19991122198
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE 1ère Chambre Civile
POURVOI Nos 81 ET 87 DES 02 ET 03 AVRIL 1999. ARRET N° 298 DU 22 NOVEMBRE 1999
DROIT DOMANIAL ET FONCIER -VENTE DE MEUBLE - PERMIS D'OCCUPER
Sur le moyen pris du manque de base légale :
En donnant d'une part effet au certificat de décès sans jamais vérifier s'il a fait l'objet d'une notification à la partie adverse au procès et en déclarant mensongers les actes de procédure faits par l'huissier et d'autre part en reconnaissant la primeur du témoignage sur l'acte de vente dûment établi par un officier ministériel la cour d'appel ne donne pas de base légale à sa décision. Sur le moyen tiré de la violation des articles 2279 et 2280 du code civil : Attendu en effet qu'il ressort de l'arrêt du 5 mars 1996 que Me Famory CAMARA, commissaire priseur à Bamako adjugeait au sieur Aa Af C dit vieux, la maison objet du permis d'occuper n°69 189 du 4 août 1980 à Ad pour la somme de onze millions (11 000 000) cfa.
Que l'ayant acquise suite à une vente publique, il est donc de bonne foi et par conséquent protégé par les dispositions des articles 2279 et 2280 du code civil applicables qui s'opposent à ce qu'un revendiquant soit admis à prouver son droit de propriété à l'encontre du possesseur de bonne foi.
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
EN LA FORME : Par actes de pourvoi n° 81 et n° 87 respectivement des 2 et 3 Avril 1998, Me Faguimba KEITA, avocat à la cour, agissant au nom et pour le compte de Aa C dit Vieux et Me Daba DIALLO, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de l'Opération Pêche Ai et Aa C dit Vieux, déclarent se pourvoir en cassation contre l'arrêt n° 118 du 1er Avril 1998 de la chambre civile de la Cour d'Appel de Bamako dans une instance en annulation de vente, opposant leurs clients aux héritiers de feu Ac X ; Par certificat n° 116/98 de Mme le greffier en chef de la Cour Suprême en date du 12 Avril 1998 les mémorants ont consigné. Ils ont produit deux mémoires ampliatifs qui notifiés aux
AU FOND :
Attendu que les mémorants développent contre l'arrêt querellé trois moyens de cassation : défaut de motif entraînant un manque de base légale.
-la violation de la loi.
-la dénaturation de l'écrit.
Premier moyen tiré, du défaut de motif, manque de base légale :
En ce que la Cour d'Appel de Bamako a, sans un motif sérieux, infirmé par arrêt n° 118, le jugement n° 302 déboutant les héritiers de feu Ac X de leur action en annulation de vente.
Que la Cour d'Appel, pour parvenir à l'infirmation du jugement attaqué, ne trouve, pas meilleure formule que se fonder sur le caractère mensonger des actes de procédure faits par l'huissier instrumentaire en l'occurrence la signification du commandement et la sommation d'assister à la vente servie à domicile d'une part et d'autre part le témoignage des voisins Ab B et Ah Y.
Que par ailleurs en cas de décès d'une partie en procès, l'art de 345 du code, de procédure civile, commerciale et sociale fait obligation de notifier cet évènement à la partie adverse pour interrompre l'instance ;
Qu'ainsi, en donnant effet au certificat de décès sans jamais vérifier s'il à fait l'objet d'une notification de la partie adverse au procès, et en déclarant mensongers les actes de procédure faits par l'huissier Me Filifing DEMBELE et en reconnaissant la primeur du témoignage sur l'acte de vente dûment établi par un officier ministériel la Cour d'Appel ne donne pas de base légale à sa décision qui s'expose à la censure de la Cour Suprême.
Deuxième Moyen tiré de la dénaturation de l'écrit :
En ce que selon l'arrêt de la Cour d'Appel attaqué, l'huissier instrumentaire aurait désigné le sieur Ac X par la mention "feu" dans ses actes. Qu'il ne figure ni dans la sommation d'assister à la vente, ni dans la signification la mention " feu Ac X ", car celui-ci ignore la disparution du débiteur. Qu'en faisant dire à un acte la mention qu'il ne comporte pas en se basant sur un tel motif, et en infirmant le jugement attaqué la Cour d'Appel a dénaturé les termes de l'écrit et partant sa décision mérite la censure de la Cour Suprême ;
Troisième Moyen de la violation de la loi en deux branches :
Première branche tirée de la violation de l'article 16 al 2 du code de procédure civile, commerciale et sociale :
En ce qu'il résulte de cet article que toute saisie vente sera précédée d'un commandement à la personne ou au domicile du débiteur fait au moins 72 heures avant la saisie et contenant notification du titre.
Que contrairement: aux argumentations des juges d'appel l'huissier instrumentaire a régulièrement procédé à cette formalité au domicile du débiteur et à la personne de son fils majeur Aa X; Qu'après avoir reçu l'exploit d'huissier celui-ci devrait déclarer à l'agent d'exécution que son auteur M. Ac X était décédé ou en faire mention sur l'original.
Que la vente intervenue bien après cette formalité et d'autre ne saurait être annulée. Que les juges ont donc violé la loi et que leur décision doit être censurée.
Deuxième branche tirée de la violation des articles 2279 et 2280 du code civil :
En ce que c'est après l'accomplissement de toutes les formalités légales requises que M. Aa Af C a acheté aux enchères publiques la concession en question. Que mieux, il a régulièrement accompli les formalités administratives nécessaires pour transférer en son nom le titre de propriété de la maison qu'il est donc de bonne foi. Qu'il se trouve donc protégé par les dispositions des articles 2279 et 2280 du code civil. Qu'en annulant donc la vente intervenue le 5 Mars 1996 l'arrêt querellé a manifestement violé des dispositions légales sus visées et mérite donc la censure de la juridiction suprême.
ANALYSE DES MOYENS :
-Premier Moyen tiré du manque de base légale :
Attendu qu'il est en effet constant que la Cour d'Appel pour parvenir à l'infirmation du jugement attaqué s'est fondée sur le caractère jugé mensonger des actes de procédure faits par l'huissier Filifing DEMBELE, en l'occurrence, la signification du commandement et la sommation d'assister à la vente servie à domicile d'une part et d'autre part le témoignage des voisins Ab B et Ae Y. Qu'à propos du caractère mensonger des actes de procédure faits par l'huissier la Cour a motivé comme suit " Considérant que de telles assertions sont fantaisistes et mensongères de la part d'un officier ministériel dans la mesure où il est versé au dossier un certificat de décès constatant la mort de Ac X le 17 Juillet 1993 l'hôpital Ag A que si l'huissier avait effectivement accompli les diligences évoquées, il n'aurait eu aucune peine à dresser les actes conformément à la loi c'est à dire en désignant le sieur Ac par la mention "feu'' tout en servant l'exploit à ses héritiers car après tout le sieur X n'était plus à l'adresse indiquée, qui n'est sûrement pas un cimetière."
Attendu cependant qu'il résulte des dispositions pertinente de l'article 343 du code de procédure civile, commerciale et sociale qu'en cas de décès d'une partie au procès, il est fait obligation de notifier cet évènement à la partie adverse pour interrompre l'instance ; qu'en conséquence le seul fait de verser au dossier de la procédure en annulation un certificat de décès sans jamais au préalable porté, à la connaissance de la partie adverse n'enlève en rien aux actes de la procédure leur caractère régulier.
Attendu par ailleurs que pour annuler la vente du 5 Mars 1996, la Cour d'Appel s'est exclusivement basée sur les témoignages des voisins Ab B et Ae Y alors qu'il est versé au dossier un procès-verbal, de vente aux enchères publiques dûment daté qui atteste que le commissaire priseur s'est transporté sur les lieux concernés.
Ainsi d'une part en donnant effet au certificat de décès sans jamais vérifier s'il a fait l'objet d'une notification à la partie adverse au procès et en déclarant mensongers les actes de procédure faits par l'huissier et d'autre part en reconnaissant la primeur du témoignage sur l'acte de vente dûment établi par un officier ministériel la Cour d'Appel ne donne pas de base légale à sa décision.
Deuxième Moyen tiré de la dénaturation de l'écrit :
Attendu que selon l'arrêt de la Cour d'Appel attaqué l'huissier instrumentaire aurait désigné le sieur Ac X par la mention "feu" dans ses actes.
Attendu cependant, qu'il n'en est rien de tel dans l'arrêt, que bien au contraire l'arrêt a plutôt soutenu que " si l'huissier avait effectivement accompli les diligences évoquées, il n'aurait eu aucune peine à dresser les actes conformément à la loi c'est à dire en désignant le sieur Ac X par la mention " feu " tout en servant l'exploit à ses héritiers. Que ce moyen n'étant pas fondé, Il y a lieu de le rejeter ;
Troisième Moyen tiré de la violation de la loi en deux branches :
Première branche tirée de la régularité des actes de procédure dressée par l'huissier :
Attendu que le contenu de ce moyen ayant été examiné sous le premier moyen il ne sera plus utile de le réexaminer ;
Deuxième branche tirée de la violation des articles 2279 et 2280 du code civil :
Attendu que c'est après l'accomplissement de toutes les formalités légales requises que Aa Af C a acheté aux enchères publiques la concession en question qu'il est donc protégé par les dispositions des articles 2279 et 2280 du code civil car étant de bonne roi ;
Attendu en effet qu'il ressort de l'arrêt que du 5 Mars 1996 M. Famory CAMARA, commissaire priseur à Bamako adjugeait au sieur Aa Af C Dit Vieux la maison objet du permis d'occuper n° 69.189 du 4 Août 1980 à Ad pour la somme de onze millions (11 000 000) francs CFA ;
Que l'ayant acquise suite à une vente publique, il est donc de bonne foi et par conséquent protégé par les dispositions des articles 2279 et 2280 du code civil applicables qui s'opposent à ce qu'un revendiquant soit admis à prouver son droit de propriété à l'encontre du possesseur de bonne foi ;
Qu'il y a lieu de déclarer par conséquent ce moyen également fondé ;
PAR CES MOTIFS
EN LA FORME : Reçoit le pourvoi ;
AU FOND : Casse et annule l'arrêt déféré. Dit qu'il n' y a pas lieu à renvoi. Ordonne la restitution de l'amende de consignation.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER. /.