COUR DE CASSATION
(Première Chambre Civile)
11 Février 1964
1- droit maritime, vente CIF - Consignataire du navire - Irresponsable de la falsification de la date du connaissement par le Capitaine- NON représentation des propriétaires et armateurs de ce chef -
2- procédure civile, compétence, lieu de conclusion du contrat au lieu de l'émission de l'acceptation du vendeur , lieu de livraison au port d'embarquement, incompétence des tribunaux libanais.
Michel S. Azar c/ Elie Carapipéris et Crts.
ARRET
La Chambre Civile de la Cour de Cassation;
Statuant sur le pourvoi formé par M. Michel S. Azar contre l'arrêt rendu par la Cour d'Appel de Beyrouth le 30 Mai 1960,
Sur les conclusions présentées par M. Carapipéris, la Sté J. Vincenti & Fils et la Sté Italienne de Surveillance,
Et sur toutes les pièces du dossier,
En la forme:
Attendu que le pourvoi a été formé dans le délai, remplissant toutes les autres conditions légales; qu'il est donc recevable en la forme,
Au fond:
Sur le premier moyen tiré de la contravention à la loi, de son interprétation erronée et du défaut de base légale:
Attendu que M. M. Azar expose qu'en jugeant qu'on ne peut considérer le consignataire du navire responsable de la falsification de la date portée au connaissement parce qu'un tel fait délictueux n'entre pas dans le cadre du mandat tacite qui lui est donné et est étranger au domaine des opérations qui lui sont déléguées et qui consistent à recevoir la marchandise, à la livrer à ses destinataires et à être responsable des manques et dégâts y constatés, la Cour d'Appel a contrevenu aux dispositions des paragraphes 2 et 4 de l'art. 27 de la loi du 10-5-1950 et à l'art. 4 du Code de Procédure Civile rendant ainsi son arrêt non fondé sur une base légale, de même qu'elle a contrevenu aux stipulations de l'art. 167 du Code de Commerce Maritime,
Attendu que l'objet du procès est la réclamation de dommages et intérêts résultant d'un fait délictueux du capitaine qui a falsifié la date du connaissement,
Attendu que la fonction du consignataire du navire est de représenter le capitaine, après son départ du port d'arrivée, dans les opérations de livraison de la marchandise à ses destinataires; qu'il ne représente les propriétaires et armateurs du navire que dans le cadre des opération de déchargement de la cargaison et de sa livraison aux destinataires et des réclamations en résultant quant aux manques ou avaries résultant des opérations du transport,
Attendu que le fait délictueux du capitaine qui a falsifié la date de connaissement est, en conséquence, étranger aux opérations entrant dans le mandat du consignataire du navire,
Attendu qu'à cet égard le consignataire du navire n'est pas considéré comme représentant des propriétaires et consignataires du navire lesquels ne peuvent donc pas être actionnés au lieu de son domicile,
Attendu, cela étant, que la Cour d'Appel a fait bonne application de la loi et qu'elle a donné à son arrêt une base légale saine,
Attendu que ce dernier moyen est donc à rejeter,
Sur le second moyen tiré de l'infondé légal de l'arrêt attaqué et de la contravention aux paragraphes 2 et 4 de l'art. 27 de la loi du 10-5-1950 et de la mauvaise interprétation de l'art. 184 du Code des Obligations et des Contrats, la Cour d'Appel ayant considéré les tribunaux libanais incompétents pour connaître de l'action quoique le contrat ait été conclu et la livraison effectuée à Beyrouth:
Attendu qu'il ressort des pièces de la cause que la vente a eu lieu entre l'acheteur, M. M. Azar, et le vendeur la Société Pastificio résidant en Italie qui a donné son acceptation télégraphiquement,
Attendu que la Sté Vincenti n'a été qu'un intermédiaire,
Attendu que le contrat doit être considéré comme ayant été conclu en Italie lieu de l'émission de l'acceptation du vendeur, et ce en vertu de l'art. 184 du Code des Obligations et des Contrats,
Attendu que dans la vente CIF la livraison est considérée comme effectuée au port d'embarquement, donc en Italie,
Attendu que l'art. 101 du Code de Procédure Civile pose comme conditions pour retenir la compétence des tribunaux de Beyrouth que le contrat ait été conclu à Beyrouth et que la livraison de la marchandise ait lieu à Beyrouth,
Attendu que les deux conditions stipulées à l'art. 101 pour rendre les tribunaux de Beyrouth compétents pour connaître de l'action ne sont pas réalisées dans l'actuelle affaire,
Attendu qu'en en jugeant ainsi la Cour d'Appel a fait bonne application de la loi et a donné à son arrêt une base légale saine,
Attend que le second moyen est à rejeter,
Par ces motifs:
Reçoit le pourvoi en la forme,
Le dit infondé au fond,
Confirme l'arrêt attaqué,..
Premier Président: M. Badri Méouchi
Conseiller Rapporteur: M. Chafic Hatem.
Conseiller: M. Mounir Mahmassani.