Décision n°07-HCC/D2
Représentant des employeurs émanant des organisations confessionnelles dans le Conseil d'Administration de la CNAPS
Décision n°07-HCC/D2
Du 23 août 2000
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Principe d'égalité : religion
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Sommaire :
Par le biais de la procédure d'exception en inconstitutionnalité devant la Chambre administrative, le Groupement des Entreprises de Madagascar (GEM) a saisi la Haute Cour Constitutionnelle pour faire déclarer non conformes à la Constitution des dispositions d'un article d'un décret imposant la présence d'un représentant des travailleurs et d'un représentant des employeurs émanant des organisations confessionnelles dans le Conseil d' Administration de la CNAPS.
La juridiction constitutionnelle a fait droit à la demande eu égard au respect du principe de laïcité de l' Etat et celui de l'égalité de tous devant les services publics et parapublics proclamés par les articles 1er et 8 de la Constitution.
Résumé :
L'article attaqué est celui 52, alinéa 2, du décret n°99-673 du 20 août 1999 prévoyant dans la composition du Conseil d' Administration de la CNAPS " ... un représentant des employeurs émanant des organisations confessionnelles " et " un représentant des travailleurs des organisations confessionnelles ".
Aux termes de l'article 1er de la Constitution : " Le B Ab constitue une Nation organisée en Etat souverain et laïc... " et en son article 8 : " Les nationaux sont égaux en droit et jouissent des mêmes libertés fondamentales protégées parla loi sans discrimination fondée sur ... la croyance religieuse... ".
Renseignement complémentaire :
CNAPS = Caisse Nationale de prévoyance sociale.
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Repoblikan'i Ac
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Décision n°07-HCC/ D2 du 23 août 2000
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La Haute Cour Constitutionnelle,
Vu la Constitution et la Convention du 31 octobre 1991 ;
Vu l'ordonnance n°92-018 du 8 juillet 1992 relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME :
Considérant que le Groupement des Entreprises de Madagascar (GEM) représenté par son Président et ayant pour conseil Me Lydia Rakoto Ralaimidona, Avocat au barreau de Madagascar a, dans son procès devant la Chambre Administrative, soulevé une exception d'inconstitutionnalité contre l'article 5.2, alinéa 2, du décret n°99-673 ;
Considérant que la Chambre Administrative, dans son arrêt n°158 du 15 décembre 1999, a imparti un délai d'un mois au GEM pour saisir la Haute Cour Constitutionnelle ;
Considérant que par la suite, le GEM a saisi la Haute Cour Constitutionnelle par sa requête en inconstitutionnalité déposée au greffe de la Haute Cour Constitutionnelle le 29 mai 2000, dans le délai légal puisqu'il a été notifié de l'arrêt de la Chambre Administrative le 4 mai 2000, soit moins d'un mois ;
Considérant que le GEM expose, d'une part, que l'article 8 de la loi fondamentale de la République n°98-001 du 8 avril 1998 consacre le principe de l'égalité de tous les usagers devant un service public ; que, d'autre part, l'article 1er de la Constitution consacre le principe de la laïcité de l'Etat, corollaire du principe de la séparation des pouvoirs temporels et spirituels ; que le GEM poursuit qu'en entendant donner une place autre que celle que lui donne la Constitution, celle d'avoir des représentants fondés sur leur appartenance confessionnelle, la CNAPS rompt le principe d'égalité et de laïcité ; qu'il conclut que de telles dispositions sont anticonstitutionnelles et doivent être annulées ;
Considérant que l'Etat Ab, bien qu'invité à conclure, n'a pas fait parvenir son mémoire jusqu'à ce jour ; qu'il échet de passer outre ;
Considérant par ailleurs que la forme de la requête est régulière et dans les normes légales ;
Qu'elle est donc recevable ;
AU FOND :
Considérant que l'article 5.2, alinéa 2, du décret n°99-673 impose la présence d'un représentant des travailleurs et d'un représentant des employeurs émanant des organisations confessionnelles dans le Conseil d'Administration de la CNAPS ; qu'il est clair que cette disposition qui entend introduire la notion de religion dans la formation de l'organe supérieur d'un établissement public, diminue le nombre de représentants professionnels au profit de représentants d'une organisation étrangère à toute activité professionnelle ; que cette représentation religieuse dans un organisme strictement professionnel et de surcroît rattaché à l'Etat, est contraire aux principes de laïcité de l'Etat et de l'égalité de tous devant les services publics et parapublics proclamés par les articles 1er et 8 de la Constitution ; qu'en effet, l'article 1er de la Constitution stipule que "Le B Ab constitue une Nation organisée en Etat souverain et laïc ... " et l'article 8 déclare que " Les nationaux sont égaux en droit et jouissent des mêmes libertés fondamentales protégées par la loi sans discrimination fondée sur ... la croyance religieuse ... " ;
Qu'il s'ensuit que la disposition attaquée est anticonstitutionnelle ;
En conséquence
D é c i d e :
Article premier.- La requête du Groupement des Entreprises de Madagascar (GEM) est recevable en la forme.
Art 2.- La requête est fondée. Les dispositions contenues dans l'article 5.2, alinéa 2, du décret n°99-673 du 20 août 1999 : " ...un représentant des employeurs émanant des organisations confessionnelles ", "...un représentant des travailleurs des organisations confessionnelles " sont déclarées anticonstitutionnelles. Elles doivent être extirpées de l'article 5.2, alinéa 2, du décret en cause.
Art 3. - La présente décision sera notifiée au requérant, à la Chambre Administrative de la Cour Suprême, à l'Etat Ab et publiée au journal officiel de la République.
Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo le mercredi 23 août 2000 à 10 heures, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :
M. BOTO Victor, Président
M. IMBOTY Raymond, Haut Conseiller - Doyen
M.MANANJARA, Haut Conseiller
Mme RAKIVOLAHARIVONY Jeanine Hortense, Haut Conseiller
M. INDRIANJAFY Georges Thomas, Haut Conseiller
Aa RABEMAHEFA Berthe, Haut Conseiller
M. Jean-Michel RAJAONARIVONY, Haut Conseiller
M. FLORENT Rakotoarisoa, Haut Conseiller
M. RAKOTONDRABAO Andriantsihafa Dieudonné, Haut Conseiller
et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en chef.