Vu l'ordonnance n° 60-048 du 22 juin 1960 fixant la procédure à suivre devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême
modifiée par l'ordonnance n° 62-073 du 29 septembre 1962 ;
Vu l'ordonnance n° 62-055 du 20 septembre 1962 portant Code Général de l'Enregistrement et du Timbre, spécialement en son article 37 ;
Vu la loi n° 61-013 du 19 juillet 1961 portant création de la Cour Suprême modifiée par l'ordonnance n° 62-091 du 1er octobre 1962 et par la
loi n° 65-016 du 16 décembre 1965 ;
Vu la requête présentée par la dame RAZAFINDRAFARA, propriétaire, et le sieur C Aa, locataire, ayant pour Conseil Me
RAMANANTSALAMA Benohery, 15 làlana Mahafaka-Antananarivo, en l'étude de qui ils élisent domicile, la dite requête enregistrée au Greffe de la
Chambre Administrative de la Cour Suprême sous n° 3/75-Adm le 8 janvier 1975 et régularisée le 25 octobre 1975, et tendant à ce qu'il plaise à
la Cour condamner solidairement la JIRAMA (ex-Société E.E.M.) et l'Etat Malagasy à leur payer :
1°/ à RAZAFINDRAFARA les sommes de 77.600 Francs pour coût de travaux de réfection et de 50.000 Francs à titre de dommages-intérêts pour
privation de jouissance de maison ;
2°/ à C Aa les sommes de 43.600 Francs, la valeur représentative de meubles détériorés et de 50.000 Francs de dommages-intérêts
pour privation de jouissance des dits biens mobiliers ;
....................
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que la dame A, propriétaire, et le sieur C Aa, locataire, demandent la condamnation solidaire de la
JIRAMA (ex-Sté E.E.M.) et l'Etat Malagasy à leur payer :
1°/ à RAZAFINDRAFARA les sommes de 77.600 Francs pour coût de travaux de réfection et de 50.000 Francs à titre de dommages-intérêts pour
privation de jouissance de maison ;
2°/ à C Aa les sommes de 43.600 Francs, valeur représentative de meubles détériorés et de 50.000 Francs de dommages-intérêts pour
privation de jouissance des dits biens mobiliers ;
Considérant que les dommages invoqués ont été causés le 29 mai 1971 lors de la rupture d'une conduite d'eau urbaine de Tananarive dont
l'ex-Société Electricité et Eau de Madagascar a la propriété et la charge d'entretien ;
Considérant que l'Etat Malagasy excipe, pour décliner sa responsabilité, des clauses spéciales du contrat de concession de l'adduction d'eau
pour la ville de Tananarive, contrat selon lequel l'ex-Société Electricité et Eau de Madagascar gère ses affaires à ses frais, risques et
périls en vertu du cahier des charges paru au Journal Officiel de Madagascar du 25 novembre 1905 et de l'avenant n° 1 du 16 janvier 1928 ;
Considérant que, dans ces conditions, il y a lieu de mettre hors de cause l'Etat Malagasy et que, du coup, la déchéance quadriennale qu'ils
soulèvent ne peut pas jouer en dehors de l'Administration ; qu'il n'y a donc pas lieu d'examiner ce moyen soulevé subsidiairement, entre
autres, par l'Etat Malagasy ;
Considérant, en ce qui concerne l'Electricité et Eaux de Madagascar devenue Ad B Ab Ac, que sa responsabilité demeure seule engagée
du fait que l'éclatement du tuyau qui a laissé échapper une trombe d'eau ayant causé les dommages subis par les requérants ; que l'accident ne
peut pas rentrer dans les cas de force majeure en tant qu'évènement imprévisible et irrésistible ;
Considérant, en effet, que, selon l'expertise, « l'instabilité du terrain », remarqué sur le terrain d'installation de la conduite cassée, est
due à des eaux sauvages détrempant la terre et que « cette eau est collectée par des ouvrages sommaires non étanches et doit s'infiltrer en
partie sous la chaussée ... même en saison sèche. On observe également des arrivées d'eau dans le mur de soutènement situé derrière la station
de pompage » ;
Considérant que, dans le cadre général de maintenance du réseau de distribution d'eau, cet état de défectuosité du terrain qui ne devait pas
être de date récente, aurait dû attirer l'attention de l'ex-Société Electricité et Eau de Madagascar et l'inciter à entreprendre des
aménagements techniques adéquats, notamment par l'assainissement de la zone intéressée en déviant et en collectant les eaux d'infiltration au
moyen d'ouvrages étanchéisés et définitifs comme l'a suggéré l'expert ;
Considérant que, dans ces conditions, les dégâts subis par les requérants résultent d'une faute dommageable de l'ex Société E.E.M. (JIRAMA) et
qu'il échet de faire indemniser en conséquence les victimes de l'accident ;
Sur le quantum des dommages-intérêts :
Considérant que, pour la dame RAZAFINDRAFARA, propriétaire, le coût des réparations immobilières est justifiée par un contrat sous-seing privé
versé au dossier (77.600 Francs), mais que, la maison ayant été louée au taux mensuel de 3.500 Francs et la durée de non-jouissance étant de
cinq mois (du 29 mai au 15 octobre 1971), l'indemnisation à ce titre, ne saurait excéder : 3.500 F x 5 = 17.500 Francs, au lieu des 50.000
Francs réclamés ;
Que, pour le sieur C Aa, locataire, il résulte du procès-verbal de constat d'huissier que l'évaluation du préjudice matériel
causé à ses effets personnels et mobiliers, après défalcation des éléments rattachables à l'immeubles, n'est en rien exagérée et qu'il convient
de l'accepter, soit 57.600 - 14.000 = 43.600 Francs, mais qu'une indemnité de privation de jouissance de 10.000 Francs est plus proche d'une
juste appréciation que de la somme de 50.000 Francs demandée ;
PAR CES MOTIFS,
D é c i d e :
Article premier.- Il est fait droit à la requête susvisée de la dame A et du sieur C en ce qu'elle réclame à
l'ex-Société E.E.M. (JIRAMA) des sommes en réparation des préjudices subis les intéressés à la suite d'un accident où la responsabilité de la
dite Société est seule engagée et reconnue ;
Article 2.- La Société JIRAMA (ex-Société E.E.M.) est condamnée à payer :
1°/ à la dame RAZAFINDRAFARA, propriétaire, les sommes ci-après : a) Soixante dix sept mille six cents (77.600) francs pour frais de réparation
de la maison ;b;
b) Dix sept mille cinq cents (17.500) Francs, à titre de dommages-intérêts pour privation de jouissance de l'immeuble ;
2°/ au sieur C Aa, locataire,
a) Quarante trois mille six cents (43.600) francs pour valeur représentative du mobilier endommagé ;
b) Dix mille (10.000) Francs à titre d'indemnité de non-jouissance des dits biens meublés ;
Article 3.- Les dépens sont mis à la charge de la Société Ad B Ab Ac (ex-Sté E.E.M.) ;
Article 4.- Expédition du présent arrêt sera transmise à Messieurs les Ministres auprès de la Présidence, chargé des Finances et du Plan, de
l'Economie et du Commerce, le Directeur Général de la Société Ad B Ab Ac (JIRAMA) et aux requérants ;