Vu l'ordonnance n° 60.048 du 22 Juin 1960 fixant la procédure à suivre devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême
modifiée par l'ordonnance n° 62.073 du 29 Septembre 1962 ;
Vu l'ordonnance n° 62.055 du 20 Septembre 1962 portant Code Général de l'Enregistrement et du Timbre, spécialement en son article 37 ;
Vu la loi n° 61.013 du 19 Juillet 1961 portant création de la Cour Suprême modifiée par l'ordonnance N° 62.091 du 1er Octobre 1962 et par la
loi n° 65.016 du 16 décembre 1965 ;
Vu les neuf requêtes distinctes présentées par la Société Henri Fraise Fils et Cie s/c Organisation et Gestion, 28 rue
Ratsimilaho-Ramaromanompo, B.P. 1611, Tananarive ;
Lesdites requêtes enregistrées au Greffe de la Chambre Administrative de la Cour Suprême, sous les n°s 164, 165, 166, 167, 168, 169, 170, 171,
172/75 le 2 Décembre 1975, et tendant à ce qu'il plaise à la Cour annuler ;
Les lettres N°s 1.094, 1.095, 1.096, 1.097, 1.098, 1.099, 1.100, 1.101 et 1.102-CD/92/CX du 27 Octobre 1975 ayant rejeté ses demandes de
dégrèvement relatives aux Impôts sur les Bénéfices Divers et aux Taxes sur les Bénéfices Commerciaux Non Reinvestis auxquels elle avait été
assujettie complémentairement sous les rôles ;
N° 1.92.00.92.30, articles 1, 3, 4 et 2
et N° 1.92.00.92.31, articles 1, 4, 5, 3 et 2
au motif que l'Administration fiscale avait à tort réintégré dans son bénéfice imposable pour les éxercices
1970/69
1971/70
1972/71
1973/72
1) les provisions pour clients douteux
2) les provisions pour dépréciation de stocks
3) les gratifications exceptionnelles allouées aux 3 dirigeants de la Société requérante ;
....................
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que la Société H. FRAISE Fils et Compagnie demande l'annulation des neuf rejets explicites en date du 27 Octobre 1975 des neufs
demandes de dégrèvement sur les impositions complémentaires auxquelles elle avait été assujettie après vérification de comptabilité au cours de
l'année 1973 ;
1 - au titre de l'impôt sur les bénéfices divers :
pour l'exercice 1970/69 pour la somme de 28.000.440 francs
pour l'exercice 1972/71 pour la somme de 32.892.000 francs
pour l'exercice 1973/72 pour la somme de 82.484.000 francs
pour l'exercice 1971/70 pour la somme de 25.216.020 francs
2 - au titre de la taxe sur les bénéfices commerciaux non réinvestis :
pour l'exercice 1970/69 pour la somme de 12.486.750 francs
pour l'exercice 1973/72 pour la somme de 41.729.250 francs
pour l'exercice 1973/72 pour la somme de 31.798.750 francs
pour l'exercice 1972/71 pour la somme de 26.001.250 francs
pour l'exercice 1971/70 pour la somme de 16.172.250 francs
au motif que l'Administration fiscale avait réintégré à tort dans le bénéfice imposable des exercices considérés :
- les provisions pour clients douteux
- les provisions pour dépréciation de stocks
- et les gratifications exceptionnelles allouées aux trois dirigeants de la Société,
alors que l'article 0I.0I.I0 du Code Général des Impôts directs paragraphe 5° prévoyait la déduction du bénéfice imposable des provisions
constituées en vue de faire face à des pertes ou à des charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables, à
condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice et figurent au relevé des provisions prévu à l'article
01.01.21 ci-après ;
alors que la requérante avait produit des documents susceptibles de faire apparaître : et l'existence de créances douteuses recouvrées
ultérieurement à leurs échéances
et l'existence de ventes réalisées sur les stocks de marchandises dépréciées et dont les recouvrements et les produits de vente ont été
régulièrement réincorporés par les soins de la demanderesse au fur et à mesure de leur réalisation dans ses bénéfices imposables ;
ensuite alors que les trois dirigeants de la Société incriminée, tous diplômés «master of business Administration» de «Aa Ab
Ac», justifiaient absolument de l'attribution qui leur avait été faite de gratifications exceptionnelles par comparaison avec les
rémunérations allouées aux dirigeants de société similaire à celle de la plaignante tant à Madagascar qu'à l'étranger ;
SUR LA RECEVABILITE
Considérant que l'Etat Malagasy soulève l'exception d'irrecevabilité de la requête pour tardiveté ;
Mais considérant que la Société déclare sans être contredite que les rejets contestés lui ont été notifiés le 3 Novembre 1975 ; les requêtes du
2 décembre 1975 ont donc été présentées dans le délai d'un mois du recours contentieux fiscal porté par le décret N° 75.106 et sont, par suite,
recevables ;
AU FOND
Considérant que, par arrêt avant dire droit N° 90 du 16 Septembre 1978, la Cour a ordonné une expertise aux fins de vérifier l'existence de
créances douteuses mais récupérées et réincorporées dans les exercices considérés ainsi que l'existence de ventes réalisées sur les stocks de
marchandises dépréciés et dont les produits auraient été réincorporés par les soins de la Société dans les bénéfices imposables ; que les
parties, à la suite du déroulement de l'opération d'expertise et du rapport produit ensuite, ont convenu que les conclusions du rapport ont
force probante ;
SUR LES PROVISIONS POUR CLIENTS DOUTEUX
Considérant que l'article OI.OI.IO paragraphe 5° précité prévoit expressément la déduction du bénéfice imposable des provisions constituées en
vue de faire face à des pertes ou à des charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables et que les conditions
prévues à cet effet ont été remplies par la société requérante ;
Considérant par ailleurs qu'il résulte du rapport d'expertise produit au dossier le 26 Novembre 1980 à la suite de l'arrêt avant dire droit N°
90 du 16 Septembre 1978 que, sur les provisions en cause «des créances ont été effectivement recouvrées partiellement ou totalement et ont été
enregistrées au crédit du compte de résultat des exercices respectifs concernés» :
que, dès lors, la réintégration des provisions à ce titre ne se justifie pas ;
SUR LES PROVISIONS POUR DEPRECIATION DE STOCKS
Considérant qu'en vertu du même article 01.01.10 paragraphe 5°, la déduction du bénéfice imposable des provisions pour dépréciation de stocks
se justifie d'autant plus qu'une telle pratique était admise depuis 1966 par l'Administration fiscale elle-même et ce, jusqu'en 1972 ;
Considérant que, du même rapport d'expertise précité, il appert que les pièces vendues sur le stock déprécié ont bien été «écriturées dans les
livres comptables de la Société et leurs produits incorporés dans le chiffre d'affaires pour faire partie des résultats imposables» ;
Qu'il s'ensuit que seules les provisions faites pour l'exercice 1973/72, mais déduites des incorporations effectuées à la suite des ventes
effectuées alors, n'ont pas de base légale du fait de la publication de l'ordonnance N° 73.001 du 9 Janvier 1973 qui a ajouté à l'alinéa 1er du
paragraphe 5° de l'article 01.01.10 :
«Toutefois les provisions pour dépréciation de stocks ne sont pas admises en déductions» ;
SUR LES GRATIFICATIONS EXCEPTIONNELLES
Considérant que l'Administration fiscale avait excipé de ce que les gratifications exceptionnelles allouées aux trois dirigeants de la Société
dont s'agit ne répondaient pas aux conditions de déductibilité ;
Considérant que l'article 01.01.10 paragraphe 1° stipule :
«le bénéfice imposable est établi, sous déduction de toutes charges, notamment :
des frais généraux locaux .... dépenses de personnel ..... «Toutefois ne sont pas admis en franchise d'impôt les salaires, honoraires
........., etc .... qui devant faire l'objet de la part des employeurs des déclarations prévues aux articles 07.03.01 à 07.03.04 n'ont pas été
régulièrement déclarés» ;
Considérant qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que les dites gratifications n'ont pas été déclarées suivant les prescriptions ci-dessus
citées ;
Considérant que la défenderesse soutient, par ailleurs, que la direction des affaires par les nouveaux dirigeants n'a pas eu des conséquences
favorables sur les résultats de la Société ;
Mais considérant que l'attribution des gratifications exceptionnelles en cause correspondait à ce que la Société estimait être une juste
rémunération des services à elle rendus par respectivement, le Directeur Général, le Directeur Financier et le Directeur Commercial, tous trois
diplômés «Master Of Business Administration» d'Harvard ;
Que la Société déclare ensuite, sans être contredite par l'Administration que «par comparaison d'avec les rémunérations allouées aux dirigeants
de Société comparable à la leur, tant à Madagascar qu'à l'étranger, ou aux salaires habituellement offerts aux ingénieurs diplômés d'Harvard»
l'ensemble des rétributions allouées individuellement aux trois dirigeants (mensualités plus gratifications) ne présente aucun caractère
d'exagération» ;
Qu'il s'ensuit que c'est à tort que les gratifications exceptionnelles susvisées ont été réintégrées au bénéfice imposable de la Société par le
Service des Contributions Directes ;
P A R C E S M O T I F S
DECIDE :
ARTICLE PREMIER - Les requêtes N°s 164, 165, 166, 167, 168, 169, 170, 171 et 172/75 susvisées de la Société H. FRAISE Fils et Cie sont
recevables.
ARTICLE 2 - Les dites affaires sont jointes.
ARTICLE 3 - Les rejets portés par les lettres N°s 1094, 1095, 1097, 1098, 1.101 et 1.102-CD/92/CX du 27 Octobre 1975 sont annulées ;
ARTICLE 4 - Les rejets portés par les lettres N°s 1.096, 1.099 et 1.100-CD/92/CX du 27 Octobre 1975 sont partiellement annulées en tant qu'ils
ont réintégré dans le bénéfice imposable de la Société H. FRAISE Fils et Cie les provisions pour clients douteux et les gratifications
exceptionnelles allouées aux trois dirigeants de la Société.
ARTICLE 5 - Compte tenu des circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre les dépens à la charge de l'Etat MALAGASY.
ARTICLE 6 - Expédition du présent arrêt sera communiqué à MM. le Ministre auprès de la Présidence chargé des Finances et du Plan, au Chef du
Service des Contributions Indirectes et à la Société requérante.