Vu l'ordonnance n° 60.048 du 22 juin 1960 fixant la procédure à suivre devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême
modifiée par l'ordonnance n° 62.073 du 29 septembre 1962 ;
Vu l'ordonnance n° 62.055 du 20 septembre 1962 portant Code Général de l'Enregistrement et du Timbre, spécialement en son article 37 ;
Vu la loi n° 61.013 du 19 juillet 1961 portant création de la Cour Suprême modifiée par l'ordonnance n° 62.091 du 1er octobre 1962 et par la
loi n° 65.016 du 16 décembre 1965 ;
Vu la requête présentée par le sieur A Ab, ex-magistrat en service au Tribunal de 1ère Instance de Tananarive ; ladite requête
enregistrée au greffe de la Chambre Administrative de la Cour Suprême, sous le n° 48/77 le 27 juillet 1977, et tendant à ce qu'il plaise à la
Cour annuler la décision n° 6-bis du 14 avril 1977 de l'Assemblée Générale de la Cour d'Appel statuant en matière disciplinaire «l'ayant mis à
la retraite d'office» aux motifs :
- qu'il est matériellement inexact de lui reprocher l'activité d'exploitant d'une entreprise de transport en commun ;
- que le délai de 8 jours, stipulé par l'article 57 de l'ordonnance 73.036 du 23 juillet 1973 portant statut de la magistrature, n'a pas été
respecté en l'espèce, car le témoin RAJAONSON Edmond ayant déposé la veille de la séance du Conseil de Discipline, l'exposant n'avait pas eu le
temps matériel pour étudier ladite déposition ni donc de préparer subséquemment sa défense ;
- qu'enfin le Conseil de Discipline aurait du surseoir à statuer en attendant la décision de la juridiction pénale déjà saisie de la présente
affaire ;
....................
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que le sieur A Ab, ex-magistrat à Tananarive demande l'annulation de la décision n° 6-bis du 14 avril 1977 par
laquelle l'Assemblée Générale de la Cour d'Appel statuant en formation disciplinaire «l'a mis à la retraite d'office» ; qu'il conteste la
régularité de la décision susvisée en ce qu'elle a été prise en violation des dispositions de l'article 57 de l'ordonnance n° 73.036 du 23
juillet 1973 portant statut de la magistrature d'abord, sur un motif matériellement inexact ensuite et enfin en ce que le Conseil de Discipline
a statué prématurément sans attendre l'issue de la procédure pénale déjà engagée sur la présente affaire ;
Sur la recevabilité :
Considérant que l'article 60 de l'ordonnance n° 73.036 du 23 juillet 1973 portant statut de la magistrature dispose :
«Sa décision (celle du Conseil de Discipline) n'est susceptible d'aucun recours...» ;
Mais considérant que le Conseil de Discipline, dont la décision est incriminée, avait statué en qualité d'autorité administrative
disciplinaire, les dispositions précitées qui excluent l'opposition ou l'appel n'ont pas pu vouloir exclure la saisine du juge administratif,
juge de la légalité des actes administratifs, alors qu'en l'espèce il s'agit d'apprécier la conformité de la décision attaquée au regard des
textes en vigueur et principalement par rapport aux règles statutaires de la magistrature édictées par la même ordonnance n° 73.036 ;
Sur la violation des dispositions de l'article 57 de l'ordonnance n° 73.036 précitée :
Considérant que le requérant se plaint de ce que «le délai de 8 jours pour la communication de toutes les pièces de l'enquête à l'intéressé
avant sa comparution devant le Conseil de Discipline» n'a pas été respecté car le témoin RAJAONSON Edmond n'a été entendu que le 13 avril 1977,
soit la veille même de la réunion du Conseil le 14 avril 1977 ;
Mais considérant que, si matériellement le délai de communication de huit jours n'a pas pu être respecté selon la lettre de l'article 57
susdit, il importe de savoir si la déposition dont s'agit était de nature à nuire au requérant et à nécessiter en conséquence la présentation
d'une défense de sa part, ce qui découle à l'évidence de l'esprit de l'institution du délai de communication des pièces ;
Qu'il ressort de la lecture de la déposition dudit RAJAONSON Edmond que ce dernier a repris presque textuellement les affirmations du sieur
A Ab ; que, dès lors, le fait que la pièce n'a pas été communiquée pendant un délai de 8 jours n'a pas pu nuire de façon
décisive au réclamant puisqu'il affirme qu'il avait eu connaissance desdites dépositions et qu'il a pu alors constater que la pièce en cause
abondait entièrement dans le sens de ses propres déclarations ;
Sur l'inexactitude matérielle des faits reprochés :
Considérant qu'il est soutenu que le défaut de mutation de la voiture n° 0469-TF au nom du défunt RANDRIANASOLO Lothaire au moment des faits
provenait de ce que la voiture n'avait pas encore été intégralement payée ; que c'est à tort que la formation disciplinaire de la Cour d'Appel
a reproché au requérant, sur ce seul fait, d'avoir exploité une entreprise de transport en commun ;
Considérant que, des déclarations orales entendues publiquement aux audiences de la Cour, il appert que, aussi bien la dame RASOAZANANY Louise
que le sieur A Ab persistaient dans leurs affirmations contradictoires ; qu'il en découle des présomptions troublantes en faveur
de l'une et l'autre partie intéressées en l'affaire de la voiture n° 0469-TF mais qu'il n'en demeure pas moins qu'il existe au dossier
disciplinaire une pièce émanant du centre immatriculateur des véhicules de Tananarive qui précise que ladite voiture était au nom de dame
A Ac, épouse du demandeur, et qu'elle y figurait avec la qualité de «transporteur en commun» ;
Que, dès lors, il ne peut être entièrement reproché à l'autorité disciplinaire d'en avoir fait grief au requérant à raison des prescriptions du
statut de la magistrature alors que l'autorisation exigée n'avait pas été demandée à qui de droit ;
Considérant au surplus qu'il est produit au dossier un «Fanomezam-pahefana» par lequel dame RASOAZANANY Louise donnait tout pouvoir au sieur
A Ab aux fins de la représenter dans toutes les affaires pendantes devant les juridictions et se rattachant à la mort de son
mari (A AaB, alors que l'article 9 de l'ordonnance n° 73.036 précitée :
«interdit aux magistrats de se charger, devant quelque juridiction que ce soit, de la défense des parties quellesqu'elles soient et sous
quelque forme que ce soit»
et alors qu'il est patent que le demandeur avait touché au nom de dame RASOAZANANY Louise la partie provisionnelle des Dommages-Intérêts
accordés par le Tribunal de Miarinarivo ;
Que ce fait vient encore justifier la décision disciplinaire contestée ;
Sur le moyen tiré de ce que l'autorité disciplinaire aurait du attendre l'issue de la procédure pénale en cours :
Considérant qu'il est admis de façon constante que les procédures pénale et administrative sont indépendantes l'une de l'autre ; qu'il est non
moins évident que le Conseil de Discipline statuant à raison des dispositions disciplinaires et statutaires de la magistrature ne peut être
suspendu par la procédure pénale en cours ;
Considérant que, de tout de qui précède, il résulte que la requête n'est pas fondée et ne peut qu'être rejetée ;
PAR CES MOTIFS
Décide :
Article premier.- La requête susvisée du sieur A Ab est rejetée ;
Article 2.- Les dépens sont mis à la charge du requérant ;
Article 3.- Expédition du présent arrêt sera transmise à Messieurs le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE de la Justice, le Directeur de la Législation
et du Contentieux, le Premier Président de la Cour d'Appel et au requérant ;