20020429058
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
2ème Chambre Civile
POURVOI N°36 DU 09 MAI 2001 ARRET N°058 DU 29 AVRIL 2002
RECLAMATION DE CHAMPS -MESURES D'INSTRUCTION EXPERTISE -OBSERVATIONS DES PARTIES -VIOLATION DES DISPOSITIONS DU CODE DOMANIAL ET FONCIER
Il est de principe généralement admis que le juge doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même, le principe de la contradiction.
Qu'en appuyant leur décision sur « la photocopie » d'un croquis des lieux litigieux, annexé à un procès-verbal d'enquête préliminaire, sans provoquer les observations des parties, les juges d'appel ont manifestement violé le principe de la contradiction prescrit par l'article 16 du code de procédure civile, commerciale et sociale, et exposent leur décision à la censure de la cour suprême.
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME :
Par acte n°36 du 09 mai 2001, Ad C représentant Ae C a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n° 52 du 09 mai 2001 rendu contradictoirement par la chambre Civile de la Cour d'Appel de Mopti dans une instance en réclamation de champ l'ayant opposé à Ac C.
Suivant certificat de dépôt n°134 du 11 juillet 2001, l'amende de consignation a été acquittée ; Par l'organe de son conseil, le demandeur au pourvoi a produit mémoire ampliatif qui a été notifié au défendeur qui a répliqué en concluant au rejet ; Pour avoir satisfait aux exigences de la loi, le pourvoi est recevable ;
Attendu que la cause vient pour la 2ème fois mais avec des moyens nouveaux; que la Chambre Civile demeure compétente.
AU FOND :
EXPOSE DES MOYENS :
Au soutien de son pourvoi, le demandeur sous la plume de ses conseils invoque les moyens suivants :
1)Violation des dispositions des articles 245, 246 et 276 et suivants du Code de procédure Civile, Commerciale et Sociale relatifs aux mesures d'instruction en ce que l'expert Aa Af Ai A a surgi spontanément dans le procès sans que l'on sache s'il a été désigné d'office par le Tribunal ou à la requête des parties ; que l'objet de sa mission n'a pas été précisé et ses conclusions restent muettes sur la procédure suivie quant au déroulement de son travail ;
2)Insuffisance de motifs et manque de base légale :
En ce que les juges d'Appel ont procédé par syllogisme en déclarant que le croquis versé au dossier établit de façon formelle une limite entre les deux terroirs et de conclure que la zone litigieuse est située dans le domaine du village de Djero qui doit être considéré comme premier occupant ; or en l'espèce le champ exploité par Ag C de Ab, les mares de Poyaba et Ah B sont situés dans le domaine de Djéro mais il n'est pas démenti que leur gestion relève de la compétence de Ab qui fixe les dates de pêche et lance des invitations aux villages voisins ; que tel raisonnement empêche la Cour Suprême d'exercer son contrôle et entraîne la censure;
3)Violation des articles 2, 7, 28 et 44 de l'ordonnance du 22 mars 2000 portant code Domanial et Foncier :
L'arrêt déféré a attribué la propriété de la zone en violation des articles précités or il n'est pas contesté que le litige concerne une zone non immatriculée relevant du domaine privé immobilier de l'Etat sur lequel l'occupant ne peut avoir que des droits d'usage; d'où l'arrêt encourt la cassation.
ANALYSE DES MOYENS :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt querellé d'avoir procédé par violation de la loi notamment la violation des articles 245, 246 et suivants du code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale, et, la violation, des articles 2, 7, 28 et 44 de l'ordonnance n°27 du 22 mars 2000 portant Code Domanial et Foncier ;
Attendu, sur le premier moyen tiré de la violation des textes réglementant l'expertise, que, contrairement aux assertions du mémorant, le croquis des lieux litigieux établi par le sieur Af Ai A sur réquisition du chef d'arrondissement (côte 1) est annexé au procès verbal d'enquête de la Brigade de gendarmerie de Djenné (côte 4) ;
Que cependant, il ne ressort nulle part des pièces du dossier que les parties aient
été invitées à fournir leurs observations sur le document qui ne remplit aucune des conditions fixées par les dispositions visées au moyen ;
Attendu à cet égard qu'il est de principe généralement admis que le juge doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui -même, le principe de la contradiction ;
Qu'en appuyant leur décision sur la « photocopie» d'un croquis des lieux litigieux, annexé à un procès-verbal d'enquête préliminaire, sans provoquer les observations des parties, les juges d'appel ont manifestement violé le principe de la contradiction prescrit par l'article 16 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale, et exposent leur décision à la censure de la Cour Suprême ;
Et, attendu que l'arrêt encourt la cassation, il est superfétatoire d'examiner les autres moyens.
PAR CES MOTIFS :
En la forme : reçoit le pourvoi Au fond : Casse et annule l'arrêt déféré ;
Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'Appel de Mopti autrement composée ; Ordonne la restitution de l'amende de consignation ; Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER