2000041882
COUR SUPREME DU MALI ********* SECTION JUDICIAIRE *********
Chambre civile
POURVOI N° 321 DU 31 DECEMBRE 1996
ARRET N° 82 DU 18 AVRIL 2000
Cautionnement - Dette solidaire - Acte notarié.
Article 2015 du Code civil : « le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté. »
Article 2021 : « la caution n'est obligée envers le créancier à le payer qu'à défaut du débiteur, qui doit être préalablement discuté dans ses biens, à moins que la caution n'ait renoncé au bénéfice de discussion, ou à moins qu'elle ne soit obligée solidairement avec le débiteur, auquel cas l'effet de son engagement se règle par les principes qui ont été établis pour les dettes solidaires. »
Article 1203 : « le créancier d'une obligation contractée solidairement peut s'adresser à celui des débiteurs qu'il veut choisir, sans que celui-ci puisse lui opposer le bénéfice de division. »
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
En la forme :
Par acte n° 321 du 12 décembre 1996 du greffe de la Cour d'Appel de Bamako, Maître Mahamadou Bouaré, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de SMPC, a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n° 274 du 27 décembre 1996 de la Chambre civile de ladite Cour dans l'affaire ci-dessus spécifiée.
Le demandeur, conformément aux dispositions de l'article 588 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale a versé l'amende de consignation et produit un mémoire ampliatif qui, notifié au défendeur n'a fait l'objet d'aucune réponse.
De ce qui précède, il appert que le recours, conforme aux conditions de norme et délai, est donc recevable.
Au fond :
A-EXPOSE DES MOYENS DU POURVOI
A l'appui du pourvoi, le demandeur a excipé des moyens ci-après :
1° Du moyen tiré de l'usage par la Cour de motifs inexacts :
En ce que la Cour d'Appel a refusé d'ordonner la contrainte par corps contre le débiteur du mémorant au motif que celui qui devrait procéder à la liquidation préalable de la débitrice principale (la Société Askia Mohamed). En d'autres termes, la Cour estime que la SMPC (créancière) aurait dû liquider la société Askia Mohamed (débitrice principale) dans ses biens avant de s'adresser à Aa Ab (caution solidaire) ; le mémorant estime que la débitrice principale a été discutée dans ses biens puisque deux commandements infructueux lui ont été adressés les 10 novembre 1994 de 21 avril 1995, que les motifs invoqués par la Cour sont inexistants ; qu'il échet par conséquent de censurer l'arrêt de la Cour.
2° Du moyen pris de la violation de l'article 2015 du Code civil :
En ce que l'arrêt incriminé stipule qu'aux termes de l'article 2015 du Code civil, le cautionnement ne se présume point, il doit être exprès et que le silence de l'acte notarié ne permet pas de savoir si la caution a ou non renoncé au bénéfice de discussion ; qu'il s'agit là d'une fausse application de l'article 2015 du Code Civil car il résulte du préambule de l'acte notarié que le défendeur agit tant en qualité de gérant de la société débitrice, qu'en qualité de caution solidaire de celle-ci ; qu'à partir de là, l'on ne saurait soutenir que le cautionnement n'est pas clairement exprimé ; que s'agissant d'une caution solidaire, le créancier peut adresser à celle-ci après de simples commandements ; que dans le cas d'espèce, le créancier n'est pas tenu de faire liquider la société Askia Mohamed ou de s'adresser au liquidateur ; que les juges d'Appel ont fait une fausse application de l'article 2015 du Code civil, exposant ainsi leur arrêt à une censure.
B-ANALYSE DU MOYEN DE POURVOI
Les deux moyens du pourvoi peuvent s'analyser ensemble en raison du fait qu'ils ont trait tous deux à la nature du cautionnement et à ses conséquences prévues par les articles 2015 et 2021 du Code civil ;
La cour d'Appel soutient que la contrainte par corps ne peut être ordonnée car toutes les voies ordinaires d'exécution de l'acte notarié ne sont pas épuisées notamment la liquidation de la société Askia Mohamed, débitrice principale.
La Cour d'appel soutient par ailleurs, qu'il résulte du dossier que Aa Ab s'est porté caution solidaire de la société Askia Mohamed pour la créance de 54.207.427 Fcfa.
Le Code civil dispose :
-Article 2015 : « le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté » ;
Article 2021 : « la caution n'est obligée envers le créancier à le payer qu'à défaut du débiteur, qui doit être préalablement discuté dans ses biens, à moins que la caution n'ait renoncé au bénéfice de discussion, ou à moins qu'elle ne soit obligée solidairement avec le débiteur, auquel cas l'effet de son engagement se règle par les principes qui ont été établis pour les dettes solidaires ».
L'arrêt querellé stipule lui-même qu'il résulte des pièces du dossier et des débats qu'Alassane s'est porté caution solidaire de la société Askia Mohamed. Dès lors les principes qui ont été établis pour les dettes solidaires doivent s'appliquer ;
A cet égard, il y a lieu de rappeler qu'il y a solidarité de la part des débiteurs, lorsqu'ils sont obligés à une même chose, de manière que chacun puisse être contraint pour la totalité et que le paiement fait par un seul libère les autres envers le créancier (art. 1200 Code Civil).
La solidarité ne se présume point, elle doit être expressément stipulée.
Elle peut être cependant établie par tous les modes de preuve de droit commun (cf. art. 1202
C. Civ. et développement jurisprudentiel). Dans le cas d'espèce la solidarité résulte de l'acte notarié du 05 octobre 1994 passé en l'étude de Me Amadou Diop.
L'article 1203 du Code Civil dispose : « le créancier d'une obligation contractée solidairement peut s'adresser à celui des débiteurs qu'il veut choisir, sans que celui-ci puisse lui opposer le bénéfice de division.
Dès lors, la Cour d'Appel est mal venue à soulever la discussion des biens de la débitrice se traduisant notamment par une liquidation de celle-ci ;
De ce qui précède, il appert que la Cour d'Appel a violé les règles sus invoquées, régissant le cautionnement solidaire ; que son arrêt doit par conséquent être censuré.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR : En la forme : Reçoit le pourvoi ; Au fond : Casse et annule l'arrêt déféré ; Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'Appel de Bamako autrement composée ; Ordonne la restitution de l'amende de consignation ; Met les dépens à la charge du Trésor Public. Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER