeuble de la SIGH.

Mon avis est donc que l’origine des désordres constatés dans l’immeuble de la SIGH (moisissures et humidité des murs du rez-de-chaussée) est une infiltration d’eau provenant de l’immeuble de Mme [I] [X] et de la toiture de l’extension arrière dôme non étanche), l’eau a coulé au sol et s’est propagé par le sol dans l’immeuble de la SIGH, de l’humidité est alors apparue de façon importante sur les bas des murs de l’immeuble de la SIGH et s’est propagée dans l’air ambiant non chauffé et non ventilé. (…) »

Mme [I] [X] conteste ce rapport en n’apportant aucun pièce permettant de remettre en cause ces conclusions.

Par ailleurs, il ressort de ce rapport d’expertise, que l’expert a analysé plusieurs causes possibles à ces désordres en excluant certaines avant de retenir comme seule cause celle d’une infiltration d’eau provenant de l’immeuble appartenant à Mme [I] [X].

L’expert a notamment retenu dans son analyse, les déclarations du frère de Mme [I] [X] qui a reconnu le remplacement récent du dôme, et que ce dernier n’était pas étanche et que de l’eau coulait par son intermédiaire en quantité importante au sol.

Son mauvais état et son défaut d’étanchéité sont également établis par les différents clichés photographiques versés au débat dont ceux du constat d’huissier démontrant que ce dernier était non couvert par une bâche à cette date.

Par ailleurs, l’expertise permet également de retenir que les plâtreries du mur mitoyen de Mme [I] [X] ont été récemment remplacées et qu’ainsi, l’absence de moisissures sur ces dernières ne saurait remettre valablement en question les conclusions de l’expert judiciaire.

Par voie de conséquence, il est établi que les désordres subis par l’immeuble appartenant à la SIGH sont dus à une infiltrations d’eau provenant de l’immeuble appartenant à Mme [I] [X].

Pour autant, l’expert a également conclu que les désordres constatés avaient été aggravés par l’absence de chauffage et de ventilation de cet immeuble.

Malgré l’impossibilité de louer cet immeuble, il appartenait à la SIGH de chauffer et ventiler ledit immeuble afin d’éviter une aggravation des désordres.

Il conviendra donc de partager la responsabilité et de dire que Mme [I] [X] est responsable à hauteur de 90 % du dommage subi tandis que la SIGH est responsable à hauteur de 10 %.

S’agissant de la dépendance arrière :

En l’espèce, il ressort du rapport d’expertise qu’une partie de la toiture et de la charpente de la dépendance arrière appartenant à la SIGH ont été calcinées par un incendie.

« (…) - Désordres dans la dépendance arrière de la SIGH :
Au niveau de la dépendance arrière, nous constatons une partie de la toiture zinc et de la charpente calcinée par un incendie, à proximité de la parcelle sis [Adresse 3].(…) »

L’expert a conclu que ces désordres étaient dûs à un incendie ayant son origine dans la parcelle appartenant à Mme [I] [X], ce qu’elle ne conteste pas dans la mesure où elle soutient qu’il appartenait à la SIGH de se rapprocher de son assureur.

« (…) Les désordres relatifs à cet incendie sont situés à proximité immédiate de l’immeuble situé au n°[Adresse 3].
Dans la parcelle de cet immeuble, en partie arrière, à proximité des désordres constatés dans la dépendance de l’immeuble de la SIGH, nous constatons un tas de gravats comportant notamment des éléments en bois calcinés.
L’origine des désordres est donc un incendie d’un tas de gravats à proximité de la parcelle n°[Adresse 3] .(…) ».

Il conviendra donc de dire que Mme [I] [X] est responsable des dommages générés par l’incendie en date du 18 juin 2022.

Sur le préjudice :
Aux termes des dispositions de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

De même, en vertu de l’article 1242 du même code, on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.

Enfin, en application de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe aux parties de prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.

S’agissant de l’humidité :

En l’espèce, l’expert judiciaire a notamment chiffré les travaux de reprises des désordres liés à l’humidité de la manière suivante :
« (…) Pour les désordres liés à l’humidité, les devis fournis correspondent aux travaux listés, soit un montant de :
Devis GLM : 10 133,90 euros TTC,Devis LGC BATIMENT : 2 754,50 euros TTCComme indiqué précédemment, il faut également assurer l’étanchéité entre les deux couvertures arrières des 2 immeubles à leurs jonctions, cette intervention peut être estimée à 3 000 euros TTC. (…) »

Il ressort du rapport d’expertise que l’expert a expressément mentionné les travaux de reprise nécessaire et qu’il a estimé que les devis remis par la SIGH correspondaient notamment à ces travaux listés mais également que les prix n’étaient pas excessifs.

Ainsi, cet expert a jugé qu’au regard des infiltrations d’eau importantes, il fallait reprendre l’électricité et la facture en lien avec le déplacement des radiateurs, du meuble de la cuisine et de la chaudière pour refaire le mur était également en lien avec les travaux de remise en état.

Par voie de conséquence, et compte-tenu du partage de responsabilité retenu précédemment, il conviendra donc de condamner Mme [I] [X] à payer à la SIGH, la somme de 14 299,56 euros TTC en réparation de son préjudice matériel lié à l’humidité.

S’agissant de la dépendance arrière :

En l’espèce, l’expert judiciaire a notamment chiffré les travaux de reprise des désordres liés à l’incendie de la manière suivante :
« (…) Pour les désordres liés à l’incendie, les devis fournis correspondent aux travaux listés, soit un montant de :
Devis HAINAUT CONSTRUCTIONS : 14 262,39 euros TTC (…) »
Il ressort du rapport d’expertise que l’expert a expressément mentionné les travaux de reprises nécessaire et qu’il a estimé que le devis remis par la SIGH correspondait aux travaux listés mais également que les prix n’étaient pas excessifs.

Ainsi, cet expert a jugé qu’au regard de l’importance des dégâts, il était nécessaire de déposer la toiture ainsi que la charpente et de poser une charpente et une toiture neuve.

Par voie de conséquence, il conviendra donc de condamner Mme [I] [X] à payer à la SIGH la somme de 14 262,39 euros TTC en réparation de son préjudice matériel lié à l’incendie.

S’agissant du préjudice de jouissance :

En l’espèce, la SIGH exerce une activité de locations de logements dans le secteur de l’habitat à loyer modéré.

Les différents clichés photographiques, le constat d’huissier établi en date du 10 juillet 2023 et le rapport d’expertise judiciaire permettent d’établir que notamment les importantes traces d’humidité et l’humidité importante des pièces du rez-de-chaussée de l’immeuble situé [Adresse 4] à [Localité 7], lui appartenant, le rendait inlouable.

Ainsi, comme l’a retenu l’expert, la SIGH a indéniablement subi un préjudice de jouissance consistant en l’impossibilité de louer ce bien de son parc locatif.

L’expert a chiffré ce préjudice de jouissance à une somme de 14 400 euros en précisant que sa durée pouvait être fixée à une durée totale de vingt-quatre mois dans la mesure où la SIGH s’est rendue compte de ces désordres à la réception des travaux de rénovation de cet immeuble soit en date du 11 mars 2022, qu’elle en a informé Mme [I] [X] en date du 10 juin 2022 et qu’un mois est nécessaire pour effectuer lesdits travaux et que la somme de 600 euros correspond au prix auquel cet immeuble était précédemment loué.

Par voie de conséquence, il conviendra donc de condamner Mme [I] [X] à payer à la SIGH la somme de 14 400 euros au titre de son préjudice de jouissance.

3. Sur la garantie :

Aux termes des dispositions de l’article 14 du code de procédure civile, nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée.

En l’espèce, force est de constater que la compagnie d’assurance Axa Iard France n’a pas été assignée et n’est donc pas partie à la présente procédure.

Par voie de conséquence, il conviendra donc de débouter la demande de Mme [I] [X] à la garantir des condamnations prononcées à son encontre.

4. Sur les dépens :

Aux termes de l'article 696 du Code de Procédure Civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l'espèce, Mme [I] [X], ayant succombé, il conviendra donc de la condamner aux dépens en ce compris les frais d’expertise.

5. Sur les demandes de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

L'article 700 du code de procédure civile dispose que dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie, la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En l'espèce, Mme [I] [X], ayant succombé, il conviendra de la condamner à payer à la SIGH la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

6. Sur l’exécution provisoire :

Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

En l’espèce, il n'y pas lieu de l'écarter.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par mise à disposition de la décision au greffe le 20 août 2024, comme indiqué à l'audience de plaidoirie, prorogée au 02 septembre 2024, par jugement contradictoire et en premier ressort :

DIT que la responsabilité délictuelle de Mme [I] [X] est engagée au titre des désordres d’humidité subis par la SIGH.

FIXE la part de responsabilité de Mme [I] [X] dans les dommages subis au titre de l’humidité par la SIGH à hauteur de 90 %.

DIT que la responsabilité délictuelle de Mme [I] [X] est entièrement engagée au titre des désordres subis par la SIGH suite à l’incendie survenu en date du 18 juin 2022.

CONDAMNE Mme [I] [X] à payer à la SIGH la somme totale de 42 961,95euros, répartie de la manière suivante :
- au titre des travaux de reprise en lien avec l’humidité : la somme de 14 299, 56 euros TTC,
au titre des travaux de reprise en lien avec l’incendie : la somme de 14 262,39 euros TTC,au titre du trouble de jouissance : la somme de 14 400 euros.
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.

CONDAMNE Mme [I] [X] à payer à la SIGH une somme de
2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE Mme [I] [X] aux dépens en ce compris les frais d’expertise.

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire à titre provisoire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Valenciennes
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 24/01344
Date de la décision : 02/09/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-02;24.01344 ?
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