2000041883
COUR SUPREME DU MALI ********* SECTION JUDICIAIRE *********
Chambre civile
POURVOI N° 28 DU 02 JUIN 1999
ARRET N° 83 DU 18 AVRIL 2000
Contrat -Interprétation - Application article 77 du Code des obligations.
Article 77 du Code des Obligations : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » ;
Article 106 : « Sauf dispositions légales contraires, les parties peuvent convenir expressément qu'à défaut d'exécution, le contrat sera résilié de plein droit et sans sommation » ;
Article 175 : « La novation est la substitution d'une obligation nouvelle à une obligation ancienne qui se trouve ainsi éteinte. Elle ne se présume pas, mais doit résulter de la volonté clairement exprimée par les parties de remplacer une obligation par une autre. »
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
En la forme :
Par acte en date du 02 juin 1999, San Aa Af a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n° 45 rendu le même jour par la Chambre civile de la Cour d'Appel de Mopti dans une instance en résiliation de vente l'opposant à Kola Sow.
Le demandeur a acquitté l'amende de consignation et produit mémoire ampliatif qui a été notifié au défendeur qui a répliqué en concluant au rejet de l'action.
Pour avoir satisfait aux prescriptions de la loi, le pourvoi est recevable en la forme.
Au fond :
A-LES MOYENS DE CASSATION :
Le mémorant par l'organe de son Conseil soulève à l'appui de sa demande les moyens de cassation ci-après :
1° Premier moyen basé sur la violation de la loi, notamment l'article 77 du Code des obligations :
En ce que l'arrêt querellé en confirmant le jugement d'instance qui n'a fondé sa décision sur aucune base légale à savoir la violation de l'ordre public ou l'atteinte aux bonnes mours, a violé l'article 77 du Code des obligations qui stipule que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise » ;
2° Deuxième moyen tiré de la fausse application de la loi :
En ce que l'arrêt querellé s'est fondé sur l'article 105 du Code des obligations pour confirmer le jugement d'instance alors qu'il ressort des faits de la cause que Ac Ab Ale défendeur) a contracté sur la base d'une carte grise provisoire ; que le retard accusé dans la délivrance de la carte grise définitive est indépendant de la volonté du pourvoyant comme l'atteste l'ordonnance de non lieu du juge d'instruction confirmée par l'arrêt de la Chambre d'Accusation, prouvant ainsi sa bonne foi ; que ce faisant, il est erroné de parler d'un refus quelconque du pourvoyant surtout que pour preuve la carte grise définitive fut obtenue par la suite en cours d'instance ; que même si l'obligation de délivrer la carte grise pesait sur le pourvoyant, l'alinéa deux (2) de l'article 105 visé lui offrait la possibilité de s'exécuter en cours d'instance ; le moyen est donc aussi pertinent que le premier.
3° Troisième moyen basé sur le refus d'appliquer la loi :
En ce que l'arrêt déféré a occulté la convention des parties qui avaient convenu qu'en cas de non-paiement par l'acheteur dans le délai convenu, la résiliation est de plein droit et le véhicule entre en location en raison de 20.000 fcfa par jour ; que ce cas est régi par les articles 106 et 175 du Code des obligations que les juges d'Appel ont refusé d'appliquer.
B-ANALYSE DES MOYENS :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt recherché la violation de la loi, la fausse application de la loi et le refus d'appliquer la loi.
Attendu que la violation de la loi ou le refus d'application de la loi est constituée dès lors qu'il appert à partir de faits matériellement établis, correctement qualifiés, les juges du fond ont fait une mauvaise application de la loi au prix d'une erreur le plus souvent grossière soit qu'ils aient ajouté à la loi une condition qu'elle ne pose pas, soit qu'ils aient refusé d'en faire application à une situation qui manifestement rentrait dans son champ d'application (cf. La technique de cassation par Aj Ag Ai Ah et Ad Ah p. 138) ;
Attendu qu'il ressort des pièces du dossier que suivant attestation de vente légalisée datée du 20 août 1996 que Ae Aa Af (le demandeur) et Ac Ab Adéfendeur) ont convenu de la vente d'un véhicule de marque PEUGEOT 404 BÂCHEE au prix d'un million trois cent mille francs (1.300.000 fcfa) payable le 20 août 1996 date d'enlèvement le 30 septembre 1996 ;
Que les parties ont en outre convenu que le non respect du délai de paiement entraîne la résiliation de la vente. (cf. côte 5 dossier d'instance) ;
Que ce faisant, les juges d'Appel en statuant que « s'agissant d'un contrat de vente de véhicule, le vendeur Ae Aa Af a failli à une obligation fondamentale prévue par l'article 1615 du Code civil, c'est-à-dire l'obligation de délivrer la chose en l'occurrence le véhicule comprenant ses accessoires et tout ce qui est destiné à son usage perpétuel » pour ensuite confirmer le jugement d'instance qui a prôné la révocation pure et simple du contrat de vente et ordonné la restitution du prix de vente, ont d'une part manifestement ignoré les
prescriptions de l'article 77 du Code des Obligations qui édictent que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » et d'autre part refuser de faire application de la loi en l'occurrence les articles 106 et 175 du Code des obligations qui sont ainsi conçus :
-Article 106 : Sauf dispositions légales contraires, les parties peuvent convenir expressément qu'à défaut d'exécution, le contrat sera résilié de plein droit et sans sommation ;
-Article 175 : La novation est la substitution d'une obligation nouvelle à une obligation ancienne qui se trouve ainsi éteinte. Elle ne se présume pas, mais doit résulter de la volonté clairement exprimée par les parties de remplacer une obligation par une autre.
Qu'enfin, en ajoutant une condition dont les parties n'avaient pas convenu puisque n'existant pas dans l'écrit à savoir délivrer le véhicule comprenant ses accessoires et tout ce qui est destiné à son usage perpétuel, l'arrêt recherché a également violé la loi ;
Qu'il s'en suit que les moyens soulevés sont pertinents et doivent être accueillis.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR : En la forme : Reçoit le pourvoi ;
Au fond : Casse et annule l'arrêt déféré ;
Renvoie la cause et des parties devant la Cour d'Appel de Mopti autrement composée ;
Ordonne la restitution de l'amende consignation ;
Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER