La cour,
Statuant sur le pourvoi de la société SOCIMEX, ayant pour Conseils Maître SICARD et DUMONT, Avocats, contre un arrêt contradictoire de la Chambre Sociale de la Cour d'Appel du 16 mai 1968 qui a jugé que le Tribunal du travail de Tananarive était incompétent pour connaître du litige l'opposant au sieur A Aa ;
Vu les mémoires en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article premier de l'ordonnance n° 60-119 du 1er octobre 1960 portant Code du Travail, fausse interprétation des conventions passées entre les parties, insuffisance de motifs, manque de base légale, en ce que l'arrêt attaqué a estimé que la convention du 2 mars 1960 n'était pas un contrat de travail, alors qu'il résultait des éléments de la cause et des documents produits aux débats, mis en relief par le jugement du Tribunal du Travail de Tananarive du 28 janvier 1967, qu'en dépit des termes de la convention litigieuse FLEURIOT était bien un travailleur au sens de l'article premier de l'ordonnance susvisée, le contrat de louage de services pouvant revêtir n'importe quelle forme ;
Attendu que, pour statuer sur la nature des relations ayant existé entre les parties, l'arrêt attaqué a relevé :
1° que les termes de la convention du 2 mars 1960 n'impliquaient aucune subordination du sieur FLEURIOT envers la société SOCIMEX ;
2° que cette convention prévoyait seulement une répartition des attributions quant à la co-exploitation du portefeuille, la SOCIMEX assumant la gestion administrative, financière et comptable, tandis que FLEURIOT était chargé de la protection de l'entretien de la clientèle ;
3° qu'aucune participation aux bénéfices ou aux pertes n'était envisagée ;
4° que la rémunération de FLEURIOT était initialement constituée d'un fixe et d'une commission de 5 p.100 sur les primes encaissées ;
Attendu qu'en l'état de ces constatations, qui ressortissent au pouvoir d'appréciation souveraine des juges de fond, et qui établissent que la convention litigieuse laissait à FLEURIOT le libre emploi de son activité dans l'intérêt de la société qu'il représentait, la Cour d'Appel a pu, à bon droit, déduire de l'absence de tout lien de subordination juridique que ladite convention constituait, non pas un louage de services, mais un contrat « sui generis » relevant de la compétence des juridictions de droit commun ;
Qu'ainsi le premier moyen doit être rejeté ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 118 de l'ordonnance n° 60-119 du 1er octobre 1960, contradiction de motifs, fausse interprétation des documents de la cause, manque de base légale, en ce que l'arrêt attaqué, en reconnaissant qu'outre la convention du 2 mars 1960 existait entre les parties un contrat de travail, a décidé néanmoins que celui-ci n'était pas l'objet du présent litige, alors que la demande principale de la SOCIMEX était fondée sur la mauvaise exécution de ce contrat de travail ;
Attendu que le pourvoi fait grief à la Cour d'Appel rejeté la compétence du tribunal de travail tout en reconnaissant l'existence, en dehors de la convention du 2 mars 1960, d'un contrat de louage de services ;
Mais attendu que les éléments relevés par l'arrêt, attaqué à l'appui de cette qualification, n'apparaissent nullement déterminante à l'effet de caractériser un contrat de travail ; qu'en effet, le paiement d'un fixe, l'inscription de FLEURIOT à la CNAFAT, et l'accomplissement par ce dernier de certaines tâches matérielles, n'impliquent pas nécessairement la subordination juridique de l'intéressé à la société demanderesse ;
Attendu que ce motif de droit erroné est resté sans influence sur le dispositif qui a rejeté la compétence du tribunal du travail ;
Que dès lors, le deuxième moyen de cassation ne saurait être accueilli;
Par ces motifs,
Rejette le pourvoi.
Président : M. Ab, Premier Président.
Conseiller-Rapporteur : M. Thierry.y.
Avocat Général : M. Ac Ad