N° 104
02 août 2002 108/00-SOC
CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE; Démission provoquée; Portée
Constitue un licenciement déguisé, ouvrant droit à l'indemnité de préavis et à des dommages-intérêts, une démission ne relevant pas de la libre volonté de l'employé mais provenant de l'initiative de l'employeur. Le fait d'affecter un travailleur à un poste qui ne convient pas à sa santé malgré des prescriptions médicales strictes interdisant l'employé de faire des efforts trop fatigants, constitue une incitation à la démission.
La Cour,
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant sur le pourvoi de la Société Sosimae, boulevard Augagneur, Aa mais élisant domicile … l'étude de son conseil, Maître Allain Rajoelina, Avocat à la Cour à Antananarivo, contre un arrêt de la Chambre Sociale de la Cour d'Appel d'Antananarivo du 3 février 2000, rendu dans l'affaire qui l'oppose au sieur Ab Ac ;
Vu le mémoire en demande ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 5 et 44 de la loi n°61.013 du 19 juillet 1961, portant création de la Cour Suprême, excès de pouvoir, fausse application de la loi, dénaturation des faits, fausse interprétation de la loi, insuffisance de motifs ;
En ce que l'arrêt attaqué a maintenu la décision du 1er juge déclarant que la rupture des relations de travail a été concrétisée par la démission forcée de l'employé, rupture imputable à l'employeur s'analysant en un licenciement abusif alors que l'auteur de la rupture est réellement l'employé qui a déposé sa démission ;
Que si la recherche de l'auteur de la rupture d'un contrat de travail relève de l'appréciation des juges du fond, la Cour Suprême est habilité à contrôler à qui appartient l'initiative de la rupture ;
Que la décision attaquée en constatant la démission de l'employé a dénaturé les faits en imputant à l'employeur l'auteur de la rupture du contrat ;
Que la décision attaquée mérite donc cassation ;
Attendu que le moyen dans son développement fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir maintenu les dispositions de l'arrêt confirmatif du jugement du Tribunal de Travail de Tamatave en date du 23 septembre 1994 qui a constaté que la rupture des relations de travail est imputable à l'employeur qui a forcé l'employé à démissionner par son affectation à un autre poste qui ne convenait pas à son état de santé ;
Attendu que la Cour d'Appel énonce dans ses motifs : « Attendu que comme il a été souligné à juste titre par le 1er juge que malgré les prescriptions médicales strictes interdisant à sieur Ab Ac de faire des efforts violents ou trop fatigants suite à sa maladie, la Sosimae, son employeur l'a affecté à un poste qui ne convenait pas à sa santé, ce qui l'a contraint à démissionner ;
Que ce genre de démission ne relevant point d'une libre volonté de l'employé ne peut s'analyser qu'à un licenciement déguisé, justifiant le paiement d'indemnité de préavis et de dommages et intérêts » ;
Attendu ainsi que, la Cour d'Appel a procédé à l'analyse et à l'appréciation des conditions et circonstances qui ont abouti à la rupture des relations de travail liant les parties ;
Qu'elle a pu en son pouvoir souverain déduire que cette rupture provient de l'initiative de l'employeur ;
Que le moyen qui tente en réalité de remettre en cause cette appréciation souveraine ne saurait être accueilli ;
Par ces motifs
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la demanderesse à l'amende.
Ainsi jugé et prononcé par la Cour Suprême, Formation de Contrôle, Chambre Civile et Sociale, en son audience publique ordinaire, les jour, mois et an que dessus.
Où étaient présents :
- Rahalison Rachel, Président de Chambre, Président ;
- Rasandratana Eliane, Conseiller, Rapporteur ;
- Raharinosy Roger, Raharinivosoa Sahondra, Randrianantenaina Modeste, Conseillers, tous Membres ;
- Rakotonandrianina Aimé Michel, Avocat Général ;
- Razaiarimalala Norosoa, Greffier.
La minute du présent arrêt a été signée par le Président, le Rapporteur et le Greffier.