20011126209
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE 2ème Chambre Civile
POURVOI N° 54 du 7 février 2000 ARRÊT N° 209 du 26 novembre 2001
INSTANCE EN EXPULSION -IMMEUBLE IMMATRICULE - VIOLATION ARTICLE 169 DE L'ORDONNANCE N°00-27/PRM DU 22 MARS 2000 PORTANT CODE DOMANIAL ET FONCIER
Attendu que la demande d'expulsion s'appuie sur la possession par le réquerant d'un titre de propriété objet d'un titre foncier.
Que selon l'article 169 de l'ordonnance n°00-27/PRM du 22 mars 2000 portant code domanial et foncier, le titre foncier est définitif et inattaquable ; il constitue devant les juridictions maliennes le point de départ de tous les droits réels existant sur l'immeuble au moment de l'immatriculation ;
Que l'article 170 du même code indique que toute action tendant à la revendication d'un droit réel non révélé en cours de procédure et ayant pour effet de mettre en cause le droit de propriété même d'un immeuble est irrecevable.
Attendu que de tout ce qui précède, il est manifeste que les juges d'appel en décidant comme ils l'ont fait ont refusé d'appliquer la loi à une situation qui entre dans son champ d'application ; qu'en effet, il ne peut être contesté que le titulaire d'un titre foncier est fondé à demander l'expulsion d'un occupant du lieu objet du dit titre.
Et attendu que l'arrêt encourt la cassation.
La Cour :
EN LA FORME :
Par lettre datée du 04 février 2000, enregistrée le 07 février 2000 sous le numéro 54 bis du Greffe, Maître Boubacar MAÏGA Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Ab A, a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n°26 rendu le 04 février 2000 par la Chambre des référés de la Cour d'Appel de Bamako dans une instance en expulsion qui oppose son client à Aa B ;
Suivant certificat de dépôt n°113/2000 du 15 mai 2000, l'amende de consignation a été acquittée ; Par l'organe de son conseil, le demandeur a produit mémoire ampliatif qui a été notifié au défendeur qui a répliqué par le truchement de son conseil en concluant au rejet de l'action ;
Pour avoir satisfait aux exigences de la loi, le pourvoi est recevable en la forme.
AU FOND :
PRESENTATION DES MOYENS DE CASSATION :
Sous la plume de son conseil, le mémorant présente à l'appui de sa demande les moyens de cassation ci-après :
Premier moyen tiré de la violation des articles 143, 237, 238 et 239 du Code Domanial et Foncier....
En ce que l'arrêt querellé a infirmé la décision d'instance au motif que « les lettres d'acceptation dont Aa B (le défendeur) est bénéficiaire se trouvent contraires aux titres Fonciers concédés à Ab A (le mémorant) » ;
Qu'en retenant même le principe de l'opposition entre titre Foncier et titre d'acceptation, la Cour préjuge du fond et détermine sa propre hiérarchie des actes administratifs, alors que le caractère définitif et inattaquable du titre foncier est inscrit dans tous les textes fonciers, notamment aux articles susvisés; que l'immatriculation annule tous titres et purge tous droits antérieurs qui ne seraient pas mentionnés; que les droits du vendeur sont anéantis si l'immeuble a été immatriculé par l'acheteur même; que, même en cas de résolution de la vente, et, ce, par exemple si le vendeur de droit sur une concession obtient l'annulation de la vente après que les terrains ont été immatriculés au nom de l'acquéreur; il ne peut obtenir le rétablissement de son droit d'usage sur la concession; ce droit d'usage n'ayant pas été inscrit dans le titre foncier ( cass. Civ. 1, 09 février 1954, RJ PUF, N°1, 1956, P-177, note DOMAINE) ; qu'en statuant, comme ils l'ont fait, les juges d'appel exposent leur décision à la censure de la Cour Suprême ;
Deuxième moyen basé sur l'excès de pouvoir
En ce que, en se contentant d'infirmer l'ordonnance d'expulsion d'un occupant de l'immeuble immatriculé, motif pris de ce que ce dernier détient des lettres d'intention, alors que, d'une part, il est constamment fait droit à la demande d'expulsion présentée par le propriétaire d'un terrain immatriculé contre l'occupant qui prétendrait qu'il y avait erreur sur l'immatriculation, ou, en défense, qu'il y a fraude de ses droits dans l'immatriculation du terrain, les juges d'appel en ne précisant pas ainsi le fondement juridique qui leur permet d'opposer un titre foncier à une lettre d'acceptation et mettre en doute les prérogatives attachées à la possession d'un titre foncier, droit réel sur un immeuble, n'ont pas mis la Cour Suprême en mesure d'exercer son contrôle et leur décision excédant manifestement leur pouvoir mérite la cassation.
Troisième moyen tiré du défaut de motif
En ce que l'arrêt attaqué pour infirmer l'ordonnance du juge d'instance et déclarer l'incompétence a visé un lot d'articles sans autre précision violant ainsi les articles 463, 491, et 494 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale, encourant ainsi là cassation.
ANALYSE DES MOYENS
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt entrepris d'avoir procédé par violation de la loi, excès de pouvoir et défaut de motif ;
Attendu que les deux premiers moyens interfèrent et peuvent être analysés ensemble ; Qu'à cet égard, il ne peut être contesté que les moyens soulevés ont trait à un problème de fond à savoir la propriété des terrains ;
Attendu que la demande d'expulsion s'appuie sur la possession par le requérant d'un titre de propriété objet d'un titre foncier ;
Que selon l'article 169 de l'ordonnance n°00-27/PRM du 22 mars 2000 portant code Domanial et Foncier, le titre foncier est définitif et inattaquable ; il constitue devant les juridictions Maliennes le point de départ de tous les droits réels existant sur l'immeuble au moment de l'immatriculation ;
Que l'article 170 du même code indique que toute action tendant à la revendication d'un droit réel non révélé en cours de procédure et ayant pour effet de mettre en cause le droit de propriété même d'un immeuble est irrecevable ;
Attendu que de tout ce qui procède, il est manifeste que les juges d'appel en décidant comme ils l'ont fait ont refusé d'appliquer la loi à une situation qui entre dans son champ d'application; qu'en effet, il ne peut être contesté que le titulaire d'un titre foncier est fondé à demander l'expulsion d'un occupant du lieu objet dudit titre Et, attendu que l'arrêt encourt la cassation, il est superfétatoire d'examiner les autres moyens.
PAR CES MOTIFS
En la forme : reçoit le pourvoi ; Au fond : casse et annule l'arrêt déféré ; Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'Appel de Bamako autrement composée ; Ordonne la restitution de l'amende ; Met les dépens à la charge du Trésor Public ;
Ainsi fait jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.