Vu l'ordonnance n° 60-048 du 22 juin 1960 fixant la procédure à suivre devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême
modifiée par l'ordonnance n° 62-073 du 29 septembre 1962 ;
Vu l'ordonnance n° 62-055 du 20 septembre 1962 portant Code Général de l'Enregistrement et du Timbre, spécialement en son article 37 ;
Vu la loi n° 61-013 du 19 juillet 1961 portant création de la Cour Suprême modifiée par l'ordonnance n° 62-091 du 1er octobre 1962 et par la
loi n° 65-016 du 16 décembre 1965 ;
Vu 1°) la requête présentée par le sieur B Aa Ac, Adjoint d'Administration Académique ;
Vu 2°) la requête présentée par le sieur A Ab, Chargé d'Enseignement, Adjoint Administratif à la Direction Provinciale de
l'Enseignement Secondaire et de l'Education de Base de Majunga, lesdites requêtes enregistrées respectivement les 22 juin et 14 juillet 1981 au
greffe de la Cour Suprême sous les n°s 91/81 et 100/81-Adm et tendant à ce qu'il plaise à la Chambre Administrative annuler pour excès de
pouvoir le refus de visa opposé par le Ministre des Finances au projet d'arrêté portant nomination des intéressés dans le corps des professeurs
licenciés ;
....................
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que le sieur B Aa Ac, Adjoint d'Administration Académique, et le sieur A Ab, Chargé d'Enseignement,
après avoir obtenu, tous deux, le diplôme de fin de stage au service de Formation Administrative du Ministère français de l'Education,
ont fait l'objet d'un projet de nomination dans le corps des professeurs licenciés ; mais que ledit projet, au moment où il était soumis pour
visa au Ministère des Finances, celui-ci a différé le sien aux motifs d'une part, qu'une copie de l'arrêté déterminant l'équivalence du diplôme
obtenu, compte tenu des nouvelles catégories instituées par le nouveau statut général des fonctionnaires, n'avait pas été jointe ; d'autre
part, que l'arrêté de nomination ne devra prendre effet, en tout état de cause, qu'à partir de la date de sa signature, s'agissant de
fonctionnaires admis dans un corps de catégorie supérieure ;
Considérant que ce sont ces deux aspects du visa différé dont les requérants demandent aujourd'hui l'annulation en soutenant d'une part qu'il
va à l'encontre du principe d'égalité de traitement entre fonctionnaires dans la mesure où d'autres agents titulaires de titres et diplômes
équivalents ont fait l'objet de nomination dans le corps des professeurs licenciés ; d'autre part, des dispositions du décret n° 71-484 du 3
novembre 1971 suivant lesquelles : «toute nomination, s'il y a lieu, après formation professionnelle, dans un corps de fonctionnaires de l'Etat
prend effet à compter de la date de prise effective ou de la veille de la mise en route selon le cas» ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes susvisées des sieurs RATOBISON et A présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre
pour y être statué par une seule décision ;
Sur la nature juridique d'un refus de visa opposé à un projet de texte :
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, visa qualifié de différé par l'Administration des Finances s'analyse en réalité en un
véritable refus de visa ; qu'en effet, les conditions auxquelles l'Administration subordonne l'acceptation de son visa ne paraissent pas
fondées dès lors qu'à ce moment là, d'autres agents titulaires du même diplôme ont fait l'objet de nomination dans le corps des professeurs
licenciés et que les dispositions du décret n° 71-484 du 3 novembre 1971 quant à la date d'effet de l'acte de nomination sont dépourvues
d'ambiguité ;
Qu'il suit de là que le visa différé attaqué au présent pourvoi constitue une décision exécutoire, un acte juridique émis unilatéralement par
l'Administration en vue de modifier l'ordonnancement juridique ; dès lors passible d'un recours en excès de pouvoir, et dont la Chambre
Administrative peut connaître par vote de conséquence ;
Sur la violation du principe d'égalité entre agents :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en refusant de donner son visa au projet d'arrêté portant nomination des intéressés dans le corps
des professeurs licenciés, l'Administration a commis un excès de pouvoir dès lors que la réglementation en vigueur au moment ou le projet lui
était soumis le lui permettait ; et que d'autres agents se trouvant en la même situation ont fait l'objet d'une telle nomination ; que compte
tenu de ce qui vient d'être dit, la survenance ultérieure d'un acte d'équivalence relatif au diplôme concerné est sans influence sur le fond de
la réclamation des sieurs RATOBISON et A ;
Sur la date d'effet de l'acte de nomination :
Considérant qu'il ressort des termes du décret de 1971 lesquels ont été repris presque mot pour mot par l'article 24 de la loi portant nouveau
statut général des fonctionnaires que «les arrêtés portant nomination à des emplois de fonctionnaires prennent effet pour compter de la date de
prise de service ou de la veille de mise en route selon le cas» ;
Qu'en application des dispositions susvisées, c'est à tort que l'Administration se propose de faire partir les effets de l'acte de nomination
des requérants à compter seulement de la date de la signature de celui-ci ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le visa différé opposé le 20 mai 1981 au projet d'arrêté portant nomination dans le corps des
Professeurs licenciés des sieurs A Ab et B Aa, mérite l'annulation ;
PAR CES MOTIFS,
Décide :
Article 1er :- Les requêtes 91/81 et 100/81-Adm sont jointes ;
Article 2.- Le «visa différé» opposé par l'Administration des Finances le 20 mai 1981 au projet d'arrêté portant nomination des sieurs A
Ab et B Aa dans le corps des Professeurs licenciés est annulé ;
Article 3.- Les dépens sont laissés à la charge de l'Etat ;
Article 4.- Expédition du présent arrêt sera transmise à Messieurs les Ministres des Finances, de l'Enseignement Secondaire et de l'Education
de Base, de la Fonction Publique, du Travail et des Lois Sociales, le Directeur de la Législation et du Contentieux et aux requérants ;